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Galliæ, 1, 474). - Sous la deuxième race, nous ne trouvons plus d'impôt général, mais le cens ou les redevances des serfs, colons ou tenanciers tenaient sa place. Les revenus des rois consistaient, à cette époque, dans les fruits de leurs domaines et dans les redevances qui leur étaient payées par leurs tenanciers, colons ou serfs; dans les dons gratuits des grands et des comtes, dans l'obligation imposée aux propriétaires de fournir les moyens de transport, le logement et les vivres aux rois et à leur suite. Les comtes et les grands possesseurs de bénéfices devaient, en outre, le service militaire, qui comprenait l'obligation de conduire leurs hommes armés et équipés à leurs frais et sans solde du roi, ce qui dispensait les rois de l'entretien d'une armée dont les frais furent toujours l'occasion et formèrent la plus grande partie des impôts.

La féodalité ne modifia pas cet état des choses; le roi dans ses domaines, les seigneurs dans les leurs, imposaient seuls leurs serfs ou leurs vassaux ou les taillaient à volonté, comme dit Froissard. L'abus des tailles et des impôts de toute sorte était arrivé à ce point que les pères du concile de Latran, en 1179, durent défendre aux seigneurs de lever de nouveaux impôts sur leurs terres, sans la permission des princes souverains, sous peine d'excommunication. De leur côté, les princes souverains firent les mêmes défenses; mais l'abus était trop enraciné pour pouvoir être ainsi guéri. Ce fut dans ces temps malheureux que les tailles aux quatre cas, les loyaux aides, ou les cas impériaux, les tailles franches, les tailles serves, réelles, personnelles, haut et bas, et à volonté et les corvées furent établies (V. Delaurière sur Loisel, Inst. liv. 6, tit. 6, règl. 1); mais, il n'existait plus d'impôt général, et ce n'était qu'accidentellement et en cas de guerre que le roi demandait à ses vassaux des subsides: encore est-il à remarquer que, dans ces circonstances, chaque seigneur restait chargé, dans l'étendue de son territoire, de l'imposition et de la répartition de la part du subside qui lui était demandée. Ce n'est que dans les terres dont il était seigneur immédiat que le roi levait directement des impôts. Chaque possesseur de fief imposait de même à sa volonté et à son profit les habitants de sa seigneurie. Il en était fait un dénombrement au rôle, et chacun d'eux était taxé à la somme qu'on le jugeait en état de payer.

28. Les impôts levés ainsi par les seigneurs ou par le roi étaient, dès lors, presque généralement désignés sous le nom de taille, dénomination qui, suivant les uns, vient du verbe talerari, partager, diviser, et que d'autres attribuent aux tailles ou morceaux de bois dont les collecteurs se servaient, dans l'origine, pour marquer les sommes qu'ils avaient reçues. Mais ce n'est qu'à partir de 1444, sous le règne de Charles VII, que la taille devint cet impôt général et annuel qui a été conservé jusqu'en 1789. Le motif déterminant de cette création fut le besoin de pourvoir à la solde des corps réguliers de gendarmes et d'archers institués vers la même époque pour remplacer les milices féodales et les troupes qu'on levait à la hâte dans les temps de guerre, troupes mal disciplinées et qui, par leurs brigandages et leurs excès, portaient la désolation dans tout le royaume. A la faveur de ce motif, l'impôt fut accepté avec joie, et les peuples se trouvèrent heureux de sacrifier une portion minime de leurs revenus pour s'assurer la possession paisible du reste de leurs biens.

29. A la taille furent plus tard ajoutées deux nouvelles impositions de même nature: la première, créée par François Ier, sous le nom de grande crue, et dont l'objet fut de pourvoir à la solde de nouveaux corps de troupes qui avaient été levés par suite de guerres successives dans lesquelles la France s'était trouvée engagée; la seconde, appelée taillon et créée par Henri II pour donner aux troupes une augmentation au moyen de laquelle elles durent pourvoir par elles-mêmes à leurs vivres, qui jusque-là étaient restés à la charge des habitants chez lesquels elles étaient logées. La taille, le taillon et la grande crue furent, par suite, confondus dans le même rôle, et compris dans le même acte du pouvoir royal qu'on appelait le brevet de la taille. Successivement, on fit entrer dans ce brevet: 1° les sommes nécessaires à la solde des officiers et archers de la maréchaussée; 2o La somme nécessaire à la dépense des étapes accordées aux troupes qui marchaient dans le royaume ; - 3o Les dépenses des réparations des turcies et levées de la rivière de Loire, depuis la rivière d'Allier près Moulins, jusqu'à Nantes; 4° Les fonds

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nécessaires au service des ponts et chaussées; 5o Et enfin les sommes dont l'imposition se trouvait ordonnée par des arrêts du conseil, pour être continuée pendant une ou plusieurs années.

30. Les tailles, réelles dans le Languedoc, étaient considérées plutôt comme personnelles dans le reste du royaume, et la raison qu'on en donnait, c'est que, quoique fixées eu égard an patrimoine, elles sont attachées à la personne, parce qu'on ne tient pas compte seulement, pour les fixer, de ce patrimoine même, mais encore des revenus provenant du travail et de l'industrie des contribuables. Les tailles mixtes, et c'est là en effet leur vrai caractère, se payaient par ceux du tiers état, c'est-à-dire par les habitants roturiers des villes non franches, bourgs et villages à proportion des biens du taillable, de quelque nature qu'ils fussent et en quelque part qu'ils fussent assis. Les gens d'église, les gentilshommes et les bourgeois des villes franches en étaient exempts. La taille était donc un impot direct, mais elle n'était pas seulement un impôt foncier, puisqu'elle pesait sur tous les biens sans distinction des contribuables, elle était un impôt sur le revenu brut; mais l'importance du revenu étant fixée par les collecteurs de la taille, eu égard au nombre des charrues, des chevaux..., il en résultait que la quotité de la taille n'était pas toujours proportionnelle à ces revenus, et qu'elle engageait souvent les taillables à réduire le nombre de leurs instruments de labour pour obtenir une réduction de leur taille, au grand préjudice de l'agriculture. La taille était payable en quatre termes. Le premier quartier était exigible le 1er décembre, le deuxième le dernier février, le troisième le dernier avril, le quatrième le 1er octobre à cause des travaux de la campagne. On accordait d'ailleurs un délai de dixhuit et même de vingt-quatre mois. Au montant de la taille étaient joints six deniers pour livre, pour le salaire des collecteurs qui étaient garants solidaires du payement de la taille de la part des contribuables qu'ils avaient taxés.

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31. La somme à retirer des impôts était autrefois fixée par les états généraux qui élisaient en même temps quelques-uns de leurs membres pour veiller à sa répartition, d'où vint le nom de pays d'élection aux provinces de la France où ces tailles étaient réparties par des commissaires élus; mais ces commissaires ne tardèrent pas à être nommés par le roi lui-même, quoique le pays conservât toujours le nom de pays d'élection. C'était, au surplus, une conséquence de la fixation elle-même de la taille qui était faite par ordonnance du roi délibérée en conseil, et que l'on nommait brevet de la taille Toutes les parties de la France n'étaient pas d'ailleurs soumises au même régime sous le rapport des tailles; quelques-unes d'entre elles avaient conservé au moins une ombre de leurs anciennes franchises provinciales; on les nommait pays d'Etats. Les provinces d'États étaient l'Artois, la Bourgogne, la Bretagne', le Béarn, la Flandre-Wallonne, le Languedoc et la Provence. Les pays d'États jouissaient de cet avantage que les contributions paraissaient y être accordées par les provinces comme un don purement libre et volontaire, et que s'il est forcé en réalité, il est soumis à l'examen et au contrôle de son administration locale, qui le lève et le répartit. Voiei d'ailleurs comment on procédait dans quelques-unes de ces provinces, notamment en Languedoc. Le roi adressait une commission en forme de lettres patentes pour la convocation des États. Cette commission contenait le détail des diverses impositions à percevoir, tels que la taille, le taillon... Les Etats, après examen, votaient dans la forme suivante: Ont libéralement octroyé et accordé, octroient et accordent au roi, leur souverain prince et seigneur. et sans conséquence, lesdites sommes, dons gratuits. Puis il répartissaient entre les diocèses de la province la somme votée et les assemblées particulières de chaque diocèse répartissaien la part qu'il devait payer entre les paroisses ou communautė: d'habitants, entre lesquels la somme à payer par chaque com mune était ensuite répartie au moyen du cadastre. Dans le pays d'élection il y avait quatre sortes de répartitions. La premièr se faisait en conseil du roi entre les vingt généralités dont ce pays se composaient; la seconde était faite par les intendants e les officiers de l'élection entre les élections de chaque généralité la troisième entre les paroisses de chaque élection; la quatrièm était faite par les collecteurs entre les contribuables de la paroisse On appelait généralités des circonscriptions territoriales financière

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où étaient établis des bureaux de trésoriers pour la recette des deniers, des tailles, taillons, et à la tête desquelles était un infendant. Il y avait autrefois en France vingt et une généralités dans les pays d'élection, six dans les pays d'Etats, et sept dans les provinces frontières. Les élections étaient des juridictions subalternes, chargées de répartir la taille et de juger en première instance de la plupart des matières dont connaissaient les cours des aides. Leurs membres étaient appelés élus, parce qu'ils étaient jadis désignés par l'élection; mais ils étaient depuis longtemps institués en titre d'office.

89. Il ne sera pas sans intérêt, ce nous semble, de montrer ici les accroissements successifs que reçut l'impôt de la taille de puis sa création jusqu'en 1767. Il ne fut d'abord que de 2,000,000 destinés à l'entretien de 13,000 hommes de troupes régulières levés par Charles VII; mais sous Louis XI il s'éleva à 5 millions; Louis XII le réduisit d'un million; il fut rétabli par François Ier, qui y ajouta encore la grande crue, et le porta, les deux réunis, à 9,000,000 ; il était, sous Henri III et à l'avénement de Henri IV, suivant le président Hénault, de 32 millions; mais Sully, dans un voyage qu'il fit en 1596, accorda la remise des arrérages des deux années 1594 et 1595; en 1610, les tailles furent réduites de 10 millions; mais, en 1634, elles s'élevaient à 36 millions, et, en 1642, époque de la mort de Richelieu, à 44 millions. Sous le ministère de Colbert, elles s'élevaient à 53 millions. Ce grand ministre avait promis de les réduire à 25 millions en trois ou quatre ans, mais il ne put réaliser sa promesse, et les tailles, après avoir subi diverses variations, furent, en 1767, réunies aux autres impôts.

33. Outre la taille, figuraient encore parmi les impôts directs les droits de dixième et de vingtième des revenus des biens-fonds ou des produits de l'industrie. Ces droits, établis à titre de subside extraordinaire en temps de guerre, se continuaient la guerre terminée et dévenaient perpétuels. La capitation ou impôt personnel par tété fut établie en 1695, pour subvenir également aux besoins pressants de l'État, mais elle se maintint ensuite comme les autres impôts. Tous les individus, nobles ou roturiers, domestiques, même les officiers des armées de terre et de mer étaient soumis à la capitation. Les étrangers l'étaient aussi après six mois de résidence. En étaient seulement exempts, les femmes communes en biens, les enfants mineurs n'ayant pas de biens propres et demeurant avec leurs père et mère, les ministres ou ambassadeurs des puissances étrangères.

34. Les dimes existaient aussi en France concurremment avec les autres impôts directs, mais, à la différence de ces derniers, elles étaient perçues, non au profit du roi, mais à celui du clergé. Ces dimes, comme nous l'avons déjà dit, étaient la dixième partie, plus ou moins, des fruits et autres produits des fonds de terre, quelquefois elles atteignaient aussi les produits de l'industrie. Mais ces dernières, qu'on nommait personnelles, étaient depuis longtemps tombées en désuétude; quant aux autres, elles étaient levées au profit du curé ou du possesseur d'un bénéfice ecclésiaslique. Toutefois, ces dimes étaient aussi établies, par suite d'alienation ou de concession, au profit des seigneurs laïcs, et elles étaient alors appelées dimes inféodées, parce qu'à partir du septième siècle, elles furent plusieurs fois données en fief aux seigneurs pour obtenir leur protection. Mais Grégoire VII et Alexandre III ayant défendu de les inféoder à l'avenir, sous peine d'excommunication, elles ne pouvaient être conservées qu'autant qu'elles remontaient par le titre de leur concession à une époque antérieure à celle du troisième concile de Latran, dans lequel elles furent définitivement proscrites.

35. Les gens d'église exempts de la taille étaient soumis, comme les bourgeois des villes franches, à quelque autre impôt qui en tenait lieu. Cet impôt, qui portait le nom de décimes, parce qu'il était du dixième du revenu des biens ecclésiastiques, n'était levé, dans l'origine, que de temps en temps et dans des circonstances extraordinaires, par exemple, pour les expéditions en térre sainte à l'occasion desquelles il fut établi. Souvent les décimes étaient alors précédées d'une concession du pape et du consentement du clergé, et elles conservèrent toujours ce caractère de subvention accordée, quoique depuis François Ier elles eussent été réduites en droit commun; en sorte que tous les bénéfices du royaume furent taxés au dixième de leur revenu. Cette

taxe était votée et réglée dans les assemblées du clergé qui se tenaient tous les cinq ans.-V. Culte.

36. Les impôts indirects, connus autrefois sous le nom d'aides, étaient fort nombreux. Ils embrassaient la vente et le transport des marchandises au dedans et au dehors du royaume ; mais ceux qui frappaient le transport avaient reçu le nom de traites, traites foraines (V. Douanes, no* 1, 12 s.). Ainsi aides se disait particulièrement des deniers qui se levaient sur le vin, tani en gros qu'en détail, comme le gros, le vingtième, le huitième et le quatrième, le jaugeage et courtage, l'annuel, les anciens et nouveaux cinq sols, les entrées et sorties des villes; de l'impôt sur le cidre, la bière et les autres breuvages, sur le pied fourché, le bétail et d'autres encore. Mais le plus important de ces impôts était sans contredit l'impôt du sel, qui avait même reçu un nom spécial, celui de gabelle. Cette dénomination dérivée du latin gabella, tiré luimême de l'hébreu gab (impôt), fut attribuée plus spécialement à l'impôt sur le sel, auquel il est resté. On distinguait donc les aides, les tailles et les gabelles. Les aides se prenaient sur les marchandises, les tailles sur les personnes, et la gabelle sur les deniers provenant de la vente du sel, c'est-à-dire sur la vente faite dans les greniers à sel. Le trafic et l'achat du sel n'étaient pas libres en France, et la vente n'en pouvait être faite que par les fermiers et les officiers du roi. Ces fermiers étaient tenus d'acheter le sel dans les salines à un certain prix, d'y payer les droits du roi, et de le faire conduire à leurs frais aux greniers établis pour cela, où la vente et distribution s'en faisaient à un prix arrêté en conseil du roi et par des commis ou préposés. Personne, sans même en excepter les gentilshommes et les gens d'église, n'était exempt du droit de gabelle : chacun devait prendre du sel dans le plus prochain grenier de son domicile. Etaient seules exemptées de cet impôt quelques provinces que l'on nommait à cause de cela, et par antiphrase, pays de franc salé.

Le sel n'était pas, d'ailleurs, vendu partout de la même manière. Il y avait des greniers de vente volontaire et des greniers d'impôt. Dans les premiers, chacun ne prenait du sel qu'autant qu'il lui plaisait. Dans les seconds, le sel s'imposait tous les ans et était assis comme les tailles. Chaque paroisse en prenait la quantité à laquelle elle était imposée, et l'on obligeait chaque habitant d'en prendre une certaine quantité, proportionnée au nombre des membres de sa famille. Inutile d'insister sur ce singulier moyen d'assurer la consommation du sel et par là d'assurer la perception de l'impôt. Il se faisait ordinairement trois fermes des gabelles: la première comprenait la plus grande partie du royaume et se nommait le grand parti; la deuxième était celle du Lyonnais et du Languedoc; la troisième celle de la Provence et du Dauphiné. Il y avait des grenier's où la vente se faisait dans toutes les villes considérables, sous la surveillance d'officiers du roi appelés grènetiers.-L'impôt sur le sel remonte, d'ailleurs, à une époque assez reculée de notre histoire, et nous l'avons déjà vu existant chez les Romains. Mais, dans les premiers temps, il ne produisait pas de grands revenus, car il n'était guère que de deux deniers par minot. L'accroissement en fut rapide et il produisit des sommes considérables sur lesquelles s'acquittaient les rentes constituées sur le sel, les gages des officiers des cours souveraines, les octrois pour les gagés des présidiaux, réparations des villes, etc. Comment eût-il été possible de le réduire? Mais cet impôt sur ce que Vauban ap pelait une manne dont Dieu a gratifié le genre humain, équivalait à une prohibition de s'en servir. « La cherté du sel le rend si rare, disait cet économiste, qu'elle cause une espèce de famine dans le royaume, très-sensible au menu peuple, qui ne peut faire aucune salaison de viande pour son usage, faute de sel. Il n'y a point de ménage qui ne puisse nourrir un cochon, ce qu'il ne fait pas, parce qu'il n'a pas de quoi avoir pour le saler: ils ne salent même leur pot qu'à demi et souvent point du tout » (V. Projet d'une dime royale). Vauban demandait, en conséquence, une réduction de moitié sur l'impôt du sel et celle des impôts indirects qu'il rem plaçait par une contributioa foncière du dixième des revenus en nature ou en argent. Nous n'avons pas à parler ici des autres charges qui pesaient autrefois sur les personnes ou les biens, et qui étaient établies au profit des seigneurs, tels que le cens, les lods et ventes, les corvées, etc.-V. Propriété féodale.

87. Les divers impôts dont nous venons de nous occuper

d'or et d'argent et de l'or et de l'argent monnayés gardés en réserve. L'assemblée, pour prévenir tout ce que la perception d'un pareil impôt sur le revenu et sur certains capitaux pourrait avoir d'odieux, prohibait toute recherche ou inquisition, et ordonnait qu'on s'en tint à la déclaration de chaque citoyen qui devait être faite à la municipalité de son principal domicile, et qui était conçue dans les termes suivants : « Je déclare avec vérité que telle somme dont je contribuerai aux besoin de l'État est conforme aux fixations établies par le décret de l'assemblée nationale» (V. déc. 6-9 oct. 1789). Le lendemain, la même assemblée décrétait en principe que «toutes les contributions et charges publiques, de quelque nature qu'elles soient, seront supportées proportionnellement par tous les citoyens et par tous les propriétaires, à raison de leurs biens et facultés. » Par un décret des 12-16 déc., elle maintenait les impôts perçus en Bretagne. Par un autre du 21 mars 1790, elle abolissait la gabelle, le quartbouillon et autres droits relatifs à la vente du sel, et les remplaçait par une contribution égale aux deux tiers du revenu de cet impôt assis sur les provinces où il était perçu. Puis elle supprimait ou transformait certains droits, tels que ceux établis sur les huiles et savons, sur les cuirs, sur les fers, sur l'amidon.V. déc. des 22-24 mars 1790.

étaient autrefois donnés à ferme par adjudication au plus offrant | chaque citoyen, et à 2 1/2 pour 100 de l'argenterie, des bijoux et dernier enchérisseur, et c'était d'ordinaire sous le nom de leurs commis que les fermiers généraux ou traitants les obtenaient : ils les sous-affermaient ensuite à des sous-traitants dont ils étaient responsables, comme ils l'étaient de tous leurs commis. Montesquieu a réprouvé avec raison un pareil système, dont il ne sera pas d'ailleurs sans intérêt de connaître les résultats en indiquant le chiffre des impôts perçus sur les contribuables et celui qui entrait dans les coffres du roi. En 1596, à l'époque où Sully fut appelé à l'administration des finances, sur 24 millions il en entrait 4. En 1646, de 79 millions il n'en entrait dans les coffres iu roi que 35. Aussi combien grande était à cette époque la mière du peuple! On connaît le tableau qu'en a tracé Vauban : Par toutes les recherches que j'ai pu faire, disait-il, depuis plusieurs années que je m'y applique, j'ai fort bien remarqué que, dans ces derniers temps, près de la dixième partie du peuple est réduite à la mendicité et mendie effectivement; que, des neuf autres parties, il y en a cinq qui ne sont pas en état de faire l'aumône à celle-là, parce qu'eux-mêmes sont réduits, à très-peu de chose près, à cette malheureuse condition; que des quatre autres parties qui restent, trois sont fort malaisées et embarrassées de dettes et de procès, et que dans la dixième, où je mets tous les gens d'épée, de robe, ecclésiastiques et laïques, toute la noblesse et les gens en charge militaire et civile, les bons marchands, les bourgeois rentés et accommodés, on ne peut pas compter sur cent mille familles, et je ne croirais pas mentir quand je dirais qu'il n'y en pas dix mille petites ou grandes qu'on puisse dire fort à leur aise. » Sully, Colbert ne purent réaliser leurs projets de réforme dans cette partie si importante des finances, et les idées de Turgot et des physiocrates exercèrent malheureusement (V. Économie politique, no 25) une influence bien marquée sur la grande réforme financière accomplie par l'assemblée constituante. Déjà avant cette époque on avait, sous la même influence, réalisé d'importantes améliorations on avait commencé (en 1763) l'exécution d'un cadastre général pour asseoir l'impôt sur une base uniforme, et l'on avait aboli en 1775 les corvées pour les constructions et réparations des routes.

38. Régime nouveau en France.-L'assemblée constituante, qui devait changer complétement le système financier en vigueur à l'époque de sa réunion, après avoir déclaré que les contributions qui se percevaient alors dans le royaume, n'ayant point été consenties par la nation, étaient toutes illégales, et par conséquent nulles dans leur création, extension ou prorogation, déclara néanmoins consentir provisoirement à ce que les impôts et contributions continuassent d'être levés et perçus comme ils l'avaient été précédemment, jusqu'au jour de la première séparation de l'assemblée, de quelque cause qu'elle pût provenir, avec cessation de plein droit de tous ces impôts à partir dudit jour. L'assemblée s'engageait par cette déclaration à résoudre la question des impôts avant sa séparation, et s'assurait son existence jusqu'à l'époque où elle l'aurait résolue. Dans la déclaration des intentions du roi, le même besoin et le même désir de réforme en cette matière sont exprimés, soit pour le vote périodique de l'impôt, soit pour l'égalité des charges entre toutes classes de la nation, soit pour l'abolition ou la réduction des divers impôts. La nuit du 4 août, pendant laquelle furent jetės les premiers fondements de la réforme qui allait s'accomplir, vit disparaître tous les droits féodaux ou censuels, les dimes de toute nature et les redevances qui en tenaient lieu, les priviléges pécuniaires personnels ou réels en matière de subsides, et établi ce principe nouveau que la perception se fera sur tous les citoyens et sur tous les biens, de la même manière et dans la même forme (V. déc. des 4, 6, 7, 8 et 11 août, art. 1, 5, 9). Conformément à la demande faite par le roi dans la déclaration, l'assemblée réduisit le prix du sel à 30 liv. par quintal, et abrogea tous les règlements qui forçaient les citoyens à en lever une quantité déterminée, ou les empêchaient de faire de grosses salaisons; mais elle maintint tous les autres impôts jusqu'à ce qu'il eût été autrement pourvu à leur perception (V. les déc. des 23 el 26 sept. 1789 et le rapport au roi, du 27 du même mois). Mais les besoins de l'Etat ne permirent pas de s'en tenir aux impôts existants; pour y faire face, une contribution extraordinaire et patriotique dut être décrétée. Cette contribution, devant être égale et proportionnelle, fut fixée au quart du revenu net de

39. Par ces diverses mesures, l'assemblée constituante préludait à la grande réforme qu'elle allait bientôt accomplir. L'abolition des divers droits qu'elle avait supprimés était, d'ailleurs, entièrement dans les principes économiques qu'elle devait appliquer dans la loi du 23 nov. 1790.- Cette loi, qui établit une contribution foncière, proportionnelle, sur le revenu net de toutes les propriétés foncières, c'est-à-dire sur le revenu net moyen d'un certain nombre d'années, était conforme aux idées des économistes. La contribution foncière devait être toujours d'une somme fixe annuellement déterminée par la législature et être perçue en argent (art. 1, 3, 4, 5). Pour asseoir et répartir l'impôt, la loi ordonnait de faire un tableau indicatif des différentes divisions ou sections du territoire des municipalités et des différentes propriétés renfermées dans chacune de ces sections, avec le nom du propriétaire, et la déclaration de la nature et de la contenance de chaque propriété, faite par le propriétaire lui-même ou son fondé de pouvoir, plus l'évaluation du revenu imposable de chaque propriété foncière faite en leur âme et conscience par les officiers municipaux et les commissaires adjoints. Ce n'est pas ici le lieu d'insister sur toutes les dispositions de cette loi qui sert encore de base à notre système de contribution foncière; ce qu'il importe de faire observer, c'est que cette contribution devait, dans la pensée de ses auteurs et conformément aux principes des économistes, être unique et que ce ne fut que sous la pression des besoins et de la pénurie du trésor qu'on y ajouta quelques autres contributions. De ce nombre furent, soit les droits d'enregistrement et de timbre établis par les décrets des 5-19 déc. 1790 et 12 déc.-18 fév. 1791, et destinés à remplacer tous les anciens droits sur les actes de mutation ou autres, soit la contribution mobilière établie par le décret des 18 déc.-18 fév. 1791. Cette dernière contribution devait atteindre tous les revenus quí ne pouvaient l'être par la contribution foncière. « Il est juste, est-il dit dans l'instruction de l'assemblée sur cette contribution, qu'ils contribuent à la dépense commune, puisqu'ils profitent de la protection publique. Il a été nécessaire de l'établir pour porter les revenus de l'Etat au niveau de ses besoins. » La somme de la contribution mobilière, comme celle de la contribution foncière, devait être votée tous les ans par la législature; et elle se divisait en deux parties, l'une commune à tous les habitants et ayant pour base de répartition les facultés équivalentes à celles qui peuvent donner la qualité de citoyen (à trois journées de travail), les domestiques, les chevaux, etc., établie progressivement; l'au tre portant uniquement sur les salaires publics et privés, les revenus d'industrie et de fonds mobiliers et ayant pour base res revenus. Mais comment connaître les revenus d'industrie et de capitaux mobiliers? « L'assemblée nationale, disait à ce sujet l'instruction, n'a été arrêtée que par la difficulté de connaître les revenus d'industrie et de fonds mobiliers. Il est impossible de soustraire aux yeux de l'administrateur une propriété foncière, un champ ou une maison; mais les revenus d'industrie sont fa

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ciles à cacher. La différence de profession ne pouvait pas servir | de moyen pour les connaître deux hommes du même état ont souvent des fortunes inégales, et souvent des professions de même nature sont plus ou moins productives, à raison des villes où on les exerce. Il était plus difficile encore de reconnaître les revenus des capitaux le débiteur et le créancier, presque toujours également intéressés au secret de leurs opérations, ne laissent aucun moyen de les découvrir. Il fallait enfin prévenir l'arbitraire tant fois reproché aux anciennes contributions personnelles, source d'embarras pour les administrateurs honnêtes, et instrument d'animosité et de passion entre les mains de tous les autres. L'assemblée nationale ne s'est pas dissimulé qu'il était impossible d'atteindre à une évaluation parfaite; mais convaincue qu'il y❘ aurait trop d'inconvénients à asseoir une contribution sans autre base que l'opinion des administrateurs, elle a adopté la présomption résultant des loyers d'habitation comme la moins fautive.»> Cette évaluation était empruntée, d'ailleurs, à l'ancienne administration qui s'en servait pour les capitations. La contribution mobilière comprenait donc, dans ses deux parties, cinq taxes, au moins, lors de son établissement: 1o la taxe de citoyen actif; 2o Celle pour les domestiques; 3° Celle des chevaux; 4° Celle des revenus mobiliers; 5° Celle d'habitation. La première de ces taxes, qui forme la contribution personnelle, était égale à trois journées de travail. La seconde et la troisième étaient des impôts somptuaires et progressifs: elles consistaient dans le payement de trois livres pour un seul domestique mâle, de six livres pour le second et de douze livres pour chacun des autres, et de trois livres pour chaque cheval ou mulet de selle, et de douze livres pour chaque cheval ou mulet de cabriolet. Quant à la quatrième, elle était du sou pour livre du montant présumé des revenus, et ce montant était fixé au moyen de loyers d'habitation de la manière suivante. Les loyers de 12,000 liv. et au-dessus étaient présumés être du douzième des revenus, tandis que ceux de 100 à 500 liv. étaient présumés être du tiers. Rien de plus facile dès lors que d'évaluer, au moyen de l'échelle établie par la loi, et qui comprenait tous les degrés compris entre les deux termes extrêmes que nous venons d'indiquer, les revenus de chaque citoyen d'après les loyers d'habitation.

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40. L'assemblée constituante compléta son nouveau système d'impôts en supprimant tous les impôts indirects. Elle supprima d'abord tous les droits d'entrées ou impôts perçus à l'entrée des villes, bourgs et villages (V. décr. des 19-25 fév. 1794); puis tous les droits connus sous le nom de droits d'aides, perçus par inventaire ou à l'enlèvement, vente ou revente en gros, à la circulation, à la vente en détail sur les boissons et tous autres droits d'aides ou réunis aux aides et perçus à l'exercice dans toute l'étendue du royaume, les droits sur les papiers et cartons, sur les cartes à jouer et autres dépendant de la régie générale (décr. des 2-17 mars 1791). En supprimant les drois d'aides, l'assemblée restait fidèle aux principes des économistes, mais elle privait l'État de ressources considérables. «Ainsi, dit avec raison l'historien de l'économie politique, les idées des physiocrates déterminèrent l'assemblée constituante, malgré les sages remontrances de Roederer et de quelques esprits avancés, à concentrer tout le poids des impôts sur la propriété foncière, à peine on consentit à y joindre les taxes mobilières et les droits de douanes. La France se vit privée, d'un trait de plume, des ressources immenses qu'elle aurait pu retirer des contributions imposées à tous les producteurs qui ne vivaient pas de leurs rentes, et il lui fallut bientôt chercher dans les assignats une compensation à ce déficit volontaire, ajouté au déficit de la vieille monarchie.» C'est par le même décret, qui proclama la liberté d'industrie, que furent supprimés tous les droits d'aides; mais, en les abolissant, l'assemblée créa un impôt nouveau, destiné à remplacer les anciens droits de maîtrise, celui des patentes. · Tous ceux qui voulaient exercer ane industrie ou faire un négoce furent soumis au payement annuel d'un impôt direct, que l'on nomma patente. Le prix des patentes annuelles pour les négoces, arts, métiers et professions fut réglé à raison du prix du loyer, ou de la valeur locative de l'habitation des boutiques, magasins et ateliers dans les proportions suivantes. 2 sous pour livre du prix du loyer | jusqu'à 400 livres, 2 sous 6 deniers depuis 400 jusqu'à 800, et 3 sous pour livre au-dessus de 800 livres. La patente se composait

alors uniquement d'un droit proportionnel, plus ou moins élevé, selonle loyer des maisons, ateliers, fabriques que l'on occupait, selon la profession que l'on exerçait (certaines professions, celle de boulanger notamment, ne payaient qu'un demi-droit), selon qu'on exerçait une ou plusieurs professions. A défaut de patente, les personnes qui faisaient un commerce ou exerçaient une industrie non exceptée étaient punies d'une amende du quadruple du prix fixé pour la patente dont elles auraient dû se pourvoir. Les marchandises mises en vente par elles étaient confisquées. L'exhibition de la patente en original ou en expédition, fut nécessaire pour intenter toute action en justice à raison de sa profession et pour passer tout acte authentique, ou faire enregistrer tout acte sous seing privé y relatif. Elle fut nécessaire encore pour faire viser et coter les registres et pour être inscrit sur la liste des personnes éligibles aux tribunaux de commerce (V. décr. des 2-17 mars 1791, art. 19, 20, 21 et 22). Telles furent les sanctions spéciales données au nouvel impôt (V. Patente). - A la place de tous les anciens impôts, l'assemblée nationale établit donc trois impôts directs; la contribution foncière, la contribution mobilière et les patentes, mais elle repoussa tous les impôts indirects, elle n'admit que les droits de douanes à l'entrée et à la sortie du royaume.-V. déc. des 2-15 mars 1791.

41. Dans son décret des 21-22 mars 1793, la convention nationale maintint les contributions foncière et mobilière, mais supprima les droits de patentes, ordonnant seulement que les revenus d'industrie fussent pris en considération dans la contribution mobilière. Les droits d'enregistrement, d'hypothèque et de douanes furent conservés. La contribution foncière pour 1793 fut fixée à 240 millions, chacun des contribuables ne devant payer néanmoins que le cinquième de son revenu net, ce qui suppose pour la propriété foncière un revenu net de 1,200 millions. Cette contribution était payable, chaque mois, par sixième, en sorte qu'à l'expiration de chaque trimestre, la moitié des impositions fût exigible (V. décr. 3 août 1793). Mais la convention ne se contenta pas de maintenir les contributions existantes; de telles ressources ne suffisaient pas dans les circonstances où se trouvait alors la Franee, les assignats eux-mêmes ne donnaient que des résultats insuffisants, un emprunt forcé ou impôt extraordinaire était le seul moyen qui restât: il fut voté. Le décret des 20-21 mai 1793 porte, à ce sujet : « La convention nationale décrète ce qui suit: Il sera fait un emprunt forcé de 1 milliard sur les riches. » Mais la convention décréta, un mois après, que par une conséquence de la déclaration solennellement faite au commencement de la session et consignée dans l'acte constitutionnel tendant au maintien inviolable des propriétés territoriales, commerciales, industrielles, le répartiment de la somme d'un milliard, formant l'emprunt forcé décrété le 20 mai dernier, ne sera point fait sur les propriétés ou les capitaux, mais seulement sur tous les revenus fonciers, mobiliers et industriels, d'après des règles et des mesures justes et dignes d'un peuple libre >> (décr. des 22-29 juin 1793). Mais que devait-on entendre par riches, et comment l'impôt devait-il peser sur eux? Un premier décret des 22-29 juin avait exempté de l'impôt les gens mariés ayant des revenus nets au-dessous de 10,000 livres, et les célibataires au-dessous de 6,000. Mais un autre décret réglementaire, du 3 septembre, après avoir prescrit, de la part de tous les contribuables, la déclaration de leurs revenus nets et de ceux de leurs épouses et de leurs enfants mineurs, et la vérification de ces déclarations, ordonna que les revenus des citoyens étant une fois fixés et déterminés, il en serait déduit 1,000 v. pour les célibataires ou les veufs sans enfants, 1,500 livres pour les citoyens mariés ou veufs ayant des enfants, 1,000 livres pour leurs femmes, et pareille somme de 1,000 livres pour chacun de leurs enfants ou parents à leur charge, et que le surplus de ces revenus serait soumis à l'emprunt forcé dans les proportions de 1/10 pour l'excédant de 1 à 1,000 livres, de 2/10 pour celui de 1,000 livres à 2,000, et ainsi de suite jusqu'à 9,000 livres, pour laquelle somme le taux de l'emprunt était de 9/10; au delà de 3,000 livres de revenu, à quelque somme qu'il s'élevȧt, la taxe était de la totalité outre les dixièmes perçus pour les 9,000 livres. C'était là un impôt progressif, sous la forme d'emprunt forcé, et c'est ainsi que le considérait un publiciste (M. A. Carrel) dont la perte fut regrettable pour la démocratic dans un

rapport fait en 1833 à la société des droits de l'homme (publié chez Paulin en 1835), et qui porte sur cet impôt un jugement remarquable, sauf quelques erreurs de calcul, jugement justement sévère, car il n'y voit qu'un expédient qui ne saurait se renouveler.

42. Le directoire compléta, en l'améliorant, l'œuvre de la constituante, en matière d'impôts. Dès l'an 4, les droits de patente furent rétablis, mais ils furent à la fois fixes et proportionnels. Le droit fixe fut déterminé par un tarif, le droit proportionnel fut fixé au dixième du loyer des maisons d'habitation, usines ateliers, magasins et boutiques (V. L. 6 fruct. an 4 et les lois des 9 frim. et 28 pluv. an 5, 7 brum. an 6, qui la modifient). Des lois nouvelles qui, pour la plupart et sauf quelques modifications apportées par des lois plus récentes, sont encore en vigueur, réglèrent d'une manière complète, en l'an 7, les diverses espèces de contributions. La première fut celle du 1er brumaire qui réglementa à nouveau les droits de patente en adoptant le double droit fixe et proportionnel, et qui régit la matière jusqu'à la loi du 25 avril 1844 (V. Patente). Le droit proportionnel était du dixième du loyer des maisons d'habitation, usines, ateliers... Le droit fixe, sauf pour certaines classes de commerçants, était réglé eu égard à la population des villes dans lesquelles ils exerçaient leur profession. Quant à la contribution foncière, une loi générale qui a conservé toute son autorité, en régla la répartition, l'assiette et le recouvrement (V. L. 3 frim. an 7). Nous n'entrerons pas dans le détail des diverses dispositions de cette loi, qui se compose de huit titres et de cent cinquante-quatre articles, et qui, étant encore en vigueur, sera rapportée et expliquée, vo Impôts directs. Il nous suffira de dire ici que, tout en maintenant les bases adoptées par la constituante, pour l'assiette de l'impôt qui porta toujours sur le revenu net, la loi nouvelle améliora le mode d'évaluation des propriétés foncières. La contribution foncière était d'ailleurs tout à la fois un impôt de répartition, en ce que la somme totale en était votée chaque année pour être ensuite répartie entre les contribuables, et un impôt de quotité en ce que le corps législatif devait déterminer chaque année une proportion générale de la contribution foncière avec les revenus territoriaux, au delà de laquelle la cote de chaque individu ne pouvait être élevée (art. 7). Mais on ne se contenta pas pour les propriétés bâties de la contribution foncière; une nouvelle contribution, celle des portes et feneétres des maisons habitées, fut établie, et le taux en fut réglé eu égard à la population des communes dans le territoire desquelles ces maisons étaient situées. Les contributions personnelle, mobilière et somptuaire furent réglées par la loi du 3 nivôse de la même année, la contribution personnelle et mobilière formait un impôt de répartition, tandis que la taxe somptuaire et un droit de retenue du vingtième sur les salaires publics formaient un impôt de quotité. La contribution somptuaire était perçue à raison des domestiques, hommes et femmes, des chevaux et mulets et des voitures de luxe. La contribution personnelle, établie sur chaque habitant, était toujours de trois journées de travail; le surplus du contingent de la commune devait être réparti en contribution mobilière au marc le franc de la valeur du loyer d'habitation personnelle; les loyers d'habitation des célibataires devaient être surhaussés de moitié : une disposition analogue se trouvait déjà dans la loi des 13 janv.-18 fév. 1791. La contribution mobilière était établie sur les revenus mobiliers et à raison des loyers des maisons d'habitation: n'étaient pas compris dans ces loyers les magasins, boutiques, usines et ateliers pour raison desquels les habitants payaient patente: sans cela la contribution eût été double. Les quatre contributions directes qui subsistent encore aujourd'hui, remontent donc, pour leur réglementation, à l'an 7. L'innovation la plus considérable introduite par la loi postérieure a été l'abolition de la taxe somptuaire qui faisait partie de cette contribution (L. 24 avril 1806, art. 69). La contribution foncière pour l'an 8 fut fixée à 210 millions, et la contribution mobilière personnelle et somptuaire à 40 millions (L. 17 fruct. an 7).

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43. C'est aussi à l'an 7 que remontent nos lois, encore en vigueur, sauf quelques modifications, sur l'enregistrement et le timbre, et celles sur les hypothèques (V. Enreg., Privil. et hypoth.). C'est à la même époque que remonte encore l'établissement de l'octroi dans certaines villes (V. décr. des 27 vendémiaire, 11 frimaire et 27 frimaire an 7, vo Octroi), et celui de certaines con

tributions indirectes (V. v° Impôt indirect). Mais ce ne fut qu'en 1816 que furent établis les divers droits sur les boissons, qui en forment la partie principale, et qui sont l'innovation la plus considérable introduite dans le système des contributions depuis les lois de l'assemblée constituante qui avait aboli tous ces droits. Avant la révolution de 1848, leur produit s'élevait au moins à 100 millions, et déjà un dégrèvement de 28 millions et demi avait eu lieu (en 1831). Quant aux diverses contributions, voici quel était leur produit à la même époque : contribution foncière, 279,456,080; personnelle et mobilière, 59,313,060; des portes et fenêtres, 34,796,826; des patentes, 46,310,100; droits d'enregistre ment, de greffe, d'hypothèques, 216,324,000; droit de timbre, 40,556,000; droits sur les boissons, 103,603,000; taxe de consommation des sels perçue hors du rayon des douanes, 13,346,000; droit de fabrication sur les sucres indigènes, 20,840,000; produit de la vente des tabacs, 120,000,000; produit de la vente des poudres à feu, 6,863,000; produit de la taxe des lettres, 46,542,000..... Après la révolution de 1848, on fit plusieurs propositions tendant au changement complet ou à des modifications partielles de notre système d'impôts on voulait établir un impôt direct proportionnel sur le revenu mobilier; mais on voulait surtout l'abolition de tous les impóts indirects, notamment des droits sur les boissons, de la taxe de consommation des sels et de la taxe des lettres. Un dégrèvement considérable eut lieu sur les sels, et pour les lettres, une taxe uniforme, remplacée à son tour par une taxe variable, mais d'une manière et avec des diminutions considérables, remplaça l'ancien système des zones. Quant à l'impôt des boissons, il a été rétabli, et pendant les années 1830 et 1851, il a été l'objet d'une longue et sérieuse enquête devant l'assemblée législative. Le nouveau budget pour 1852 en a modifié le taux en réduisant de moitié le droit perçu au profit du trésor à l'entrée des villes, et en augmentant de moitié le droit de détail. Si nous recherchons quel a été le résultat de ces diverses modifications, le voici tel qu'il se trouve dans le projet de budget pour 1852, après qu'il eut été amendé par la commission de l'assemblée législative. Le droit sur les boissons était resté ce qu'il était, à peu de choses près, pour son produit; mais pour les sels, il y a eu une diminution énorme, de plus de 60 pour 100. L'abaissement du droit n'a pas produit un accroissement de consommation, comme on l'espérait de 13 millions, il était descendu à 4. Aussi, dans le budget pour 1852, a-t-on imposé les sels destinés à la fabrication des soudes, jusque-là reçus en franchise. Au contraire, le nouveau système adopté pour la taxe des lettres n'a pas produit de diminution notable, ce qui prouve une augmentation considérable dans le nombre des lettres confiées à la poste. La contribution foncière a été dégrevée de 18 millions; elle n'est plus que de 261,384,900. La contribution personnelle et mobilière s'est accrue de près de 3 millions; celle des portes et fenêtres de 2 millions et demi, et celle des patentes de plus de 3 millions: on sait que le dernier budget de l'assemblée législative a converti, pour certaines professions libérales, en une addition d'impôt proportionnel basée sur le prix du loyer, le droit de patente auquel le projet de loi proposait de les assujettir (V. D. P. 51. 4. 93 et 196). Les droits d'enregistrement ont diminué de près de 9 millions, mais ceux du timbre ont augmenté de près de 11, depuis la nouvelle loi qui a soumis de nouveau au timbre les journaux périodiques et celle qui a soumis au même droit, avec une sanction nouvelle, les effets de commerce et les actions dans les sociétés industrielles. Quant au produit de la vente des tabacs, il s'est aceru sur le budget de 1848 de plus de 4 millions.

44. Dans la plupart des grands États de l'Europe se retronvent les divers impôts directs et indirects qui existent en France. Ainsi, en Angleterre, outre les droits de douanes dont le revenu est le plus considérable (il a été, pour l'exercice finissant au 5 janv. 1851, de 20,442,170 liv. sterl., plus de 500 millions de francs), existent l'accise ou impôts indirects d'un revenu de 14,316,083 liv. sterl.; le timbre, les impôts directs sur la propriété (land and accessed taxes), d'un produit de 4,360,178 liv. sterl. Les taxes sur la propriété et le revenu dont nous avons parlé suprà, no 13, qui ont produit 5,383,036; les postes, d'un revenu de 820,000 liv. sterl.; les droits sur les charges et les pensions. Dans le budget de l'Autriche, nous trouvons les

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