général, cependant il n'est pas possible d'en fixer précisément les époques. Nous pouvons bien mettre aussi au nombre de ses établissemens, l'acquisition qu'elle fit à sa -communauté de la célèbre recluse Jeanne Leber, dont on à donné la vie. On sait, que si elle n'a pas établi en cela une Mission de campagne, elle a au moins servi à établir solidement la communauté de la Congrégation à Ville-Marie, soit dans ses revenus temporels, soit dans ses bâtimens; nous pourrions même ajouter par rapport au spirituel; tant par les exemples de vertu qu'elle y a donnés, que par les Saintes pratiques et fondations pieuses qu'elle y a établies. Cette illustres solitaire n'eut pas plutôt connu la Sœur Bourgeois et sa communauté qu'elle s'y attacha uniquement, par conformité de vertu, et par les rapports qu'elle y trouvoit de tous côtés avec le culte de la très Ste. Vierge, pour qui elle avoit une très singulière dévotion. Elle n'embrassa pourtant pas l'institut de la Congrégation : le Seigneur vouloit l'attirer à lui par una toute autre voie, et il avoit sur elle d'autres desseins pour l'accomplissement de sa gloire. En attendant la manifestation "de ces desseins, la Ste fille tant qu'elle conserva quelque communicatiou extérieure avec le monde, c'étoit uniquement á la Congrégation qu'elle venoit quelquefois, pour se former de plus en plus à la vertu, et pour s'édifier des exemples de perfection qu'on y avoit continuellement sous les yeux. La Sœur Bourgeois,de son côté, la recevoit toujours avec plaisir, parce qu'il n'y avoit qu'à gagner en sa fréquentation; et ces deux filles de grace concurent dès lors, l'ane pour l'autre, une telle estime, que le Seigneur en retira dans la suite une très grande gloire, et la communauté des Sœurs un très grand avantage, en la façon que nous allons le raconter. Mdle. Leber se dégouta entièrement des attaches mêmes les plus innocentes, depuis que la mort lui eut enlevé une amie de préférence qu'une vertu distinguée lui avoit attachée parmi les filles de la Seur Bourgeois : c'étoit Marie Charly qui mourut à Montréal. Dès lors cette vertueuse fille ne pensa plus qu'à imiter, et à surpasser, si elle pouvoit, les vertus de son amie, en se donnant entièrement à Dieu, et si parfaitement, qu'elle ne voulut plus conserver absolument aucun rapport avec le monde, pas même avec ses plus proches parens, et dans sa propre famille. Elle prit le parti généreux de se condamner elle-même à une solitude perpétuelle, qu'elle observa long-temps dans la maison paternelle, et qu'elle vint dans la suite terminer avec sa vie, dans la maison de la Congrégation. C'est ici un de ces traits de Providence, dont il n'est pas permis aux hommes de sonder les ressorts, et qui sont d'autant plus admirables, qu'il est difficile de les prévoir de loin, et qu'on n'en juge jamais bien que par leurs effets. C'étoit sans aucune apparence de secours humain, et fondée seulement sur sa confiance en Dieu, que la Sœur Bourgeois avoit entrepris, et heureusement exécuté tous les établissemens des villes et des campagnes, dont nous avons parlé jusqu'à présent. Ce fut sur le même fonds qu'elle entreprit de donner à celui de Ville-Marie un nouveau dégré de perfection qui lui parut nécessaire pour la régularité des exercices de la communauté. On n'avoit encore en bâtimens, que le grand corps de logis qui donne sur la cour; (car l'aîle de la chambre de communauté et de l'infirmerie, n'est venue que long-temps après,en 1738). Mais il n'y avoit point de logement vaste et commode pour un pensionnat, capable de répondre aux vœux du public, tant pour les écoles externes, que pour le grand nombre de pensionnaires qui se présentoient de toute part. L'on avoit non plus encore d'Eglise domestique. La Sœur, dans son indigence, pensoit à tout cela: mais l'article de l'Eglise lui tenoit principalement à cœur. Elle commença à s'en expliquer en l'année 1692, et ce projet fut bientôt exécuté, il donna même ouverture à l'exécution de celui des écoles, et à plusieures autres avantages en faveur de la Congrégation, dont nous avons à parler. Malle. Leber n'eut pas plutôt appris, dans sa solitude, qu'on pensoit, à la congrégation, à bâtir une Eglise en l'honneur de la très Sainte Vierge, qu'elle pensa ellemême à fixer pour toujours sa demeure dans la maison de Dieu et de Marie. C'étoit une fille riche,et elle proposa de faire la plus grande dépense de cet édifice, à con dition qu'il lui seroit permis de s'y réserver un logement pour y finir ses jours ; ce qui lui fut accordé. La Sour Bourgeois elle-même, qui la première avoit fait cet accord, en signa le contrat en datte du 4 Août, 1695, sous la Supériorité de la Soeur l'Assomption. Mais c'étoit la Sœur Bourgeois qui avoit fait les avances de cette acquisition, et qui avoit encore, quoique malgré ellemême, la plus grande influence dans le gouvernment de la Congrégation. Et ce fut du fonds de cette solitude, que du vivant même de la Sœur Bourgeois, la pieuse recluse décora cette Eglise de plusieurs vases sacrés et ornemens, ensorte qu'on fut en état d'y célébrer la Ste. 7. Messe pour la première fois le jour de la Nativité de la très Sainte Vierge, 8 Septembre, 1695. C'étoit la lendemain de la cérémonie de la réclusion de Mdlle. Leber, qu'on a décrite ailleurs. Elle y fonda aussi l'adoey ration perpétuelle du très Saint Sacrement, de la manière qu'elle s'observe encore aujourd'hui à la Congrégation. Après la mort de la Soeur, elle fit encore bâtir l'ancien pensionnat, en exécution des intentions de cette bonne mère, comme elle s'en expliquoit elle-même. Elle dota cet édifice de plusieurs belles fondations. Elle fonda aussi à perpétuité dans l'Eglise de la Congrégation la Messe de communauté qui s'y dit encore tous les jours. Et elle fit enfin à la communauté plusieurs autres biens, dont il n'est pas à propos de faire ici le détail. Nous pourrions cependant, sans nous écarter trop du sujet que nous traitons, faire un petit abrégé des vertus de la recluse, qui serviroit beaucoup à l'édification des lecteurs, qui, en voyant ce que nous dirons dans la suite,des vertus de la Sœur Bourgeois, comprendroient sans peine que ces deux saintes filles se copioient souvent dans leurs sentimens et dans leurs pratiques d'humilité, de mortif cation, et de piété: mais on trouvera ce qui regarde la première, dans la vie qui en a été écrite; pour la Sœur Bourgeois nous le verrons dans la partie suivante da cette vie où nous avons à traiter de ses maximes et de ses vertus domestiques. M LA VIE DE LA SCEUR BOURGEOIS. CINQUIEME PARTIE, Où il est traité de ses vertus privées et domestiques, de son heureux trépas, et des merveilles qui l'ont suivi. N auroit pu penser que tout étoit fini pour la Sœur Bourgeois, par rapport à l'établissement de la Congrégation. En effet, elle avoit déjà une maison bien établie à Ville Marie, une communauté nombreuse et fervente, et en état de fournir à perpétuité des Missionnaires dans toutes les Missions établies dans le Diocèse, et en former de nouvelles dans le besoin. Il n'y avoit pas encore à la vérité de règle autentiquement approuvée: mais on en avoit le plan, qu'on observoit fidèlement, en attendant que la Providence se déclarât sur cet article, sur lequel la Sœur éclairée intérieurement, ne doutoit pas que l'affaire ne réussît. Elle avoit donné jusqu'alors, les exemples de toutes les grandes vertus de la femme forte: mais la plus part de ses actions passées étoient dans un ordre héroïque, propres seulement à ces grandes âmes destinées, comme elle l'avoit été, à des entreprises d'éclat, et au dessus de la portée ordinaire des personnes de son sexe. Elle devoit à ses Sœurs des exemples de la vie privée et ordinaire, et des maximes proportionnées à leurs forces, et propres à entretenir et à perpétuer la ferveur, dans la communauté qu'elle venoit de former. Nous l'allons voir, ou plutôt admirer, dans des états où 1 |