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que la vapeur qui s'élevait des blessures et du sang versé, forma comme un brouillard qui obscurcit le soleil. Lorsque Harald, que la vieillesse avait rendu aveugle, entendit, par le murmure des siens, que l'ennemi prenait le dessus, il demanda à Bruno, qui conduisait son char, comment Sigurd avait rangé son arinée. Le pseudoBruno lui répondit en riant, qu'il avait adopté l'ordre cunéiforme. Comment a-t-il pu apprendre cette manœuvre, s'écria le vieillard, puisque c'est Othin qui l'a inventée et qu'il ne l'a enseignée qu'à moi! Puis prenant un glaive dans chaque main, il fait pousser ses chevaux vers le centre de l'armée de Sigurd, immole un grand nombre d'ennemis, jusqu'à ce qu'enfin Othin le renverse de son char et le tue d'un coup de massue sur la tête.

Aussitôt que Sigurd vit le char du roi vide, il fit cesser le combat et chercher le corps de son oncle. On le trouva sous un monceau de morts. Il périt dans cette bataille 30,000 nobles du côté des Danois, et 12,000 du côté des Suédois. Le corps d'Harald fut brûlé sur un bûcher fait de la proue dorée de son navire, et le feu fut entretenu avec tout ce que l'on put trouver de plus précieux. Sigurd y fit placer un cheval magnifiquement harnaché, et demanda aux dieux que Harald, porté sur son coursier, arrivât le premier dans le Walhalla, pour y préparer une bonne réception à ses amis et à ses ennemis. C'est ainsi que Sigurd Ping devint roi de Suède et de Danemark.

Son fils Ragnar était le plus fort et le plus beau de tous les hommes. C'est sur lui que la tradition a accumulé tous les hauts faits des peuples du Nord pendant le huitième et le neuvième siècle; ce n'est plus un personnage mythique, mais, comme Charlemagne dans les poésies épiques du moyen âge, il est le type des exploits de la nation entière. Nous allons donner un aperçu de ces traditions, sans entrer dans tous les détails.

Il paraît que l'union des différents états du Nord ne fut pas de longue du

rée, car les exploits de Ragnar commencent par une expédition dans la Norvège, qu'un chef suédois nommé Froé tyrannisait après avoir tué le roi Syvard. Froé ayant fait déshonorer les plus nobles femmes de la Norvège, un grand nombre d'entre elles, à la nouvelle de l'approche de Ragnar, vint rejoindre ce prince, et dans la bataille qu'il livra à Froé, l'une d'elles, Lathgertha, toujours présente au plus fort de la mêlée, décida la victoire en faveur du roi de Suède. Après la bataille Ragnar envoya demander sa main. La vierge demeurait seule dans la montagne; elle feignit d'être favorable aux vœux de Ragnar, et lui fit dire de venir à la nuit tombante. Puis elle attacha à sa porte un ours et un chien. Ragnar vint seul, tua l'ours de sa lance, étrangla le chien de ses mains, et s'empara de la vierge.

Pendant qu'il restait en Norvège, retenu par l'amour qu'il ressentait pour sa femme, les habitants de la Jutie et de la Scanie attaquaient les Séelandais, qui lui étaient restés fidèles; Ragnar les vainquit dans une grande bataille et s'avança dans la Scanie; là, ayant entendu parler de Thora, fille de Heroth, roi ou, selon d'autres, comte de Suède, il devint amoureux d'elle et répudia Lathgertha, qui lui avait donné un fils et deux filles.

Heroth avait trouvé à la chasse un serpent qu'il rapporta à sa fille Thora; mais entre les mains de Thora ce serpent grandit bientôt outre mesure. Chaque jour il dévorait un bœuf, et, roulé autour de la maison qu'habitait la princesse, il en interdisait l'accès à qui conque aurait voulu s'en approcher, car son haleine donnait la mort. Le roi Heroth, dans le désir de se voir délivré d'un si cruel fléau, fit proclamer qu'il donnerait la main de sa fille à celui qui tuerait le serpent. Une nombreuse jeunesse périt dans cette épreuve: néanmoins Ragnar résolut de tenter l'entreprise. Il se fit faire des habits de laine et de peaux, de telle manière que le poil était en dehors; couvert de ces vêtements, il se

jeta à la mer en plein hiver, et l'eau qui resta attachée aux poils de ses vêtements se condensa bientôt en glace et le couvrit comme d'une enveloppe de corne. Au moyen de ce stratagème, le poison que le serpent vomit sur lui ne lui fit aucun mal; et comme d'ailleurs il repoussait à l'aide de son bouclier les morsures du monstre, il finit par le tuer avec son épée. Alors Thora sortit de sa prison et lui demanda qui il était Ragnar lui répondit qu'il avait hasardé sa vie et combattu le serpent pour l'amour d'elle; que bien qu'il ne fût âgé que de quinze ans, il était parvenu à vaincre le monstre, et que désormais elle était libre. Le roi de Suède et ses courtisans, qui pendant le combat s'étaient réfugiés dans des tours, se mirent, quand le danger fut passé, à plaisanter Ragnar sur. ses vêtements, et lui donnèrent le surnom de Lodbrog (brog, bracca, et lod, hirsutus) (*). Toutefois on ne put lui refuser Thora, dont il eut six fils.

Pendant que Ragnar Lodbrog se livrait tout entier à son amour pour sa femme, la Jutie et la Scanie se révoltèrent de nouveau. Dans son impuissance de leur résister, il se vit forcé d'implorer l'appui de Lathgertha, sa première femme, qui s'était mariée à un chef norvégien. Celle-ci, oubliant l'affront qu'elle avait reçu, pour ne se rappeler que son premier amour, vint au secours de Ragnar avec son fils et son mari, et repoussa les insurgés. Peu de temps après, Thora mourut, et Ragnar, pour se distraire de sa douleur, songea à de nouvelles entreprises, et voulant se former une armée qui fut entièrement dans sa dépendance, il ordonna que chaque père de famille envoyât à sa cour le fils dont il ferait le moins de cas, ou un esclave dont la fidélité lui paraîtrait suspecte. De ce ramas d'hommes méprisables il forma une armée redoutable par sa discipline, et d'autant plus acharnée au combat que chaque

(*) C'est sous ce nom qu'il est désigné dans plusieurs chroniques des Franes.

șoldat avait à se laver de son ancienne ignominie.

Ensuite il décréta que toutes les contestations, sans admettre les lenteurs d'une procédure, seraient décidées par douze personnages notables: ce qui est la plus ancienne trace du jury que l'on ait découverte jusqu'à présent.

Le premier pays contre lequel il tourna ses armes, fut l'Angleterre; il tua le roi de cette contrée, ainsi que les chefs de l'Écosse et des Hébrides, et il donna le gouvernement de ces pays à ses fils Syvard et Rathbarth; le fils qu'il avait eu de Lathgertha, Friedleb, fut chargé de la Norvège et des Orcades.

Mais bientôt une nouvelle insurrection du Danemark vint interrompre ses conquêtes; il battit Harald, le chef de cette révolte et de celles qui la suivirent. Celui-ci s'enfuit en Allemagne. Ragnar, après avoir distribué à ses soldats les biens des révoltés, alla attaquer l'Allemagne, fit éprouver une défaite à Charlemagne, et imposa un tribut aux Saxons.

Pendant ce temps, le roi de Suède Heroth était mort; Ragnar alla conquérir le royaume pour ses fils. Il y avait parmi les Suédois un homme très-fort, qui avait sept fils; on convint que Ragnar le combattrait avec trois de ses fils, et que l'issue du combat déciderait de celle de la guerre. Le Suédois et ses sept fils furent tués, et Bioern, fils de Ragnar, devint roi de Suède. On lui donna pour surnom Jernsida (flanc de fer), parce qu'il n'avait pas même été blessé dans le combat.

Ragnar rassembla en Danemark une nouvelle armée, et étendit son royaume vers l'est et l'Hellespont, en Russie et en Biarmie; mais pendant qu'il était, ainsi que ses fils, occupé à la conquête de ces pays lointains, Ubbo, son plus jeune fils, qui, au commencement de la campagne, était trop jeune pour porter les armes, se révolta contre son père en Gothie. La mère de cet Ubbo était la fille d'un simple citoyen, dans la maison duquel Ragnar s'était

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introduit sous des habits de femme. Ubbo vénérait sa mère, parce qu'elle wait pris un roi pour amant, mais il méprisait son père qui n'avait pas rougi de descendre à l'amour d'une fille de basse condition. Battu par Ragnar en Gothie, il s'enfuit pour rassembler quelques troupes et attaquer de nouveau son père en Séelande. Son armée l'ayant abandonné pour prendre la fuite, il résista seul aux ennemis, et en tua un si grand nombre que leurs cadavres formaient autour de lui comme un bastion, d'où il se défendit pendant long-temps; enfin, il fut pris et tué, non sans avoir auparavant rompu les chaînes dont on l'avait chargé.

Ragnar était retourné en Russie, quand il en fut rappelé par de nouvelles révoltes qui éclatèrent en Norvège et en Suède, et dont nous épargnerons le récit à nos lecteurs. Harald, qui les avait suscitées, tenta encore la fortune avec le secours des Saxons, mais il fut hattu et s'enfuit à Mayence près de Louis-le-Débonnaire. Devenu chrétien, il établit pendant quelque temps sa domination, ainsi que la religion chrétienne, dans la Jutie méridionale; mais Ragnar parvint à le chasser et à rétablir le paganisme.

Enfin Ragnar, dans une de ses excursions, fut fait prisonnier par Hella, roi d'Irlande, qui le fit jeter dans une fosse remplie de serpents, sous les morsures desquels il expira en chantant ses hauts faits. L'ancien chant que Ragnar est supposé avoir chanté dans la fosse aux serpents est parvenu jusqu'à nous, et sous beaucoup de rapports il s'accorde avec le récit de la chronique de Saxon le grammairien, dont nous venons de donner une analyse: il s'y trouve pourtant des faits intéressants que Saxon n'a pas recueillis et que d'autres traditions nous ont transmis. Nous en citerons un qui concerne particulièrement la Suède.

Après la mort de Thora, dit le chant dont nous venons de parler, Ragnar, fuyant l'amour des femmes, laissa le gouvernement de son pays à ses fils et s'en alla faire des conquê

tes. Un jour qu'il était avec sa flotte dans une baie de la Norvège, les serviteurs qu'il avait envoyés à terre pour faire du pain, lui apportèrent des pains brûlés. Le roi mécontent les réprimanda. Alors ceux-ci lui ra contèrent qu'ils avaient vu une jeune fille, nommée Kraka; que c'était la plus belle de toutes les femmes, et que ses cheveux de soie descendaient jusqu'à terre. Ragnar en fit sa femme; mais lorsqu'elle lui eut donné quatre fils, il songea à la répudier pour épouser la fille d'Oesten, roi d'Upsala. Alors Kraka découvrit à Ragnar qu'elle était Aslang, la fille de Sigurd et de Brynhilda. Ragnar le crut, et fit la guerre à Oesten, qui, après bien des revers, finit par être battu, non par Ragnar, mais par ses fils. A Ragnar succéda en Suède Björn Jernsida.»

Ces traditions, plutôt historiques que mythiques, étaient autrefois trèsrépandues dans le Nord: naguère encore on les rencontrait chez les paysans de la Norvège, et même aujourd'hui on les retrouve souvent chez les habitants des îles Féröe. Elles furent pour le Nord ce que furent les traditions de Charlemagne pour la France, les Nibelungen pour l'Allemagne, Arthur pour la Grande-Bretagne. Elles prirent naissance et se propagèrent à l'époque où le christianisme commença à remplacer le paganisme, et ne contribuèrent pas peu à faire oublier l'ancienne my-. thologie. On a vu que dans ces traditions l'histoire du Nord commence déja à se lier à celle des autres pays de l'Europe; bientôt nous allons voir des missionnaires venus de l'empire des Francs découvrir le Nord et le convertir; mais, avant de les suivre dans cette généreuse entreprise, nous dirons quelques mots sur la constitution politique des petits états dont se composait la Suède pendant l'époque païenne.

Ce qu'il importe surtout de se rappeler en jugeant la société barbare des peuples du Nord, c'est que l'édifice social et l'organisation politique étaient regardés comme l'œuvre des dieux. Presque jamais des troubles inté

rieurs ne changèrent la base des états; toute révolution occasionée par la conquête était accompagnée d'une révolution religieuse, car les conquérants apportaient presque toujours de nouveaux dieux aux vaincus; et c'est ainsi que l'introduction du christianisme fut précédée et suivie d'une révolution totale dans l'état.

Les premiers chefs étaient nommés Diar ou Drottnar, mot qui signifie dieu, maître, prêtre et juge. Othin, auquel les mythes attribuent les institutions sociales, rendait lui-même la justice accompagné de douze diars, comme le fit plus tard le roi d'Upsala. Le peuple s'assemblait trois fois par an pour les grands sacrifices, et l'endroit où cette solennité avait lieu était sacré. Participer aux mêmes sacrifices était pour les différentes tribus un signe de paix et de bonne intelligence. Dans ces assemblées périodiques, on terminait les contestations, on délibérait sur les entreprises qui auraient lieu dans l'année, et l'on faisait le commerce d'échange. Le mot Ting, qui désigne ces assemblées, signifie tout à la fois sacrifice, repas, assemblée politique, tribunal et foire. Tout père de famille était le drottnar de sa maison; il y était souverain. Une infinité de petits rois ou princes remplissaient des fonctions analogues dans une plus ou moins grande étendue de pays.

Le roi d'Upland exerçait une sorte de suzeraineté sur la Suède, parce que dans son district se trouvait le temple d'Upsala (*), qui était le centre du culte; mais il n'était élu que par les Uplandais, et, comme tous les autres rois, il était pris dans la famille royale.

La suite du roi, les jarls ou comtes, formaient une sorte de noblesse, mais ils n'avaient aucun privilége sur les autres hommes libres, qui pouvaient devenir comtes en se faisant admettre parmi les compagnons du roi.

La principale attribution du roi consistait à offrir les sacrifices et à rendre

(") Voyez, pl. VII, la restauration de ce temple d'après les traditions anciennes.

les dieux favorables. S'il survenait une disette ou quelque autre malheur public, on le chassait ou on l'imamolait pour apaiser le courroux des dieux.

La nation proprement dite était composée des propriétaires libres et nobles; l'esclave n'avait aucun droit, même dans l'autre vie. Il ne pouvait entrer dans le Walhalla, à moins qu'il ne fût mort en combattant près de son maître. Les Suédois les méprisaient tellement que c'est à peine s'ils daignaient accepter leurs services. Störkodder, dangereusement blessé dans une bataille, refusa les secours que lui offrait une esclave, et Eystein, roi d'Upsala, ayant demandé aux habitants du Throndelag qui ils voulaient pour roi, de son esclave Faxe ou de son chien Sar, ils choisirent le chien. L'Upland abolit l'esclavage en 1295: dans les autres provinces de la Suède il ne disparut qu'en 1335.

Le peuple et l'armée étaient une seule et même chose, et la grande assemblée d'Upsala était appelée l'assemblée de toute l'armée : aussi les rois d'Upsala cherchèrent-ils bientôt à étendre de plus en plus leur domination sur les autres rois. Ingjald Illrada mourut sans avoir pu réaliser cette tentative, bien qu'il eût fait assassiner plusieurs souverains; et en effet, indépendamment de la dynastie ywarienne, nous en retrouvons encore un grand nombre.

A la mort d'un souverain, tous ses fils prenaient le titre de roi (Sokongar, roi de la mer), et pour leur part de l'héritage on leur distribuait des armes et des navires. Ils rassemblaient alors des compagnons, ou champions, et allaient infester l'Europe; souvent ils revenaient avec leurs bandes, et portaient le trouble dans l'état, surtout aux derniers temps du paganisme; souvent aussi les souverains eux-mêmes partaient pour des expéditions lointaines, et, au retour, l'armée qu'ils s'étaient formée servait parfois d'instrument à leur despotisme.

Ces usurpations du pouvoir royal déterminèrent le peuple à créer des magistrats pour défendre ses intérêts. Les Lagmanner étaient dans les gran

des assemblées les chefs du peuple, des nobles et des paysans; car ces trois classes peuvent être considérées comme n'en ayant formé alors qu'une seule. Une fois que le pouvoir royal fut sorti du cercle de l'ancienne constitution, et qu'on lui crut des intérêts autres que ceux de la nation, il devint de plus en plus dangereux pour la liberté publique. Aussi, dans les colonies qui furent établies en Islande dans les derniers temps du paganisme, on se passa tout-à-fait de la royauté le lagman y était le chef de l'état.

Le père étant le souverain de sa famille, il y exerçait le droit de vie et de mort, et, comme à Rome jusqu'au règne de Constantin, il pouvait à son gre reconnaître ou faire exposer ses enfants: la haine qu'il portait à la mère de l'enfant ou à ses parents, un rêve, un augure, suffisaient pour qu'il prononçat l'arrêt fatal. Cet usage, qui se retrouve chez beaucoup de peuples paiens, même chez les plus civilisés, et qui existe encore en Chine, était autorisé par les lois en Islande. Il est très-probable que dans l'origine c'était un sacrifice offert aux dieux, et la coutume que quelques peuples de l'Asie avaient de prostituer leurs filles dans les temples d'Astarté n'était peutêtre qu'un adoucissement de la loi religieuse. Dans le Nord, les missionnaires chrétiens employèrent toute leur influence pour abolir cet usage, ils n'y parvinrent que peu à peu. Les premières lois cléricales permettaient encore d'exposer les enfants qui n'étaient pas bien faits, et les Islandais, en embrassant le christianisme, se réservèrent le droit de faire de leurs enfants ce que bon leur semblerait, comme aussi de continuer à se nourrir de la chair du cheval.

mais

La monogamie était de règle, mais les rois épousaient quelquefois plus d'une femme, et chaque citoyen pouvait avoir autant de concubines qu'il lui plaisait. Les fils légitimes, ou plutôt l'aîné seul, héritaient des biensfonds, mais les enfants naturels avaient aussi quelque part à l'héritage.

Les femmes n'étaient pas sans con2o Livraison. (SUÈDE.)

sidération dans l'intérieur de la famille, qu'elles gouvernaient pendant l'absence du mari. Comme les femmes des temps héroïques de la Grèce, elles s'occupaient à préparer des étoffes et des vêtements; de plus elles exerçaient la médecine et l'art divinatoire; souvent encore elles accompagnaient leurs époux et leurs parents dans les combats. Il y avait aussi dans les armées des vierges aux boucliers, consacrées à Othin, qui ne pouvaient se marier, et dont l'amour était funeste. Les femmes ne furent jamais enfermées dans un harem ou dans un gynécée; elles jouissaient d'une entière liberté, et ni dans l'histoire ni dans les mythes il n'est jamais fait mention d'adultère. Les filles des rois étaient bien quelquefois gardées dans des tours, que la fable suppose entourées de dragons et de serpents, mais c'était uniquement une précaution pour empêcher qu'elles ne fussent enlevées; car le désir de s'unir à une femme de haute condition, ou au moins d'une condition égale, a toujours été trèsvif chez ces peuples; et même encore aujourd'hui les lois punissent sévèrement quiconque enlève une femme d'une condition plus élevée que la sienne, et cela seul prouve l'existence du désir.

Le divorce était permis, même à la femme: souvent elle quittait son mari, parce que les concubines de celui-ci avaient trop d'autorité; souvent aussi, quand elle était vieille ou malade, elle rendait à son mari les clefs de la maison, et le quittait à l'amiable. La femme qu'on avait obtenue de ses parents, moyennant des dons, était plus honorée que celle qui avait été ravie ou enlevée.

Après le métier de guerrier, celui du barde, qui chantait les hauts faits des héros, et celui du forgeron, qui fabriquait leurs armes, étaient le plus estimés. L'humeur guerrière du peuple était entretenue, non seulement par les traditions mythologiques, mais aussi par des circonstances extérieures. Othin ne voyait pas de bon œil ceux qui arrivaient pauvres dans le Wal

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