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d'Espagne et d'Afrique, donnèrent aux chrétiens d'Espagne et de la Septimanie de nouvelles forces; et, lorsque, en 752, Pepin le Bref vint attaquer Narbonne, une armée assez faible la bloqua et la força de se rendre,

en 759.

Ainsi la France était délivrée de la présence des infidèles, au moins pour un temps assez long. Ce ne fut qu'en 792 que le khalife de Cordoue, Hescham, résolut de reprendre la Septimanie, et leva une armée pour pénétrer en France. En 793, Charlemagne étant occupé à faire la guerre aux Avares, les Sarrasins passèrent les Pyrénées et se dirigèrent sur Narbonne, impatients de reconquérir un boulevard où ils s'étaient maintenus si longtemps. Guillaume, comte de Toulouse, marcha à leur rencontre, mais les Francs furent vaincus à Villedaigne, entre Narbonne et Carcassonne. Cependant les Arabes ne purent s'emparer de Narbonne. Cette invasion détermina Charlemagne à attaquer les Sarrasins; et, dans ces guerres dont nous ne parlerons pas ici, les provinces entre l'Ebre et les Pyrénées tombèrent au pouvoir des Francs. Charlemagne assura ainsi ses limites au midi. Toutefois les Arabes d'Afrique, qui depuis longtemps infestaient la Méditerranée de leurs pirateries, commencèrent à ravager les côtes de l'empire le Charlemagne. Déjà, entre 728 et 739, ils avaient pillé le monastère de Lérins; mais, à partir de cette époque, leurs invasions en France devinrent plus redoutables. La Corse, la Sardaigne, les îles Baléares, furent dévastées, en 806, 808, 809, 813. Charlemagne fit établir des forts aux lieux de débarquement, et des flottes pour repousser les ennemis. Tant qu'il vécut, ces moyens et la terreur de son nom suffirent pour préserver les côtes de ses États.

Après sa mort les Arabes recommencèrent leurs courses. En 820, la Sardaigne fut ravagée; vers 838, Marseille se vit livrée au pillage. La mort de Louis le Débonnaire, et les guerres qui eurent lieu entre ses enfants, laissèrent

aux Sarrasins le champ libre; aussi les embouchures du Rhône, puis Marseille en 848, furent-elles dévastées; une armée partit d'Espagne, s'avança en France, et ne se retira que comblée de présents par Charles le Chauve. En 869, les pirates sarrasins firent une nouvelle invasion dans la Camargue. En 889, ils s'établirent sur les côtes de Provence, à Fraxinet, dans le golfe de San-Tropez, et de ce point, leurs ravages s'étendirent dans toute la vallée du Rhône, et jusqu'aux frontières de l'Allemagne.

En 906, les Arabes sortirent de ce repaire, et ravagèrent le Dauphiné et la vallée de Suse. En 908, des pirates africains saccagèrent les environs d'Aigues-Mortes. En 920, les Arabes d'Espagne passèrent les Pyrénées, et pousserent jusqu'aux portes de Toulouse. Pendant ce temps, les environs de Fraxinet se trouvaient entièrement dévastés; Marseille, Aix, Sisteron, Gap, Embrun, furent successivement pillées, et la Savoie, comme le Piémont et la Suisse, n'étaient pas, malgré les Alpes, à l'abri des attaques des infidèles.

En 940, Fréjus, Toulon, furent prises toute la contrée était dépeuplée. Le mal devint tel, que Hugues, comte de Provence, fit alliance avec l'empereur grec pour prendre Fraxinet. En 942, Hugues et les Grecs s'emparèrent, en effet, de ce port si important; mais Hugues, apprenant que l'Italie, qu'il convoitait, allait passer à son rival Bérenger, fit alliance avec les Arabes et leur rendit Fraxinet pour pouvoir disposer de ses forces contre son adversaire. Depuis lors, la puissance des Sarrasins alla toujours croissant. Il n'entre pas dans notre sujet de parler ici de leurs invasions en Italie, contentons-nous de dire qu'ils vinrent jusque sous les murs de Grenoble, dont ils se rendirent maîtres. Une victoire de Conrad, en 952, fit chanceler leur puissance. En 960, on leur enleva le mont Saint-Bernard, et les communications entre l'Italie, l'Allemagne et la France, furent rétablies. En 965, ils furent chassés du diocèse de Grenoble, puis, postérieurement à 972, de Sisteron et de Gap. De toutes parts, les seigneurs féodaux,

T. II. 7 Livraison. (DICT. ENCYCL.)

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secondés par le peuple, et excités par le clergé, se soulevaient contre les barbares.

Enfin, vint le moment de la délivrance. Guillaume, comte de Provence, appela à lui tous les guerriers de la Provence, du bas Dauphiné et du comté de Nice, et résolut de prendre Fraxinet. D'abord les Sarrasins furent vaincus à Tourtour, près de Draguignan, puis, malgré leur résistance, obligés de fuir de Fraxinet. C'est vers 975 que la France fut enfin délivrée de ces hôtes terribles. Ceux qui ne furent pas tués, devinrent serfs et se fondirent peu à peu dans la population. Il fallut bien que les Arabes se résignassent à regarder la France comme étant à l'abri de leurs atteintes. Ils s'en consolèrent en disant que (( les Français, étant exclus d'avance du paradis, Dieu avait voulu les dédommager en ce monde par le don de pays riches et fertiles, où le figuier, le châtaignier et le pistachier, étalent leurs fruits savoureux. »>

Il y eut bien encore depuis cette époque des attaques partielles en 1019, sur Narbonne; en 1047, contre Lérins, etc.; mais ces attaques tiennent moins à l'histoire des invasions barbares qu'à celle de la piraterie des Barbaresques, à laquelle la conquête d'Alger vint enfin mettre un terme.

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Scandinaves; et la comparaison de ces traditions avec la religion de l'Inde, et surtout avec celle de la Perse, atteste qu'elles ont avec ces religions une commune origine. Les dieux, leurs attributs, leur généalogie, tout se ressemble; et ce qui domine toute cette théologie, c'est l'idée de l'immortalité, « cette immortelle prophétie de l'espérance,» à laquelle l'antiquité orientale et le christianisme ont si hautement rendu témoignage. De cette croyance à l'immortalité ne se séparent pas les moyens de l'obtenir. Il faut, pour vivre immortel dans le palais d'Odin, être mort avec courage sur le champ de bataille. « Cette mort était la plus précieuse récompense qu'un noble cœur pût attendre. Loin d'interrompre la vie, elle la prolongeait en la couronnant. A quiconque était sorti pacifiquement de la vie, quelque éclat que cette vie, en son temps, eût jeté dans la guerre, les portes du céleste palais demeuraient inexorablement fermées par la loi du destin. D'autres mondes, les mondes mélancoliques de Héla s'ouvraient pour ces infortunées victimes de la mort. La croyance à cet égard était si formelle, qu'au dire des poëtes c'était dans un de ces mondes que le dieu Balder lui-même (le dieu de la bonté et de la miséricorde), après sa mort, avait été contraint de descendre.

« Quant aux lâches, l'affreux séjour du Niflheim était pour eux. Frappés d'infamie pendant leur vie, souvent même, comme le rapporte Tacite au sujet des Germains, étouffés dans la boue par leurs frères d'armes, ils allaient, leur dernière heure venue, expier leur crime dans un enfer de glace et de venin. Lâcheté, courage, voilà quels étaient, chez les Scandinaves, les deux pôles fondamentaux du vice et de la vertu; et chez un peuple où la guerre semblait être la fin essentielle de l'individu comme de la société, cela ne pouvait manquer d'être ainsi.

« On ne saurait croire à quel point cette morale, toute dirigée vers la guerre, avait porté chez les Scandinaves le mépris de la mort. L'instinct

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FRANCE.

naturel avait été complétement anéanti. Au lieu de redouter la mort comme un mal, on la désirait et on la recevait comme un bien. Cet héroïsme, inspiré aux Scandinaves par le sentiment de l'immortalité, paraît avoir profondément étonné les Romains, qui ne connaissaient que celui qui provient du dévouement à la chose publique..... Lucain avait mieux compris le secret de leur valeur: « La mort, disait-il, est pour eux le passage à un autre univers. Ils sont heureux de leur erreur, ces peuples que regarde le pôle! Ils ignorent la plus redoutable de toutes les craintes, celle de la mort. De là, cette hardiesse à se précipiter sur les piques; de là, ces âmes toujours prêtes a la mort, et cette persuasion qu'on ne saurait avoir de lâches ménagements pour la vie, puisqu'elle doit renaître (*).» Il ne paraît hors de doute que c'est cette croyance si forte qui a décidé la ruine de l'empire romain. Des armées où il n'y a que l'honneur militaire, quelque puissant qu'on l'y suppose, peuvent-elles résister à des armées mises en mouvement par la religion? Ce sont vraiment là les épées du Seigneur; leur mobile est souverain. Aussi me semble-t-il tout à fait superficiel de chercher à expliquer, comme on le fait ordinairement, par des considérations toutes temporelles, le démembrement de l'empire romain. La religion y a joué un plus grand rôle peut-être que la politique et la stratégie. C'est elle qui a décidé toutes les victoires, en jetant dans les balances du combat ses palmes immortelles (**). »

La première expédition des Northmaus, et le premier exploit maritime des Francs, remonte peut-être au milieu du sixième siècle. Cochiliac, roi

()........ Regit idein spiritus ortus

Orbe alio: longæ, canitis si cognita, vitæ
Mors media est. Certe populi, quos despicit Arctos,
Felices errore suo, quos ille timorum
Maximus, haut urget leti metus. Inde ruendi
In ferrum mens prona viris, animæque capaces
Mortis et ignarum perituræ parcere vita.

LUCAIN, Pharsale, 1, 456 et suiv.

(**) Reynaud, art. SCANDINAVES, dans l'Encyclopédie nouvelle.

des Danois, fut battu par terre et par mer par le roi d'Austrasie, Théodebert. Mais ce n'est qu'à partir du neuvième siècle que leurs invasions deviennent redoutables. Les dernières années de Charlemagne furent troublées par les attaques de ces audacieuxennemis, et ce prince put prévoir les maux qu'ils causeraient un jour à la France. Adonnés à la piraterie, les Northmans, pendant les neuvième et dixième siècles, ne cessèrent d'infester les côtes de la Baltique, de l'Atlantique et de la mer du Nord, jusqu'à ce que le christianisme eût adouci leurs mœurs féroces et vagabondes. Les États carlovingiens présentaient aux insultes des hommes du Nord une étendue de côtes de trois cents lieues, depuis les bouches de l'Elbe jusqu'à celles de l'Adour: aussi leurs descentes furent-elles continuelles, depuis la mort de Louis le Débonnaire jusqu'à leur établissement en Neustrie. Les cantons maritimes ne furent pas seuls exposés à leurs ravages: les fleuves de l'Allemagne, et surtout de la France, portèrent leurs frêles navires dans le coeur des provinces, et leurs brigandages s'étendirent partout. Mais les contrées riveraines de l'Escaut, de la Garonne, de la Loire et de la Seine, étaient les plus exposées. C'est sur ces rivières, ou dans les îles voisines de leur embouchure, que nous trouvons les principales colonies ou stations des Northmans. Sur l'Escaut et le Rhin ils étaient cantonnés à Bétau et Walcheren, dès l'an 837; de là ils remontaient l'Escaut, la Meuse et le Wahal, et dévastaient la Flandre, la basse Lorraine et la Hollande. L'ile de Her, ou Noirmoutier, devint pour eux un lieu de retraite sur la Loire, dès l'année 830. Enfin quelques flots, à l'embouchure de la Seine, leur servaient de refuge dans cette partie de la France. La Bretagne et la Touraine eurent particulièrement à souffrir de leur voisinage. Le bassin de la Garonne fut moins exposé aux ravages de ces peuples; cependant Bordeaux, Saintes, Périgueux, Toulouse, Tarbes, Bayonne, furent dévastés, de 843 à 848. Mais

ce qui favorisa surtout les invasions de ces pirates, ce fut l'infâme appel fait à leur avidité par Pepin II, qui s'allia avec eux contre Charles le Chauve. Deux fois, les Northmans vinrent à son secours, à l'époque déjà indiquée et en 864; alors Toulouse fut encore pillée; mais, depuis, le bassin de la Garonne n'eut plus à souffrir des favages des pirates du Nord.

Pendant que toutes les forces de l'empire étaient employées à décider la querelle des fils du Débonnaire, les Northmans, commandés par Oscheri, pillèrent, en 841, pour la première fois, ville de Rouen. Enhardis par leurs succès, par la faiblesse de Charles le Chauve et par l'argent qu'il leur donnait pour les engager à se retirer, ils assiégèrent un assez grand nombre de fois la ville de Paris; mais le siége le plus terrible que cette ville eut à soutenir contre eux fut celui de 886. Godefroy, l'un des rois northmans et duc de Frise, avait demandé à Charles le Gros un territoire près de Coblentz; on n'osa refuser. L'île de Bétau fut choisie pour le lieu de la conférence, et Godefroy y fut assassiné par un des sicaires de l'empereur, qui espérait se débarrasser ainsi des barbares. Sigefroi, autre prince des Northmans, voulut tirer vengeance de cette perfidie; il rassembla une armée de quarante mille hommes, et vint mettre le siége devant la capitale de la Neustrie. A cette époque Paris ne se composait encore que de la Cité, qui communiquait avec les deux rives de la Seine par deux ponts de bois, celui du Change et le Petit-Pont. La tour du Châtelet, qui devait défendre la ville, n'était pas terminée quand l'ennemi parut. Les Parisiens, qui s'attendaient cette fois à l'irruption des barbares, n'abandonnèrent pas leur ville comme ils l'avaient fait précédemment. Le comte de Paris, Eudes ou Odon, que sa valeur éleva depuis sur le trône, maintint dans la ville un ordre qui ranima tous les courages. Cependant, Sigefroi pressait le siége avec une fureur opiniâtre. Le 28 janvier 886, il livra un troisième assaut, dont les circonstan

ces méritent d'être rapportées. Les Northmans, dit Abbon, construisirent une tour informe et misérable à voir, qui avait seize roues, sans ordre ni proportions; elle avait trois étages: chacun portait trente-cing hommes, et un bélier destiné à abattre la tour du Châtelet, que l'on avait terminée avec dela charpente. La tour des assiégeants était commandée par les deux ingénieurs qui l'avaient construite. Elle s'avança; mais les Parisiens tuèrent à coups de flèches les deux commandants, et les soldats sans chefs se retirèrent; puis la tour fut démolie par les pierres que les assiégés firent pleuvoir dessus au moyen des machines. Toutefois les assiégeants ne furent pas déconcertés : ils revinrent à la charge, et livrèrent un quatrième assaut, lancèrent des pierres, des flèches, des balles de plomb, et jetèrent un instant le trouble parmi les assiégés; mais Odon ramena les citoyens à la charge. Encouragés par leur évêque, Gozlin, les Parisiens repousserent les ennemis ; ce prélat, après avoir donné sa bénédiction, se tenait sur la brèche, le casque en tête, un carquois sur le dos, une hache à la ceinture, et, plantant la croix sur le rempart, il combattait vaillamment. Les Northmans tinrent Paris assiégé pendant un an et demi. Les habitants éprouvèrent toutes les horreurs de la famine et de la contagion, mais ne furent pas ébranlés ; ils eurent à soutenir huit assauts furieux, et remportèrent toujours la victoire. Cependant Charles le Gros arriva enfin à leur secours; il parut sur les hauteurs de Montmartre (mons Marlis), mais il n'osa pas combattre l'ennemi, et ne vint que pour acheter une trêve ignominieuse. Les Northmans levèrent le siége moyennant sept cents livres d'argent; et comme on ne pouvait les leur payer de suite, pour les dédommager de ce délai on leur permit d'aller passer l'hiver en Bourgogne, c'est-à-dire de la piller. Les Parisiens, indignés, s'opposèrent à ce que les Northmans passassent devant leur ville, et ils furent forcés de trans.

porter leurs bateaux par terre jusqu'à une ou deux lieues au-dessus de Paris, et là ils s'embarquèrent pour aller ravager, du consentement du roi, la plus belle province du royaume. Gozlin ne survécut pas longtemps au traité de Paris: il mourut de ses fatigues et de ses blessures, laissant une mémoire chère à tous les Parisiens: « car il s'arma des mains que la religion réservait au ministère de l'autel i les arma pour cet autel même et pour ses concitoyens, pour la cause la plus juste et pour la défense la plus nécessaire (*). » Charles retourna en Austrasie chargé de la haine des Français. Déposé à Tribur, en 887, il mourut quelque temps après. Alors Eudes monta sur le trône de Neustrie, et trouva la récompense due à son courage héroïque.

Vingt-deux ans après les événements qu'on vient de raconter, la France était régie par le lâche Charles IV. Les seigneurs étaient devenus si puissants et si redoutables, que le roi, pour ainsi dire, ne faisait que ce qu'ils voulaient bien. C'est dans cet état de faiblesse que la France fut attaquée par un chef northman, nommé Rolion, le plus redoutable adversaire qu'elle avait eu à combattre depuis Witiking (**). Chassé de Danemark, il rassembla sous ses drapeaux tous les hommes qui voulurent s'attacher à sa fortune. Il aborda d'abord aux Hébrides, puis il se remit en mer, et vint aborder sur les côtes de la France, qu'il mit à feu et à sang. Il s'empara de Rouen dont il fit relever les murailles, et cette ville devint pour lui une place d'armes d'où il se jetait tantôt sur l'Angleterre, tantôt dans l'intérieur de la France. Nantes, Angers, le Mans, Clermont, furent pris et livrés au pillage. La ville de Chartres fut sauvée comme par miracle. L'échec éprouvé par Rollon devant cette ville le transporta de fureur: la contrée d'alentour

(*) Voltaire, Essai sur les mœurs et l'esprit des nations, chap. xxv.

(*) Voyez pour toute cette partie de l'histoire des invasions des Northmans M. Augustin Thierry, Histoire de la conquête de l'Angleterre, t. 1.

fut pillée et ravagée, et les habitants députèrent au roi pour le prier d'acheter la paix à quelque prix que ce fût. Charles IV, à cette époque, était tellement effrayé de la puissance des seigneurs, qu'il résolut de se faire un appui du conquérant northman. Il lui proposa sa fille et des provinces. L'archevêque de Rouen fut choisi pour cette négociation. Ce prélat persuada à Rollon qu'il lui serait avantageux de se fixer sur une terre que le roi lui donnerait; il lui fit sentir l'honneur qu'il y aurait pour lui à être le gendre du roi. Rollon accepta, mais à la condition qu'on lui donnerait la Normandie et la Bourgogne. Il fallut céder: ces pays, d'ailleurs, ne relevaient de la couronne que par un vain hommage. Ce fameux traité fut signé à Saint-Clair-sur-Epte, en 912. Rollon s'y rendit pour saluer le roi de France, et lui prêter le serment de fidélité. Cette entrevue donna lieu à un incident qui faillit rallumer la guerre: Rollon ne voulut pas se conformer lui-même à l'usage établi par la féodalité, qui était de baiser le pied du roi; mais il consentit à ce qu'un de ses officiers rendit pour lui ce devoir. Cet officier, soit par maladresse, soit par méchanceté, leva le pied du roi si haut, qu'il le fit tomber à larenverse; et Charles IV, qui n'était pas le plus fort, dut tourner la chose en plaisanterie. Rollon se fit instruire dans la religion chrétienne; il fut baptisé à Rouen, et cette cérémo nie fut suivie de celle de son mariage avec Gisèle, fille du roi de France.

Rollon gouverna avec autant d'équité que de justice; il abolit le vol, et pendant les vingt années de son règne toutes les traces des ravages commis par les Northmans furent effacées. Telle était la sûreté publique sous son gouvernement, que des bracelets d'or pendus à un arbre y restèrent pendant trois ans sans que personne pensât à y toucher. Rollon fit oublier aux Northmans la farouche religion d'Odin, et leur fit embrasser le christianisme; il s'efforça de les rendre sédentaires et de leur faire perdre cet amour effréné du pillage, du vol, et des expéditions ma

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