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d'obvier à la mendicité sera punie de trois à six mois d'emprisonnement et sera, après l'expiration de sa peine, conduite au dépôt de mendicité.

Garraud écrit : « Il y a là une mesure de police dont l'exécution est remise à l'administration et que les tribunaux n'ont le droit ni de réglementer ni de supprimer. Mais quel est le but et la durée de cette sorte de détention dans un dépôt de mendicité? La loi ne s'en explique pas... La durée de la détention dépend donc de l'arbitraire de l'administration. »

Droit pénal, 3o édit., 1900, IV, p. 170.

Il y a là évidemment une atteinte à la liberté individuelle. Notre législation sur la mendicité est tout à fait insuffisante; il serait bon de la compléter. Cependant il convient de dire qu'en fait dans les villes françaises la mendicité a disparu à peu près complètement grâce aux efforts très remarquables des pouvoirs publics et particuliers, grâce notamment à la loi du 14 juillet 1905 sur l'assistance aux vieillards, aux infirmes et aux incurables. Il serait bon, dès lors, que le législateur intervînt pour préciser et compléter les dispositions de l'article 274 du code pénal.

Pendant les années qui ont précédé la guerre, nos campagnes étaient, principalement pendant les mois d'été, envahies par des caravanes de nomades, dont les uns prétendaient exercer une profession, dont les autres se bornaient à mendier et à voler. Cet état de choses avait provoqué, et très justement, de vives réclamations. Le législateur est intervenu et très légitimement il a soumis à un sévère régime de police les nomades et les personnes exerçant des professions ambulantes. C'est la loi du 16 juillet 1912 qui le règle.

Elle distingue les individus qui ayant un domicile ou une résidence fixe veulent exercer une profession ambulante et ceux qui n'ont ni domicile, ni résidence.

Tous individus domiciliés en France ou y possédant une résidence fixe, qui voudraient, quelle que soit leur nationalité, exercer une profession ambulante, sont tenus d'en faire la déclaration à la préfecture ou à la sous-préfecture de l'arrondissement où ils ont leur domicile ou leur résidence; récépissé leur en est délivré. L'exercice d'une profession ambulante sans cette déclaration et le défaut de présentation du récépissé à toute réquisition des agents de l'autorité constituent une contravention pouvant être punie d'une amende de 5 à 15 francs et d'un emprisonnement de un à cinq jours (L. 16 juillet 1912, art. 1or).

Tous individus de nationalité française qui, n'ayant en France ni domicile, ni résidence fixe, veulent circuler sur le territoire français pour y exercer une profession ambulante, doivent demander un carnet d'identité reproduisant leur signalement avec photographie à l'appui. Tous les individus sans domicile ni résidence fixe qui accompagnent les industriels ou commerçants doivent aussi être munis du carnet d'identité. Il est délivré par le préfet ou le sous-préfet. Toute infraction à ces dispositions peut être punie d'une amende de 16 à 100 francs et d'un emprisonnement de cinq jours à un mois (L. 16 juillet 1912, art. 11).

La même loi, article 3, répute nomades, quelle que soit leur nationalité, tous individus circulant en France sans domicile ni résidence fixe et ne rentrant dans aucune des catégories que l'on vient d'indiquer, même s'ils ont des ressources et prétendent exercer une profession. Pour les nomades, la loi prend des précautions toutes spéciales; elle exige qu'ils soient munis d'un carnet anthropométrique d'identité. La délivrance de ce carnet n'est jamais obligatoire pour l'administration. et elle ne fait pas obstacle à l'application de la loi du 3 décembre 1849 sur l'expulsion des étrangers ni à

l'exercice des pouvoirs de police appartenant au maire relativement au stationnement des nomades sur le territoire de la commune.

Ceux qui se trouvaient en France au moment de la mise à exécution de cette loi du 16 juillet 1912 ont dû demander la délivrance du carnet anthropométrique au préfet ou au sous-préfet de l'arrondissement où ils se trouvaient en fait. Quant aux nomades venant de l'étranger, ils ne sont autorisés à passer la frontière et à circuler en France qu'à la condition d'y justifier d'une identité certaine constatée par la production de pièces authentiques tant pour eux-mêmes que pour toutes personnes voyageant avec eux. Ils doivent adresser la demande du carnet anthropométrique au préfet ou au sous-préfet du département ou de l'arrondissement frontière. Toute infraction aux dispositions concernant le carnet anthropométrique est punie des peines du vagabondage. La loi du 16 juillet 1912 édicte des peines sévères contre toute fausse déclaration ou tout autre acte tendant à faire échec aux mesures prescrites.

L'article 10 de cette loi du 16 juillet 1912 décidait qu'elle serait applicable six mois après sa promulgation et qu'avant l'expiration de ce délai des règlements d'administration publique détermineraient les conditions de son application. Le règlement complémentaire porte la date du 16 février 1913 et a été inséré au Journal officiel le 19 février; il n'a donc pas été fait, comme le voulait la loi, dans les six mois. Une circulaire du ministre de l'intérieur du 3 octobre 1913 a donné aux préfets des instructions détaillées pour l'application de la loi et du règlement (J. off., 14 octobre 1913, p. 9045).

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Mesures de police destinées à éviter la propagation des épidémies.

Pour éviter la propagation des épidémies, les législateurs, en France et à l'étranger, ont été naturellement amenés à édicter des mesures qui sont des atteintes

directes à la liberté individuelle et la soumettent à un régime rigoureux de police préventive. On comprend, d'ailleurs, la nécessité d'un pareil régime si l'on considère la grandeur des calamités que les procédés de police ont pour but de prévenir et qu'il serait évidemment impossible de réparer.

De tout temps, les maladies contagieuses d'origine exotique, le choléra, la peste, la fièvre jaune, ont inspiré aux Européens une véritable terreur; et comme l'importation de ces maladies ne pouvait guère avoir lieu que par voie de mer, les législations de tous les pays maritimes ont donné aux gouvernements des pouvoirs particulièrement étendus en matière de police sanitaire maritime et leur ont permis de prendre des mesures attentatoires à la liberté individuelle et à la propriété privée.

En France, la loi du 3 mars 1822 (art. 1o, § 2) donne au gouvernement le pouvoir sans limite de déterminer « les mesures à observer sur les côtes, dans les ports et rades, dans les lazarets et autres lieux réservés ». C'est en vertu de ce texte qu'ont été portés les nombreux décrets qui depuis 1822 ont imposé des mesures sanitaires maritimes. Jusqu'en 1896, ces mesures ont surtout consisté en un internement imposé aux passagers arrivant sur un navire porteur d'une patente brute. Cet internement, dénommé quarantaine, était un véritable emprisonnement, et le local où il avait lieu, décoré du nom de lazaret, un véritable bagne.

Les progrès de la science médicale et de l'art de l'hygiène ont démontré que le procédé brutal des quarantaines, profondément vexatoire, et parfois source de graves préjudices pour les intérêts commerciaux, était très souvent inutile, et presque toujours inefficace lorsqu'il était seul employé. A la suite de la convention sanitaire signée à Dresde le 15 avril 1893, promulguée

en France par le décret du 22 mai 1894, a été porté le grand règlement du 4 janvier 1896, rendu après avis du comité consultatif d'hygiène de France et qui règle aujourd'hui la police sanitaire maritime. Il supprime à peu près complètement le système suranné des quarantaines et de l'internement dans les lazarets, et réduit ainsi les atteintes à la liberté individuelle.

Le système de l'observation quarantenaire n'est maintenu que pour les passagers des navires dits infectés. Est considéré comme infecté le navire qui présente à bord un ou plusieurs cas, confirmés ou suspects, d'une maladie pestilentielle. Pour les navires suspects, le règlement de 1896 ordonne simplement les visites médicales, la désinfection et la délivrance pour chaque passager d'un passeport sanitaire, qui le place sous la surveillance de l'autorité municipale de la commune où il se rend après son débarquement, et cela pendant cinq jours à partir de l'arrivée du navire (art. 58).

On voit par là que le décret du 4 janvier 1896 porte une atteinte aussi réduite que possible à la liberté individuelle. S'il est un domaine où la liberté individuelle doive être soumise à un régime de police, c'est assurément celui de la santé publique ici, il faut nécessairement prévenir; il serait impossible de réparer; il serait vain de réprimer.

Une longue loi a été promulguée le 15 février 1902, sous le titre de loi relative à la protection de la santé publique, qui est un véritable code de l'hygiène et qui était inspirée des données les plus récentes de la science médicale et de l'art de l'hygiène. Cette loi a été modifiée et complétée en certains points par une série de lois postérieures la loi du 7 avril 1903 modifiant les articles 22 et 23, déterminant d'une manière précise les attributions respectives en matière d'hygiène du préfet de la Seine et du préfet de police; les lois du 25 novem

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