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bilitation n'a pas été prononcée, le failli reste inéligible. (Cons. d'Ét. 17 décembre 1900, Corps.)

Il en est de même des débiteurs admis au bénéfice de la liquidation judiciaire tant qu'ils n'ont pas obtenu leur réhabilitation. (Loi du 4 mars 1889, art. 21; Cons. d'Ét. 30 novembre 1900, Paul.)

155.

L'inscription sur les listes électorales sera ordinairement la preuve de la jouissance des droits électoraux. Toutefois, ainsi que nous l'avons fait remarquer sous l'article 31 (no 143), on ne pourrait prétendre qu'un candidat n'est pas éligible par cela seul qu'il n'est pas inscrit sur les listes électorales. La capacité électorale est indépendante de l'inscription.

D'un autre côté, l'inscription sur les listes ne fait pas obstacle à ce que l'on conteste la capacité électorale d'un individu qui y aurait été inscrit à tort, et celui-ci ne pourrait se prévaloir, pour établir son éligibilité, du jugement d'une commission électorale qui l'aurait maintenu ou inscrit malgré réclamation et prétendre qu'il y a chose jugée à cet égard1. (Cons. d'Ét. 16 mars 1877, Prades; 17 janvier 1879, Recoules-d'Aubrac; 26 décembre 1879, Veyras.)

156. Individus pourvus d'un conseil judiciaire. - Cette

1. Le Conseil d'État a nettement affirmé sa doctrine à cet égard, malgré un arrêt contraire de la cour de Nîmes, dans les circonstances suivantes : Saisi d'un recours contre l'élection d'un sieur X... dont on contestait la capacité électorale, malgré son inscription sur la liste, le Conseil d'État avait sursis à statuer jusqu'à ce que l'élu cut fait juger par l'autorité judiciaire la question de savoir si une condamnation antérieure ne le rendait pas ineligible. La cour d'appel de Nîmes, saisie à la suite de ce renvoi, déclara, conformément aux conclusions de l'élu, que celui-ci était éligible par le motif qu'ayant été porté sur les listes en vertu d'une décision dévenue définitive de la commission instituée par la loi du 7 juillet 1874, il y avait chose jugée sur ce point. Le Conseil d'État ne s'est pas incliné devant cet arrêt et il a définitivement annulé l'élection du candidat en déclarant que celui-ci ne s'était pas conformé à la décision d'avant-faire-droit qui l'avait renvoyé devant l'autorité judiciaire pour faire décider non la question de savoir s'il y avait chose jugée par la décision de la commission électorale, mais si la condamnation qu'il avait subie le plaçait ou non sous le coup de l'incapacité électorale (16 mars 1877, Prades).

disposition est empruntée à la loi du 10 août 1871 sur les conseils généraux qui l'a, pour la première fois, introduite dans notre législation électorale. Le Conseil d'État a eu l'occasion de l'appliquer (29 novembre 1890, Saint-Germain-en-Laye).

157.- Individus dispensés de subvenir aux charges communales. — Un électeur peut ne payer aucun impôt sans pour cela être dispensé de subvenir aux charges communales et par suite inéligible.

Ainsi, un électeur omis au rôle est parfaitement éligible. (Cons. d'Ét. 5 avril 1856, Saint-Hilaire.)

Il en est de même de l'individu dispensé par son âge de l'impôt des prestations (Cons. d'Ét. 26 mars 1855, Bourg-Charente);

D'un sapeur-pompier que le conseil municipal aurait, comme cela se pratique souvent, dispensé, à raison de son service, du même impôt (Cons. d'Ét. 20 décembre 1878, Cresseils);

D'un brigadier de douane exempté, à ce titre, tant de la contribution personnelle et mobilière que des charges locales. (Cons. d'Ét. 15 novembre 1871, Seignoste.)

Il doit a fortiori en être de même des petits contribuables qui, dans certaines villes à octroi, sont dispensés de la cote mobilière parce que le conseil municipal a été autorisé, conformément aux lois des 21 avril 1832 et 3 juillet 1846, à prélever le montant de ces cotes sur les ressources de l'octroi. Ce n'est pas, en effet, à raison de leur situation personnelle, mais en raison seulement du montant de leur loyer que l'exemption leur profite 1.

En un mot, ceux-là seuls sont inéligibles qui ont été dispensés d'impôt par décision spéciale du conseil municipal, à titre

1. Une discussion s'est engagée à ce sujet à la Chambre des députés dans les séances des 2 et 5 juillet 1883. La théorie que nous exposons a été soutenue par M. de Hérédia. Le rapporteur paraît y être contraire; mais le paragraphe a été expliqué dans le sens que nous y attachons par M. Victor Plessier dont les paroles, qui ont immédiatement précédé le vote, semblent avoir obtenu l'adhésion de la Chambre.

d'indigents, en vertu de l'article 18 de la loi du 21 avril 1832. (Cons. d'Ét. 9 mars 1889, Royère; 5 avril 1889, Hellemmes.)

158. - Individus secourus par le bureau de bienfaisance.

Cette catégorie d'inéligibles, bien que se rattachant à la précédente, ne se confond pas pourtant avec elle, car un individu peut être inscrit au rôle des contributions et néanmoins recevoir des secours du bureau de bienfaisance et par conséquent être inéligible. (Cons. d'Ét. 4 novembre 1881, Famechon.)

La Chambre des députés a, sur ce paragraphe, repoussé un amendement de M. de Hérédia qui tendait à restreindre l'inéligibilité au cas où le candidat reçoit habituellement ou d'une manière permanente les secours du bureau de bienfaisance. Le rapporteur a maintenu le texte de la commission en déclarant que, dans sa pensée, l'inéligibilité s'appliquait sans distinction aux individus qui figurent sur la liste des indigents secourus par le bureau de bienfaisance au moment de l'élection. « Il n'est pas question, ajoutait-il, de rechercher si, dans un temps plus ou moins lointain, on a été secouru : au moment des élections, oui ou non figure-t-on sur la liste? Si vous n'êtes pas sur la liste, vous êtes éligible; si vous y êtes, vous n'êtes pas éligible »; et il en donne la raison : « L'homme qui est inscrit au bureau de bienfaisance n'a pas une indépendance suffisante au moment où le conseil municipal délibère sur les admissions. » (Séance du 5 juillet 1883.)

Même avec cette interprétation, on doit admettre que l'individu qui n'est pas inscrit sur la liste du bureau de bienfaisance, mais qui reçoit un secours exceptionnel à la suite d'une calamité, telle que des pertes subies pendant la guerre ou une inondation, est néanmoins éligible. (Cons. d'Ét. 15 février 1872, Bléneau; 23 décembre 1884, Saint-Polycarpe.)

L'incapacité prévue par ce paragraphe a été appliquée par le Conseil d'État à un individu qui n'était porté sur la liste du bureau de bienfaisance que du chef de sa fille mineure (11 no

vembre 1881, Lacaune); par contre, il a déclaré éligibles ceux dont les parents âgés reçoivent des secours (1er juillet 1893, Beaupuy; 16 juin 1893, Festes-Saint-André).

A l'époque où l'instruction primaire n'était pas gratuite pour tous, l'inscription des enfants sur les listes de la gratuité scolaire n'était pas considérée comme entraînant l'inéligibilité du père de famille. (Cons. d'Ét. 11 novembre 1881, Ouroux.)

Un arrêt du 7 décembre 1900 déclare que l'individu porté sur la liste de l'assistance médicale gratuite est inéligible. Le Conseil d'État s'est fondé sur ce que l'article 10 de la loi du 15 juillet 1893 déclare que dans les communes où il n'existe pas de bureau de bienfaisance (et c'était le cas), le bureau d'assistance médicale possède tous les droits et attributions qui appartiendraient à ce premier bureau. En fait, l'individu avait été secouru dans l'année par le service de l'assistance médicale. Nous ferons à cet égard une réserve; les secours médicaux sont, dans certaines communes au moins, accordés à des familles d'ouvriers qui ne peuvent être considérées comme indigentes et il est excessif de confondre la liste d'assistance médicale avec la liste du bureau de bienfaisance.

Le conseil de préfecture de la Haute-Marne a appliqué l'inégibilité à un mari dont la femme était entretenue comme indigente aux frais du département (sauf le concours de la commune) dans un asile d'aliénés (8 mars 1878, Savigny). Le Conseil d'État n'a pas jugé la question, mais il a décidé qu'un individu annuellement assisté sur des fonds départementaux était éligible (12 juin 1885, Caubous).

159.- Domestiques exclusivement attachés à la personne. Cette cause d'exclusion, qui a été maintenue dans la loi de 1884 (elle figurait dans la loi du 5 mai 1855) malgré la demande de M. de Hérédia (Chambre des députés, séances des 3 et 5 juillet 1883) et de M. de Gavardie (séances du Sénat des 1 et 28 mars 1884), est uniquement fondée sur ce que les citoyens qu'elle vise, « engagés dans les liens particuliers, ayant

accepté un service d'un ordre spécial qui les attache à une autre personne, peuvent très bien ne pas pouvoir disposer d'eux-mêmes à un moment donné et se trouver placés entre deux devoirs, le devoir civique qui les appelle au conseil municipal et le devoir de leur charge qui les appelle ailleurs » (séance du 5 juillet 1883).

Par cela même qu'il s'agit d'une disposition restrictive, ce paragraphe doit être interprété dans un sens très étroit. C'est de cette pensée que s'est toujours inspirée la jurisprudence du Conseil d'État. La loi de 1884 précise d'ailleurs, mieux que ne le faisait l'ancienne, ses intentions en n'excluant que les domestiques exclusivement attachés à la personne. Cette expression a été ajoutée par le Sénat (séance du 1er mars 1884). Sous la réserve de cette observation, nous rappellerons les principales décisions de la jurisprudence :

160. Elle ne considère pas comme domestique attaché à la personne : le jardinier concierge d'un château qui, d'ailleurs, est imposé à la contribution personnelle-mobilière (10 avril 1836, Estrées-Deniécourt); un maître jardinier ayant deux aides sous ses ordres (6 février 1885, Gavrus);

L'individu qui est logé gratuitement dans une propriété confiée à sa garde et qui est payé à la tâche ou à la journée pour tous les travaux qu'il exécute (2 novembre 1871, Bignicourt);

L'individu qui conduit et soigne accidentellement les chevaux d'un propriétaire pendant son séjour dans la commune (29 décembre 1871, Caranac), à la différence du cocher qui serait inéligible (6 février 1885, Gavrus);

La personne qui fournit ses services pour l'exploitation d'une ferme appartenant à sa belle-sœur et à ses neveux dont il est le subrogé-tuteur (17 décembre 1875, Argol);

Le contre-maître d'une ferme qui tient la comptabilité journalière d'un propriétaire (3 février 1882, Villers-en-Prayères);

La personne employée habituellement aux travaux du jardin et de la basse-cour dans une maison où elle n'est ni logée ni

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