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cassation du 1 avril 1889 où on lit : « Attendu qu'aux termes de l'article 31 du décret de 1852, nul ne doit, par son fait, être inscrit comme électeur, en même temps dans deux localités différentes; que, d'autre part, la loi de 1884 a aboli la dualité des listes électorales et supprimé toute distinction entre les électeurs municipaux et les électeurs politiques, pour ne plus admettre qu'une catégorie d'électeurs et une liste unique ; qu'il suit de là que nul ne peut réclamer son inscriptiou simultanée sur les listes de deux communes, dans l'une pour l'électorat municipal, dans l'autre pour l'électorat politique. »

Mais s'il est interdit à tout électeur déjà inscrit sur une liste électorale de faire des démarches en vue d'obtenir son inscription sur une autre liste, il peut, par suite d'une inscription opérée, sans son fait, se trouver régulièrement porté sur deux listes. Dans ce cas, il pourra être mis en demeure d'opter, mais il ne pourra être rayé d'office contre son gré de l'une ou de l'autre de ces listes où il a le droit de figurer. (Cass. 5 mai 1887, Favier.) Ainsi, s'il est porté sur la liste électorale de la commune qu'il habite, le fait qu'il se trouverait en même temps inscrit d'office sur les listes d'une autre commune ne suffirait pas pour justifier sa radiation de la liste de la commune où il habite. (Cass. 9 juin 1898, Revue générale d'administration, t. III, p. 429.)

Nous nous abstiendrons d'examiner ici l'influence que peuvent avoir sur la validité d'une élection les votes émis par ces électeurs plusieurs fois inscrits; nous nous bornerons à renvoyer aux décisions du Conseil d'État, qui considèrent le second vote comme nul lorsqu'il a été émis dans une même année électorale (du 1er avril au 31 mars) et pour les mêmes élections. Le Conseil d'État a en effet déclaré, par arrêt du 17 mars 1894, que le fait d'avoir pris part la même année à des élections législatives dans une commune n'empêchait pas les mêmes électeurs de voter pour les élections municipales dans d'autres communes.

Nous n'examinerons pas non plus la question de savoir si l'article 31 du décret du 2 février 1852 qui punit le fait d'avoir obtenu une double inscription est encore en vigueur. Les lecteurs que ce point intéresserait pourront se reporter au Recueil de Sirey (1895, II, 113) sous un jugement du tribunal correctionnel de Poitiers du 30 mai 1894 et au Répertoire de FuzierHermann, vo Élections, nos 812 et suivants.

Droit des électeurs appartenant à des communes sectionnées de choisir les sections où ils doivent être inscrits.

65. La faculté donnée au conseil général de sectionner les communes et de créer ainsi deux ou plusieurs listes électorales dans la même commune a donné naissance à une difficulté particulière.

Certains électeurs sont contribuables dans plusieurs sections, ils habitent l'une. Ils peuvent avoir intérêt à être inscrits sur les listes de telle ou telle section, auront-ils le droit de choisir?

Oui d'après un arrêt des chambres réunies de la Cour de cassation qui déclare que, dans les communes divisées en sections électorales, un électeur domicilié dans l'une des sections peut demander à être porté sur les listes électorales de l'autre section où sont situés des immeubles pour lesquels il est inscrit au rôle des contributions directes (31 janvier 1898, Revue générale d'administration, t. I, p. 308), et le juge de paix n'a pas même qualité pour décider si c'est à tort ou à raison qu'il est porté au rôle. (Cass. 9 avril 1900, Jurisprudence municipale et rurale, 1901, III, p. 6.)

Application aux élections municipales des dispositions des lois antérieures relatives à la distribution et à l'affichage des écrits électoraux, à la distribution des bulletins de vote, aux réunions électorales, à la communication des listes d'émargement et à certaines pénalités.

66. En déclarant applicables aux élections municipales les dispositions des lois antérieures concernant l'affichage, la libre distribution des bulletins, circulaires et professions de foi, etc., le législateur de 1884 a voulu faire cesser les incertitudes qui avaient marqué la jurisprudence, la Cour de cassation ayant déclaré que certaines de ces dispositions insérées dans la loi du 30 novembre 1875 ne s'appliquaient qu'aux élections de députés.

67. - Distribution et affichage des circulaires et professions de foi, placards et manifestes électoraux, etc. Cette matière a été successivement régie par les lois des 30 novembre 1875 (art. 3), 20 décembre 1878 (art. 2) et 29 juillet 1881, qui se résument ainsi qu'il suit :

Pendant la période électorale, les circulaires et professions de foi peuvent être distribuées sans aucune autorisation.

Le candidat n'a même plus aujourd'hui aucun dépôt à effectuer. Seul, l'imprimeur doit, aux termes de l'article 3 de la loi du 29 juillet 1881, faire le dépôt administratif prescrit pour les collections nationales et dont les bulletins de vote ont seuls été exemptés. Le dépôt est fait au ministère de l'intérieur pour Paris; à la préfecture, pour les chefs-lieux de département; à la sous-préfecture pour les chefs-lieux d'arrondissement, et pour les autres villes, à la mairie. L'imprimeur est seul responsable de l'accomplissement de cette formalité dont l'omission constitue une contravention passible d'une amende de 16 à 300 fr., mais qui ne saurait autoriser la saisie des circulaires ou l'enlèvement des affiches.

68. Aucune autorisation n'est nécessaire pour l'affichage. L'article 16 de la loi du 29 juillet 1881 dispose expressément que les professions de foi, circulaires et affiches électorales pourront être placardées sur tous les édifices publics', à l'exception des édifices consacrés aux cultes et des emplacements réservés, par arrêté du maire, pour les affiches des lois et autres actes de l'autorité publique. La loi du 27 janvier 1902 a ajouté une nouvelle réserve en faveur des édifices et monuments publics présentant un caractère artistique et sur lesquels le maire ou le préfet peuvent interdire tout affichage. (V. no 893.) La loi veut particulièrement que l'affichage puisse s'exercer librement aux abords de la salle de scrutin.

Elle protège la conservation des affiches, car elle punit d'une amende de 5 à 15 fr. ceux qui auront enlevé, déchiré, recouvert ou altéré par un procédé quelconque, de manière à les travestir ou à les rendre illisibles, des affiches électorales apposées ailleurs que sur les propriétés de ceux qui auront commis cette lacération ou altération (art. 17).

La peine sera d'une amende de 16 à 100 fr. et d'un emprisonnement de six jours à un mois ou de l'une de ces deux peines seulement, si le fait a été commis par un fonctionnaire ou agent de l'autorité publique, à moins que les affiches n'aient été apposées dans les emplacements réservés aux actes de l'autorité.

Cette protection s'étend à toutes les affiches électorales, qu'elles soient manuscrites, imprimées, anonymes ou revêtues de signatures. (Cass. 16 janvier 1886, Lesage.)

Mais l'article 3, § 3, de la loi du 11 mai 1868 reste toujours applicable en ce qui concerne le timbre. Sont seules affranchies du timbre les affiches électorales d'un candidat, conte

1. Est considéré comme un édifice public une maison louée à un particulier par le département pour servir de caserne de gendarmerie. (Avis int. 7 mars 1898, Revue gén. d'admin., 1899, t. I, p. 184.)

2. Cette disposition n'a pas de sanction légale. (Cass. 18 décembre 1885, Gorchon.)

nant sa profession de foi, une circulaire signée de lui, ou seulement son nom. Les affiches émanées d'un tiers, d'un auxiliaire, d'un ami, ne sont point dispensées de cette formalité.

La loi du 30 mars 1902 (art. 44) interdit pour les affiches électorales l'emploi du papier tricolore sous peine, pour l'imprimeur, d'une amende de 50 fr.

69. Le colportage est également libre; la seule condition imposée à ceux qui veulent exercer la profession de colporteur ou de distributeur sur la voie publique est de faire une déclaration à la préfecture. (Loi du 29 juillet 1881, art. 18.)

Le colportage et la distribution accidentels (et tel est évidemment le caractère des distributions faites à l'occasion des élections) sont même dispensés de toute déclaration (art. 20).

Les mêmes immunités s'appliquent à la distribution des bulletins de vote. La loi du 29 juillet 1881 les exempte, de plus, formellement du dépôt auquel sont tenus les imprimeurs (art. 3, § 4). Ils sont également exemptés du timbre. (Loi du 11 mai 1866, art. 3, § 3.)

70. Droit des électeurs de distribuer des bulletins de vote où sont portés des candidats déjà inscrits sur d'autres listes. Cette question n'est pas encore définitivemet tranchée. Elle ne manque cependant pas d'intérêt, car elle met en présence le droit personnel des électeurs qui n'entendent être portés sur une liste que dans des conditions déterminées et en telle ou telle compagnie et le droit des électeurs de choisir et patronner les candidats qui leur plaisent.

La jurisprudence du Conseil d'État ne voit pas dans le fait de la distribution de ces listes, dites de conciliation, une cause d'annulation (29 novembre 1896). Elle déclare que les électeurs n'ont fait qu'user de leur droit en prenant les noms des candidats portés sur les listes opposées même sans le consentement de ces candidats (6 avril 1889, Mouchamps; 18 mai 1889,

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