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JOURNAL DES AUDIENCES

DE LA COUR DE CASSATION,

OU

RECUEIL

DES ARRÊTS DE CETTE COUR;

EN MATIÈRE CIVILE ET CRIMINELLE;

PUBLIÉ par M. DE SELIGNY, Greffier EN CHEF de la Cour
de Cassation.

ANNÉE 1819.

A PARIS,

DE L'IMPRIMERIE DE J. SMITH, RUE MONTMORENCY, N.° 16.

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JOURNAL DES AUDIENCES

DE LA COUR DE CASSATION,

OU

RECUEIL DES ARRÊTS DE CETTE COUR,

EN MATIÈRE CIVILE ET CRIMINELLE.

I.IBRAIRIE.-VENTE CONNUE SOUS LE NOM DE PARTAGE, VENTE PUBLIQUE. DROITS D'ENREGIstrement.

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Les ventes connues en librairie sous le nom de partages doivent-elles étre faites par le ministère d'huissiers ou de commissaires-priseurs, et sontelles soumises au droit d'enregistrement? Rés. nég.

(LECLERE C. LA RÉGIE DE L'ENREGISTREMENT.)

ON connaît en librairie, sous le nom de partage, une sorte de vente dont il est nécessaire de faire connaître le mode pour l'intelligence de cet article.

Le libraire, propriétaire des livres destinés au partage, en fait imprimer. la notice, qu'il envoie à ceux de ses confrères qu'il juge à propos d'y faire participer. Ce catalogue contient indication du lieu, du jour et de l'heure où le partage aura lieu. Au jour indiqué, le libraire propriétaire présente successivement différens lots dont il indique le prix le prix une fois annoncé n'est susceptible d'aucune surenchère; celui des libraires invités qui accepte le lot four le prix proposé se borne à dire hautement pris ou rétenu, et ce mot suffit pour consommer l'opération et fermer accès à toute autre proposition. L'acheteur ne paie pas comptant, mais en effets de commerce à échéances plus ou moins éloignées. Enfin, comme cette sorte de négociation suppose une certaine confiance de la part du libraire vendeur dans la personne des acheteurs, nul n'est admis à prendre part au partage, s'il n'y a été invité par l'envoi d'un catalogue. Telle est Popération que l'on nomme partage en librairie.

Au mois de janvier 1817, le sieur Leclere, libraire à Paris, se trouvant

en possession d'une grande quantité de livres tant de fonds que d'assortiment, a fait imprimer et distribuer à plusieurs de ses confrères un avis portant ce titre: «Catalogue de bons livres de fonds et d'assortiment qui sont offerts, à l'amiable et de gré à gré, aux seuls libraires à qui ce catalogue sera directement adressé, et qui seront personnellement présens au partage qui s'en fera dans le magasin d'Adrien Leclere, rue Pavée-Saint-André-desArts, n.o 2, le mercredi 5 février 1817, à six heures et demie très-précises du soir. >>

La réunion provoquée par le sieur Leclere a eu lieu en effet chez lui aux jour et heure indiqués.

Ce même jour, le vérificateur de l'enregistrement et le syndic des commissaires-priseurs en ont dressé chacun un procès-verbal.

A la suite de ces procès-verbaux, la régie de l'enregistrement a fait décerner contre le sieur Leclere une contrainte en paiement d'une somme de 1,540 fr., savoir; 1,100 fr., décime compris pour amende résultant de la contravention par lui commise à la loi du 22 pluviôse an 7, relative à la vente publique et par enchères des meubles et objets mobiliers, et 440 fr. pour droits d'enregistrement de la vente, évalués sur le pied de 20,000 fr., sauf à augmenter ou diminuer.

Le sieur Leclere a formé opposition à cette contrainte, et a soutenu, 1.o que le partage qu'il avait fait ne pouvait être réputé vente publique, puisqu'il n'avait admis à y participer qu'un certain nombre de libraires convoqués par un avis spécial; 2.o que ce partage ne pouvait pas non plus être considéré comme une vente aux enchères, puisqu'au lieu d'admettre les acheteurs à couvrir par une hausse le prix proposé par le vendeur ou par un précédent acheteur, ils devaient, au contraire, prendre chaque lot au prix proposé; que, sous ces deux rapports, une semblable opération ne pouvait rentrer dans l'application de la loi du 22 pluviose an 7, uniquement relative aux ventes faites publiquement et par voie d'enchères, ainsi que cela résulte littéralement de l'art. 1.er de cette loi.

La régie a répondu, 1.o que la vente était publique, par cela seul qu'elle avait été annoncée à un assez grand nombre de libraires par une distribution d'avis imprimés; 2.° qu'elle avait été faite aux enchères, quoique par voie de rabais sur le prix d'abord proposé par le libraire vendeur, parce que, disait la régie, une enchère résulte aussi bien de ce mode que de celui

d'une hausse successive.

Le 12 juillet 1817, jugement par lequel le tribunal civil de la Seine, << attendu que les mesures prises par le sieur Leclere pour vendre un assez grand nombre d'ouvrages de librairie, sont en contravention à l'art. 1.er de la loi du 22 pluviose an 7, contravention passible des peines prononcées par l'art. 7 de la même loi; condamne ledit Leclere à l'amende de 200 fr., et, en outre, au paiement des droits proportionnels d'enregistrement de cette vente, sur le pied de 20,000 fr., sauf la preuve contraire. »

Pourvoi en cassation de la part du sieur Leclere, pour fausse application de l'article 1er de la loi du 22 pluviose an 7, ainsi conçu: « A compter

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