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les qualités nécessaires pour exercer de telles fonctions.

Outre le développement nouveau des preuves contre la distinction du pouvoir d'ordre et du pouvoir de juridiction et contre la délégation de celui-ci, développement qui, joint à celui de Maultrot, le rend plus complet, Besoigne montre fort bien que le canon d'Elvire et autres semblables ne délèguent point la puissance d'ordre pour le sacrement de pénitence comme on pourrait l'imaginer.

On interprète de la même façon un passage de saint Cyprien « Ceux, dit-il, à qui les confesseurs auraient donné des lettres de grâce, qui peuvent en effet leur profiter auprès du Seigneur s'ils viennent à tomber dans une maladie qui les mette en péril, ne doivent pas souffrir de notre absence, ni attendre notre retour; qu'ils fassent seulement leur confession devant le premier prêtre qui se trouvera présent; s'il ne s'en rencontre point et que le danger presse, à défaut de prêtre, il suffira du ministère d'un diacre, qui pourra donner l'imposition des mains et la réconciliation que les martyrs nous ont témoigné désirer pour ceux qui sont dans ce cas 1. » Il ne s'agit point là d'absoudre sacramentellement, mais de lever la pénitence publique imposée à ceux qui avaient failli dans la persécution et de leur donner l'eucharistie. L'histoire offre plusieurs

1. Lettre XII. Guillon, dont je prends la trad., en fait la XIX®.

exemples de confessions faites à des laïques; ce sont des actes d'humilité et non de sacrement.

La Luzerne, si prononcé pour la délégation du pouvoir de juridiction dont il s'est tant servi pour ravir aux prêtres leurs droits propres de juger, combat la délégation du pouvoir d'ordre pour conférer ceux des ordres qui sont sacrement 1. Excepté quelques théologiens infiniment rares, tous repoussent la délégation du pouvoir d'ordre, lors même qu'ils admettent celle du pouvoir de juridiction.

Au reste, définir la distinction et la délégation, c'est les réfuter. Qu'est-ce que le pouvoir d'ordre? c'est le pouvoir d'exercer les fonctions sacerdotales. Qu'est-ce que le pouvoir de juridiction? c'est le pouvoir de les exercer sur des sujets déterminés. Apparemment on ne saurait exercer en l'air les fonctions du sacerdoce; il faut les exercer sur quelqu'un, sur telle ou telle personne. Donc le pouvoir de les exercer et le pouvoir de les exercer sur un sujet déterminé, ne forment qu'un même pouvoir. Puisque le pouvoir de les exercer sur un sujet déterminé est identique au pouvoir de les exercer, et qu'on reçoit ce dernier ou le pouvoir d'ordre par l'ordination, c'est aussi par l'ordination nécessairement qu'on reçoit l'autre, qui est le pouvoir de juridiction. Prétendre les distinguer, alors qu'ils sont in

4. Droits et devoirs respectifs des évêques et des prêtres, p. 113.

divisiblement un, et les déléguer, ou tous les deux, ou seulement le pouvoir juridictionnel, quand ils ont une source unique dans le sacrement de l'ordre, quelles vaines imaginations!

Ici nous les avons combattues par l'histoire et l'autorité des docteurs. Dans les Pouvoirs constitutifs de l'Église, livre III, chapitre 7, nous les avons attaquées en considérant l'essence du sacerdoce. Il semble que l'Observateur aurait dû montrer que nous nous trompions avant de proclamer que c'est en vertu d'une pure délégation que les laïques administrent le baptême. Un écrivain moins solidement posé dans la science n'y aurait pas manqué. Mais lui a d'autres allures qui sentent le maître. Il enseigne et n'est point enseigné. Peu importe qu'il débite ce qui, selon Bossuet, surpasse toute absurdité. Il va fièrement son train, nous jetant au front le stigmate d'hérésie. La même façon de procéder, il l'emploiera contre les droits des laïques et des prêtres au gouvernement de l'Église. Nous croyons avoir établi ces droits avec des preuves qui méritaient d'être examinées. Toutefois il est clair qu'il ne pouvait descendre jusque-là.

CHAPITRE V

LES PRÊTRES ET LES LAÏQUES JUGENT DE LA FOI ET CONTRIBUENT A L'INFAILLIBILITÉ DE L'ÉGLise.

Les Port-Royalistes reconnaissant aux prêtres l'exercice des clefs, seraient inconséquents de leur nier le droit de prononcer sur la doctrine. Quant aux laïques, il en est de ce droit comme de l'exercice des clefs, ils le leur refusent en apparence et le leur accordent en réalité.

« Ce sont deux excès également blâmables, dit Legros, que d'étendre trop les droits du second ordre du clergé ou de leur donner des bornes trop étroites. L'un et l'autre ne peuvent être que très-pernicieux à l'Église, parce qu'ils renversent le gouvernement que JésusChrist y a établi lui-même et qui en fait toute la gloire aussi bien que toute la force... En Espagne, il semble que le second ordre soit seul chargé du dépôt de la foi en la personne des inquisiteurs, qui s'y conduisent comme s'ils étaient les juges uniques des erreurs et de ceux qui sont infectés de ces erreurs. Les évêques de ces royaumes paraissent ignorer leur pouvoir et quel usage leurs saints prédécesseurs en ont fait pour le bien de l'Église. L'attention qu'on a eue en France à faire valoir les droits des évêques, trop méconnus

ailleurs, a fait quelquefois aussi oublier ceux du second ordre. De là il est arrivé que plusieurs voudraient aujourd'hui réduire les prêtres à la servile fonction d'huissiers ou de crieurs publics, qui annoncent sans discernement ce qui a été jugé à leur insu... Si c'est dans le gouvernement despotique que consiste la gloire de l'épiscopat, il faut avouer que les plus grands évêques de tous les siècles ont peu connu leurs intérêts et mal ménagé leur dignité. Toutes les règles qu'ils nous ont laissées recommandent un gouvernement dans lequel le second ordre ait part à tout, et dont l'autorité soit tempérée par la sagesse, par la charité, par l'humilité et par le concert des suffrages des pasteurs.

C'est ce que divers auteurs ont entrepris de remettre sous les yeux du public, en plusieurs ouvrages estimables. Tout le monde connaît celui de M. Boileau, qui est mort doyen de la Faculté de théologie de Paris. Cet ouvrage est intitulé: De antiquo jure presbyterorum in regimine ecclesiastico.

« Il en a paru un autre, en 1707, avec le titre : Du gouvernement des diocèses en commun par les évêques et par les curés. On attribuait ce traité à M. Drapier, curé de Saint-Sauveur à Beauvais.

« En 1665, M. Noulleau, docteur en théologie et théologal de Saint-Brieuc, en écrivit un De la police ecclésiastique. Il le dédia à l'assemblée du clergé qui se tenait alors. Son but principal était de prouver que

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