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te Sulkowski, en fa qualité de maréchal de l'ordre équestre à ce confeil, alla éveiller le roi, & l'informa que le grand-général, comte de Branicki, avoit donné ordre à toutes les troupes qui se trouvent en cette capitale, excepté aux gardes, de s'affembler le même jour, pour prêter entre fes mains le ferment de fidélité. Le prince Sulkowski représenta au roi que cet acte d'autorité étoit contraire à celle du confeil, dont il demanda l'affemblée extraordinaire. S. M. y confentit; & les billets de convocation ayant été expédiés, l'affemblée se trouva formée à 6 heures du matin. On fit fommer le comte de Branicki de venir au confeil pour y rendre compte de fa corduite; mais il répondit qu'il étoit indépendant de cette affemblée, & que fi elle avoit à lui communiquer quelque objet intéressant, elle pouvoit le faire par écrit. Pendant que le confeil délibéroit fur cette réponse inattendue, le corps d'artillerie, & les autres régimens prêtoient le ferment de fidélité entre les mains du comte de

Bruhl, grand maitre de la couronne, au roi & au grand-général.

Le confeil fe raffembla le 26, & exigea que les miniftres, les chanceliers, les généraux & les maréchaux lui prêtaffent ferment de fidélité; mais ils refuferent de procéder à cette cérémonie. La fuite de ce refus pique la curiofité publique.

Les féances du confeil continuent régulierement chaque jour. Dans celle du 29, on parut fe calmer un peu fur la démarche du comte de Branicki, furtout lorfqu'on fut informé que le baron de Stackelberg avoit expédié un courier à Mofcou pour demander de nouvelles inftructions fur ce qui fe paffe aujourd'hui. D'ailleurs, le grand-général a prouvé qu'il ne s'étoit attribué d'autre pouvoir que celui que lui donne le 7e. paragraphe relatif aux grands-généraux. Il porte « que

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la difcipline militaire, la fubordination, l'exercice, la diftribution, le cafernement, le campement, en un mot le commandement général des troupes dépendront uniquement des grandsgénéraux, conformément à ce qui fera prescrit par le réglement militaire qui fera joint aux nouvelles conftitutions ». Il eft vrai que la délégation, qui a terminé fes opérations à la hâte n'a pas achevé de rédiger ce réglement, qu'elle avoit commencé; mais il n'a pas été moins lu & approuvé, tout imparfait qu'il étoit, par la diete, qui a très-légerement donné fa fanction à bien des articles fufceptibles de l'examen le plus réfléchi. On ignore files deux autres miniftres des cours alliées interviendront dans cette affaire; mais le comte de Branicki paroit dans la ferme résolution de jouir de toutes les prérogatives qui font attachées à fa charge. On affure qu'il fera affembler toutes les troupes de la couronne aux environs de cette capitale, pour les exercer, & tout le monde convient qu'elles en ont grand befoin; il a déjà expédié, pour cet effet, des ordres aux régimentaires de l'Ukraine, de la Podolie, de la Wolhynie, de la grande & petite Pologne. On ne doute pas que le comte Oginski n'en agiffe de même en Lithuanie, dont il eft grand-général.

Tandis que les grands-généraux fe propofent de remettre en haleine les troupes exiftantes actuellement, & fi longtems négligées, on travaille à mettre l'armée de la couronne fur le pied où elle a été fixée par les nouvelles conftitutions. On établit des dépôts de recrues en plufieurs endroits, entr'autres à Térefpol & Grodno, pour recruter les gardes lithuaniennes. On enrôle nonfeulement les nationaux, mais encore les vagabonds & gens fans aveu, que les troubles ont multipliés dans nos provinces. Il reste à fçavoir fi les fonds affignés par la diete rentreront affez

tor, & feront fuffifans pour ces dépenses précipitées. Quelques perfonnes prétendent qu'il y fera fuppiéé par la cour de Ruffie, qui paroit s'être ménagé la plus grande influence dans la conftitution actuelle, & qu'elle prendra l'armée de la république à fa folde, dès-qu'elle fera portée fur Te pied fixé par les états. Les troupes de cette puiffance, aux ordres du général Romanius, paroiffent accréditer ces conjectures en continuant de féjourner dans le royaume. On fe rappelle qu'elles devoient l'évacuer pendant ce mois; mais on recule actuellement ce terme au mois de Septembre prochain. Quant à l'armée de Romanzow, on mande de Podolie qu'elle s'approche de l'Ukraine & du palatinat de Braclaw, & qu'avant la fin de ce mois, elle fera rendue enfin fur les terres de la domination ruffe : le feldt-maréchal de Romanzow a déjà transféré fon quartier genéral de Mohilow à Zytomiers. Les Autrichiens ne font pas entrés dans le palatinat de Sendomir; les nouvelles qui les concernent font vagues & contradictoires. On difoit ici, le 26, qu'ils exigeoient qu'on leur remit Kaminieck, dont ils avoient déjà formé le blocus; mais ces bruits ont été détruits par les avis reçus de cette place fe 26 & le 27. On n'apprend pas que les Prulliens faffent aucuns mouvemens qui puiffent inquiéter Ta république. Ils doivent s'affembler, le 6 Juin, près de Graudentz, pour y former un camp qui fera compofé de tous les régimens en garnifon dans les deux Pruffes, excepté le régiment qui eft cantonné autour de Dantzig. La réunion de ces troupes, qui formeront un corps de 36, 500 hommes, n'a d'autre objet que de grandes manoeuvres, & la revue générale que S. M. Pruf. eft dans l'ufage de faire chaque année.

L'affaire de la démarcation eft toujours au même point où elle étoit au départ des commiffai

res; le foin de la terminer eft remis au confeil permanent. On aime à croire qu'il s'en acquittera avec plus de fuccès que la délégation, & c'est dans cette confiance qu'on affure que deux des puiffances alliées rendront tous les diftricts qu'elles ont occupés, & qui n'étoient point compris dans la convention de Pétersbourg.

Les opérations de la commiffion du tréfor de la couronne fe bornent jufqu'à préfent à la publication de deux univerfaux. L'un abolit les exemptions des droits d'entrée & de fortie, qui avoient été accordées à plufieurs perfonnes, & foumet indiftinctement à ces taxes toutes les claffes de citoyens. L'autre impofe une taxe d'un florin fur chaque livre de tabac venant de l'étran ger, & affujettit la culture de cette plante en Pologne à ro gros pour livre.

La plupart des difcours que les oppofans ont prononcés à la diete, paroiffent imprimés. Après celui du grand-général Branicki, qu'on regarde comme le plus fort & le plus éloquent, on dif tingue ceux du grand-maréchal prince Lubomirski, & du général-major Wilczewski. Dans le difcours que le prince Lubomirski prononça à l'a premiere féance de la diete, le 27 Mars, il s'exprime entr'autres en ces termes: Les traités de commerce avec les puiffances voisines, en étendant en apparence notre commerce étranger, affoibliffent effe divement celui de l'intérieur : le traité furtout qu'on a conclu avec le roi de Pruffe, nous menace de la ruine infaillible de la ville de Dantzig, & de l'inévitable perte qui en doit réfulter pour les provinces de la république, de la décadence & de l'anéantisement total de notre commerce inté rieur. Notre impuiffance nous a forcés à nous foumettre à tout ce qu'on a jugé à-propos de nous preferire à cet égard Après l'établissement de la douane près Marienwerder,pour ruiner & vexer notre pays,

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& cela dans un tems où les anciens traités fubfif toient avec cette puiffance, nous pouvons regarder comme très-poffible Texécution de tous les projets, quelque étranges qu'ils foient? L'établissement du confeil permanent, par lequel l'autorité du trône a été diminuée, & les rois ont été dépouillés de leurs principaux privileges, qu'on a donnés à d'autres, cet établiffement renverse la forme de notre gouvernement. Il femble qu'on ait penfé que jufqu'a- préfent il n'y a eu en Pologne ni bon ordre, ni juftice. C'eft fous ce prétexte que, fous le nom de bon ordre, on introduit l'anarchie; fous celui de juftice, l'oppreffion des citoyens; sous le prétexte de fauver la patrie, on la perd de fond en comble. Toutes les fuites dangereufes qui doivent néceffairement réfulser de ces innovations, fe manifefteront bientôt en leur entier; & alors il nous fera permis de nous plaindre fans danger devant le trône de V. M., & devant toute la nation ; mais qui de nous ne doit point gémir dès-à-préfent fur la garantie générale que la cour de Ruffie a accordée à tout ce qui a été arrêté par la délégation? Qui ne doit point fe fentir bleffe jufqu'au fond du cœur de ce qu'on a deftitué la république du droit de fe gouverner elle-même, & qu'il ne lui eft plus permis de changer fes propres loix récem ment faites, fans en avoir préalablement obtenu l'aveu des puiffances voifines? Je m'acquitte de mon devoir, en traçant au pied du trône de V. M. l'affligéant, mais fidele tableau de l'extrême fervitude où nous fommes réduits. Si j'ai eu la douleur d'étre le témoin des procédés qui ont opéré la ruine de la patrie, il me refle au moins la fatisfaction d'être fidele minifire de V. M. & de la république, & d'avoir obfervé le ferment que j'ai prété comme fénateur, en m'oppofant à tout ce qui étoit préjudiciable à ce royaume.

Lorfqu'il fut queftion dans la féance de la die

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