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même temps être rédigées de façon qu'elles puiffent être entendues des efprits même les plus bouchés : c'eft uniquement le but que l'Auteur anonyme de cet Ouvrage s'eft propofé en le publiant. Tout ce qui concerne l'art des accouchemens y est détaillé avec jufteffe, précision & clarté; il mérite de figurer à côté des excellens Ouvrages manuels qui ont paru en France depuis quelque temps.

Article fur l'Opéra. Extrait du 17. Vol. du Journal Littéraire de Berlin, à Berlin; & à Paris, chez Lacombe, Librai re, rue Chriftine, 6 Volumes in-12 par

année.

Nous tranfcrivons d'autant plus volon tiers cet article en particulier, qu'en faifant connoître de plus en plus le mérite du Journal d'après lequel nous le copions, il nous paroît très-propre à donner au Public les idées les plus juftes fur un Spectacle dont il a la gloire & le fuccès à cœur. Il s'agit de l'Opéra; mais les Auteurs du Journal de Berlin, on traduit eux mêmes cet article, de la Théorie des -Beaux Arts, du célèbre M. de Sulzer.

» Il ne règne dans ce Spectacle extraor

dinaire

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dinaire, auquel les Italiens ont donné le nom d'Opéra, * un tel mélange de grandeur & de petiteffe, de beauté & de fadeur, que je ne fais ni comment en par ler, ni ce que j'en dois dire. On voit & on entend dans le meilleur Opéra, tant de chofes infipides & puériles, qu'on diroit qu'elles n'y font placées que pour amufer des enfans, ou pour étonner une populace frivole; cependant, au milieu de ces mifères, qui par toutes fortes d'endroits révoltent le bon goût, fe trouvent des chofes qui pénètrent le cœur, font goûter à l'efprit les charmes de la volupté la plus delicieufe, le comblent de la compaffion la plus tendre, ou le rempliffent de terreur & d'étonnement. Une fcène qui nous ravit & qui nous intéresse trèseft fouvent fuivie d'une autre où les mêmes perfonnages ne nous paroiffent plus que de vils Jongleurs, qui abufent de la magnificence du Spectacle. D'un côté, choqué de ces abfurdités,

vivement,

* Le vrai nom en Italien eft Opera per mufica, Ouvrage pour être mis en mufique; enfuite, pour abréger, on a dit Opera tout court, & ce nom eft palé aux Etrangers. (Note du Journa lifte).

E

qui fe rencontrent fi fouvent dans l'Opéra, on perd le courage d'approfondir ce fujet; d'un autre côté, Te rappelant ces fcènes raviffantes, qui nous affectent fi vivement, on voudroit voir toutes les perfonnes de goût fe réunir pour donner à ce grand Spectacle le degré de perfection, dont il eft fufceptible. Il faut que je répette ici ce que j'ai dit ailleurs. *

De tous les beaux Arts, l'Art Dra » matique eft le plus important; il n'y a » aucune espèce d'énergie qui n'ait lieu » dans l'exécution d'une pièce Dramati» que fa compofition renferme tout ce que la Poëfie a de plus féduifant, & la » bonne exécution y ajoute ce qu'il y a » de plus fort dans les geftes, dans les » mouvemens, dans les caractères &

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les tons de voix. Aucune autre produc» tion de l'Art ne réunit tant d'avantages. Parmi les différentes efpèces d'ou»vrages Dramatiques, celui qu'on "nonime l'Opéra eft très fupé ieur aux » autres, vu que tous les beaux Arts fans exception, s'y trouvent réunis. Si tous

*Dans le Traité fur l'énergie, contenu dans les Mém. de l'Acad. Royale des Sciences & BellasLettres de Berlin. Année 1765.

» ceux qui concourent à rendre ce Spec»tacle brillant, Poëtes, Muficiens, Ac»teurs, Danfeurs, Décorateurs, joi

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gnoient au caractère de grands Artistes » les lumières de la Philofophie, & qu'ils » fuffent bien unis dans leurs vues; ce Spectacle entre les mains d'un Légifla"teur Philofophe, deviendroit infiniment important mais ce même Spectacle » prouve, de la manière la plus frappante, » combien les modernes font éloignés » d'en avoir la moindre idée. Telle eft » la frivolité de notre fiècle, qu'on a fçu » avilir tous les Arts dans un genre, qui » feul pouvoit les anoblir tous ».

Mais comme je ne peux me réfoudre à paffer l'Opéra tout-à fait fous filence, il me paroît que ce que je puis faire de mieux, c'est d'indiquer d'abor d ce qu'à mes yeux ce Spectacle renferme de contraire au bon goût, & d'expofer enfuite mes idées, fur le moyen de le perfectionner.

La Poëfie, la Mufique, la Danfe, la peinture, l'Architecture fe réuniflent pour former l'Opéra. Afin d'éviter la confusion, confidérons féparément le rôle qu'y joue chacun de ces Arts.

La Poëfie eft le fondement de l'Ou vrage, c'est elle qui fournit le Drame.

En Italie, où l'Opéra a pris naiffance, on en puifoit anciennement les fujets dans le monde fabuleux. L'ancienne Mythologie, l'Empire des Fées & des enchantemens, & enfuite les tems fabuleux de la chevalerie, fourniffoient le fond & les per fonnages de l'Opéra. De nos jours les Amateurs d'Opéra n'ont pas entièrement rejeté ces fujets; cependant ils en prennent fouvent dans l'histoire de semblables à ceux de la Tragédie: ainfi les uns & les autres travaillent fur le même fondles uns & les autres nous mettent devant les yeux une grande action de courte durée, remarquable par le choc des paf. hions & par la péripétie: mais dans la façon dont ils manient leur fujet, on diroit que les Poëtes Lyriques fe font fait une foi d'abandonner tout-à-fait le che min de la Nature. Leur maxime eft de faire enforte, que par les fréquens changemens de fcène, par la magnificence des décorations, par la variété & la force des objets, l'œil foit dans une surprise continuelle. N'importe que cela foit auffi peu naturel, qu'il eft poffible, pourvu qe le Spectateur foit coaftamment frappé par des objets nouveaux & éblouiffans. Il faut, de quelque manière que cela soit

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