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d'hui aux administrations financières, avait établi en faveur de ses employés un système de retraites dont les fonds étaient faits: 1o par une retenue de 3 p.% sur les traitements; 2o par une subvention additionnelle d'une somme égale payée par la compagnie elle-même; 3° par le produit des vacances. Ces pensions furent maintenues, comme dette du pays, par une loi de juillet 1791.

Ce fut un décret du 4 brumaire an IV, qui, dans le nouvel ordre de choses, créa la première tontine en faveur des régisseurs et des employés de l'enregistrement. Il ne s'agit d'abord que des fonctionnaires; la retenue était de 1 p., sur les remises qu'ils percevaient. Un arrêté du 30 ventôse an IV fixa les bases de la liquidation de leurs pensions. La retenue fut portée à 2 p.% par le décret du 13 ventôse an VIII, puis à 21⁄2 p.% par le décret du 15 floréal an XIII, afin d'assurer également une pension à leurs veuves et à leurs orphelins.

La loi du 2 floréal an V introduisit le système des retenues pour les pensions des régisseurs et des préposés des douanes; on y accordait des pensions aux veuves et aux enfants de ceux qui perdraient la vie ou succomberaient aux blessures reçues dans l'exercice de leurs fonctions.

Un décret du 7 fructidor an XII, relatif à l'organisation du corps des ingénieurs des ponts et chaussées, créa (articles 33 à 46) un fonds de retenues pour le service de leurs pensions et de celles de leurs veuves et de leurs orphelins. La pension des veuves fut fixée au tiers de celle dont le mari jouissait, ou à laquelle il aurait eu droit.

Le décret du 7 mars 1808 régla, en un petit nombre d'articles, tout ce qui concernait la pension de retraite des employés des prisons, ou celle de leurs veuves et de leurs orphelins. La pension des veuves était de moitié de celle des maris.

Si l'Empire avait continué, ce système de pensions serait devenu bientôt la règle générale. Un avis du Conseil d'État, du 5 mars 1811, approuvé par le chef du Gouvernement, avait arrêté en principe la création d'un fonds de retenues de deux centimes par franc, sur les traitements de toutes les personnes qui en recevaient de l'État, à raison d'une fonction ecclésiastique, civile ou maritime.

La loi du 15 germinal an XI, le décret du 13 septembre 1806, avaient fixé les bases de la liquidation des pensions civiles et le maximum des pensions, qui était de 6,000 francs. Mais ces règles ne s'appliquaient point aux tontines, qui étaient régies par les lois et les décrets qui les avaient instituées. D'autre part, la loi du 11 septembre 1807 avait fixé une somme de 20,000 francs comme maximum des pensions des ministres et de quelques autres dignitaires.

En France, sous la Restauration, plusieurs ordonnances, entre autres celle du 30 septembre 1814 en faveur de la magistrature, avaient continué à créer des

tontines, de manière à laisser subsister un double système de pensions celui des rémunérations civiles, fondé sur la loi du 22 août 1790 et le décret du 13 septembre 1806, et celui des tontines administratives. Le Gouvernement de LouisPhilippe présenta successivement cinq projets de loi à la Législature, pour régler cette matière d'après un mode uniforme; tous ces projets proposaient la suppression des tontines existantes, et mettaient à la charge de l'État les pensions qu'elles étaient tenues de servir; les retenues avaient été portées jusqu'à 5 p., des traitements, et nonobstant, le fonds des retenues était partout insuffisant pour satisfaire au service des pensions. Les pensions inscrites à la charge des caisses de retraite s'élevaient à plus de dix-sept millions de francs, et le trésor public suppléait annuellement au déficit de ces caisses par une somme qui excédait dix millions. Nous verrons plus loin le système qui a été consacré en France, sous le second Empire, par la loi du 9 juin 1853.

S3. Tontines créées

par

le Gouvernement des Pays-Bas et par le Gouvernement belge.

L'arrêté-loi du 14 septembre 1814, en réglant dans notre pays le système des pensions civiles, n'avait rien fait en faveur des veuves et des orphelins.

Un arrêté royal du 12 mars 1815 créa une première caisse de pensions pour les employés des douanes, ainsi que pour leurs veuves et leurs orphelins. La pension des veuves était des trois quarts de la pension du mari ou de celle à laquelle il aurait eu droit en cas de liquidation de sa pension, lorsque le mariage avait duré plus de cinq ans. Elle était de moitié, si le mariage avait duré au moins une année et moins de cinq.

Des arrêtés royaux du 16 avril et du 21 août 1816 réglèrent ce qui concerne les pensions des pasteurs protestants et celles du clergé catholique.

Un arrêté royal du 25 juillet de la même année, organique du corps des ingénieurs du waterstaat et des travaux publics, créa (articles 42 à 47) un fonds de pensions en faveur des veuves et des orphelins de ces fonctionnaires, au moyen d'une retenue sur leurs traitements. Ce fonds ne devait pas être alimenté par les finances de l'État.

Un arrêté royal du 25 septembre 1816 régla l'organisation des universités de l'État. Les articles 83 à 88 concernaient les pensions. Le dernier de ces articles établissait que la dépense résultant du service des pensions des veuves serait supportée, autant que possible, par un fonds de retenues, qui n'a jamais été organisé. Un arrêté royal du 19 octobre 1819 supprima la caisse de retraite pour les

employés des douanes, créée par l'arrêté du 12 mars 1815, et en fonda une nouvelle pour les employés des droits d'entrée et de sortie, ainsi que pour leurs veuves et leurs orphelins. La durée de cette caisse ne fut pas longue. Un arrêté royal du 29 mai 1822, après l'avoir réorganisée, y rattacha la plupart des fonctionnaires et employés des différentes branches de l'administration des finances, en conservant le double système des pensions de retraite et des pensions des veuves et des orphelins.

Ce fut un arrêté du Régent du 18 mars 1831, qui y fit ressortir plus tard les fonctionnaires et employés de l'administration centrale des finances.

Les retenues sur les traitements, qui ne s'élevaient primitivement qu'à 2 p.%, furent portées à 3 p.% par un arrêté royal du 15 novembre 1852, et ensuite à 5 p. % par un arrêté du 11 novembre 1833. La subvention du trésor public, fixée à 30,000 florins annuellement par l'art. 34 du règlement du 29 mai 1822, dut être augmentée plus tard par suite de l'accroissement des charges provenant surtout des changements occasionnés par la révolution de 1850.

Dans le système du règlement de 1822, la veuve dont le mariage avait duré plus de huit ans recevait une pension fixée aux trois quarts de celle dont le mari avait joui ou à laquelle il aurait eu droit.

Si le mariage avait duré plus de trois ans et moins de huit, la pension n'était que de moitié de celle du défunt.

Nous nous bornons à noter pour mémoire la caisse des veuves et orphelins des officiers de l'armée, instituée par l'arrêté royal du 14 janvier 1815, et réorganisée par l'arrêté du Régent du 10 mars 1831.

Sous le Gouvernement belge, un arrêté royal du 1er septembre 1858 a institué une caisse de pensions et de secours en faveur du personnel des chemins de fer de l'État et de l'administration centrale du Département des travaux publics. Cette caisse accordait aussi des pensions aux veuves et aux orphelins. Elle a été supprimée, pour ce qui concerne les pensions des fonctionnaires et celles des veuves et des orphelins, par la loi du 21 juillet 1844; la caisse de retraite et de secours, limitée aux ouvriers des chemins de fer de l'État, a été réorganisée par des arrêtés royaux du 24 juin 1845 et du 50 octobre 1851.

Des arrêtés royaux du 30 juin 1839 et du 10 décembre 1844, ont réglé l'organisation de la caisse de pensions et de secours des pilotes, dont le principe remonte à l'art. 42 du décret impérial du 12 décembre 1806, concernant le service du pilotage.

Un arrêté royal du 9 septembre 1841 avait réorganisé la caisse des veuves et orphelins du corps des ponts et chaussées, et un autre arrêté, du 22 octobre de la même année, avait établi une caisse analogue pour le corps des ingénieurs des

mines. Mais ces deux caisses ont été supprimées et réunies à la caisse des veuves et orphelins du Département des travaux publics, créée en exécution de la loi du 21 juillet 1844.

Nous devons encore mentionner: un arrêté royal du 19 septembre 1845, instituant à Anvers une caisse de secours et de prévoyance en faveur des marins naviguant sous le pavillon belge; des arrêtés en date du 31 décembre 1842, du 10 et du 27 février 1843, et du 10 décembre 1852, érigeant des caisses de prévoyance en faveur des instituteurs primaires des communes rurales; et, enfin, les arrêtés royaux du 22 juin 1848 et du 18 décembre 1855, fondant une caisse centrale de prévoyance en faveur des instituteurs et des professeurs urbains.

Dans le vaste champ des institutions de prévoyance, il nous resterait à indiquer un grand nombre d'actes du Gouvernement, qui témoignent de l'intérêt qu'il porte à l'amélioration du sort des travailleurs; nous pourrions citer la Caisse générale de retraite, la loi sur les Sociétés de secours mutuels, etc. Nous préférons renvoyer à l'Aperçu des institutions de prévoyance de la Belgique, que nous avons présenté au Congrès international de bienfaisance réuni à Bruxelles en septembre 1856. (Voir tome Ier, p. 165, du compte rendu en deux volumes, publié par l'éditeur Lesigne.) On y trouvera des détails sur une foule d'institutions, qui démontrent l'esprit de prévoyance des ouvriers, que secondent et favorisent la générosité des patrons et la sage sollicitude du Gouvernement.

Avant d'aborder l'examen du système que la loi du 21 juillet 1844 a inauguré en Belgique, pour les pensions des veuves et des orphelins des fonctionnaires et employés, nous pensons qu'il ne sera pas sans utilité de passer rapidement en revue les systèmes adoptés pour ces pensions en France et en Prusse. On trouvera ainsi dans ce Mémoire, s'il doit contribuer un jour à une révision de la loi du 21 juillet 1844 et des statuts des caisses des veuves et orphelins qu'elle a fondées, tous les éléments nécessaires pour apprécier le caractère et les avantages de notre législation sur les pensions.

CHAPITRE II.

SYSTÈMES ADOPTÉS POUR LES PENSIONS EN FRANCE ET EN PRUSSE.

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La loi qui régit actuellement, en France, la matière des pensions civiles porte la date du 9 juin 1853. Elle a été suivie d'un règlement d'administration publique, en date du 9 novembre de la même année.

Cette loi est applicable à tous les agents de l'ordre civil, au nombre de 157,000, non compris le clergé1. Il y a, en outre, une exception en ce qui concerne les fonctionnaires de l'ordre politique, désignés dans l'art. 32 de la loi, tels que : les ministres secrétaires d'État, les sous-secrétaires d'État, les membres du Conseil d'État, les préfets et les sous-préfets. Ces différents fonctionnaires, affranchis de la retenue, sont placés sous le régime du décret du 13 septembre 1806, qui ne leur accorde qu'un taux de rémunération inférieur à celui de 1853 : un sixième du traitement après trente ans d'exercice, avec bonification d'un trentième des cinq sixièmes restants pour chaque année de service en sus de trente. Leurs veuves et leurs orphelins n'ont, par conséquent, aucun droit à une pension.

D'après la loi du 9 juin 1853, les fonctionnaires et employés directement rétribués par l'État, à l'exception de ceux que nous venons de désigner, ont droit à la pension conformément aux dispositions de cette loi, et supportent indistinctement, sans pouvoir les répéter dans aucun cas, les retenues ci-après (art. 3):

1o Une retenue de 5 p. % sur les sommes payées à titre de traitement fixe ou éventuel, de préciput, de supplément de traitement, de remises proportionnelles, de salaires, ou constituant, à tout autre titre, un émolument personnel;

2o Une retenue du douzième des mêmes rétributions lors de la première nomi

Le clergé possède en France une caisse spéciale de retraite, régie par un décret du 28 juin 1855.

Le nombre des membres du clergé catholique, dans ce pays, s'élevait en 1856 à 51,717. Les membres du clergé ne sont point soumis à des retenues. La caisse fondée dans leur intérêt est alimentée :

1° Par une subvention prélevée annuellement sur le budget des cultes;

2o Par la subvention de cinq millions accordée par le décret du 22 janvier 1852;

3° Par le produit des dons et legs que cette caisse est autorisée à accepter,

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