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heur, l'égalité et la liberté. C'est dans vos décrets que nous puiserons nous-mêmes les lumières qui nous seront nécessaires pour arriver au but que nous nous proposons.

L'histoire jusqu'ici n'a été que le recueil monstrueux des attentats contre les droits de l'homme et des nations, que des écrivains mer. cenaires ou fanatiques ne connurent jamais. Dans cette liste nombreuse de rois et de conquérants, les bons princes sont rares..... leur règne d'une courte durée. Titus ne fit que se montrer aux Romains asservis par les premiers Césars. Tel fut néanmoins l'ascendant de ces conquérants farouches, sur les peuples qu'ils mireni dans les fers, que plusieurs furent divinisés par les troupeaux d'esclaves qu'ils avaient enchaînés. Ainsi, dans ces temps d'ignorance, la superstition déilia tous les tyrans, dénatura l'essence divine du créateur, qui ne peut être dignement adoré que par des hommes libres. C'est en comparant ces jours de calamité avec ceux que votre sagesse nous prépare, que la jeunesse peut apprendre à connaître toute la dignité de l'homme, et arriver successivement à ce siècle qui vous devra toute sa gloire.

« Désorinais le marbre et la toile n'animeront que des hommes qui auront bien mérité de la patrie; et sans doute Louis XVI s'éclairant au milieu des représentants du peuple dont il est aimé, Louis XVI renversant d'une main ferme et hardie, tous les monuments éleves par le régime féodal, doit offrir à la postérité une image plus consolante que Louis XIV, armé de la massue d'Hercule. »

M. le Président répond :

« Messieurs,

« L'Assemblée nationale vient de donner à la France une nouvelle Constitution. Elle a ré abli les hommes dans l'exercice de leurs droits; elle a déjà détruit la plus grande partie des abus; elle s'occupe de rétablir le crédit et les finances et ses travaux préparent le bonheur de tous les bons français; mais elle n'aura rien fait, si dorénavant le patriotisme ne dirige pas l'éducation publique. Vous avez senti cette importante vérité; et ce n'est qu'avec une extrême satisfaction que l'Assemblée nationale voit s'élever dans la ville de Paris ces divers établissements dont le principal but, ainsi que le vôtre, Messieurs, est de former des citoyens : elle les encouragera de tout son pouvoir et les offrira pour modèles aux autres parties de la monarchie. Elle vous permet d'assister à sa séance. »

M. Bailly, maire de Paris, se présente à la barre, à la tête d'une députation et dit:

« La cominune de Paris, c'est-à-dire la majorité des sections vient vous présenter le plan d'une municipalité : elle vous demande de la faire jouir du même bienfait que vous avez accordé au reste du royaume et elle vous prie d'accélérer ce bienfait. C'est le seul moyen de faire oublier le temps d'anarchie dout nous sortous. »

M. le Président répond à la commune de Paris :

«Messieurs, depuis le commencement d'une révolution qui élèvera le royaume au plus haut degré de gloire et de bonheur, la ville de Paris s'est toujours distinguée par les actes du patriotisme le plus pur et le plus désintér ssé. C'est à l'énergie et au courage de ses habitants, que l'Assemblée nationale doit peut-être sou existence

et la France une Constitution. Les représentants de la nation vont s'occuper, Messieurs, de l'organisation de votre municipalité : ceux que vous élirez librement pour la composer, n'auront qu'à suivre votre exemple pour mériter l'estime et la reconnaissance de leurs concitoyens. L'Assemblée nationale vous permet d'assister à sa séance. »

Une députation de la municipalité et de la garde nationale de la ville de Tulle renouvelle, au nom de cette ville, le serment de fidélité à la Constitution, et expose que la province du Limousin se trouvant encore déchirée par des troubles, ils vienne it supplier l'Assemblée nationale de donner aux tribunaux toute l'activité nécessaire pour les arrêter. Le discours de la députation est déposé sur le bureau.

M. le Président répond :

« Ce n'est qu'avec la plus vive douleur, Messieurs, que l'Assemblée nationale a été instruite des désordres qui ont eu lien dans vos provinces. Persuadée qu'elle ne peut assurer le succès de ses opérations que par la tranquillité du peuple, elle a employé tous ses efforts pour apaiser les troubles. Retournez dans vos provinces. Messieurs; dites à vos concitoyens que l'Assemblée nationale s'occupe sans cesse des moyens de les rendre heureux. Elle espère que la création d'uu nouvel ordre judiciaire, que la formation des municipalités et des assemblées de district et de département, détruisant partout la licence, établiront sur des bases inébranlables le bonheur et la liberté. L'Assemblée nationale vous permet d'assister à sa séance. »>

Les députés du district des capucins du Marais offrent en don patriotique les boucles d'argent des citoyens de ce district. A cette occasion, ils prononcent le discours suivant, qui mérite de justes applaudissements, et dont l'insertion dans le procès-verbal est ordonnée ainsi que l'impression et l'envoi à toutes les municipalités.

Discours de M. de Lagrange, commandant du bataillon des capucins du Marais, à l'Assemblée nationale, le 10 avril 1790.

« Monsieur le Président et Messieurs. Le district des capucins du Marais ayant ar rêté de faire une offrande patriotique à l'Asseinblée nationale, et ayant choisi les députés chargés de la lui présenter, dans le neuvième bataillon de la cinquième division, les soldats citoyens de ce bataillon ont cru qu'ils devaient s'en presser de saisir cette occasion de vous faire connaître leurs sentiments sur l'adresse du septième bataillon de la première division. Animés tous du même patriotisme, les soldats de la garde nationale parisienne n'ont tous qu'un seul et même esprit, celui de leur attachedient à leurs devoirs, de leur dévouement à la cause commune, et de leur respect pour vos décrets; le neuvième bataillon de la cinquième division partage donc entièrement les dispositions de celui de SaintEtienne-du-Mont. Il peut et doit, comme lui, vous assurer que quelle que soit la loi que vous décréterez concernant la permanence où la nonpermanence des districts de Paris, il n'en maintiendra pas moins l'exécution avec ce courage et cette constance qui, depuis le commencement de la Revolution, out elé garants et protecteurs de la tranquillité publique. Citoyens dans nos districts, nous avons la liberté d'émettre un vœu;

soldats dans nos bataillons, nous ne connaissons plus que l'obéissance. Loin de nous ces vaines appréhensions qui, présumant témérairement de notre zèle, l'ont cru susceptible de s'altérer ou de s'affaiblir au point de nous faire abandonner nos drapeaux, parce que les districts ne seraient plus permanents.

« Nous respectons, peut-être même plusieurs d'entre nous partagent-ils le désir de nos concitoyens sur cette permanence; mais, Messieurs, si vous jugez que l'activité des délibérations partielles ne soit point un avantage pour l'Etat et pour la capitale, nous nous conformerons à un décret que vous aurez pesé dans votre sagesse, et que vous n'aurez rendu que parce que vous l'aurez regardé comme nécessaire à notre bonheur. Nous ne sommes point de ceux qui, donnant à la liberté une extension moins propre à la conserver qu'à la détruire, la placent dans l'hypothèse de son abus, et non dans celle de sa jouissance. Les vrais soldats citoyens, accoutumés à obéir et à commander à leurs égaux, se croient également libres, soit qu'ils obéissent, soit qu'ils commande t. Que la loi soit faite pour tout le monde ; que le puissant, comme le faible, ait les mêmes droi's à sa sévérité et à sa protection; qu'aucun citoyen ne puisse abuser ni être victime de la situation dans laquelle l'aura placé la fortune voilà la véritable liberté, voilà celle qui fait l'objet de tous nos vœux, voilà celle que nous défendrons jusqu'à notre dernier soupir.

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Eh! Messieurs, comment penser que la garde nationale parisienne pût être dirigée dans sa conduite par des intentions autres que celles si bien exprimées, dans cette auguste Assemblée, par le bataillon de Saint-Etienne-du-Mont? Non, sans doute. Pour acquérir toute confiance à cet égard, il suffit, comme l'a observé ce même bataillon, de se rappeler que nous sommes tous Français. Quelques-uns de ces individus qui ne tiendent par aucun lien à la société, trompés par leurs passions, ou entraînés par leur faiblesse, peuvent bien oublier un moment leurs devoirs, mais Jamais trente mille Français n'out trahi à la fois la patrie et l'honneur.

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Voi à, Messieurs, nos sentiments et ceux de Dos camarades. Nous vous en offrons en ce jour, avec d'autant plus de plaisir l'hommage, que nous espérons qu'en y reconnaissant ce patriotisme et cette franchise qui caractérisent de vrais militaires, vous y apercevrez en même temps la fidélité et la soumission, sans lesquelles la plus éclatante bravoure ne pourrait jamais faire de bous soldats. >>

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L'an mil sept cent quatre-vingt-dix, le samedi trois avril, le bataillon extraordinairement convoqué en la salle du Palais Cardinal, lieu ordinaire de ses assemblées; lecture faite d'une adresse du septième bataillon de la première division, à l'Assemblee nationale, contenant invitation aux autres bataillons de manifester leurs vœux au sujet de ladite adresse :

Le batailion, considérant que cette adresse renferme l'expression de ses vrais sentiments, et sûrement de ceux de toute la garde nationale parisienne, a arrêté unanimement de lui douner son adhésion, et d'en faire part au bataillon de Saint-Etienne-du-Mont,

M. de Lagrange, commandant du bataillon, a observé alors à l'assemblée qu'il était chargé, avec deux citoyens volontaires, de porter à l'Assemblée nationale les boucles d'argent du district. Il a ajouté que présumant l'opinion du bataillon sur cet objet intéressant, et croyant que cette circonstance pouvait être une occasion de la faire connaître à l'Assemblée nationale, il avait fait un projet d'adresse qu'il allait soumettre à l'Assemblée.

Lecture faite de cette adresse, le bataillon l'a applaudie à plusieurs reprises, et l'a adoptée unanimement, et a arrêté qu'elle serait présentée par les députés ci-après nommés, réunis à ceux du district, à l'Assemblée nationale et à son comité militaire, et qu'elle serait ensuite portée à l'assemblée des représentants de la commune, à M. le commandant général, au comité militaire de la ville, et envoyée, au nom du bataillon, par son secrétaire, à MM. de l'Etat-major général et à chacun des cinquante-neuf autres bataillons.

Et pour députés, l'assemblée a nommé M. le commandant, M. l'aide-major du bataillon, des officiers, bas-officiers et fusiliers pris par ancienneté d'âge, un par chaque grade, et M. le secrétaire.

L'Assemblée a en même temps arrêté que l'adhésion et l'adresse seraient portées par quatre autres députés au bataillon de Saint-Etienne-duMont.

Signé DE LAGRANGE, commandant;
CHAUVEAU, secrétaire-adjoint.

M. le Président répond aux députés du district des capucins du Marais:

« Messieurs, l'Assemblée nationale reçoit avec satisfaction le nouveau témoignage de votre patriotisme. C'est aux habitants d'une ville qui à si puissamment contribué à la Révolution, qu'il appartient sans doute de donner l'exemple du désintéressement si nécessaire, lorsqu'il s'agit de régénérer la finance, et de rétablir le crédit et la confiance. L'Assemblée nationale, qui a reçu tant de preuves de votre zèle pour la chose publique, comme citoyens, et qui connaît si bien votre courage et votre dévouement comme soldats, sentiments que vous venez d'exprimer avec l'énergie d'homme qui sentent le prix de la liberté, vous permet d'assister à sa séance. »

Une députation du huitième bataillon de la première division de l'armée de la Révolution, est ensuite admise à la barre et présente une adresse dont l'Assemblée ordonne l'impression et l'insertion au procès-verbal. Elle est ainsi conçue:

Adresse du huitième bataillon de la première division de l'armée de la Révolution, à l'Assemblée nationale, le 10 avril 1790.

« Monsieur le Président et Messieurs.

« Le huitième bataillon de la première division de la garde nationale parisienne se croirait coupable aux yeux des législateurs de la nation française, s'il gardait plus longtemps le silence sur un objet qui intéresse d'autant plus l'armée de la Révolution, qu'on a cherché à vous faire concevoir des doutes sur la pureté de ses principes.

"Il vous a été présenté par les districts de la capitale une adresse tendante à vous faire décréter leur permanence active et perpétuelle.

On à osé dire, dans cette adresse, que si cette permanence n'était pas décrétée, les bataillons

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Le huitième bataillon de la première division restera attaché au sien, parce qu'il y lira à chaque instant la seule devise qui convienne à un peuple libre, et qu'il lui rappellera sans cesse, et son serment, et le héros à la générosité duquel il le doit, et auquel les deux mondes doivent des statues.

« Les ennemis du bien public ont cru trouver une ressource dans la demande de la permanence; mais il est attaché à leur destinée d'être toujours trompés dans leurs espérances. Quels que soient vos décrets sur le sort des districts de la capitale, l'armée de la Révolution a juré de maintenir la Constitution, et elle la maintiendra jusqu'à son dernier moment.

"

La garde nationale attend avec impatience la nouvelle existence que vos décrets vont lui donner. Elle brûle d'être quelque chose dans la Constitution; elle en attend le complément, parce que c'est à lui qu'est attaché le bonheur de la France entière, et qu'il doit vous mériter à jamais le titre excellent qui vous a été donné d'avance, par une société formée au milieu d'un peuple quelquefois libre, et dont les membres sont dignes de le partager avec vous.

"Les districts out semblé craindre que la garde nationale parisienne n'abusât de ses forces. Ils nous ont mal jugés. Ils sont et seront toujours nos frères. Si leur inactivité est décrétée, nous n'en serons pas moins attachés à notre serment, et nous doublerons de vigilance pour assurer aux citoyens qui les composent, leurs propriétés, leur vie et leur liberté, ou plutôt nous serons ce que nous avons été, et ils vivront paisibles.

Tels sont, Messieurs, nos sentiments, et tels doivent être ceux de tous les Français dignes d'êtres libres.

"

Signé : RENARD, commandant; SERSON-
DESMOITIERS, capitaine, secrétaire; LE-
MOINE, PONCE, LEROI, capitaines; GA-
TINE, lieutenant; BESANÇON, sous-lieute-
nant, remplaçant M. de la Fayette le fils;
CARON, BRISSE, sergents; HEIMAR, CHA-
BT, caporaux; COLLETTE DE BAUDICOURT,
BULLET, DEQUEVAU-VILLIERS, GOSSAUME,
fusiliers. »

Nous, secrétaire du bataillon, certifions que les noms ci-dessus sont ceux de MM. les députés nommés pour porter la présente à l'Assemblée nationale.

Signé SERSON-DESMOITIERS, secrétaire. »

M. le Président répond au discours de la députation du huitième bataillon de la première division de la garde nationale parisienne:

Messieurs, ce n'est qu'avec la plus vive sensibilité que l'Assemblée nationale est témoin de ce combat de patriotisme et de dévouement entre tous les citoyens de la ville de Paris. Les bruits injurieux qu'ont répandus les ennemis de la chose publique, ne l'ont jamais affectée; elle connalt trop bien votre courage et vos vertus. Citoyens et soldats, vous défendrez et maintiendrez la Constitution, dont le but est de vous ren

Les députés du district de Saint-Eustache, en présentant le don patriotique des habitants du district, offrent en leur nom leur vie et tout ce qui est en leur pouvoir, pour le maintien de la Constitution.

M. le Président exprime les sentiments de l'Assemblée, en répondant :

"

Messieurs, les termes me manquent pour Vous peindre les sentiments dont est affectée l'Assemblée nationale; combien elle doit s'applaudir des travaux que son zèle lui a fait entreprendre, et combien elle est dédommagée de ses pénibles occupations, par le zèle, le courage et le dévouement que développent toutes les classes de citoyens. Désormais elle n'a plus d'ennemis à craindre; ils seront confondus, et la France sera libre et heureuse. L'Assemblée vous permet d'assister à sa séance. »>

Les députés des salles des malades des deux sexes de la maison des Incurables de Paris, préseutent au nom de cet établissement, un don patriotique de 16 livres 16 sous d'argent monnayé et de quelques effets en or et en argent.

M. le Président leur dit :

« L'Assemblée nationale, qui veille également sur tous les citoyens, s'occupe encore avec plus de zèle de ceux qui sont privés des dons de la fortune. Si, dans la nouvelle Constitution qui vient de rétablir l'égalité civile entre tous les citoyens, elle n'a pu leur assurer la même aisance, du moins en encourageant et protégeant tous les établissements de bienfaisance, aura-t-elle rempli le devoir qu'elle s'est imposé, d'assurer à chacun le bonheur dont il est susceptible. L'Assemblée vous permet d'assister à sa séance. »

L'archiconfrérie royale du Saint-Sépulcre de Jérusalem présente l'hommage qu'elle juge le plus digne des vengeurs de la liberté, cent vingt-quatre infortunés dont elle va essuyer les pleurs et briser les fers. Elle entre dans quelques détails sur l'objet et sur l'utilité de son institution, dans un discours déposé sur le bureau.

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« Braves vétérans, c'est avec enthousiasme que l'Assemblée nationale reçoit les témoignages de votre patriotisme. Si, jusqu'à présent, vous avez servi la patrie par votre courage et votre intrépidité. servez-la désormais par vos conseils. Apprenez à la jeunesse que le premier devoir de tout citoyen français est de consacrer sa vie et sa fortune pour le maintien de la liberté, de la Constitution et de la monarchie. Dites-lui que vous imiter est le moyen le plus assuré d'acquérir l'estime et la reconnaissance publique. L'Assemblée nationale vous permet d'assister à sa séance. »

M. de Ludres, député de Nancy, expose que des affaires indispensables exigent qu'il s'absente pour trois semaines.

L'Assemblée lui accorde ce congé.

M. le Président. L'ordre du jour appelle la discussion sur la question relative à l'état civil des juifs.

On demande que l'ordre du jour soit interverti et que la parole soit donnée au rapporteur du comité des rapports.

L'Assemblée, consultée, adopte cette proposition.

M. Goupilleau, membre du comité des rapports. Vous nous avez renvoyé l'examen des faits relatifs à la municipalité et à la garde nationale de Montauban. Le régiment de Languedoc et cette garde nationale, après avoir fait entre eux un pacte d'union, excités par les applaudissements que vous avez donnés au pacte fédératif des Angevins, é rivirent une lettre circulaire à toutes les gardes nationales de la province, pour les engager à imiter cet exemple. Cette lettre a donné des inquiétudes à la municipalité de Montauban qui a défendu de donner des suites à cette démarche, sous peine de désobéissance. Le comité pense que le pacte fédératif entre le régiment de Languedoc et la garde nationale de Montauban, ne peut avoir pour but de soustraire la garde nationale aux ordres de la municipalité, à laquelle elle est subordonnée, et que M. le président doit écrire à la garde nationale et à la municipalité, afin de les engager à agir de concert pour le maintien de la liberté.

M. Charles de Lameth. Je ne sais pas comment I Assemblée nationale peut approuver qu'une municipalité, élue peut-être par un peuple trʊmpé, blâine ce que vous avez vous-mêmes applaudi avec transport... Vous trouvez que tout va le mieux du monde, que les affaires sont en très bon ordre, et cependant il est très nécessaire de redonner de la force et du zèle aux amis de la Constitution. L'aristocratie redouble d'efforts. Pendant la quinzaine de Pâques, on n'a pas craint d'abuser des choses les plus sacrées pour égarer les peuples. (Il s'élève de très violents marmures dans la partie droite de la salle.)

M. le Président observe à M. de Lameth qu'il est hors de la question.

M. Charles de Lameth. C'est mon amour pour la chose publique qui me fait parler; tout ce qui tend à défendre la liberté est toujours à l'ordre du jour. Le rapport du comité des recherches sur la conduite de M. l'évêque de Blois prouvera que mes inquiétudes sont bien fondées. Je reviens à l'affaire qui nous occupe, et je demande que l'Assemblée approuve la conduite de la garde

nationale de Montauban, et blâme celle de la municipalité.

M. le baron de Landenberg, député de Belfort, qui s'était absenté depuis quelque temps, rentre dans l'Assemblée nationale et demande la parole sur la discussion.

Plusieurs membres: Vous ne pouvez parler, vous n'avez pas prêté le sermeat civique.

M. de Landenberg prête serment et obtient la parole.

Je n'adopte, dit-il, aucune des propositions qui Vous sont faites, et je demande qu'on rappelle la garde nationale à l'exacte observation de son devoir; que la municipalité soit approuvée; que le réquisitoire du procureur de la commune contre la lettre de la garde nationale soit envoyé à toutes les municipalités du royaume pour leur servir d'exemple et de modèle. - J'ai appris ce matin que vous avez décrété qu'on ne peut avoir voix délibérative dans l'Assemblée sans prêter le serment de maintenir la nouvelle Consutution. Comme il est de mon devoir de délibérer, j'ai prêté ce serment.

M. de Bonnal, évêque de Clermont. Je n'ai qu'une observation à faire; je dois à la religion de la présenter. Si l'on continuait ainsi à su po ser des intentions coupables à ses ministres, il serait désormais impossible au clergé d'assister à vos séances. (Une partie de l'Assemblée applaudit. -M. l'évêque de Clermont quitte la salle. Il est suivi par un grand nombre d'ecclésiastiques.)

M. Barnave présente un projet de décret qui est aussitôt adopté. Il est ainsi conçu:

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L'Assemblée nationale, après avoir entendu son comité des rapports, consacre de nouveau le principe de la subordination des gardes nationales aux municipalités, par l'intermédiaire desquelles les ordres du pouvoir exécutif doivent toujours leur étre transmis.

Au surplus, considérant que le pacte fédé ratif, proposé dans la lettre circulaire écrite par la garde nationale de Montauban, le 13 mars dernier, a été dicté par le plus pur patriotisme, et n'a pu avoir pour objet de se soustraire à l'autorité de la municipalité, à laquel'e elle est essentiellement subordonnée; elle approuve le zèle de la garde nationale, et charge son président de lui écrire, ainsi qu'à la municipalité, pour les engager à travailler de concert au maintien de la Constitution et de la tranquillité publique. »

M. le Président annonce que la séance de demain commencera à onze heures du matin. La séance est levée à ouze heures du soir.

ASSEMBLÉE NATIONALE.

PRÉSIDENCE DE M. LE BARON DE MENOU.

Séance du dimanche 11 avril 1790 (1).

M. Gossin, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier au matin. If ne s'élève pas de réclamation.

M. Camus. Il est du devoir du comité des pensions de vous apprendre qu'ayant vu des in(1) Cette séance est incomplète au Moniteur.

culpations dirigées contre lui, et consignées dans une lettre que M. le maréchal de Ségur a fait inprimer en supplément au Journal de Paris, il a donné à l'impression les pièces originales au sujet dsquelles cette inculpation a été faite. C'est ainsi que le comité répondra toujours.

M. le comte de Faucigny-Lucinge. On croirait, par ce que dit M. Cainus, que M. de Ségur a besoin de se justifier. Une demande de 6,000 livres pour de pauvres parents ne peut être considérée comme un délit pour lequel il faille présenter une justification.

M. d'Estourmel. Je suis certain que M. de Ségur n'a rien demandé d'injuste; mais la publicité des pièces peut seule le prouver.

M. Camus. M. le maréchal de Ségur se sert du mot calomnie; il était du devoir du comité de publier les faits. Comme l'impression ne peut être très rapide, il était de son devoir de prévenir l'Assemblée et le public que l'on imprimait ces pièces, afin que l'une et l'autre suspendissent leur jugement. On verra si nous avons calomnié, on examinera, et la peine retombera sur ceux qui la méritent.

M. Martinean. Vous avez hier renvoyé au comité ecclésiastique une proposition de M. Mougins de Roquefort Dans plusieurs villes le titre de curé est partagé entre cinq ou six prêtres ; dans d'autres, il y a un curé pour les nobles, et un curé pour les non-nobles. Pour faire disparaître ces abus absurdes et bizarres, votre comité ecclésiastique vous propose le projet de décret suivant :

« L'Assemblée nationale a décrété et décrète que dans toutes les églises paroissiales où il y a deux ou plusieurs titres de bénéfices-cures, il sera par provision, en cas de vacance par mort, démission ou autrement, d'un des titres, sursis à toute nomination, collation et provision. »

Ce décret est adopté.

M. d'Harambure. M. d'Ogny a écrit au comité des finances une lettre par laquelle il demande qu'un semestre des gages des maîtres de postes soit acquitté. Ce semestre monte à 45,000 livres. Je propose à l'Assemblée d'autoriser M. Necker å fournir cette somme.

M. Gaultier de Biauzat. Plusieurs maîtres de nostes, qui n'avaient pour tous gages que des privilèges, quittent leurs fonctions: il faut s'occuper de cet objet, qui pourrait retarder le service public.

Cette observation est renvoyée au comité des finances.

Le décret suivant est ensuite rendu :

« L'Assemblée nationale décète qu'elle autorise le président du comité de liquidation de répondre à M. d'Ogny qu'elle permet qu'on retire de l'arriéré les 45,000 livres dues aux maîtres des postes sur le dernier semestre de ce qui leur est attribué pour les rembourser des frais d'avance pour les courriers, et que cette somme leur soit payée par le Trésor royal, ou par une avance faite par les fermiers des postes. »

M. Vernier, membre du comité des finances, propose deux decrets concernant la ville dé Charmes en Lorraine et la ville de Montauban.

Ces deux décrets successivement mis aux voix sont adoptés ainsi qu'il suit:

Premier décret.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, et vu les délibérations du conseil général de la ville de Charmes, des 19 septembre 1789 et 26 février 1790, autorise les officiers municipaux de ladite ville à faire un emprunt de 12,000 livres pour approvisionnement de grains, à charge et condition que la rente ou les intérêts de ladite somme, ainsi que la perte qui pourrait résulter du rabais du prix des grains, seront prélevées sur les deniers patrimoniaux de ladite ville; le tout à charge d'en rendre compte dans les formes accoutumées. »

Deuxième décret.

« L'Assemblée nationale, sur le rapport de son comité des finances, et vu la délibération du conseil général de la commune de Montauban, du 15 mars 1790, énonciative de celles prises au bureau de charité les 1er et 8 dudit inois, autorise les officiers municipaux à imposer la somme de dix-huit mille livres seulement, au lieu de celle de trente-six mille livres; pour ladite somme de dix-huit mille livres être rẻpartie au rô e de la capita ion de l'année présente, sur tous les articles de trois livres et audessus, le recouvrement en être fait par le collecteur ordinaire, et le montant employé en ateliers de charité, de la manière qui sera jugée le plus utile à la classe indigente; le tout à Charge de rendre compte, et sans préjudice des contributions volontaires reçues et à recevoir. »

M. Dupont (de Bigorre), membre du comité des finances, propose un décret relatif aux octrois des villes en général, et en particulier à l'octroi de la ville de Dax.

Ce décret mis aux voix est adopté dans les termes suivants:

« L'Assemblée nationale décrète que la ville de Dax, ainsi que toutes les autres villes du royaume, sont autorisées à percevoir les droits d'octrois, sans avoir besoin de lettres-patentes ni d'autres titres que le présent décret; décrête, en outre, que le présent décret sera très incessamment porté à la sanction du roi. »

M. le Président annonce à l'Assemblée qu'il est parvenu à sou adresse une bolte ficelée et cachetée, déclarée contenir quatre-vingts pièces de différente argenterie, dix pièces d'argenterie étrangère, neuf morceaux d'or, deux cent quatrevingt-cinq livres dix-huit sols, argent de France, et que ce don, qui n'a été accompagné d'aucune lettre d'envoi, est simplement intitulé: Dons patriotiques de la ville de Roscoff.

M. le Président annonce ensuite que M. Faul con, député suppléant de la sénéchaussée de Poitou, dont les pouvoirs ont été vérifiés, demandé à être admis dans l'Assemblée, en remplacement de M. Filleau, décédé.

Cette admission est ordonnée.

M. Faulcon monte à la tribune, où il prête le serment civique dans la forme accoutumée.

M. le Président informe l'Assemblée que M. le garde des sceaux vient de lui adresser des expéditions en parchemin, pour être déposees dans les archives de l'Assemblée nationale:

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