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re de se réformer fur un objet de pur agré ment, & dès le lendemain les courtisans prétendent avoir remarqué que S. M. avoit mis des plumes plus élevées. Le foible de cette Princeffe pour ce fragile ornement eft tel, qu'un jeune poëte nommé Augufle, ayant adreffé au Mercure une chanfon plaifante où il critiquoit les plumes, les auteurs la lui ont renvoyée & n'ont ofé l'inférer de peur de déplaire à la Reine. Enfin toutes les femmes du meilleur ton fe conformant, comme de raifon, à l'exemple de leur Souveraine, le commerce des plumes qui étoit autrefois peu de chofe, eft devenu confidérable en France, & la ville de Lyon s'en eft trouvé épuisée

un moment.

19 Août 1775. Me. Martin de Marivaux a répandu un précis où il raconte lui-même les faits de fon différend avecM -l'Avocat général d'Aguesfeau, qu'on a déja rapporté. On y voit de plus que c'est le premier Avocat général Seguier, qui fur les plaintes de fon confrere eft allé trouver M. de Gourgues, le Préfident de Tournelle; que celui-ci a engagé l'Avocat à voir l'offenfé, ce qu'il a refufé par égard pour l'Ordre auquel il tient. On y trouve une conduite peu noble de la part de M. de Lamoignon, beau-pere du jeune homme. Ce Magiftrat, malgré deux vifites à lui faites par Me. Martin, s'obstint à convoquer l'affemblée des Chambres : ce qu'apprend l'Avocat le lundi 24 Juillet, qui s'opiniâtre auffi

à fe refufer à des excufes dans le cas où fon Ordre l'exigeroit. De-là fa vifite chez M. d'Aguesfeau, qu'on a racontée. Enfin voici fa Lettre au. Bâtonnier.

MONSIEUR LE BATONNIER.

L'adulation dit: plie, plutôt que de rompre. L'honneur dit: romps, plutôt que de plier.. J'embraffe le parti de l'honneur. Je ne ferai pas d'excufe à M. d'Agueffeau, que je n'ai point of fenfé. L'on follicite à outrance une démarche vile.. Voilà fur ce mon mot: fi j'ai plaidé levrai, M. d'Agueffeau demande trop: fi j'ai plaidé le faux, M. d'Agueffeau ne demande pas asfez; ce Magiftrat doit dire:,, Avocats, vous avez dans l'Ordre un homme qui en impofe & qui dégrade par fes impoftures un Miniftere honorable. Vomiffez-le. Il ne faut de menteurs ni dans l'Ordre, ni fur les fleurs de lys.

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Je vous prie, M. le Bâtonnier, de ne vous point occuper de moi, & de faire agréer une retraite que l'honneur dicte. J'abdique l'état d'Avocat. Du moment de mon abdication l'Ordre des Avocats n'a plus de jurisdiction fur moi.

Par un Poftfcriptum, Me. Martin, d'une tête un peu légere, dit que des perfonnes diftinguées, des confrères généreux, une femme, des enfans, fes amis, fes proches, le follicitent de refter : qu'il

desavoue tout ce qui eft à desavouer, & qu'il fait à M. l'Avocat général d'Agueffeau la priere publique de croire qu'il n'a jamais voulu l'offenfer. Il en jure par les noms des d'Aguesfeau, des Lamoignon, qui continuent d'être chers au Barreau, à la France entiere, & finit par-là.. 19 Août 1775. On affure que M. de Malesherbes, outre fa répugnance à faire de nouvelles injuftices par une diftribution de Lettres de cacher illégale, cherche à réparer les maux caufés par la conduite tyrannique de fon prédéceffeur. En conféquence on veur qu'il ait écrit dans tous les châteaux, forts & autres lieux de cette efpece, qu'on eût à fournir des plumes, de l'encre & du papier à tous les prifonniers, pour qu'ils puiffent lui adreffer des Mémoires & leurs plaintes fur les caufes de leur détention. On efpere que ce Miniftre ne fe contentera pas de ce premier acte de fageffe & qu'il fe tranfportera dans les prifons à fa portée, telles que Vincennes, la Bastille, Bicêtre, &c. pour y interroger lui-même les malheu reux qui y gémiffent & lever le voile fur la multitude d'infamies & d'horreurs qu'il y dé couvrira fans doute.

20 Août. M. le Duc de Bouillon a vendu fa Charge de Grand Chambellan à M. le Prin-, ce de Guemenée, mais il s'en conferve la furvivance & les fonctions. On fait qu'on avoit parlé plufieurs fois de M. le Duc de Choifeul

que ce Seigneur avoit des prétentions à la dignité en queftion. Cette exclufion déconcerte abfolument fon parti. & ne lui laiffe plus d'espoir de le voir revenir en faveur.“

20 Août 1775. On affure que le référé au Confeil de toutes les Lettres de cachet nécesfaires à expédier, ayant paru d'une tournure trop lente & trop difficile, 'S. M. s'en eft rapportée à M. de Malesherbes, qui a propofé de nommer quatre Commiffaires ad hoc; & que le Roi lui ayant encore confié le choix desdits Commiffaires, il avoit déclaré ne pouvoir mieux les choifir qu'au fein de la Compagnie dont il avoit longtems eu 1 honneur d'être le chef: en forte qu'on croit qu'ils feront pris dans la Cour des Aides.

20 Août. On vient d'imprimer le quatrieme & dernier volume du Sacre Royal, ce qui complette cette longue, favante & ennuyeuse collection.

21 Août. On vient d'imprimer d'afficher P'Arrêt de la Tournelle, en date du 31 Juillet, qui décharge le Sr. Garnier de l'accufation intentée contre lui d'avoir eu part aux Lettres écrites au Sr. Mazieres, fermier général, en 1773, par lesquelles il lui étoit enjoint de dépofer soo-Louis au pied d'un arbre du Cours, à peine d'être affaffiné. Cet Arrêt mortifiant. pour le financier, le fera encore plus par les fuites, en ce qu'il eft permis au Sr. Garnier

de

de fe pourvoir par toutes les voies qu'il appartiendra pour réparation, dommages, intérêts

&c.

22 Août 1775. Sur les plaintes du Clergé, qui effectivement eft affez mal mené dans la Diatribe à l'auteur des Ephémérides, M. Albert a été obligé de faire retirer cette brochure & d'en em pêcher la vente libre; ce Corps ayant été furtout fcandalifé qu'on eut affecté de choifir letems où il s'eft affemblé pour débiter impuhément fous fes yeux ce pamphlet.

22 Août. Le goût des libelles n'eft point pasfé, & l'on en vend affez publiquement un nouveau, dont tout le mérite eft d'attaquer un hom me parvenu. Il eft dirigé contre le Sr. de Vaines, premier Commis des finances, & a pour titre: Lettre d'un prophane à M. l'Abbé Baudeau, très Vénérable de la fcientifique & fublime Loge de la Franche Economie. L'auteur, en rendant à M. Turgot toute la justice qui lui est dûe fur la pureté de fes intentions, prétend que fa confiance a été furprise par ce perfonnage patelin, dont on fuit la vie depuis le berceau jusqu'à préfent.

23 Aoit. Il paroît une Requête à Noffeigneurs du Parlement, les Chambres affemblées, les Princes & Pairs y féant, de la part du Sr. Benaven, ancien Receveur des Tailles de la ville d'Agde, intéreffé dans les affaires du Roi. Elle fait partie de dix autres Requêtes préfentées aujour

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