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lors de l'admission à la pension (ce qui eût entraîné à des calculs excessivement longs), nous avons essayé de ramener à des moyennes les âges des veuves, en ne les séparant qu'en deux grandes catégories: veuves sans enfants et veuves avec enfants mineurs. Ce mode a déjà été employé plus d'une fois pour les besoins de l'administration; nous ne pensons pas qu'il présente de notables différences avec les calculs faits pour chaque pension séparément; on peut s'en assurer en appliquant les calculs de vie moyenne à plusieurs personnes dont on réunit les âges.

Ce calcul de moyennes offrirait, toutefois, nous le reconnaissons, de fortes divergences, si on l'appliquait à l'évaluation de durée de pensions trop dissemblables. La division que nous avons adoptée des pensions en deux catégories, remédie déjà en partie à cet inconvénient, puisqu'en général les pensions les plus élevées (si on fait abstraction des parts attribuées aux enfants) sont celles des veuves sans enfants. Et puis, dans le cours des choses, on peut raisonnablement admettre des compensations, et présumer que tantôt les pensions les plus fortes, tantôt les moins fortes auront eu le plus de durée.

Qu'on veuille bien ne pas oublier que, dans notre pensée, il ne s'agit que d'approximations, n'ayant d'autre but que de servir de fanal à l'administration, pour l'éclairer sur le véritable état des caisses confiées à sa surveillance.

Nous savons que, dans les compagnies d'assurance sur la vie, en faisant le bilan annuel, on prend la précaution de soumettre périodiquement à une nouvelle évaluation tous les cas de rentes viagères, de manière à obtenir à la fin de chaque année une situation exacte. Ce travail absorbe plusieurs employés et demande beaucoup de temps; il dépasserait la limite de nos forces.

Pour le but que nous poursuivons, après un examen attentif, nous croyons notre méthode suffisamment sûre; et elle n'exclut pas les études plus approfondies que l'administration croirait devoir ordonner, à une époque quelconque, sur la situation exacte des caisses.

Envisageant la question uniquement sous un rapport pratique, nous avons cherché, sans remonter à l'origine des formules, à faire un choix parmi le grand nombre de tarifs adoptés par les compagnies d'assurance sur la vie, dont les opérations ont pris tant d'extension depuis quelques années.

Nous avons considéré les pensions des veuves, au moment de leur liquidation. comme des rentes viagères immédiates, pour lesquelles il était nécessaire de constituer un capital qui en représentât la valeur.

Qu'une année moyenne (de la période 1845 à 1854) offre, par exemple, douze pensions de veuves avec enfants, et dix pensions de veuves sans enfants : si les veuves de la première catégorie ont en moyenne 45 ans et les autres 55, nous trouverons dans les tables des compagnies, le coefficient qui sert à calculer le

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capital représentant la valeur de ces rentes. En regard des chiffres indiquant les annuités, nous inscrirons le montant du capital qui en forme l'équivalent ‘.

Nous rappellerons ensuite le principe que nous avons posé et expliqué ci-dessus (p. 178), à savoir que chaque année doit fournir en recettes un capital qui, augmenté des intérêts composés, suffise à acquitter jusqu'à extinction toutes les rentes viagères ou temporaires créées durant cet exercice. Chaque année doit pourvoir, par son actif, aux charges qu'elle fait inscrire au passif : si les fonctionnaires de l'année 1854, par exemple, demandent à une caisse la liquidation de pensions qui, prises dans leur ensemble, absorberont en total une somme de cent mille francs avant d'être éteintes, qui devra fournir les capitaux pour ces pensions si ce ne sont les fonctionnaires mêmes de 1854? Au lieu de s'adresser à la caisse à laquelle ils sont affiliés, qu'ils aillent trouver une compagnie d'assurance; qu'ils s'informent des conditions et du prix moyennant lesquels la compagnie se chargerait du service des pensions dont ils demandent la liquidation. La caisse des veuves ne peut agir ici, sauf le bon marché qu'elle offre, que comme agirait toute autre compagnie d'assurance.

Au reste, nous avons répondu, ainsi que nous venons de le dire, aux principales objections des partisans outrés de la réduction des retenues.

Il y a, de plus, une considération à faire valoir. Les statuts ont fixé, pour la liquidation des pensions des veuves, une double base : l'une qui est fixe, le taux normal de 15 ou de 16 p. % (dans le système des statuts primitifs) des traitements moyens dont les défunts ont joui pendant les cinq dernières années; l'autre croissante, et qui fait admettre un p. % de plus de ces mêmes traitements, pour chaque année de contribution au delà des dix premières années.

Nous avons vu, par des exemples tirés de la caisse du Département des finances, qu'après un intervalle d'environ trente ou trente-cinq années, à partir de l'institution des caisses, les pensions y seront liquidées, en moyenne, à plus du double du taux des pensions normales. Depuis l'année 1855, les caisses constituées en 1844 sans arriéré du passé, sont entrées dans la voie d'accroissement des pensions à raison des années de contribution du défunt. C'est pour épargner plus tard une surcharge réelle aux fonctionnaires, que le Gouvernement a eu soin d'élever, dans la plupart des caisses, les retenues à un taux qui leur a permis de préparer une réserve pour l'avenir.

1 Dans ce système, on voit pourquoi nous avons eu soin de ranger à part, lors de l'examen des recettes des caisses, les intérêts provenant de placements antérieurs, en nous occupant surtout de leurs recettes en principal : détachées ainsi, les recettes d'une année moyenne doivent former le capital qu'une compagnie d'assurance réclamerait pour faire le service des rentes constituées pendant une durée égale de temps.

Nous considérons donc comme tout à fait anti-économique le système qui consiste à ne satisfaire qu'aux exigences du présent, sans s'inquiéter de la nécessité de maintenir un équilibre entre les charges totales qu'impose une année, et les recettes de cette année. Heureusement nous avons des moyens simples, lorsqu'on se borne à des calculs approximatifs, de résoudre la difficulté d'un budget en équilibre.

Les tarifs des compagnies d'assurance sur la vie étant dressés d'après les tables de mortalité pour les différents âges et la théorie des intérêts composés, nous croyons indispensable d'entrer à cet égard dans quelques considérations, afin de laisser entrevoir au moins quelques jalons du terrain que l'on doit parcourir.

Si nous avions à former un tarif, nous n'hésiterions pas à prendre pour base les nouvelles tables de mortalité dressées par M. Quetelet pour les années 1841 à 1845, en Belgique, et qui ont été insérées dans son Almanach séculaire, pag. 164.

C'est sur ces tables les plus récentes, qu'il y aurait lieu de faire le calcul de la vie humaine moyenne aux différents âges 2.

Cependant il est une remarque à faire : la longévité des femmes, plus grande que celle des hommes, surtout à partir du milieu de la vie jusqu'à la fin de l'existence, est un fait important dont on ne saurait faire abstraction quand il s'agit principalement de pensions de veuves. Il est une autre considération qui doit être pesée, c'est qu'en général les rentes viagères, dans les caisses, reposent sur des têtes choisies, sur lesquelles la mortalité exerce moins de ravages que ne l'indiquent les tables dressées d'après des observations s'appliquant à toutes les classes de la société.

1 Almanach séculaire de l'Observatoire royal de Bruxelles, par le directeur A. Quetelet. Bruxelles, 1854.

On peut consulter, aux tomes IV et V du Bulletin de la Commission centrale de statistique, les deux mémoires de l'honorable directeur et président de la Commission centrale, sur ces nouvelles tables de mortalité qu'il a calculées pour la Belgique.

2 Nous parlons ici de vie moyenne et non de vie probable.

La durée présumée d'une pension doit être calculée sur la vie moyenne: on se demande quel est, d'après les tables de mortalité, le nombre d'années et de mois que, communément, une personne d'un âge donné est encore appelée à vivre. Cette moyenne est déduite de nombres assez grands pour lui donner une valeur certaine d'approximation.

Nous n'entrerons pas dans l'examen du mode qui parvient à établir ces moyennes pour les différents àges.

On aurait de grands mécomptes en fondant des calculs sur la vie probable; car on entend uniquement, par ces mots, le nombre d'années et de mois après lequel un nombre donné de personnes est réduit à la moitié, d'après les règles ordinaires de mortalité.

Nous nous en serions tenu à ces considérations générales, si le savant rapport de M. l'ingénieur en chef Maus, dont nous avons parlé ci-dessus (Introduction, p. 39), ne nous avait pas fourni des tables de vie moyenne, dressées pour la Belgique, d'après les nouvelles tables de mortalité de M. Quetelet, avec les distinctions entre les deux sexes.

Un extrait de ces tables nous servira de guide et de point de comparaison dans le choix du tarif que nous adopterons 1.

Au siècle dernier, l'on calculait encore les rentes viagères à 5 p. % d'intérêt : aujourd'hui elles sont calculées généralement à raison de 4 1⁄2 p. %.

Quand nous avons délibéré sur le choix d'un tarif qui nous permît de résoudre d'une manière pratique le problème que nous nous étions posé, nous avons comparé entre eux les tarifs de différentes compagnies d'assurance sur la vie, en Belgique et à l'étranger, qui constituent des rentes viagères immédiates.

Nous nous bornerons à donner ci-après un spécimen de quelques-uns de ces tarifs que nous avons consultés.

On sait que, dans la Grande-Bretagne, des agents particuliers appelés actuaries sont chargés de dresser ou de reviser les tarifs à l'usage des compagnies d'assurance sur la vie et des sociétés de secours mutuels (friendly societies), qui demandent au Gouvernement l'approbation de leurs statuts. Dans le tableau que nous présentons ci-dessous, nous reproduisons les chiffres extraits des tables dressées par deux de ces agents d'un ordre supérieur M. Arthur Scratchley, examinateur de l'institution des actuaries à Londres, et M. John Tidd Pratt, registrar des sociétés de secours mutuels en Angleterre. La première colonne s'applique à des rentes viagères immédiates, délivrées sans distinction de sexe; la seconde concerne les rentes viagères accordées exclusivement à des personnes du sexe féminin. Nous avons fait les réductions de sommes nécessaires pour rendre ces chiffres comparables à ceux des tarifs suivants.

La 3e colonne a été remplie au vu du tarif no 6 de la société anonyme : la

1 Voir le mémoire intitulé: Rapport sur la proposition de réduire à 2 et à 1 1/2 p. 0% le taux actuel, 3 et 2 1/2 p. 0/0, des retenues sur les traitements et émoluments des fonctionnaires, inséré en tête du compte rendu des opérations de la caisse des veuves et orphelins du Département des travaux publics pendant l'année 1857. Pages 4 et 5.

2 Observations on Life Assurance Societies and Saving Banks, in two parts, with a mathematical appendix and tables, by Arthur Scratchley, M. A., formerly fellow and Sadlerian lecturer of Queens'-College, Cambridge, and examiner of the institute of actuaries of Great-Britain and Ireland. London, 1851.

Report of the Registrar of Friendly societies in England; ordered, by the House of Commons, to be printed, 21 july 1856.

Royale belge, compagnie d'assurances sur la vie, fondée à Bruxelles, et dont les statuts ont été approuvés par arrêtés royaux du 17 février 1853 et du 17 avril 1856. Nous avons choisi, dans les colonnes de ce tarif, les chiffres qui s'appliquent aux payements par semestre, en tenant compte du prorata des intérêts dus jusqu'au jour du décès; c'est la colonne qui se rapproche le plus des conditions des caisses des veuves, dans lesquelles les payements des pensions se font par trimestre. Ces tarifs, dressés d'après les tables françaises de mortalité de Deparcieux, et à l'intérêt de 4 1/2 p. %, s'appliquent également aux deux sexes. Nous y avons fait les transpositions nécessaires pour rendre ce tarif, comme les deux précédents, applicable à la constitution d'une rente viagère de cent francs.

La 4e colonne indique le coefficient proposé par M. l'ingénieur en chef Maus. dans l'excellent travail que nous venons de citer. Il suppose le payement de la rente par trimestre. Le tarif de M. Maus, applicable principalement aux femmes habitant les villes, désigne les coefficients pour les différents âges de la manière suivante (page 9): « De 39 ans 6 mois à 40 ans 5 mois, etc. » Nous avons rangé ces indications en regard des âges correspondants exprimés en nombres ronds '.

Enfin, la dernière colonne est empruntée aux tarifs de la Caisse générale des retraites pour la vieillesse, en France, créée par la loi du 15 juillet 1850, et modifiée par plusieurs lois et décrets successifs. Cette caisse est autorisée à délivrer des rentes viagères immédiates, à partir de l'âge de 50 ans. Les tables que l'on y a suivies sont celles de Deparcieux, et les intérêts composés y ont été calculés à raison de 5 p. %.

Tous ces tarifs indiquent le prix d'une rente viagère de cent francs, aux diffe rents âges, depuis l'âge de 40 ans jusqu'à celui de soixante.

L'extrait suivant des Tables de mortalité pour la Belgique, publiées par M. Quetelet ( Annuaire de l'Observatoire royal de Belgique, année 1850, pp. 186 et 187), fournit la preuve de la longévité plus grande des femmes. Voici, d'après ces tables, le nombre de survivants constaté, dans les villes et dans les campagnes, sur 10,000 naissances:

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