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Les dispositions qui investissent les corps publics de certaines attributions, sont de stricte interprétation. On ne peut étendre les lois qui fixent les attributions de police de la commune, au delà des cas qu'elles prévoient. Ce principe, qui résulte de la loi de 1789, a été confirmé par la loi communale. L'article 78 de cette dernière loi charge les communes de faire des ordonnances de police communale, ce qui comprend seulement les objets que la loi a confiés à la vigilance des communes.

Les ordonnances de police communale n'ont jamais pu être contraires aux lois. Ce principe est inscrit en termes exprès dans l'article 78 de la loi communale. L'application en donne lieu parfois à des questions délicates, surtout lorsqu'il s'agit de rechercher si ces ordonnances ne méconnaissent pas tel ou tel droit garanti aux citoyens. Notre cour de cassation distingue avec soin les mesures qui restreignent simplement ces droits, de celles qui les atteignent dans leurs éléments essentiels. Une loi du 21 janvier 1852, interprétative de l'article 78 de la loi communale, a consacré cette distinction en décidant que l'ordonnance de police communale, par laquelle il est enjoint aux propriétaires riverains des rues où se trouvent des aqueducs, de supprimer les puits ou fosses d'absorption, n'est pas contraire à l'article 11 de la Constitution, relatif au droit de propriété.

Les libertés les plus importantes des Belges, la liberté des cultes, des opinions, de la presse, etc., sont

inscrites dans la Constitution. Quelle influence les dispositions qui les garantissent ont-elles exercé sur le droit de police des communes ?

La cour de cassation a jugé qu'elles n'ont pas eu pour effet de restreindre ce droit. En effet, s'il est interdit à la commune de supprimer directement ou indirectement les libertés constitutionnelles des particuliers, il doit lui être permis d'en réglementer l'usage par mesure d'ordre. Réglementer n'est pas supprimer. Mais l'existence de ces libertés serait compromise s'il était permis d'en subordonner l'usage à une autorisation préalable : une liberté dont on ne peut user qu'avec l'autorisation du pouvoir, n'est pas une liberté, mais une faveur du pouvoir. Aussi la Constitution défendelle de soumettre les droits des Belges à des mesures préventives, en d'autres termes, à des mesures tendant à les faire dépendre du bon vouloir de l'administration. Mais l'article 19 § 2 déroge à cette règle en ce qui concerne les rassemblements en plein air : ceux-ci, quelle qu'en soit la cause, restent entièrement soumis aux lois de police, et peuvent être interdits conditionnellement ou d'une façon absolue.

Le maximum des peines par lesquelles les conseils communaux peuvent sanctionner leurs règlements de police, a été successivement fixé par la loi des 16-24 août 1790, par celle du 6 mars 1818, et par l'article 78 de la loi communale combiné, d'abord avec le Code pénal de 1810, ensuite avec le Code pénal de 1867.

La première de ces lois fixait le maximum de la peine

d'emprisonnement à huit jours, dans les villes, à trois jours, dans les campagnes; mais, d'après le texte officiel publié en Belgique, ce maximum n'était que de trois jours dans toutes les communes. Sous le régime de la loi de 1818, les peines variaient selon l'importance des communes. Le maximum de l'emprisonnement était de trois jours dans les communes les plus populeuses, d'un jour dans les autres; le maximum de l'amende était tantôt de 50 florins, tantôt de 25 ou de 12 florins.

La loi communale est revenue à l'uniformité des peines. Elle permet aux conseils communaux de comminer des peines de simple police : le maximum de celles-ci était, sous l'empire du Code pénal de 1810, de cinq jours d'emprisonnement et quinze francs d'amende le Code pénal de 1868 a porté ce maximum à sept jours et vingt-cinq francs.

Les communes ne peuvent sanctionner leurs règlements par des peines, que lorsque la loi n'en a pas fixé (art. 78 de la loi comm.). Déjà le décret des 19-22 juillet 1791 avait prononcé des pénalités contre l'infraction à certaines ordonnances; le Code des délits et des peines du 3 brumaire an IV, le Code pénal de 1810 et celui de 1867 ont suivi cet exemple. Les peines comminées par la loi excèdent parfois le taux de celles de simple police. (Voir notamment l'art. 315 § 3 du Code pénal de 1867.)

Des lois spéciales ont conféré aux communes le droit de réglementer certains objets dans l'intérêt des campagnes elles concernent le temps pendant lequel les

pigeons devront être renfermés, le ban des vendanges, le glanage, le râtelage et le grappillage. (Loi du 4 août 1789; loi du 28 sept.-6 oct. 1791, tit. I, section V, art. 2, et tit. II, art. 21).

Mais, sauf ces dispositions, le droit de police des communes a, quant aux objets auxquels il s'applique, la même étendue dans toutes les communes; les décrets des 14 déc. 1789, 16-24 août 1790 et 19-22 juillet 1791 ne distinguent point entre les villes et les campagnes.

Le Code rural des 28 sept.-6 oct. 1791 a-t-il modifié ce principe? A-t-il conféré aux municipalités des communes rurales, indépendamment de leur droit de police ordinaire, un droit de police spécial ayant pour objet la conservation des fruits des campagnes ?

La cour de cassation a jugé l'affirmative en se fondant sur l'article 9, tit. II, de ce code, qui charge les officiers municipaux de veiller à la tranquillité, la salubrité, la sûreté des campagnes. Mais on ne saurait conclure de cette disposition que le législateur de 1791 ait voulu briser l'unité d'organisation du pouvoir communal en matière de police. Il ne s'agit point, dans cet article, d'un droit de réglementation, mais d'un droit de surveillance et d'exécution, d'une sorte de police judiciaire. Ce qui le prouve, c'est toute l'économie du titre II du Code rural, c'est le texte même de l'article 9, et spécialement les mots officiers municipaux dont il se sert; car si l'exécution des lois ou règlements de police appartient aux officiers municipaux, le droit de faire de pareils règlements était,

aux termes des lois de 1789, 1790 et 1791, l'apanage

des corps municipaux.

Quelques dispositions ont, depuis le décret des 16-24 août 1790, précisé, étendu ou restreint le cercle des attributions de police des corps municipaux. Il convient de les mentionner dans l'ordre des matières de ce décret.

Le décret de 1790 confie à la vigilance des corps municipaux tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places, et voies publiques. Il ne s'agissait ici que des voies publiques proprement dites, c'est-à-dire de celles qui appartiennent au domaine public. Mais quelle était l'étendue du droit de police de la commune en ce qui concernait les ruelles et passages établis sur des propriétés particulières et aboutissant aux voies publiques?

Elle pouvait sans doute empêcher que les uns ne devinssent une cause d'insalubrité pour les autres; elle pouvait par exemple, lors de l'ouverture de ces passages, déterminer la largeur qu'ils devaient avoir. Mais elle n'avait pas le droit de les assimiler aux voies publiques.

Cette législation présentait une lacune et entraînait de graves dangers; car, dans les localités importantes, ces chemins privés étant en fait affectés à la circulation publique, il était regrettable que les communes ne fussent pas autorisées à les soumettre aux règlements destinés à assurer la commodité du passage dans les voies publiques. D'autre part, les

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