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» sairement, ou que les revenus annuels s'élèvent à 140,000 francs, ou que l'on >> ait pu accumuler un fonds de réserve dont la rente de 20 ou 30,000 francs >> serve à combler le déficit des recettes annuelles.

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» On peut donc prévoir que, dans un certain nombre d'années, les retenues. >> actuelles, quel que soit le taux que l'on adopte, seront haussées; et que, plus tard, lorsque les charges devenues fixes dépasseront d'une manière permanente » les revenus, l'on ne pourra alors combler cette différence que par l'intérêt du » fonds qu'une sage prévoyance aura accumulé. Les caisses ne seront vraisem>> blablement jamais bien riches, malgré l'apparence de prospérité que présente>>ront les résultats des premières années. Nous avons sous les yeux l'exemple des >> tontines administratives que l'on a essayées en France et dans divers autres » pays. On semble, en France, en Angleterre, dans les différents États d'Alle» magne, avoir en quelque sorte désespéré du succès de ces caisses, lorsque l'on a » ordonné le versement pur et simple des retenues dans le trésor public, chargé, >> nonobstant toutes les éventualités, de satisfaire aux obligations résultant des >> règlements. On n'a nulle part encore érigé une véritable caisse de veuves et >> orphelins se suffisant à elle-même; ou, si on l'a essayé, les résultats trompeurs » des premières années ont presque toujours produit une sécurité fatale; et un >> long espace de temps ne s'écoulait pas sans que le trésor dût venir au secours » de l'institution. Or, c'est un recours que l'art. 30 de la loi générale nous in>> terdit. >>>

2o Département des finances. — La commission du Département des finances avait à sa disposition des documents à peu près complets: les comptes de l'ancienne caisse de retraite.

Elle estime qu'année moyenne la caisse recevra 77 pensions de veuves à sa charge; seulement elle en présume la durée plus courte que cela ne s'est réalisé. Elle se livre à différents calculs, en prenant, pour moyenne des pensions, 416, 460 et 500 francs. « L'examen de ces tableaux démontre comment les charges des >> caisses des veuves et orphelins, commençant par de faibles sommes, s'accrois>> sent successivement avec rapidité : l'ancienne caisse de retraite du Ministère >> des finances, en la réduisant au tableau des pensions des veuves et des orphelins, montre qu'après vingt-deux années d'existence, elle n'avait pas encore » révélé le chiffre définitif et permanent des charges à venir. » (Extrait du rapport de la commission générale.)

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3o Ordre judiciaire. — La commission spéciale nommée près du Département de la justice, pour l'examen de statuts de la caisse de l'Ordre judiciaire, admit les bases du travail de la commission générale.

« La commission, » porte le 1er paragraphe de son rapport, « a été frappée

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>> du principe mixte qui caractérise les caisses des veuves et orphelins. Radicale>> ment différentes des pensions de retraite, qui sont une rémunération complé>> mentaire de la part de l'État, les pensions des veuves et des orphelins sont acquises par le magistrat ou le fonctionnaire au moyen de ses contributions. Cependant ces pensions ne sont pas le fruit d'une pure opération aléatoire de tontine; une idée sociale et de solidarité a présidé à l'institution des caisses qui doivent les fournir, et c'est à ce titre que le législateur s'en est occupé. Quoiqu'il n'y ait pas à notre époque de tribu ni de classe où l'ordre des fonction>> naires se recrute; quoiqu'il n'y ait pas en Belgique d'ordre proprement dit des fonctionnaires, attendu que les fonctions publiques sont accessibles à tous, la

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» société et le Gouvernement ont intérêt à ce que les agents de l'autorité publique soient affermis dans le dévouement à leurs devoirs, par l'idée que leurs veuves et leurs orphelins seront, après eux, à l'abri du besoin. La société, le >> Gouvernement et les fonctionnaires de l'Ordre judiciaire en particulier ont, » de plus, intérêt à ce que les veuves et les orphelins des magistrats soient main» tenus dans une position convenable et décente, qui augmente encore ou au >> moins n'entame pas la considération dont doivent jouir les agents des pouvoirs publics, et spécialement les dépositaires d'un des plus beaux attributs de la >> souveraineté.

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» La caisse des veuves et orphelins est donc à la fois une institution d'intérêt >> gouvernemental et d'intérêt privé; et à ce double titre elle doit répondre aux >> besoins du présent et de l'avenir. »

La commission, se référant à des tableaux rétrospectifs dressés au Département de la justice pour les dix dernières années, estime qu'il y aura approximativement, par année, neuf pensions de veuves et une d'orphelins; ensemble dix pensions. Elle cherche à en apprécier le montant, et évalue la durée moyenne d'une pension de veuve à quinze années; mais elle se trompe dans l'estimation des extinctions, qui ne sont point aussi rapides qu'elle se l'imagine.

La commission générale, après avoir discuté ces appréciations, ne les admet qu'en partie. Elle insiste pour le maintien de toutes les ressources qu'elle a proposé de créer en faveur de la caisse. Elle termine par cette considération qu'en contribuant de leurs deniers à l'alimenter, les membres de l'Ordre judiciaire ne doivent pas oublier qu'ils pourvoient à la concession de pensions pour les veuves de leurs collègues, de leurs amis, dans beaucoup de cas pour leurs propres veuves et leurs propres enfants.

La commission générale, abordant les détails de la discussion des projets, modifiant son œuvre et précisant ses propositions, adopta définitivement des formules

TOME VIII.

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pour les statuts de sept caisses, savoir:

La caisse du Département de la justice;

des affaires étrangères;

de l'intérieur;

des finances;

des travaux publics;

de l'Ordre judiciaire;

des professeurs de l'Enseignement supérieur.

Les statuts de ces caisses ont été approuvés par des arrêtés royaux en date du 29 décembre 1844. (Moniteur belge du 31 décembre.)

Beaucoup plus tard, un arrêté royal du 29 décembre 1852 (Moniteur du 31 décembre) a sanctionné les statuts d'une nouvelle caisse, celle des professeurs de l'Enseignement moyen, fondée aussi sur les bases indiquées dans la loi du 21 juillet 1844. Cette caisse qui, pour la période que nous nous proposons d'examiner (1845 à 1854), ne présente que des résultats trop incomplets pour fixer notre attention, ne fera pas partie du présent travail. Nous nous bornerons à publier ci-après le sommaire de ses opérations, à partir du 1er octobre 1851 jusqu'en 1853, les seuls documents que nous possédions jusqu'ici 1.

Il est temps d'aborder l'examen des dispositions principales des statuts. Nous ne ferons connaître ici que les dispositions communes aux différentes caisses, en indiquant quelques-unes des modifications que des circonstances particulières ont dù quelquefois faire introduire.

§ 3. Analyse sommaire des principales dispositions des statuts.

Le point de départ adopté, la création d'un fonds commun pour l'entretien et le soulagement des veuves et des orphelins, la justice distributive exigeait l'adoption de certaines règles, consacrant une répartition équitable des charges et attribuant une part relativement plus forte aux fonctionnaires mariés, c'est-à-dire à ceux dont les femmes et les enfants étaient appelés éventuellement à profiter des bienfaits de l'institution.

D'abord faisait-on bien d'instituer plusieurs caisses? N'eût-on pas mieux fait d'imiter soit le système français, soit le système prussien, qui tous deux supposent des retenues sur les traitements et des subventions de l'État pour combler

les déficit ?

1 Voir plus loin, en note, à la première partie, chapitre III: CAISSE DU DÉPARTEMENT DE L'INTÉRIEUR.

En France, nous avons vu que les pensions des veuves ne sont que la continuation du système des rémunérations civiles adopté pour les fonctionnaires. Le système qui a prévalu est celui de la réversion de la pension, pour un tiers, en faveur de la veuve ou des orphelins; mais cela suppose que le fonctionnaire était pensionné ou remplissait les conditions d'âge et de durée des services qui le rendaient admissible à la pension. Peu importe, dans ce système, la durée des contributions du mari ; il ne peut transmettre à sa femme ou à ses enfants, jusqu'à concurrence d'un tiers, que les droits qu'il a lui-même à la pension.

Comparativement au nombre total, peu de veuves sont donc pensionnées. Nous ajouterons à peine, comme réflexion secondaire, qu'il y a inégalité relative, pour les conditions de la vie, entre le tiers d'une grosse pension et celui d'une pension modique.

Les précédents, l'admission des veuves et des orphelins à la pension, après peu d'années de contribution du défunt, dans l'ancienne caisse de retraite du Ministère des finances, dans celles des ponts et chaussées, des ingénieurs des mines, de l'administration centrale du Département des travaux publics, etc., ne permettaient point l'adoption d'un système qui eût réduit le nombre des veuves admissibles à la pension.

Le système de caisses, instituées uniquement en faveur des veuves et des orphelins, paraissait donc préférable. On voulait l'établissement d'une tontine où les veuves et les orphelins, après un petit nombre d'années de contribution du défunt et moyennant les précautions nécessaires pour prévenir les fraudes, trouvassent des ressources proportionnées à leur situation et de nature à les mettre à l'abri du besoin. Il restait à choisir entre une caisse d'assurance instituée au profit des veuves et des orphelins, et alimentée exclusivement par les fonctionnaires et employés mariés, et le système de caisses de pensions établies par communautés de fonctionnaires, et où tous contribueraient pour le soutien des veuves et des orphelins délaissés par des membres de la communauté.

Ce dernier système était celui qui avait prévalu dans les premières tontines administratives créées en France et dans notre pays; plusieurs de ces tontines existaient encore. Ce système, peu onéreux, vu la grande masse des contribuants, le va-et-vient de fonctionnaires et employés qui n'achèvent point leur carrière dans les administrations, les ressources accessoires qu'il est facile de se procurer, semblait convenir à tout le monde. On n'avait point l'expérience de caisses d'assurances en cas de mort du mari au profit de sa femme et de ses enfants. Pour alimenter exclusivement ces caisses avec les versements des fonctionnaires et employés mariés, il eût fallu faire des tarifs compliqués et pour lesquels les éléments manquaient, car il s'agit là d'assurances sur deux têtes. Restreints aux fonction

naires intéressés, les versements auraient dû être relativement beaucoup plus élevés. On résolut de s'en tenir au système le mieux connu.

Mais la condition fondamentale de ce système, c'est la constitution de plusieurs caisses, la condamnation du système d'une caisse unique.

En principe, on ne peut demander à une vaste catégorie de fonctionnaires de s'associer, et de créer un fonds commun au profit des veuves et des orphelins, que s'il existe une sorte de lien entre eux. Une véritable communauté devrait même se réduire à un petit nombre de participants; mais, en bornant la communauté à un objet déterminé et en n'exigeant que peu de sacrifices, on peut étendre le cercle de l'association, de manière à se contenter d'un faible lien, comme celui qui réunit les agents d'un même Département ministériel. Il suffit que les convenances de chaque catégorie de fonctionnaires soient observées.

Il y a un autre motif qui exige la constitution de caisses séparées. S'il n'y en avait qu'une seule, elle appartiendrait à tout le monde, c'est-à-dire qu'en réalité personne n'aurait à en répondre. Chacun voudrait, tout en en profitant, réduire outre mesure ses retenues. De ce mouvement, qui serait général, universel, résulterait inévitablement un ordre de choses qui, après un certain nombre d'années, exigerait l'intervention pécuniaire de l'État. Or, les plaintes qu'avait occasionnées la déconfiture de l'ancienne caisse du Ministère des finances, ne prédisposaient personne à demander l'admission du principe de l'intervention de l'État dans l'alimentation des caisses des veuves. L'article 30 de la loi du 21 juillet 1844 avait même établi, comme règle fondamentale, qu'en aucun cas elles ne pourraient être subsidiées par le trésor public.

Toutefois, il y avait un autre écueil à éviter : c'était, en créant des associations trop restreintes, de donner le jour à des institutions qui ne posséderaient pas par elles-mêmes les conditions nécessaires d'existence; qui, réduites à des ressources trop modiques, pourraient être renversées par un surcroît fortuit de charges.

Il eût mieux valu se tenir à un nombre moindre de caisses. Quatre peut-être auraient suffi: une pour le Ministère des finances; une pour le Ministère de l'intérieur, auquel on aurait pu rattacher le Département des affaires étrangères; une pour le Ministère des travaux publics; enfin, une pour le Département de la justice, qui aurait compris l'Ordre judiciaire, la Cour des comptes, etc.

Mais des considérations particulières, de pressantes instances firent déroger au principe de s'en tenir à de grandes associations; à notre avis on alla trop loin dans la fondation des caisses; aussi lorsqu'il s'agit d'en créer une huitième, celle des professeurs de l'Enseignement moyen, nous y avons décliné toute participation.

Il y a une raison de plus, que nous devons faire connaître, qui exigeait la séparation des fonctionnaires en plusieurs caisses; c'était la liquidation des caisses anté

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