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impartial, n'étaient pas non plus un encouragement; et de fait, n'y a-t-il pas quelque danger à tracer le tableau des mœurs, des habitudes et des actions de ses contemporains? il paraît difficile de ne pas rencontrer, surtout en province, des caractères susceptibles qui s'attribuent les passions et les vices que l'auteur a voulu dépeindre : « Il est rare, a dit un moderne et spirituel écrivain (Louis Blanc), de ne pas marcher sur l'ombre d'un bilieux ou d'un atrabilaire, et de ne pas écraser la queue d'un serpent; si le poison vous atteint, tant pis pour vos veilles, tant pis pour votre livre. » On peut ajouter tant pis aussi pour l'auteur. Quoi qu'il en soit de tous ces inconvénients, rien n'a pu me détourner de mon dessein; engagé dans cette œuvre par des considérations de pure moralité, croyant être utile à mon pays en publiant sa propre histoire, impartialement, d'après des documents authentiques, j'espère avoir achevé dignement ma tâche et mérité les suffrages des gens de cœur et de bien, seule récompense que j'ambitionne, en dédommagement de la critique injuste de sots aristarques.

J'ai écrit sans fiel et sans rancune; depuis longtemps j'ai pardonné à mes ennemis politiques et particuliers, j'ai respecté la vie privée et n'ai jamais eu la pensée de nuire à mon prochain. Je souhaite qu'on use envers moi de représailles ; d'ailleurs l'état de guerre pour des questions religieuses et politiques n'est plus dans nos mœurs. Qu'on y songe, qu'on se grave bien dans la mémoire ces paroles prophétiques d'un illustre auteur: « Nous sommes entre un vieux monde

qui finit et un nouveau monde qui commence. » Oui, un siècle plus éclairé, plus salutaire s'annonce, l'union; la paix, la tolérance, la fraternité, tels sont les éléments de la sociabilité après lesquels soupire l'humanité. Que les âmes honnêtes et indépendantes, quels que soient leurs systêmes politiques et religieux, se réunissent dans un commun effort pour l'affranchissement du genre humain; ce but tant déşirable étant atteint, une seule classe d'hommes pâlira, celle des hypocrites et des fripons; ils ne feront plus de dupes.

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PIÈCES JUSTIFICATIVES.

No 1.

Procès-verbal de la quintaine ou joûte sur l'eau. (2 février 1788).

Aujourd'hui deux février mil sept cent quatre vingt huit, onze heures du matin, nous Louis-Brice Gaultier de Guilerville, ancien avocat au parlement et maître particulier des eaux et forêts du Duché pairie de Saint-Aignan, accompagné de M. Jean-Raymond-Mazuray, avocat et procureur ducal de cette maitrise, de Charles Massicard, greffier ordinaire d'icelle, et en présence de M. Pierre Bretheau, régisseur général du duché et du sieur Joseph Ricard, inspecteur des chasses, et du sieur Pierre Legendre, arpenteur du duché, suivi des gardes des Eaux et forêts.

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Sommes transportés dans la salle du palais de cette ville, où étant sont comparus:

1° Pierre Chaudeçais, meunier des moulin Banneaux de ce duché.

2o René Ricard, meunier du moulin de galerne, paroisse de Seigi, par le sieur Rouillard, son gendre.

3o Pierre Lemoine, meunier du moulin de Seigi.

4o Gabriel Ouchet, meunier du moulin de Boutechian, paroisse de Saint-Aignan.

5o Jean Lorillard, meunier du moulin de Planche-Moreau. 6o Et Eusice Bigot, meunier du moulin de Roches, paroisse de Seigi, par François Bigot, son neveu.

Tous les quels nous ont dit qu'en conformité des titres et aveux de monseigneur le duc de Saint-Aignan, ils se présentent pour qu'il nous plaise four donner acte des offres qu'ils font de se transporter aujourd'hui, à telle heure qu'il leur sera par nous indiquée, sur la rivière du Cher, pour y briser, en notre présence et de celle du public, chacun une lance contre l'écusson qui y sera planté, et dans le cas ou ils ne parviendraient pas à casser leur dite lance dans trois courses, de payer l'amende de trois livres, et de sauter par trois fois consécutives du haut du poteau auquel sera attaché l'écusson dans la rivière du Cher, et de s'en retirer à la nage; de leur donner pareillement acte des offres qu'ils font de payer conformément à l'aveu et aux titres de mon dit seigneur, après le bris des dites lances, une somme de cinquante livres, pour être employée au repas qui se fait ordinairement dans une de salles du château.

Sont aussi comparus: Étienne Péan, Jean Pean, Jean-François Aubry, Louis Aubry, tous bateliers et pêcheurs reçus en cette maîtrise, lesquels ont dit que pour de leur part s'acquit ter du droit dont ils sont tenus envers monseigneur au désir de ses titres et aveux, ils sont prêts et offrent de se transporter sur la dite rivière du Cher, à l'endroit qu'il nous plaira indiquer pour y planter le poteau, contre lequel sera fait le bris des lances des meuniers, et de les conduire à cet effet dans des ba

teaux, suivant l'usage ordinaire, et cependant nous observent que la rigueur de la saison et le gonflement de la rivière ne leur permettent pas les uns et les autres d'exécuter ce devoir sans courir des risques et exposer leur vie, ils nous requièrent de les en dispenser.

Sur quoi nous, juge susdit, après avoir entendu M. le procureur ducal de cette maîtrise, donnons acte aux dits meuniers, bateliers et pêcheurs ci-dessus énoncés, de leur comparution et offres d'exécuter l'aveu et titre de monseigneur le duc de SaintAignan, et ayant égard à leurs observations relatives à la rigueur de la saison; disons qu'ils seront pour cette fois et sans tirer à conséquence pour l'avenir, dispensés de faire l'exercice du bris des lances auquel ils sont tenus, et les condamnons, suivant leurs offres conformes au dit aveu, de payer la dite somme de cinquante livres pour être employée aux frais du repas qui sera donné aujourd'hui dans une des salles du château de monseigneur de cette cour, et laquelle dite somme lesdits meuniers ont à l'instant payée dont ils demeurent déchargés. Dont du tout avons fait acte, et ont tous les comparants signé avec nous, sauf ceux qui ont déclaré ne le savoir, de ce enquis.

Signé Rouillard, François Bigot, Lemoine, Jacques Sellos, Berthe, Mougara, Fagarts, Magnan, Ricard, Legendre, François Aubry, Roy, Pierre Pean, Bretheau, régisseur, Gaultier, bailly, Mazurai, procureur ducal, et Massicard, greffier.

No 2.

Cahier de Doléances de la ville de Saint-Aignan du 5 mars 1789,

La ville de Saint-Aignan est composée de 463 habitants taillables, qui payent en taille, capitation, dixième, industrie et corvée, 12,102 livres 16 sols 6 deniers; de cette somme, 229

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