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Le clergé cessant d'être une corporation, rentroit par une conséquence immédiate dans la classe de tous les citoyens. Il étoit chargé d'une fonction publique très - respectable ; mais cette fonction ne devant occuper qu'un certain nombre d'individus, ceux- là seuls avoient droit à une rétribution. L'état devoit les payer comme il paye tous les hommes employés à son service, dans des proportions différentes, sans doute, mais d'après des règles fixes et déterminées. La possession commune du territoire ne pouvoit survivre à la dissolution du corps, qui n'étoit possesseur qu'à titre collectif, qui ne l'étoit qu'à condition de remplir un service public, et la propriété passoit de droit à ceux qui, désormais, se chargeoient d'acquitter ce service, c'est-à-dire, à la nation.

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Après une longue discussion, ce principe fut reconnu, et la nation cut, tout-àcoup, à sa disposition, un domaine immense, qui, dès-lors, fut consacré à l'acquit de ladette publique. C'étoit le rendre à sa destination primitive, celle de soulager les peuples en éteignant des capitaux dont les intérêts montoient à une somme exorbitante.

Cette reconnoissance d'un principe sévère, mais incontestable, fut taxée de brigandage et d'impiété; mais l'opinion publique l'emporta bientôt sur de vaines déclamations.

» C'est d'après les mêmes principes, que › l'ancien dogme politique de l'inaliénabilité des domaines de la couronne avoit déjà été proscrit, et que ces domaines avoient été consacrés de même à acquitter la dette de l'état.

» L'Assemblée Nationale, comme on vient de le voir, avoit déjà infiniment amélioré le sort du peuple ; elle l'avoit affranchi de la tyrannie des fiefs et des rigueurs du code de la ferme et de la régie générale; elle avoit fait verser dans la bourse commune le produit de tous les priviléges des corps et des individus; enfin, elle avoit adouci le poids des plus odieux impôts. En réunissant au domaine national les biens du clergé, elle put fixer un terme prochain au tribut de la dime; et libre désormais de disposer d'une. grande richesse territoriale, elle put concevoir des plans plus vastes, et préparer la régé nération totale, objet de tous ses vœux.

Le commencement de l'année 1790 approchoit, les plans de l'avenir n'étoient en

core qu'ébauchés, et le calcul des besoins de la nouvelle année se présentoient d'une manière effrayante; on ne pouvoit plus compter que foiblement sur les anticipations; manquer à les payer à leurs échéances, eût été s'exposer à un bouleversement général, et contrevenir aux décrets les plus formels. Suppléer à la masse presqu'entière des revenus, sembloit impossible. Le ministre, frappé, comme il devoit l'être, du danger de cette dans position, n'y vit encore de remède que le crédit de la caisse d'escompte. La conversion, en annuités, de sa créance sur l'état, pouvoit l'aider à se procurer des fonds: on la lui accordà. Des mandats negociables sur un capital de quatre cens millions de domaines nationaux, pouvoient garantir la rentrée de ses avances, on les lui offrit; et sous ces deux conditions, elle s'engagea à fournir quatre-ving - dix millions de ses billets, et à continuer d'en acquitter une portion assez considérable tous les jours jusqu'au mois de Juillet suivant, ce qui dès-lors présentoit de grandes difficultés.

» La frayeur que les divisions intestines inspirent toujours, avoit fait tout-à-coup

resserrer le numéraire, et ce n'étoit déjà qu'avec de grands sacrifices qu'on pouvoir en obtenir chez l'étranger. Cependant M. Necker comptoit encore sur le secours des capitalistes. La contribution patriotique étoit regardée comme une ressource bien plus considérable qu'elle ne l'a été réellement. Enfin, on commença l'année sans avoir des notions bien nettes sur les moyens de la finir, mais avec un espoir fondé sur diverses probabilités.

C'est à cette époque des premiers jours de 1790, que l'Assemblée Nationale commença à s'occuper sérieusement des finances. Sa première mesure eut pour objet de connoître enfin, et de déterminer à quoi montoient les paiemens retardés dans les différens départemens. Un décret suspendit en conséquence jusqu'après la liquidation ordonnée, le paiement de ce qui étoit arriéré à l'époque du premier Janvier 1790, excepté les ventes et la solde des troupes. Il ordonnoit en même tems qu'à l'avenir toutes les dépenses seroient mises et entretenues au courant. Un comité fut spécialement chargé de prendre connoissance de cet arriéré, d'én vé

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