Ce font des germes, illuftres états, que nos ancêtre'sTM ●nt jettés dans un fol fertile, auxquels une longue fuite d'années a laiffé prendre racine, dont des circonftances fucceffives ont malheureusement favorifé le développement & la maturité, & dont il étoit réservé à nous leur poftérité, de cueillir la trifte moisson pour en goûér les fruits amers. Un fiecle s'eft écoulé il y a quelques années, depuis qu'en 1668 les murs de ce château retentirent de la voix d'un roi (*) qui, pénétré de la plus profonde douleur fit fes derniers adieux aux états aflemblés: & nous éprouvons aujourd'hui, que cette voix n'a été que trop véridique en prédifant les malheurs fous lefquels noust gémiffons. Il y aura bientôt un demi-fiecle qu'un citoyen candidat au trône, en faifant de fa plume l'ufage qu'il convient à un homme libre, prédit également le danger qui menaçoit la république, en marquant précisément (†) (*) Le roi Jean Cafimis, peu avant fon abdication du trône de Pologne, en 1668, en confeillant à ses sujets d'élire un roi durant fa vie, leur adreffa entr'autres dans un difcours, les paroles fuivantes. Plût à dieu que je fulle faux prophéte! Mais il eft certain que fans cette dection, la république va tomber au pillage & devenir la proie des nations voisines. Le Mofcovite & le Ruffe prétendrone avoir droit fur les provinces qui parlent leur langue . & s'empareront du grand-duche de Lithuanie. Les frontieres de laGrande Pologne feront ouvertes au Brandebourg; & cette puiffance s'accordera avec la Suede au fujet de la Prusse Royale), ou elles en feront le théâtre de la guerre, pour y' difcuter leurs prétentions. La maison d'Autriche, quelque pures que foient fes intentions, ne manquera point de profiter de ce dépouillement, & pensera à ses intérêts, en s'emparant de Cracovie, car chacun aimera mieux posséder une partie de la Pologne par le droit du plus fort & à titre de conquête, que de regner fur la totalité du royaume, affuré par fes anciens privileges contre le pouvoir de fes' fouve rains. (+) Le roi Stanifla's, duc de Lorraine & de Bar, dat:s un ouvrage originairement écrit en polonois, fous le titre de la Voix libre du citoyen, & qui a été tra fuir en françois fous celui d'Obfervations fur le gouvernement de Pologne, dans les ouvrages du Philofophe bienfaisant On ys trouve - entr'autres ces paffages remarquables ( préface les circonfiances qui fe font vérifiées de nos jours: mais ces voix criant au défert, n'étoient écoutées de per fonne : les citoyens, auffi infenfibles que des arbres mobiles, mais inanimés, étoient dans la plus profonde fécurité, & ne s'inquiétoient nullement de l'avenir le plus effrayant. (La fin à l'ordinaire prochain. ) ALLEMAGNE. HAMBOURG ( le 24 Mai.) Le fénat de cette ville a fait publier un placard qui met hors de cours, comme étant de bas alloi, les pieces d'un fou qui portent l'empreinte du Mecklenbourg, fous les dates de 1774 & 1775. Tout ce qui fe paffe en Pologne fait craindre que cette république n'ait de nouveaux malheurs à redouter. On affure que les cours de Vienne & de Berlin ont refufé la médiation de celle de Pétersbourg, pour terminer les différends qui fe font élevés au fujet de la démarcation des frontieres; pag. 41.) Il eft certain que l'édifice de notre république : en va même jusqu'à dire qu'elles demandent que la Ruffie engage la république de Pologne à fixer fes nouvelles frontieres, conformément aux cartes qui lui ont été remifes par le baron de Rewitzki & le Sr. de Benoît. L'armée de Suede monte actuellement à 75000 hommes, bien difciplinés, bien exercés, & toujours prête à mercher au premier ordre. Sa flotte n'a jamis été fur un auffi bon pied; on croit que le roi va entrer dans la grande alliance du Nord. Depuis que l'importation & l'exportation font entierement libres, le commerce de ce royaume, & avec lui la fortune des citoyens, ont pris une nouvelle confiftence. Les impôts ont été diminués de beaucoup, fans que la couronne y ait perdu; il y a au contraire, dans le tréfor, des fommes confidérables, toujours prêtes pour appuyer les entreprifes des négocians, ou foutenir ceux qui en ont befoin. Le crédit public fe rétablit ; & tout cela eft l'ouvrage du fage Gustave, qui veut rendre heureuse une nation qui alloit fe perdre, comme a fait la république de Pologne. On apprend que le feldt-maréchal comte de Romanzow eft parti de Mohilow pour se rendre à Moscou, & que le général Glebow commandera l'armée ruffe en fon absence. 1 HANOVRE (le 23 Mars.) Ce fut le 11 de ce.mois que fe répandit à Zell le bruit de la mort de la reine de Danemarck; elle étoit arrivée pendant la nuit. La femaine précédente, cette princeffe infortunée fe trouva incommodée, mais point affez cependant pour garder la chambre, & fe priver du plaifir de la promenade; elle fe plaignit d'un mal aux yeux & à la gorge ; à fon retour de la promenade, elle fe mit au lit, & appella fon médecin; le mal empirant, on fit venir d'ici le docteur Zimmermann, qui arriva le 7 à Zell, & qui déclara le 8, que S. M. avoit la rougeole: cette maladie fe manifefta en effet peu-à-peu; le 9, elle parut pleinement, & la reine fut foulagée. Le 10, la rougeole fut beaucoup plus forte & la princefle très- foible, au point même de faire défefpérer de fa guérifon, quoique le genre de fa maladie fût parfaitement connu; le même jour, à minuit, elle expira. Le 12, on dépofa le corps dans le maufolée des princes, en attendant les ordres ultérieurs de la cour de Londres. BERLIN (le 24 Mai. ) Le 20 de ce mois, le roi fit la revue générale des régimens qu'il avoit vus féparément. Le 21 & le 22, S. M. vit manœuvrer ces différens corps, qui étoient campés dans les environs de Mariendorf & de Tempelhof, & elle parut très- fatisfaite de la célérité & de la précifion avec lesquelles les troupes exécuterent leurs différentes évolutions. Demain 25, le roi partira pour Magdeboug, d'où il reviendra le 30. à Potzdam. Le Ier. Juin, S. M. prendra la route de Cuftrin, de Stargard & de la Pruffe Occidentale. S. M. a déclaré généraux d'infanterie, les lieutenans-généraux de Bulow & de Tawenzien; lieutenans généraux, les généraux - majors de Horft & de Mollendorf, & généraux - majors, les colonels d'infanterie Prettwitz & Zetteritz. Le roi a été touché de la mort du colonel Quintus Icilius, & a dit à un de fes généraux: voilà comme mes amis me quittent les uns après les autres: le tems approche, mon ami, où nous en ferons autant; ou vous me quitterez, ou je vous quitterai moi-même. S. M. a écrit une lettre à la veuve de ce.cole-nel, née baronne de Schlabrendorf, dans laquelle -S. M. lui marque, qu'elle lui fait préfent de 3000 -écus, & lui affure une penfion annuelle de 1200 Ecus; qu'elle fe charge de l'éducation de fes enfans, & prend pour fon compte la bibliotheque & le cabinet de médailles du défunt, dont il lui fera compter la valeur. On mande de Konigsberg, qu'un incendie des plus terribles y a réduit en cendres, le 10 de ce mois, environ 200 maifons, & plufieurs édifices publics, entre lefquels on compte l'hôpital de St. George, une des plus grandes églifes, les cafernes royales, la manufacture angloise de cuirs &c. Il y a péri quelques perfonnes, & beaucoup de bétail. Ce malheur réduit un grand nombre d'habitans à la plus extrême mifere. Le dommage feul des bâtimens eft évalué à 2 millions de florins. Heureusement que le quartier incendié n'eft pas celui des négocians; ce qui fait que le commerce a peu fouffert. RATISBONNE (le 20 Mai.) Il femble que l'efprit de révolte foit une épidémie qui fe propage avec autant de fureur que de rapidité dans plufieurs états de l'Európe. On apprend qu'il y a eu en Baviere une émeute à l'occafion de la cherté & de la difette des grains. On ne dit pas que les payfans s'y forent livrés à aucun excès; mais ces malheureux ont donné des marques du plus grand défefpoir, & ont déclaré que fi on ne leur donnoit pas du fecours, ils viendroient fe délivrer du fardeau de la vie fous les yeux de l'électeur. Ce prince a pris les plus fages mefures pour leur procurer un prompt foulagement. Quoique la tranquillité foit rétablie en Bohême. il fe paffe peu de jours fans que l'on conduife quelques coupables dans les prifons de Prague. On remarque néanmoins qu'il y a peu de payfans parmi ces prifonniers, qui font la plupart des vagabonds, accoutumés à fubfifter de leurs brigandages. Neuf des principaux féditieux ont été pen |