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Sous Louis XIII, le revenu provenant de l'impôt ou des domaines montoit à 45 millions qui, auffi à 26 1. le marc, faifoient 86 millions d'aujourd'hui.

Louis XIV, fous l'adminiftration de Colbert, jouiffoir d'un revenu de 117 millions qui, à 28 l. le marc, faifoient à-peu-près 208 millions. La progreffion du produit des contributions françoifes a toujours été lente & uniforme; ce qui fait penser que, fi le choix des impofitions avoit été auffi fage, & leur répartition auffi jufte & auffi uniforme en France qu'en Angleterre, non-feulement les peuples y auroient été moins foulés, mais à peine fe feroient-ils apperçus de l'impôt les François n'ont point vu des fauts énormes & rapides comme dans la GrandeBretagne, où, de 1688 à 1701, il fut de 39 millions de 1751 à 1765, de 1o1 millions; enfin, de 1775 1786, de 128 millions.

:

Un Mémoire de M. de Boulogne prouve qu'en 1758 le revenu françois alloit à environ 308 millions.

Suivant un état fommaire des revenus publics, pour 1776, dreffé par M. Turgot, ils fe montoient alors à 377,549,027 livres.

Le résultat du Compte rendu au Roi, en 1781, porte la recette à 427,530,561 livres.

Enfin, d'après le compte du Gouvernement, publié au mois de Mars 1789, par les ordres de Sa Majesté, la recette ordinaire monte à 472,415,549 liv.

On a pu, à l'aide de ce à l'aide de ce qui précéde, former le tableau ci-après des revenus fucceffifs de la France, analogue à celui qui a été dreffé pour l'Angleterre; mais on eft forcé d'avouer que, vu l'ancienne conduite myftérieuse des Administrateurs François, ce second tableau, à ses deux ou trois derniers articles près, qui nous intéreffent le plus, n'aura pas le même degré de précifion & de certitude que le premier.

Projets de Décrets.

E

Le revenu.de la France étoit donc

En 1550, de

En 1640, de

En 1680, de

En 1758, de

En 1776, de

En 1781, de

En 1788, de

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On voit donc que, de 1680 à 1788, en 108 années le revenu de la France a crû de 264 millions, & celui d'Angleterre de 319 millions.

En Angleterre de 1751 jufqu'à ce moment, c'est-àdire, en 37 années, il a crû de 229 millions.

Dans l'efpace d'un fiècle l'impôt britannique s'eft done élevé de 48 à 267, c'est-à-dire, dans le rapport de 1 à 7 trois quarts; dans le même fiècle, les contributions françoifes fe font élevées de 208 à 472 millions, ou dans le rapport de 1 à 2 un quart; le revenu eft donc devenu, en Angleterre, huit fois plus grand, tandis qu'il a feulement un peu plus que doublé en France.

En établiffant une échelle de graduation moyenne, dans la marche de l'impôt, on peut dire que, de 1776 à 1788, fon accroiffement annuel moyen a été, en France, d'environ 5,480,000 livres; en Angleterre, de 10,660,000 liv.

Un Auteur, qui a écrit fur ces objets & dont l'Ou vrage infiniment eftimable qui fe vend chez Briand ma offert de grandes reffources, obferve qu'il peut fe faire que cette différence remarquable entre les deux loix, fuivant lefquelles fe font élevés les revenus publics dans les deux Royaumes, tienne beaucoup à la difference des conftitutions. En Angleterre, la Nation, repréfentée dans la Chambre des Communes,s'impofe elle-même.Quand elle a un grand objet en vue, quand elle veut la guerre ou quand elle a arrêté la dépenfe de fes armées ou de fes flottes, elle fe livre, fans crainte ultérieure, à la vivacité de la

paffion qui l'anime; elle fixe les facrifices qu'elle juge convenables pour la fatisfaire, La Chambre des Communes, par cela même qu'elle tient la place de toute la Nation, est certaine que fes loix fifcales, une fois faites, feront exécutées fans remontrance, fans oppofition, fans trouble. En France, un Souverain individuel décide de laguerre & de fes dépenses. Il eft plus circonfpect, parce qu'il commande des facrifices qui ne font pas les fiens, mais ceux de fon peuple, qui, difpofé à croire qu'il paye fuffifamment pour les dépenfes, fe plaindra facilement auffi a-t-on vu qu'en France les dépenfes ont toujours été le résultat des impulfions étrangères, notamment des attaques des Anglois, ou du defir de nous fouftraire, comme dans la dernière guerre, à la dureté des conditions qu'ils nous avoient impofées, ́en nous forçant même à entretenir, à nos dépens, un de leurs Commiffaires chez nous, pour s'oppofer aux travaux que nous defirions faire pour notre propre fûreté à Dunkerque.

J'ai fait voir que notre Département de la guerre doit, à caufe de notre pofition, dépenfer beaucoup plus que celui des Anglois; j'ai démontré que toutes nos autres dépenfes, à caufe de l'étendue du Royaume, devoient s'élever bien au-deffus de la proportion qui fe trouve entre notre revenu public & celui des Anglois. On trouvera les preuves les plus détaillées de cette vérité, dans l'Ouvrage indiqué chez Briand, Libraire: on y verra la marche de la dette angloife, comparée avec la nôtre qui fe trouve, comme je l'ai dit ci-devant, infiniment à notre avantage;" la dette de cette Nation s'étant accrue, dans le même efpace, bien au delà de la nôtre, quoique la guerre d'Amérique ait augmenté la nôtre de 86 millions de rentes à payer, ce qui a dû néceffairement nous donner un déficit de 41,115,012 liv., notre revenu ne s'étant accru, depuis 1781 jufqu'en 1788, que de 44,884,987 liv., tandis qu'il auroit dû être porté à 5.13,530,561 livres, au lieu de 471,415,549 liv., pour égaler la recette à la

dépenfe. Ce déficit a dû prodigieufement augmenter par la nature des emprunts & de toutes les opérations d'anticipations qu'on a été obligé de faire.

Il est donc vrai que, fans la guerre d'Amérique, nos charges annuelles feroient moindres de 86 millions, & que loin d'avoir de déficit, nous ferions dans le cas de diminuer l'impôt; il eft donc vrai que nous avons été plus économes que les Anglois, puifque, avec plus de charges réelles, nous avons moins dépenfé, moins accru notre impôt que cette Nation qui l'a augmenté de 319 millions, dans le même efpace de temps où le nôtre ne s'eft accru que de 264 millions, que cette Nation qui, en trente-fept années, pour couvrir fes déficits, l'a augmenté de 229 millions. Il eft donc vrai que notre déficit e plutôt le réfultat des circonftances qui ont enchaîné forcément nos affaires avec celles de l'Angleterre, que celui des abus des Administrateurs.

TAB L E A U

De la balance du commerce de la Nation Angloife; PAR M. CHAL MER.

L'ANGLETERRE perd, depuis nombre d'années, fur la balance de fon commerce, comme on va le voir : Elle avoit à fon avantage,

En 1761, 1762, 1763... 134,993,007 l. tournois.
En 1764, 1765, 1766

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En 1767, 1768, 1769
En 1770, 1771, 1772...
En 1773, 1774, 1775-
En 1776, 1777, 1778..
En 1779, 1780, 1781..
En 1782, 1783, 1784...

100,863,809
• 56,893,620

81,765,930
70,963,445

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47,532,241

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45,683,046

35,620,612

M. Chalmer, dans fon ouvrage fur la Grande-Bre→ tagne, & plufieurs autres obfervateurs Anglois avec lui, ont remarqué que les avantages de la balance de leur commerce étoient baiffés, en raison de ce que le prix des denrées de première néceffité étoit augmenté.

Il ne faut que le plus fimple raifonnement pour faire, fentir que l'exhauffement du prix du bled doit non-feulement opérer cet inconvénient, mais qu'il doit encore néceffiter l'augmentation de l'impôt, & ruiner la Nation.

Les ouvriers étant obligés, pour fournir à leur fubsistance, d'exiger davantage pour prix de leurs journées, les manufacturiers, les négocians font également forcés, pour reprendre leurs avances, d'élever celui de leurs marchandises, parce qu'il eft naturel que celui qui paie plus, retire plus auffi en proportion, ce qui leur fait perdre l'avantage de la concurrence chez l'Etranger. — C'est par cette réaction que tout prend un accroiffement progreffif, d'après les denrées de première néceflité.-Ce calcul naturel ne manque jamais de fe faire dans tous les coins de l'Empire; il meneroit, à la longue, tout homme qui vend fon temps ou fa denrée, à trouver, par fa recette, le jufte fupplément qui balanceroit l'augmentation de fa dépenfe; de forte qu'enfin tout reprendroit le même niveau, fans que perfonne fût plus riche ou plus pauvre qu'avant ce mouvement, fi une multitude de léfions momentanées ne s'opéroient, & fi l'induftrie de certaines claffes, les plus nombreuses, fur-tout celles de peine & de travail qui perdent plus que d'autres, n'en fouffroient, comme étant les dernières à obtenir leur dédommagement.

Les dépenfes du Gouvernement devant fe cumuler, en raifon de ce qu'il a plus de monde à entretenir, il eft forcé d'accroître l'impôt, ou de manquer à fes engagemens; le trouble interne devient alors extrême: d'une multitude de répétitions, d'avances faites au revenu public, naît un conflit général d'intérêts, où chacun cherche à jouer un rôle; le défordre eft d'autant plus grand, que le tarif de

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