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suis persuadé que l'assemblée n'a nul besoin ni de mes lumieres ni de mes raisons, je donnerai très-librement mon suffrage pour ou contre les décrets, et rien absolument au-delà (murmures). Mais, messieurs, croyez qu'il a fallu desirer passionnément de remplir ses devoirs pour vous demander la parole, repoussé si souvent d'une maniere offensante. Croyez, messieurs, que ce sacrifice-là a été fait au caractere respectable dont nous sommes revêtus, aux obligations saintes qui nous étoient imposées : elles sont calomniées, j'en suis affranchi.

M. d'André: Je demande, M. le président, que la discussion soit renfermée dans les propositions qui vous sont faites. Si M. Pethion avoit dit que les troubles venoient de la résistance de la minorité de l'assemblée nationale contre la majorité, je me serois élevé moi-même le premier, pour demander qu'il fût rappellé à l'ordre consacré, et soumis à toutes les peines que peut infliger l'assemblée nationale, parce que je suis loin d'attribuer aucun désordre â la résistance de la minorité de l'assemblée nationale (applaudi), qui a le droit, et j'ose même dire le devoir, de s'opposer constamment à ce qu'elle croit mauvais. Non-seulement je regarde cela comme nn principe rigoureux, mais je le regarde comme le plus sacré de tous les principes, puisqu'il établit la liberté des délibérations; et nous serons tous ici à reclamer sans cesse pour la liberté des opinions (applaudi ). Ainsi donc si M. Pethion avoit dit ce qu'on suppose qu'il a dit, il auroit été unanimement rappellé à l'ordre. Mais voici cé que M. Pethion a dit et a voulu dire, je pense; c'est qu'il est possible que tous les désordres ou quelques désordres arrivent par la résistance de la minorité de la nation à la majorité de la nation ( murmures). Et certainement tout le monde est d'avis que, lorsque la volonté de la nation a été exprimée par une loi, la minorité de la nation doit s'y

soumettre.

D'après cela, j'en viens à la motion d'ordre ( murmures à droite, applaudissemens à gauche). M. Barnave a fait une motion qui ne peut pas souffrir de difficulté, parce que c'est un renvoi au comité, un renvoi déja opéré dont on demande le rapport, lorsque la loi sera faite. Alors nous debattrons la loi en liberté; la loi sera adoptée ou rejettée. Ainsi je demande que la motion de M. Barnave soit mise

aux voix.

L'assemblée adopte la motion de M. Barnave et celle de M. Martineau sur les émigrans.

M. de la Galissonniere: Voici quatre articles addition

nels au décret du 5 de ce mois, sur la décoration militaire. Je vous les présente au nom du comité de la marine, qui s'est concerté à ce sujet avec le comité colonial.

L'assemblée nationale décrete, pour être exécutés provisoirement jusqu'à l'organisation des régimens coloniaux, les articles additionnels suivans, pour faire suite aux deux premiers articles du décret du mois de février 1791, concernant la décoration militaire.

Art. III. Pour déterminer le tems nécessaire aux officiers des régimens coloniaux pour obtenir la décoration militaire chaque année de service dans la colonie sera comptée pour dix-huit mois.

IV. Dans le cas où la colonie seroit attaquée, et dans celui où les régimens seroient employés pendant la guerre dans une expédition hors la colonie, chaque année de service sera comptée pour deux.

Ces deux articles sont décrétés.

M. le rapporteur lit les deux articles suivans:

.V. Les officiers des milices des colonies qui auront, а l'époque de la publication du présent décret provisoire, les années de service ou de comunissions d'officier requises par l'ordonnance du premier janvier 1787, concernant les milices des colonies, ou qui auront par leur retraite acquis le tems de service prescrit sans avoir obtenu la décoration militaire, pourront en former la demande, et sont déclarés susceptibles de l'obtenir, sans néanmoins rien préjuger sur l'existence des milices coloniales.

L'assemblée nationale abrogeant la disposition de l'art. 43 de la susdite ordonnance qui limite le nombre des croix de Saint-Louis à accorder par année dans chaque colonie.

VI. Le tems pendant lequel ces officiers auront été employés dans les troupes de ligne ou dans les régimens coloniaux leur sera compté conformément à l'ordonnance de 1787 pour tous ces différens corps.

M. Barnave: Je demande que la différence qui existe entre les troupes de ligne et les milices soit effacée, et cela avec d'autant plus de raison, que les milices étant prêtes à être abolies, ceux de ces mêmes officiers qui n'auroient pas le tems nécessaire se trouveroient en très-grand nombre et n'obtiendroient jamais la croix.

M. le rapporteur: L'article 43 auquel je renvoie dit textuellement que chaque campagne de guerre sera comptée pour deux aux officiers des milices des colonies qui auront été à la guerre, ou lorsque les colonies auront été attaquées, M. Barnave: Ma proposition, qui avoit été admise par

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le comité, est que les années de service des officiers de milice, indépendamment de toutes incorporations dans les troupes de ligne, leur soient comptées pour deux ans, et qu'il soit ajouté à l'article 5 ces mots : en comptant les années de guerre pour

deux.

L'assemblée décrete les deux articles avec l'addition adoptée par M. le rapporteur.

M. Camus: Vons avez ordonné qn'il seroit distrait des assignats de 2000 livres, la quantité de 100 millions pour être fabriqués d'une autre maniere que par assignats de 2000 livres. De ces 100 millions, il y en a déjà 50 dont la coupure a été exécuté, suivent et comme vous l'avez ordonné en assignats de 50 et 100 livres; mais il reste encore 50 millions; il est donc question de savoir, messieurs, en quelle nature ces assignats seront fabriqués. Ce ne sera certainement pas en assignats de 2000 livres, dont l'incommodité se fait sentir journellement. Ce sera en assignats de moindre valeur, de 100 livres, par exemple, de 50 livres, ou même de sommes moindres S1 Vous le jugez à propos.

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D'après les observations qui furent faites hier, je propose de couper ainsi les 50 millions, de faire 30 millions d'assignats de 100 livres, et 20 millions d'assignats de 50 livres.

M. de Crillon le jeune: L'empressement avec lequel on recherche les assignats de 50 livres, est une preuve du bien que feroient des assignats de 25 livres. Je pense même que s'il eût été possible d'en avoir d'une valeur inférieure, il y auroit eu encore plus d'avantage; mais je cenviens que les raisons qu'on y oppose, sont trop spécieuses, si elles ne sont pas solides, pour que l'assemblée puisse se déterminer à décréter des assignats au-dessous de 25 livres. Cependant j'observe qu'on pourroit se procurer le même avantage sans aucun inoonvénient: vous avez décrété des assignats de 50, de 60, de 70 jusqu'à 100 livres. Cette coupe donne le moyen de payer 10 livres avec les assignats. Je propose que vous avez des as.ignats de 30 livres et des assignats de 25 livres : auec ces assignats, vous pourrez payer 5 livres, et vous n'aurez pas l'inconvénient d'avoir des assignats au-dessus de 25 livres. J'amende donc le projet de M. le Camus; et je propose que sur les 50 millions d'assignats qui restent à faire, on fabrique 25 millions d'assignats de 30 livres et 25 millions d'assignats de 25 livres.

M. d'André: Si vous admettiez des assignats de 25 liv. et au-dessous, vous feriez totalement disparoître le numéraire -du royaume, Je sais bien que le principal avantage du fabri

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quant, des gens qui employent beaucoup de monde, serois d'avoir de petits billets; je le sais, puisqu'ils sont obligés de faire chercher de l'argent pour payer leurs ouvriers et leurs travaux; mais il n'est pas douteux que vous feriez le malheur de la classe qui n'a pas 25 liv. à sa disposition. Je donne un exemple: je suppose un ouvrier qui gagné 25 liv. par semaine; le fabriquant lui donnera un assignat de 25 liv. Je vous demande comment cet ouvrier ira chercher du pain le dimanche ? Il faudra qu'il change et perde sur son assignat. Il est évident que par-là vous feriez un préjudice énorme à la classe des pauvres. D'un autre côté, messieurs, vous feriez totalement disparoître le numéraire. Je m'oppose donc à la proposition de M. de Crillon, et je demande qu'on s'en tienne à faire des billets de 50 liv., 60 liv., etc.

M. Reubell: C'est favoriser la classe des riches.

M. de Mirabeau: Je demande qu'une question trèssimple, très-essentielle soit mise à l'ordre du jour. Peuty avoir, contre les petits assignats un autre intérêt que celui des vendeurs de petits assignats?

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M. d'André: Et moi je demande que l'on mette cette question à l'ordre du jour : Y a-t-il d'autre intérêt en faveur des petits assignats que celui des fabricans contre la

nation.

M. de Landine: Je demande qu'on mette à l'ordre du jour si l'assemblée peut discuter de nouveau ce qu'elle a formellement jugé par un décret.

M. de Praslin: Voici le décret: il porte formellement qu'il ne sera point fabriqué d'assignats au-dessous de 50 liv. L'assemblée ferme la discussion, et accorde la priorité à l'avis du comité.

M. le Long: Je propose, par amendement à l'avis du comité, de décréter que la totalité des 50 millions sera faite en assignats de 50 liv; et je vous prie de considérer que si notre plus forte piece de monnoie a été de 48 liv. la différence de-là à 50 liv. n'est pas bien considérable.

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M. Thuault: Je demande à M. le rapporteur si parmi les assignats qu'on brûle, et qui vont l'ètre incessamment, il en existe un seul de 50 liv.

M. Camus: Oui, monsieur, il en existe; je n'en sais pas le nombre, mais comme le registre a été remis à la bourse, vous verrez qu'il y en a de 50 liv.

M. Thuault: Le plus grand ennemi de l'état, 'c'est l'agiotage. Il est reconnu qu'on accapare les assignats de 50 liv.; c'est une vérité constante. Le meilleur moyen de déjouer les accaparemens, c'est de faire un grand nombre

de billets de 50 liv. J'appuie l'amendement de M. le Long: on ne doit pas balancer à le décréter.

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L'assemblée admet l'amendement de M. le Long. M. Camus: D'après ce décret nous demandons adjonction de 6 nouveaux signataires pour accélérer. Adopté. Je demande aussi que le directeur du trésor public soit tenu de fournir toutes les semaines au comité des finances, qui en rendra compte à l'assemblée, un état du numéraire et des différentes valeurs d'assignats qu'il aura délivrés. Je crois que c'est le moyen de le mettre à couvert de toute sollicitation et de toute inculpation. Adopté. M. le président: M. de Montmorin vient de m'envoyer deux prestations de serment, l'une de M. Genest, chargé des affaires de France auprès de l'impératrice de Russie et l'autre de M. Menageot, directeur de l'académie de France à Rome.

M. d'Auchy présente et l'assemblée adopte des articles additionels au décret sur la contribution fonciere.

Art. I. Les droits de péages et autres de même nature, non supprimés par l'article 13 du titre 2 du décret concernant les droits féodaux, en date du 24 mars 1790, seront soumis à la contribution fonciere, à raison de leur revenu

net.

II. Le revenu net des canaux de navigation sera de même soumis à la contribution fonciere.

III. L'évaluation du revenu des canaux qui traversent le territoire de plusieurs communautés d'un même district, sera faite par le directoire de ce district, et la contribution sera fixée, par le même directoire, au taux moyen de celle qui sera supportée par les autres propriétés du district. Cette fixation sera faite en même tems que la répartition de la contribution fonciere entre les diverses communautés.

IV. Le revenu des canaux qui traversent plusieurs districts d'un même département, sera évalué par le directoire de département, et divisé par chaque district, en proportion de la longueur du canal sur le territoire de chacun.

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V. Quant aux canaux qui traversent plusieurs départe mens, chaque directoire de département évaluera les revenus et les charges du canal sur son territoire. Les directoires se communiqueront le résultat de leurs évaluations, et le total du revenu imposable sera réparti en proportion de la longueur du canal sur le territoire de chacun des districts.

VI. Seront compris dans l'évaluation des revenus et des charges du canal les ouvrages d'art, les réserves d'eau, les

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