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deviendroit fuperflu. Les phyficiens qui feront curieux de le vérifier, y découvriront certainement la clef de toutes les expériences de MM. Symmar & Cigna.

(La fin au Journal prochain.)

Obfervations fur quelques phénomenes particuliers à une matiere verte. Par M. l'abbé COLLOMB de la fociété philofophique des fciences & arts utiles de Lyon.

Onvaincu que tout eft lié dans la nature,

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la connoiffance, quelque peu importante qu'on' la fuppofe au premier abord, ne foit propre à répandre de nouvelles lumieres, il m'a paru qu'il ne feroit pas inutile d'entretenir les naturaliftes des phénomenes que m'a offerts une matiere verte.

Dans le deffein de fatisfaire à différentes vues fur la diffolution de quelques fubftances au moyen de l'eau à la température de l'athmosphere, j'en mis plufieurs le 16 Août 1787 en macération dans différens vafes jufqu'au 28, d'où je les fortis pour les laver & les foumettre après avoir changé l'eau de leurs vafes, à des macérations fucceffives, avec la réfolution de mettre entre chacune des intervalles de tems à peu près égaux. N'ayant pu continuer ces expériences, ni en vérifier les résultats dans le tems & de la manière que je me l'étois propofé, elles ne me valurent pas les lumieres que j'en attendois. Mais la nature nous fert fouvent mieux que nos moyens; en agillant par des voies qu'elle fçait varier. & étendre à fon gré, elle forma une matiere verte fur la partie inférieure de la paroi interne d'un de N°. XXIX. Tom. VIII. 20 Od. 1792.D

mes vases. Ce fut le 10 de Novembre suivant que je découvris cette production, à laquelle je ne donnai pas, d'abord une attention affez particuliere, parce qu'elle n'étoit point l'objet de mes recherches. Après l'examen des substances en macération, d'autant moins intéreffant, qu'il étoit trop tardif, & qu'il fut fait fi fort à la hâte, que j'oubliai de remarquer quelle étoit précisément celle des fubftances que j'avois enlevée du vafe contenant cette matiere verte, & qui avoit pu concourir à la former, je me bornai à fortir cette production du vafe, où elle étoit reftée avec une médiocre quantité d'eau légerement roufsâtre ; je la délayai dans cette eau, à laquelle elle donna une couleur verte; ayant augmenté fon volume d'un peu d'autre eau, je la versai dans un vafe de verre blanc que je couvris avec du papier pour le garantir feulement de la pouffiere.

Le 11 Novembre, à huit heures & quelques minutes du matin, je m'apperçus que cette cau laissée la veille d'une couleur verte n'avoit plus que celle d'une eau ordinaire. Il s'étoit formé dans le fond du vase un dépôt d'un vert foncé, que je regardai comme une matiere fpécifiquement plus pefante que l'eau qui la furnageoit. J'étois fur le point de décanter cette eau, d'examiner fi ce dépôt par luimême ou dans un état de combinaison offriroit une matiere colorante fufceptible de tourner à l'avantage de l'art de la teinture. Mais, détourné de cet objet, & obligé de fortir de mon cabinet, je remis le vafe à la place, & l'examen du dépôt à un autre tems. Il eft des retards quelquefois utiles; celui-ci le fut à la confervation d'une matiere qui, dans fon état naturel, dans l'élément néceffaire pour le jeu de fes organes, & dans une faifon plu

me

tempérée qu'elle ne l'eft ordinairement, devoit mettre fur la voie d'être témoin d'un de ces phénomenes de la nature qui reftent fouvent inconnus faute de circonftances favorables à leur observation. Après deux heures ou environ d'absence, étant rentré dans mon cabinet & voulant reprendre le vafe, je n'en vis plus l'eau furnageant fans couleur au deffus. du dépôt vert que je venois d'obferver: elle étoit teinte en vert, comme le premier jour où elle y avoit été verfée. Cet événement me caufa de la furprife; fa fingularité m'engagea à l'examiner de plus près. Pour me garantir de l'illufion des premieres apparences, quoique. le vafe fût dans un endroit du cabinet affez éclairé, je le portai près d'une fenêtre, où, après quelques minutes de repos, je vis de même toute l'eau de couleur verte; le tenant encore entre la lumiere & mon œil, je diftinguai dans l'eau colorée quelques parties d'une teinte plus foncée elles paroiffoient s'élever du fond du vafe droites & paralleles. Toute Peau du côté du vafe le plus éxpofé à la lumiere paroiffoit aufli plus colorée que du côté opposé.

Comme l'air a une influence marquée fur la plupart des phénomenes de la nature, qu'il contribue au développement de quantité de couleurs, j'effayai de boucher le vafe: cette privation du contact de l'air libre ne produifit aucun changement dans la couleur de l'eau: elle resta verte tout le tems que je l'obfervai, & elle l'étoit encore au moment où je fortis de mon cabinet. J'y rentrai à trois heures aprèsmidi pour admirer & connoître de plus en plus toutes les particularités de cette finguliere production de la nature. Une matiere qui des parties inférieures de l'eau d'un vafe s'éoit élevée fpontanément aux fupérieures &

qui les tenoit toutes colorées en vert, étoir pour moi un fpectacle agréable. J'aimois à croire qu'il feroit digne de la curiofité des philofothes qui s'occupent à obferver les phénomenes de la nature. Je voyois avec plaifir que la couleur de l'eau étoit toujours au même point d'intensité & à la même hauteur où je l'avois laiffée avant midi.

Voulant néanmoins m'affurer de plus en plus de la réalité de cette couleur, qu'elle n'étoit due à aucune illufion d'optique, je mis le vafe fous les yeux de quelques perfonnes en préfence defquelles je lui donnai diverfes politions, après lefquelles & quelque tems de repos il leur offrit, ainsi qu'à moi, une eau colorée en vert à la même hauteur, & d'une intenfité néanmoins plus forte fur le côté du vase exposé à la lumiere.

Sur les fix heures du foir, nous vimes avec une nouvelle surprise notre matiere verte féparée pour la feconde fois de l'eau de fon vafe: elle en occupoit le fond, & le coloroit en vert de la même maniere qu'à huit heures & quelques minutes du matin. Je le d bouchai; mais l'air ne fit aucune impreffion fenfible fur l'eau que je tims expofée à son action pendant piès d'une heure.

Le 12 Novembre, curieux de voir cette matiére verte avant les premiers rayons du jour je la trouvai qui occupoit le fond du vafe de la même maniere que la veille à fix heures du foir: on ne voyoit aucune couleur verte à l'eau qui la furnageoit; mais lorsque le fofeil fut élevé de plusieurs degrés au deffus de l'horizon, ainfi qu'un être doué d'un principe de vie cette matiere verte manifefta fes mouvemens par des degrés fucceffifs d'éléva tion; elle les rendit tenfibles en imprégnant peu à peu l'eau du vafe de couleur

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Verte. A neuf heures & quelques minutes elle l'avoit colorée au quart de fa hauteur entre dix & onze heures, à fa hauteur entiere moins près d'une demi-ligne (1); tout le tems que le foleil brilla fur l'horizon, elle Ja tint colorée avec la même intensité & à la mê ne hauteur; près de fon déclin, elle com mença à la décolorer en defcendant par degrés infenfibles au fond du vafe; dès qu'elle y fut parvenue, elle y offrit un dépôt vert en tout femblable aux précédens.

Tels ont été fucceffivement les mouvemens pério di ques de notre matiere verte pendant près d'un mois & demi dans une faifon où il est rare, comme je l'ai déjà dit, qu'on jouiffe dans ce climat d'une température aut douce. Des occupations indifpenfables d'un aurre genre, je l'avoue avec regret, ne m'ont permis de me livrer à quelques obfervations qu'à des momens perdus : je rapporterai néanmoins ici les circonstances relatives à quelques-unes, & en particulier celles qui méritent plus d'attention.

L'élevation de cette matière dans le vafe, après celle du foleil fur l'horizon, s'eft faite pour l'ordinaire affez régulierement, lorfque

(1) J'obferverai ici que cette matiere verte n'a jamais coloré l'eau du vale dans toute la hauteur, Chacune de fes élévations a été terminée par une couche d'eau claire qui a pris tous les jours un peu plus d'épaiffeur. Le Novembre, la couche ap perçue pour la premiere fois au deffus du niveau de l'eau colorée n'avoit qu'environ un quart & plus de ligne le 12, près d'une demi-ligne; le 13, une demi-ligne entiere; ke 14, une demi-ligne & pius, de maniere que chacune de ces couches d'eau claire devenant épaife par degrés infentibles & proportionnels à la diminution journaliere de l'élévation de cette matiere, l'épaiffeur de la derniere couche a été d'environ huit lignes dans l'efPace de près d'un mois & demi.

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