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velle opération. Ce fut alors que le Sr. Law mit en mouvement les premières roues du vrai Syftême, & qu'il fit ceffer la vîteffe de celles de fes Antagonistes, par un Arrêt, où S. M. permettoit à la Compagnie des Indes de faire vingt-cinq millions de nouvelles Actions. La dénomination fous laquelle les Négocians les diftinguerent des autres cent millions, par le nom de Filles, convenoit d'autant mieux, qu'on ne pouvoit les acquerir qu'en rapportant quatre fois autant d'Actions d'Occident, fur lefquelles on les avoit entées; de forte que, pour acquerir cinq-mille livres de nouvelles, il falloit en rapporter vingt-mille livres d'anciennes.

L'Arrêt du 20. Juin 1719. (1) qui a autorifé cette opération, expofoit, que le Roi ayant, par fon Edit du mois de Mai précedent, réüni à la Compagnie d'Occident le privilege exclufif de faire feule à l'avenir le Commerce des Indes Orientales; & qu'afin de la mettre en état d'étendre & de foutenir fon Commerce avec fuccès, & de payer les dettes de l'ancienné Compagnie, tant en France qu'aux Indes, Sa Majefté avoit ordon

(1) Voyez Tom. V. No. 21.

ordonné que la Compagnie d'Occident, alors nommée Compagnie des Indes, feroit pour vingt-cinq millions de nouvelles Actions, de même nature, que celles des cent millions faites en vertu de l'Edit d'Août 1717, & que les premiers numeros des nouvelles Actions fuivroient immédiatement les derniers des premières; lefquels vingt-cinq millions ne pouvoient être acquis qu'en payant cinq-cens cinquante livres pour chaque Action de cinq cens livres, fçavoir, comme il a déja été dit, dix pour cent en foufcrivant, & le principal de l'Action en vingt payemens de cinq pour cent par mois, & que faute par ceux qui auroient foufcrit de faire le payement dans le dit tems, les dix pour cent refteroient au profit de la Compagnie: Mais que quand Sa Majefté avoit ordonné que les Actions pourroient être acquifes fur le pied de dix pour cent d'excedent, elles n'étoient encore dans le public qu'au pair; que Sa Majesté ayant été informée, qu'avant même la publication de l'Edit les anciennes Actions avoient pris une telle faveur, qu'elles étoient montées jufqu'à cent trente pour cent, enforte que l'empreffement pour acquerir les nouvelles étoit

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tel,

tel, qu'il s'étoit déja préfenté pour plus de cinquante millions de Soufcrivans; mais que Sa Majefté, voulant ôter tout moyen & tout prétexte de les acquerir par préférence, elle jugeoit convenable d'établir une regle générale qui ne feroit fufceptible d'aucune faveur: Sur quoi, de l'avis du Duc Régent, S. M. ordonna, que les nouvelles Actions, jusqu'au nombre de vingt-cinq millions, feroient faites en différens Billets numerotés, & qu'elles feroient acquifes par Soufcription, ainfi qu'il eft plus au long détaillé par cet Arrêt, à la lecture entiere duquel nous renvoyons le Lecteur. Il eft cependant à remarquer, que l'Articlė 3. de cet Acte portoit, que Sa Maj. vouloit, qu'outre le payement des dix pour cent du montant du total des Soufcriptions, on ne pût être reçu à foufcrire qu'en représentant pour quatre fois autant d'anciennes Actions que monteroit la fomme pour laquelle chaque Actionaire voudroit foufcrire afin d'en avoir de nouvelles; & que le livre des Soufcriptions feroit ouvert pendant vingt jours, après quoi il feroit fermé, & qu'au cas que les anciens cent millions d'Actions ne fuffent pas repréfentés pour acquerir les vingt-cinq millions de nouvelles, ce

donne au

jeu un

croyable.

qui manquéroit après ce delai feroit acquis du fonds de la Compagnie, qui pourroit enfuite les vendre, lorfque les Directeurs le trouveroient à propos. Ce n'eft pas fans raifon qu'on a avan-Ce qui cé, que cette derniere opération étoit la roue qui mettoit en mouvement toutes mouveles autres qui compofoient la machine ment indu Syftême; parce qu'en premier lieu le Billet de Banque dans fon grand crédit étoit préféré à l'efpece, qui devint d'autant plus à charge dans les payemens, que le volume & l'embarras de l'apporter interrompoient la volubilité avec laquelle on vouloit confommer les négociations, pour en recommencer d'autres. Or étant facile à celui qui tenoit le gouvernail du Systême d'avoir la quantité de Billets de Banque néceffaire aux mouvemens, & de joindre à fon parti les Agens, qui avoient d'autres Emiffaires, fans que ni les uns ni les autres penétraffent dans le fecret; il pouvoit, dis-je, faire enlever, comme il fit, la plus grande partie des vingt-cinq millions de nouvelles Actions qu'on recherchoit avec tant d'empreffement; ce fut alors que les avides s'emprefferent pour acheter, tant à Prime qu'au comptant, des Actions d'Occident à tout prix, G 4 quand

quand ils ne trouverent plus de leurs Filles (1): tellement que les cent vingtcinq millions furent dans un fi grand mouvement, que les Actions montoient prodigieufement & fans relache. A l'égard de ceux dont les forces ne pouvoient atteindre à l'enlevement de groffes parties, ils acheterent par des marchez à Prime; après quoi les timides vendirent, d'abord qu'ils y trouverent un bénéfice; mais ceux qui demeurerent conftans, & qui attendirent jufques au moment qu'il falloit réaliser, font ceux qu'on appelle les vrais Miffiffipiens, dont nous parlerons dans la fuite.

Il parut quelque tems après ce mouvement un Arrêt, dont voici la fubftance (2) Que depuis qu'il avoit été fait des Billets de Banque en livres tournois, la plupart des porteurs de ceux en écus de huit au marc les avoient fait convertir en Billets en livres tournois, de forte qu'il n'en reftoit que peu fur la place; & S. M. voulant établir l'uniformité dans ces fortes de Billets, & rendre la régie de sa Banque plus facile, elle

(1) Soufcriptions.

( 2 ) Arrêt du 8 Juillet 1719.Voyez Tomę V. No 22.

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