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140 Léonard de Beauvilliers, son frère, qui mourut à son château de Saint-Aignan, par un accident de feu qui prit à des poudres; il eut pour successeur :

150 Honorat de Beauvilliers, son frère, lieutenant-colonel de la cavalerie légère de France, qui épousa Jaqueline de Lagrange, fille de François de Lagrange, seigneur de Montigny, maréchal de France et gouverneur de Paris. Ce fut le dernier des seigneurs de Saint-Aignan, au seizième siècle; il mourut dans les premières années du dix-septième.

Le comte Claude de Beauvilliers, deuxième du nom, laissa a sa mort neuf enfants, trois garçons et six filles; du nombre de ces dernières était Marie de Beauvilliers, abbesse de Montmartre dont le nom se trouve mêlé à l'histoire du meilleur de nos rois. Voici à son sujet ce que rapporte Dreux de Radier, dans ses mémoires historiques et anecdotiques sur les reines et régentes de France, publiés à Paris en 1828:

« Le peu de progrès que fit Henri IV sur le cœur de la marquise de Guercheville, le détermina à chercher une maîtresse plus indulgente, et des plaisirs plus vifs que ceux que donne la vertu qu'on est contraint d'admirer; il crut avoir trouvé ce qu'il cherchait au siège de Paris. Il avait assiégé cette ville immense au mois de mai 1590. Ce fut pendant les opérations de ce siège qu'il vit madame de Beauvilliers, fille de Claude, comte de Saint-Aignan, mort à la suite du duc d'Alençon en 1594, elle avait été élevée dès

l'enfance, au monastère de Beaumont-les-Tours, auprès d'Anne Babou de la Bourdaisière, sa tante, de laquelle elle fut dans la suite nommée coadjutrice. Il ne paraît pas qu'elle ait été nommée abbesse de Montmartre avant l'an

1597.

<< Sa vocation, ainsi que celle de bien d'autres filles de qualité, n'était autre que le vœu de ses parents, une fortune à ménager, un grand nombre d'enfants; et elle était de ces victimes qui font hautement vœu de chasteté, en réclamant tout bas contre la dureté de l'usage et l'injustice du sort. Henri n'eut pas beaucoup de peine à persuader à madame de Beauvilliers qu'il y avait dans le monde quelque chose de plus agréable que la retraite. En la flattant de sa tendresse, il lui fit concevoir l'espérance d'une entière liberté. Le roi fit conduire sa nouvelle maîtresse à Senlis, et s'occupa d'elle autant que le lui permirent ses affaires, qui étaient alors dans une espèce de crise, et à la veille du dénouement heureux qu'elles eurent par son entrée dans Paris. Il n'épargna rien pour rendre le séjour de Senlis agréable à sa nouvelle conquête; mais Henry n'aimait pas un triomphe facile; et ce prince, si impétueux dans ses passions, si prompt à leur sacrifier ses plus chers intérêts, n'était capable de constance, qu'autant que celles qu'il aimait étaient capables de lui rendre leurs faveurs précieuses par le prix des difficultés. Si madame de Beauvilliers compta sur une acquisition durable, elle se méprit; il vit Gabrielle d'Estrées, et ne pensa plus aux charmes de la première. Elle prit

elle-même le parti de retourner dans son abbaye; abbesse pendant 9 ans, elle en avait 80 quand elle mourut. >>

Ce fut, comme chacun sait, dans le seizième siècle, qu'eurent lieu les guerres déplorables de religion qui désolérent si longtemps la France, et dont le contre-coup se fit sentir dans nos contrées. Selon la tradition orale, l'armée des calvinistes menaçant de surprendre Saint-Aignan, dont elle s'était approchée de fort près, les habitants effrayés de cette menace, auraient transporté l'argenterie des églises dans la ville de Selles, où on la croyait plus en sûreté, et brûlé ensuite les archives sur la place publique. Effectivement, les calvinistes étant entrés dans la ville, l'amiral Coligny à leur tête, ils y prirent leurs logements. La même tradition rapporte que le duc Claude de Beauvilliers, deuxième du nom, violemment suspecté d'hérésie, leur en avait sécrètement favorisé l'entrée ; mais cette circonstance ne se trouve appuyée d'aucune tradition écrite. Toujours est-il que l'armée des calvinistes occupa réellement notre pays à cette époque la preuve incontestable se trouve dans les historiens du temps, il suffit de quelques citations:

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On lit dans Mezerai, année 1563: les troupes de l'armée du prince prièrent l'amiral (Coligny), d'accepter la charge de général. Lorsqu'il se fut rafraîchi à Patay, il descendit dans le vendômois, et passant la Loire à Beaugency, logea ses gens dans la Sologne et dans le Berry, où il savait que le duc de Guise voulait loger les siens pour le siège d'Orléans, qui avait été résolu. »>

L. Maimbourg, dans son Histoire du Calvinisme, troisième

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édition, s'exprime en ces termes : après une si glorieuse action, (la bataille de Dreux), ce prince, (le duc de Guise) qui avait esté de nouveau déclaré lieutenant général du roi dans ses armées, entreprit de faire le siège d'Orléans; disant toujours qu'outre qu'il voulait délivrer le connétable, il était résolu d'attaquer le dragon de l'hérésie par la teste, pour l'écraser, et qu'après avoir pris le terrier. Comme il s'en tenait asseuré, il donnerait aisement la chasse aux renards, qu'il poursuivrait si vivement, qu'on les verrait bientôt réduits aux dernières extrémités. Ayant donc rafraichi et fortifié son armée dans la Beausse, où il prit Estampes et Pluviers, et les autres petites places dont les Huguenots s'étaient emparés et qui incommodaient Paris, il passe la Loire à Beaugency, et s'approche sur la fin de janvier jusqu'à quatre lieues d'Orléans. L'amiral (Coligny), qui après la perte de la bataille s'était aussi jetė avant lui par Beaugency, dans la Sologne et dans le Berry pour y refaire un peu ses troupes, comme il fit à Celles et à SaintAignan, puis avait repassé la rivière à Gergeau, dont le comte de La Rochefoucaut s'estoit rendu maître peu auparavant, reprit alors le dessein qu'il avait avant la bataille..

Dans l'inventaire général de l'histoire de France, par Jean de Serres, imprimé à Rouen en 1647, on remarque ce passage: « ainsi doncque ayant rangé sous son obeyssance (l'amiral), Selles en Berry, Saint-Aignan, Montrichard et Sully-sur-Loire, il commait la garde d'Orléans à son frère

Dandelot, avec 14 enseignes des français et landskenets, quatre des habitants de la ville et grand nombre de noblesse, sous la conduite de Duras, etc... »

L'abbé Pereau, dans sa vie des hommes illustres de France, imprimée en 1747, vient à l'appui des précédents ; il dit positivement: « le deuxième jour de janvier (1563), Coligny alla attaquer Celles en Berry, où l'on savait que les ecclésiastiques des environs s'étaient rétirés, et y avaient transporté l'argenterie de leurs églises, comme dans un lieu de sûreté. Cette place ne tint pas longtemps, et les Huguenots y firent un butin considérable. Toute l'argenterie des églises fut fondue, et l'on en tira de quoi appaiser les allemands que l'on faisait attendre depuis longtemps après ce qui leur était dù.

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Enfin, Moreri et Théodore de Bèze, confirment pleinement cette occupation de nos pays par les troupes Calvinistes; voici ce que dit le premier : « Coligny mena ses troupes dans le Berry, où il prit Celles et quelques autres places. et l'on y commit des désordres épouvantables, surtout dans les églises. « De Bèze ajoute : « En décembre 1562 et janvier 1563, l'amiral envoya son armée se rafraîchir dans les villes de Sologne, cette province lui était très dévouée. »

Il ne peut donc s'élever aucun doute sur la véracité de ce triste épisode de notre histoire; il est même avéré que la guerre civile se prolongea dans nos contrées bien au-delà de l'année 1563, car on lit dans les mémoires de Sully, à l'année 1593, que: « le voyage que fit Henri IV du côté de

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