Page images
PDF
EPUB
[graphic]

LE CHEVALIER DE BUFFON

Le chevalier de Buffon', maréchal de camp, chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis et de la Légion d'honneur, est né au village de Buffon en mai 1734, et décédé en sa maison de Montbard, le 23 avril 1825, à l'âge de quatre-vingt-onze ans.-M. le chevalier écrivait avec pureté et parlait de même : il faisait des vers avec une facilité charmante et savait toujours les rendre agréables aux personnes auxquelles il les adressait.

Homme de goût en toutes choses, il cultiva la peinture non sans succès; il a laissé des dessins, des tableaux, des

1. Pierre-Alexandre Leclerc, chevalier de Buffon, né à Buffon le 23 juin 1734, mourut à Montbard, le 23 avril 1825, à l'âge de quatre-vingt-onze ans. Volontaire aux grenadiers de Navarre en 1757, major aux gardes lorraines le 22 juin 1767, colonel le 27 avril 1783, maréchal de camp le 20 octobre 1790; il servit avec une grande distinction, fit la guerre de Sept ans, et fut chevalier de Saint-Louis et membre de la Légion d'honneur à la fondation de l'ordre.

paysages au pastel notamment, dont quelques-uns ont un réel mérite.

Il fut noble et généreux dans toutes ses actions. Ami sûr, sensible au malheur et charitable, il se montra digne du nom qu'il portait. M. le chevalier s'est marié dans un âge avancé à une femme plus jeune que lui: il n'en a pas eu d'enfants.

M. le comte de Buffon aimait beaucoup son frère, il rendait justice à son esprit indépendant et à son intelligence élevée. Dans son testament il l'inscrivit pour une pension viagère et le choisit pour diriger son fils'.

M. de Buffon n'a pas attendu l'heure où se règlent les dernières volontés pour se montrer généreux envers sa famille; le chevalier notamment reçut à plusieurs reprises des cadeaux importants offerts avec autant de goût que de générosité.

J'en citerai un exemple qui fera voir en même temps

1. Il l'avait, en outre, nommé son exécuteur testamentaire, comme on le voit dans un billet écrit par le chevalier de Buffon, le 20 mai 1788::—« Je prie M. Lucas, en l'absence de M. Boursier, qui << n'est point encore de retour de Montbard, de vouloir bien me << remettre la somme de 462 livres, montant de la dépense << extraordinaire à laquelle j'ai été obligé tant pour venir de « Saint-Lô à Paris, que pour retourner de Paris à Bayeux, et << petits frais pendant mon séjour à Paris, pour les affaires dont « feu M. le comte de Buffon, mon frère, m'a chargé, m'ayant « honoré du titre de son exécuteur testamentaire.

«M. Lucas pourra me remettre cet argent chez M. le docteur « Daubenton, où je dine aujourd'hui. »

jusqu'où peut aller la passion de certains hommes, lorsqu'elle les aveugle au point de négliger et de compromettre leurs propres intérêts. Le chevalier de Buffon était à son régiment, en Corse, et comme il avait toujours manifesté l'intention de se retirer à Montbard, son frère lui faisait construire, non loin du sien, un petit hôtel, dont M. Verniquet avait donné les plans : un jardin en dépendait, M. de Buffon voulut l'agrandir; le maire et les échevins conduits par M. Mandonnet, l'un d'eux, s'assemblent et prétendent qu'il usurpe des terrains appartenant à la commune. Le docteur Mandonnet', avait seul provoqué

1. Le docteur Mandonnet fut toujours hostile à Buffon dans les questions d'intérêt privé que ce dernier avait fréquemment à débattre avec les représentants de la ville de Montbard : il ne doit pas être confondu avec M. Mandonnet, secrétaire de l'ordre du Saint-Esprit, qui s'était chargé, en l'absence de l'auteur, de surveiller à l'imprimerie royale l'impression des volumes de l'Histoire naturelle.

Buffon se montra d'abord fort sensible aux attaques du docteur Mandonnet. Le 6 juin 1773, il écrit à madame Daubenton: « Mandonnet ne sera plus échevin, Richard sera continué « premier échevin cette année; il faut en nommer un autre à « la place de Mandonnet. Ils recevront sur cela les ordres du «ministre. Surtout qu'ils ne présentent pas un second Man<< donnet. » Le 15 du même mois, il lui dit avec un peu d'impatience : << Monsieur votre mari, discret à son ordinaire, a donc « publié ce que je vous ai marqué sur Mandonnet....., de sa «< vie il n'a rien su faire à propos que de vous épouser heu<< reux s'il sentait son bonheur! » (Voir page 428 du tome II de la Correspondance, note 1.)

et conduit cette opposition malveillante; il rédigea, au sujet de l'affaire, qui avait pris de grandes proportions, un mémoire dans lequel il reprochait au seigneur de Montbard d'avoir obtenu du ministre des lettres de cachet pour exclure des assemblées certains notables habitants qui lui étaient hostiles, et de s'immiscer dans les affaires de la ville. Ce mémoire fut envoyé à M. de Buffon: loin de se montrer mécontent des reproches qui lui étaient adressés, il écrivit à l'auteur une lettre flatteuse pour lui dire qu'il en avait distingué le style et l'esprit.

Il y eut procès. Le Parlement fut saisi, M. de Buffon assista à l'audience dans une tribune grillée réservée alors

1. Ce procès se plaida à Dijon, le 31 juillet 1773. Buffon, dans sa correspondance avec madame Daubenton et avec Gueneau de Montbeillard, parle de cette injuste opposition des habitants de Montbard, sans amertume et sans chagrin.

Il écrit à la première, le 2 juillet : - « C'est, en effet, M. Colas « qui parlera dans mon affaire, et, s'il est honnête, il parlera «< comme madame Nadault chante, c'est-à-dire très-bien... » Mais il oublie bientôt le Parlement et les procès pour dire à son aimable correspondant : « Vous voir me tient plus que de

<< tout posséder. >>

[ocr errors]

Il écrit, à Montbeillard, le 26 juillet : « Voilà, mon bon << ami, la liste de mes juges... Je compte que nous emmènerons « votre voiture, qui fera nos visites d'honneur à Dijon. Nous ren« verrons vos chevaux coucher à Montbard, et nous arriverons « le même jour avec les miens de bonne heure à Dijon. J'ai vu, « par ce que m'a dit le chevalier de Saint-Belin, que mes juges << traitent mon affaire plus sérieusement depuis qu'ils sont in« formés de mon arrivée, et vous m'aiderez plus que personne

« PreviousContinue »