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tant que sa vanité, attire une nouvelle et épouvantable guerre sur la France, pour procurer la couronne d'Espagne à son petit-fils Philippe V. Tandis qu'il irrite de nouveau les Anglais en se déclarant en faveur du fils de Jacques II qu'ils ont chassé, il irrite tous les Rois, en extorquant un testament au Monarque Espagnol, et en disant fièrement : Il n'y a plus de Pyrénées.

Toute l'Europe se ligue contre lui pour réprimer son orgueil et son ambition.-On se bat partout, en Espagne, en Italie, en Allemagne, en Belgique et en France.

Après douze années d'une guerre acharnée, beaucoup de victoires et beaucoup de revers, Louis XIV est forcé de s'humilier et de demander deux fois la paix.

Mais les Souverains alliés déclarent qu'ils ne font pas la guerre à la Nation française, et seulement à son chef, dont l'ambition et le despotisme sont incompatibles avec le repos de l'Europe : ils demandent, comme condition de la paix, la convocation périodique des États-Généraux en France, pour enchaîner l'ambition royale.

Le vieux Desposte refuse et se prépare à se retirer derrière la Loire quand la fameuse bataille de Denain, gagnée pour lui par Villars, amène enfin la paix et consolide le despotisme vainqueur. Le grand Roi s'abaisse cependant jusqu'à consentir à la destruction du port de Dunkerque.

C'est peu après que Louis XIV meurt, âgé de soixantedix-sept ans, dominé depuis longtemps par son confesseur, jésuite, et par une vieille dévote, gouvernante de ses bâtards, la veuve Scarron, qu'il a secrètement épousée, sous le nom de Madame de Maintenon.

Sa beauté personnelle, sa gloire militaire, la pompe de sa Cour et de ses fêtes, la magnificence de son Versailles et de ses autres palais royaux, les flatteries des écrivains, des poètes et des prédicateurs, ont d'abord ébloui et séduit la Nation. Mais il l'a corrompue par son despotisme brillant, par l'esprit d'adoration et de servilité qu'il a répandu, par

ses maîtresses, par ses bâtards adultérins avoués et même légitimés, par la tartuferie religieuse qu'il a encouragée.

Son despotisme ses folles dépenses en fêtes et en palais, ses guerres ambitieuses qui font tuer plus d'un million de Français et qui ruinent le pays, ses impôts accablants, la vénalité des charges et de la Noblesse, ses Dragonnades, la proscription des Protestants et la persécution des Jansénistes, ont attiré sur sa vieillesse une haine presque universelle. A la fin, tout l'abandonne; on se plaint de l'éternité de son règne; sa mort fait éclater la joie générale; et le Peuple insulte à son cercueil.-Il laisse à la France et à ses successeurs trois milliards cent douze millions de dettes, avec le despotisme et le jésuitisme pour les payer!!

SECT. 4. Louis XV. 1715 à 1774.

$ 1er. Régence du duc d'Orléans.

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· Débauches. —Corruption.-Papier-monnaie.

Arrière-petit-fils de Louis XIV, Louis XV n'a que cinq ans, et le vieux monarque a réglé la Régence par son testament. Mais la réaction éclate aussitôt; et le Parlement, cassant le testament royal, déclare le duc d'Orléans, oncle du Roi mineur, Régent absolu.

Servi par un vil Ministre, l'abbé Dubois, le Régent ne s'occupe que de plaisirs ou de débauches, ne s'entoure que de libertins et de roués, et corrompt complétement les mœurs de la Cour et de la Nation.

Mais il faut payer les trois milliards de dettes laissées par Louis XIV; et l'on adopte,malgré l'opposition du Parlement, le système financier de l'Écossais Law, qui propose un pa- pier-monnaie, promettant de grands avantages à ceux qui voudront l'acquérir. L'avidité du gain aveugle la crédulité publique; l'agiotage et le jeu sur ce papier deviennent une fureur; une foule de riches se ruinent, tandis qu'une foule de pauvres s'enrichissent et acquièrent la Noblesse à prix d'argent; et l'escroquerie ou la banqueroute royale jette la perturbation dans les fortunes et les familles.

Le Regent meurt, quand Louis XV, devenu majeur,prend le gouvernement pour l'abandonner à ses Ministres.

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C'est le règne de la débauche et du cynisme, des favoris et des maîtresses officielles; c'est le règne d'un Despote qui manifeste son dédain et sa haine pour le Peuple, qui fait asseoir des prostituées sur le trône, et qui se livre aux pluș dégoûtantes orgies dans son Parc-aux-Cerfs, tandis que la famine désole le royaume. Louis XV rend le despotisme vil et méprisable, et détruit le prestige de la royauté.

Il fait la guerre aussi, gagne et perd des batailles terrestres et navales, tantôt pour soutenir le Roi de Pologne Stanislas, son beau-père, attaqué par les Empereurs d'Allemagne et de Russie, tantôt pour empêcher Marie-Thérèse de succéder à l'Empereur, tantôt pour favoriser la restauration d'un Stuart (le jeune Édouard) sur le trône d'Angleterre.

Il acquiert la Lorraine et la Corse; mais il perd le Canada et presque toutes les Colonies françaises en Amérique; laisse trahir la France par ses maîtresses, et SE DÉSHONORE par le sacrifice honteux de la Pologne, en souffrant que les Despotes de Russie, de Prusse et d'Autriche se la partagent.

Échappé au poignard de Damiens, il finira par expulser les Jésuites soupçonnés d'avoir dirigé l'assassin; mais, longtemps dominé par eux, il persécute les Protestants et les Jan sénistes, fait pendre à Toulouse le vieux et innocent Calas, et fait brûler à Abbeville (1766) le jeune chevalier de Labarre, dont tout le crime est d'avoir, avec quelques enfants de son âge, outrage un crucifix placé sur un pont, et qui, pour ce crime, est condamné à subir l'amputation du poing, celle de la langue arrachée avec des tenailles, la torture ordinaire et extraordinaire, puis à être brûlé à petit feu.

La bulle Unigenitus, qui proclame l'infaillibilité du Pape,

et les billets de confession et d'absolution, imaginés par les Jésuites, ont jeté la division parmi les catholiques. —Le Roi, son Conseil et le Haut-Clergé, soutiennent le Pape, tandis que le Parlement, le Bas-Clergé et le Peuple, défendent la liberté. -Les Évêques suspendent les Curés récalcitrants; le Parlement annulle les décisions des Évêques: et le Conseil du Roi annulle les arrêts du Parlement, qui ne cesse pas de rendre de nouveaux arrêts. Les prêtres refusent la sépulture; le Parlement lance contre eux des prisesde corps, malgré les défenses du Conseil. Le Parlement est exilé à Pontoise. -Mais l'opinion se prononce en sa faveur; la Cour est forcée de le rappeler; et les Parlementaires rentrent en triomphe.

Excité par son Chancelier Maupeou, Louis XV tient un lit de Justice à Versailles, et défend au Parlement de se mêler des affaires politiques, financières et religieuses.

Le Parlement proteste, et suspend ses audiences, encouragé par l'approbation populaire.

Tous ses membres sont enlevés pendant la nuit et exilés, tandis qu'une Commission est installée pour le remplacer. - Mais les avocats refusent de plaider.

Cependant, Maupeou organise un nouveau Parlement composé de ses créatures, frappe les procureurs en supprimant les trois cents plus indépendants, frappe les avocats en donnant aux cent procureurs les plus serviles le droit presque exclusif de plaider devant les nouveaux juges, et parvient à triompher momentanément.

Mais la résistance au Despotisme est partout l'un des premiers actes que va faire Louis XVI pour se populariser sera de supprimer le Parlement Maupeou; et l'ancien Parlement sera réintégré aux applaudissements du Peuple, dont il a défendu la bourse et la liberté.

Quant à Louis XV, père égoïste, il laisse pour héritage à ses enfants le mépris universel, la haine générale, et une inévitable Révolution dont il les aura rendus victimes: on peut dire que c'est lui qui tue Louis XVI!!...

SECT. 5. Louis XVI. 1774 à 1792.

$1er.

Son caractère.

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Malesherbes et Turgot. Réformes. - Guerre d'Amérique. Necker et Calonne. Procès du Collier.

Il paraît que Louis XVI, jeune, économe, sans besoins personnels, sans autre passion que celle de la chasse et de la serrurerie, veut d'abord satisfaire l'opinion publique, réformer les abus, faire des concessions à la liberté, et s'occuper du bonheur du Peuple.

Mais, égare par une mauvaise éducation, imbu de tous les préjugés du pouvoir absolu, faible de caractère, sans confiance en lui-même, irrésolu, jouet de tous ceux qui l'entourent, dominé par une Reine altière (Marie-Antoinette, Archiduchesse d'Autriche), par des frères ambitieux (Monsieur, Comte de Provence, depuis Louis XVIII, et le Comte d'Artois, depuis Charles X), et par des Courtisans et des Prêtres avides, il voudra bientôt agir en maître.

Il supprime d'abord le Parlement-Maupeou et rappelle l'ancien Parlement.

Au vieux courtisan Maurepas, imposé par la Cour comme principal Ministre, il associe bientôt deux hommes aussi connus par leurs vertus que parleurs talents, amis du Peuple et de l'économie, Malesherbes et Turgot. Puis, par leurs conseils, il abolit la torture préparatoire, le monopole des grains, lesjurandes et les corvées, et prépare beaucoup d'autres réformes, avec le rétablissement de la liberté de la presse.

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Mais la Cour, qui s'enrichit et vit des prodigalités du despotisme, et qui ridiculise les intentions populaires du Roi et ses bonnes mœurs, conspire contre des Ministres économes, et parvient à les faire remplacer, sur la fin de 1776, par des Ministres prodigues, au grand mécontentement du Peuple, et presque malgré Louis XVI, qui disait : « Il n'y a « que moi et Turgot qui aimons le Peuple.

La Cour est cependant bientôt (juillet 1777) forcée de confier la direction des finances à Necker, ancien banquier Ge

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