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morales « Cette chaleur de cœur, cette sensibilité si vive, cette bienveillance innée pour ses semblables, cet amour ardent du grand, du vrai, du beau, du juste; cette horreur du mal en tout genre, cette impossibilité de nuire et même de le vouloir, cette vive et douce émotion à l'aspect de tout ce qui est vertueux, généreux, aimable »; on n'est pas moins choqué, pour peu que l'on connaisse déjà sa vie, de le voir, en tête de ses Confessions, défier qui que ce soit de se déclarer meilleur que lui, et il est certain que la modestie n'est pas son fait; mais ce que je nie, c'est qu'il y eût chez lui de l'hypocrite. Qu'on l'accuse donc d'orgueil, j'y souscris, et je reconnais que son orgueil est bien souvent déplacé, et qu'en général la personnalité tient chez lui une beaucoup trop large place; mais je repousse cette dégradante accusation d'hypocrisie. Non, Jean-Jacques Rousseau ne fut point un tartufe de morale.

On l'a accusé aussi, sans plus de fondement, de charlatanerie. Il est vrai que certaines singularités, son costume arménien, par exemple, pouvaient paraître avoir pour but de le distinguer des autres hommes et d'attirer sur lui l'attention; mais elles n'étaient certainement pas calculées en vue de cet effet elles provenaient uniquement de l'indépendance et, si l'on veut, de la bizarrerie de son caractère.

Enfin, on l'a accusé d'ingratitude, et il faut convenir qu'il semble quelquefois mériter ce reproche. Je ne parle pas de sa brouille avec Grimm, avec Diderot, avec madame d'Épinay, avec Hume, etc., qui n'eurent certainement pas moins de torts à son égard que lui-même envers eux; je parle de sa conduite å l'égard de madame de Warens, sa bienfaitrice, dont il divulgue la vie privée et les fautes dans ses Confessions. Il faudrait pourtant noter d'abord, comme circonstance atténuante, qu'à l'époque où Rousseau écrivit ses Confessions (1766), madame de Warens était morte (1765); mais ce qu'il importe surtout de faire remarquer, c'est qu'en racontant ainsi la vie de madame de Warens avec la sienne, il péchait plutôt par manque de délicatesse morale que par ingratitude. Il croit, en parlant comme il le fait de sa bienfaitrice, lui témoigner toute la reconnaissance qu'il lui doit; il ne s'aperçoit pas qu'en révélant ses fautes, il divulgué des secrets que la plus simple délicatesse, à défaut de sa reconnaissance, aurait dû lui faire taire. Il n'a pas même le sentiment de son indiscrétion. Voilà son excuse.

Tel fut Rousseau. Si je repousse les défauts qu'on lui a faussement reprochés, je n'ai dissimulé aucun de ceux qu'il eut réellement; mais j'ai montré aussi, à côté de ces défauts, les grandes qualités qui les compensaient. Je ne dirai pas avec Mirabeau, lequel

n'était pas lui-même le meilleur des juges en matière de vertu, qu'il ne fut jamais peut-être un homme aussi vertueux, et qu'il arracha mille fois plus à ses passions qu'elles n'ont pu lui dérober; mais je dirai que, quand on songe à ce que fut sa jeunesse et de quel abaissement il se releva par sa propre force, on est plus tenté de l'admirer pour ses qualités et ses vertus que de le blâmer pour ses défauts et ses fautes.

JEAN-JACQUES ROUSSEAU.

SES IDÉES MORALES.

LA LIBERTÉ. Elle est la qualité spécifique qui distingue l'homme de l'animal. Le sentiment intérieur que nous en avons plus fort que tous les arguments. Confusion de la liberté et de l'entendement. Réponse à l'objection tirée de l'incompatibilité de la liberté humaine, soit avec l'ordre général, soit avec la bonté divine. LE PRINCIPE MORAL. Que le fondement de la morale ne peut être ni la coutume, ni l'intérêt personnel, mais qu'il y nous un principe inné de justice et de vertu la Conscience. En quoi consiste ce principe pour Rousseau: difficultés et contradictions que présente sa pensée sur ce point. Que sa théorie est au fond celle de la morale du sentiment, mais sous une forme peu rigoureuse. Ce qu'il y avait d'ailleurs de juste et d'opportun

dans cette théorie.

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IDÉE GÉNÉRALE de la vertu. Pourquoi Rousseau ne veut pas qu'on la définisse l'amour de l'ordre. Que la force (le courage) est la base de la vertu. Comment elle diffère de la bonté. Définition de l'homme vertueux. Rousseau distingue le bonheur de la vertu, mais il voit dans la vertu la condition du vrai bonheur.

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La philosophie morale fut, par excellence, l'objet des méditations de Rousseau: il ne voit rien de plus beau et de plus grand que cette étude (1), il y ramène

(1) C'est ce qu'il exprime dès le début de son premier discours : « C'est un grand et beau spectacle de voir l'homme sortir en quelque

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