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Voici quel est, au moment où j'écris, l'état de l'entreprise.

Du côté de la Saône, le canal est navigable depuis sa naissance à Saint-Jean de Losne, jusqu'à Pont-de-Pany, commune située à 20 kilomètres (5 lieues) ouest de Dijon, sur une longueur totale de 50 kilomètres (13 lieues). Les travaux seront continués aussitôt que la décision relative au point de partage aura été prise.

Du côté de l'Yonne, ils sonten pleine activité dans plusieurs endroits de la ligne du canal. Quelques parties sont entièrement terminées, et il a été fait récemment des adjudications montant à une très forte somme, pour des travaux à effectuer dans le département de l'Yonne. Enfin les projets qui ont le point de partage pour objet, s'accordant à placer l'une de ses extrémités à Pouillenay (1); les écluses et terrassemens qui sont à exécuter depuis cette commune jusqu'aux limites du département de la Côte-d'Or, sur une étendue de 32 kilomètres (8 lieues), ont été adjugés en septembre dernier; et tout annonce que ce magnifique monument sera désormais continué sans interruption, et que son achèvement prochain jettera un nouvel éclat sur un règne déjà si fécond en merveilles.

De tous les projets qui ont été présentés sous les derniers règnes, il n'en est que deux qui

vérifier les projets, entre lesquels l'Administration balance aujourd'hui.

(1) Département de la Côte-d'Or. Voyez la carte jointe Amoire.

paraissent balancer les suffrages de l'administration. A l'un, quoique l'idée première en appartienne à MM. Bernard et de Laloge (1), est attaché le nom de l'ingénieur Abeille, qui l'a développé et appuyé de plans et de devis. L'autre, proposé deux fois, sous deux aspects différens, et rejetté comme impraticable, ou sujet à de trop graves inconvéniens, est reproduit aujourd'hui, mais avec des modifications qui font croire à la possibilité de son exécution, et en font un projet absolument neuf.

Projet

Pouilly.

Le projet Abeille, lorsqu'il fut offert au public, en 1727, reçut les éloges les plus mé- Abeille, par rités. Vérifié plusieurs fois officiellement par des ingénieurs de la première distinction, l'exactitude des aperçus et l'efficacité des moyens ont été constatés honorablement pour l'auteur.

M. Abeille place son point de partage à Pouilly (2). Pour parvenir à cet endroit, il fait remonter à son canal la vallée de l'Ouche jusqu'au village de Pont-d'Ouche, puis celle Crugey, jusqu'auprès de Châteauneuf; enfin, le vallon de Vandenesse jusqu'au dessous de la Lochère, niveau du biez de partage. Ce biez dont l'élévation, suivant ses calculs, est de 289,10 (890 pieds) au dessus de l'Yonne, est de 218,94 (674 pieds) au dessus de la Saône, a 12,824,66 (6580 toises) de longueur, dont 3549,17 (1821 toises) dans le vallon de Vandenesse, et 9275,46 (4759 toises) dans celui

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(1) Traité de la jonction des deux mers, par Bernard, Dictionnaire encyclopédique. Le Mémoire de M. de la Loge est de 1718. (2) Voyez son projet sur la carte.

de l'Armançon. La jonction des deux vallons s'opérerait par une tranchée à ciel ouvert, longue de 3683,67 (1890 toises), et dont la plus grande profondeur serait de 26TM 31 (87 p.) Arrivé dans la vallée de l'Armançon, le canal la suivrait quelque tems, puis tournant à droite, auprès du village de Braux, il se dirigerait presque en ligne directe sur Pouillenay. Enfin sa longueur totale serait de 238,879,66 (122,563 toises), dont 148115,38 (75994 toises), du côté de l'Yonne, 77939,62 (39989 toises), de la Saône, et 12824",66 (6580 toises) de biez de partage. Je ne détaillerai point par quels moyens M. Abeille amène à ce biez la quantité d'eau nécessaire. Il suffit de dire qu'elle a été jugée en rapport avec la navigation la plus florissante.

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Depuis l'instant où ce projet a été rendu public par la voie de l'impression, il est resté, sans concurrence, en possession de fixer tous les regards. Soumis, dans des tems différens à l'examen de MM. Gabriel, Chezy et Perronet, ces habiles ingénieurs n'ont trouvé à y indiquer que des changemens peu importans. On prétend qu'aujourd'hui, M. Forey, ingénieur en chef, chargé de la confection du canal, en propose de nouveaux, que l'on s'accorde à regarder comme de véritables améliorations. Indépendamment de quelques différences que M. l'ingénieur en chef apporte dans la direction du canal, il remplace, dit-on, par une galerie souterraine, d'environ 1200 mètres percée au travers de la montagne de Pouilly une tranchée à ciel ouvert, dont les côtés eus sent eu 26,31 (87 pieds) d'élévation. Mais des

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diverses additions projetées par M. Forey, celle qui paraît mériter l'approbation la plus générale, c'est la construction d'un réservoir immense qu'il établit au-dessus du village de Grosbois, au moyen d'un barrage jeté d'un côté du vallon à l'autre, qni retient les eaux de la Brenne. Cette opération, dont l'heureuse idée lui appartient tout entière, amènerait à Pouilly, par une percée souterraine, les eaux de cette petite rivière, qui prend sa source audessous de Sombernon, et compléterait l'approvisionnement des eaux nécessaires au point de partage, d'une manière plus directe et moins dispendieuse que par les opérations qui font partie du projet Abeille.

En examinant, sur une carte, la position Projet des lieux, le premier sentiment qu'on éprouve, par SemPlagniol, est le regret que la montagne de Sombernon bernon. semble opposer un obstacle invincible à ce que le canal parvienne, par la voie la plus courte, dans le vallon de la Brenne, qui, en abrégeant la navigation, d'environ 27 kilomètres (7 lieues), le conduirait presqu'en ligne droite, jusqu'à l'Armençon. L'homme, familiarisé avec les prodiges des arts, passe bientôt de ce sentiment à la pensée que peut-être la nature pourrait être encore une fois vaincue par l'industrie humaine, et des moyens sont proposés.

Vauban.

Le grand Vauban est le premier qui ait songé Projet de à établir à Sombernon le point de partage du canal de Bourgogne. Cette idée, qu'il n'a développée dans aucun écrit rendu public (1),

(1) On ne l'a connue que par les lettres publiées en 1726, par l'ingénieur Tomassin, sur les canaux proposés pour la

Projet de M.Laurent.

après avoir fixé quelques momens l'attention de MM. Colbert et de Louvois (1), a enfin servi de base à un projet que M. de la Fonchère, ingénieur, a présenté au Régent en 1718, et fait imprimer la même année, mais que sa mauvaise conception et les erreurs dont il abonde, n'ont pas tardé à faire rejeter. Cet ingénieur franchit la montagne, au moyen de cinquante écluses, de 2,59 (8 pieds) de chute de chaque côté, et d'une galerie qui la traverse à une certaine hauteur.

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M. Laurent, que le canal de Picardie a rendu célèbre, appelé sans doute par l'administration de la province, se transporta en Bourgogne, pendant la tenue des états, en 1772; et, dirigeant ses vues sur le même point, il songea aux moyens d'y placer son biez de partage (2).

jonction des mers par la Bourgogne. Cette idée du maréchal de Vauban, était la troisième de cinq qu'il avait données en 1696, pour opérer cette jonction.

(1) Au commencement du siècle dernier, MM. Colbert et de Louvois, acquéreurs de terres et de seigneurie en Bourgogne, firent examiner sur les lieux la possibilité du passage par Sombernon, par des ingénieurs qui se prononcèrent pour la négative.

(2) On n'a pu retrouver aucune pièce officielle sur ce projet dont il est fait mention dans des écrits relatifs au canal de Bourgogne, et avec un certain détail dans la navigation de Bourgogne, de M. Antoine, ancien ingénieur de la pro

vince.

On est porté à croire que M. Laurent se proposait de tenter l'exécution d'un autre projet qui eût fait passer le canal par Pouilly. On en juge par une ligne de puits qui a été creusée par ses ordres et sous sa direction, et qui indiquait une percée qui eût commencé au-dessous de Vandenesse, et eût abouti au-dessous d'Equilly, sur une longueur de 13000 mètres. C'est pour ce dernier projet qu'a été creusé

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