Page images
PDF
EPUB

foibles d'entre vous ne cedent enfin aux efforts de tout genre, que la violence & la féduction emploient avec tant de perfévérance pour vous précipiter dans les horreurs du fchifme affreux qui défole le royau me naguere très-chrétien. Ces alarmes font bien faites pour le cœur d'un pafteur; & le mien dont vous connoiffez toute la tendreffe pour vous, ne cherche point à fe defendre de l'impreffion profonde qu'une telle follicitude y fait naître.

[ocr errors]

"L'approche d'un tems auquel l'Eglife appelle fes enfans à la participation du plus faint de nos myfteres, & l'extrême difficulté que vous trouverez à l'accompliffement de ce devoir, augmentent vos embarras & mes peines. Ainsi je me dois des confolations & à vous des inftructions & des conseils, écoutez-donc ma voix, mes freres; l'écouter lorfqu'elle vous parle au nom de Jefus-Chrift & de la part de fon Eglife, c'eft, dit-il, l'écouter lui-même. Puiffe cette voix que vous connoiffez & qui vous trouva conftamment dociles, porter dans vos ames affligées les dons fi néceffaires de la patience & de la paix ! ""

دو

Il est vrai, M. C. Par.; l'obligation de la Confeffion & de la Communion annuelles eft fondée fur une loi générale de l'Eglife. Affemblée dans lẹ IV concile de Latran, elle y aftreignit tous les fideles parvenus à l'âge de difcrétion. L'importance de la matiere & la griéveté des peines intentées aux prévaricateurs, annoncent affez le crime de la défobéiffance. Point de chrétien qui fans pécher mortellement, puiffe fe fouftraire à la pratique des œuvres de pénitence & de fanctification qu'elle prefcrit. Combien de fois vous ai-je intimé fon précepte & vous en ai-je expofé l'étendue & la rigueur ! Mais, il n'eft point de loi pour la néceffité ni de devoir pour l'impuiffance. Conduite par l'Ef prit-Saint, brûlante de charité pour fes enfans notre Mere commune, l'Eglife de Jefus-Chrift exigeroit-elle d'eux ce que des circonftances malheu

[ocr errors]

reufes rendent impoffible, ce que n'oferoit commander fans honte le plus abfurde & le plus impitoyable des tyrans? Non, non, M. C. P., calmez donc vos inquiétudes : fondez votre confcience devant Dieu; & omettez ou différez fans fcrupule, ce qu'au pied de fon fanctuaire, vous trouverez ne pouvoir accomplir.,,

"Avant que la perfécution dirigée spécialement contre moi, & qui avoit déjà dévoué ma perfonne à la captivité comme elle deftinoit fans doute ma tête au glaive des fatellites de la tyrannie, m'eût arraché du milieu de vous pour venir à travers mille écueils moins à craindre que ma patrie, chercher ma fureté dans une terre étrangere, je vous donnai publiquement connoiffance de l'Inftruction de Mgr. de Langres adoptée par notre digne & refpectable évêque. Obligé de fuir une terre altérée de fon fang & pourtant couverte des monumens de fa charité & fi long-tems glorieufe de fes vertus, hélas! il gémit depuis un an fur les rivages d'une ifle proteftante *. Mais fon zele repaffe fou- Jersey. vent les mers, & fon cœur repofe toujours au milieu de fon cher troupeau. Sans ceffe attentif à fes befoins, il a confié toute fa jurifdiction & fes pouvoirs à fes coopérateurs demeurés fideles, celui fur-tout d'anticiper ou de prolonger le tems de l'acquit du devoir Pafchal. J'ufe de cette trifte faculté & je déclare que de ce jour en fix mois vous fatisferez au précepte de l'Eglife en vous confeffant à tout prêtre approuvé par un évêque de la communion Romaine (vous favez que les conftitutionnels n'en font pas), & en recevant la Ste. Euchariftie de tout prêtre non-schismatique, c'est-à-dire non-fermenté.

[ocr errors]

,, Je n'ai pas fans doute befoin de vous avertir que l'intrus qui ufurpe mes fonctions, n'eft pas du nombre de ceux dont il vous eft permis de réclamer le miniftere. Il eft fans miffion de l'Eglife qu'il a abandonnée & dont il déchire le fein. Déjà

excommunié, il ne tardera pas d'être comme tel dénoncé aux fideles. S'attacher à lui, c'eft s'enrôler dans une nouvelle fecte. En recevoir les Sacremens (la Confeffion à la mort exceptée), c'eft adhérer à fon fchifme & commettre un facrilege. Ses abfolutions, hors ce cas, font invalides, & les mariages qu'il béniroit feroient nuls, abfolument nuls devant Dieu. "

39 La préfence du Sr. H... n'est donc point celle d'un miniftre légitime. Il n'eft point le propre pretre que l'Eglife vous indique comme le canal des biens fpirituels à la participation defquels elle vous invite; & l'article de la mort excepté, vous êtes conftamment censés n'en pas avoir, s'il eft le feul auquel vous puiffiez recourir. Les principes de votre foi ne vous permettent de voir en lui qu'un lache apoftat, un voleur facrilege, un loup que vous devez fuir fans néanmoins oublier qu'il eft aux yeux de la charité un frere errant dont vous devez folliciter dans vos prieres le retour & la converfion.

دو

[ocr errors]

Vous tâcherez donc, M. C. P., de vous proqurer en fecret les foins charitables d'un confeffeur fidele, & d'affifter pour recevoir le Corps du Sauveur au facrifice d'un miniftre catholique. Mais je ne faurois trop vous recommander de mettre en ces jours mauvais toute la prudence & la difcrétion poffible dans cette démarche. Offrez à Dieu en efprit de pénitence les peines & les fatigues qu'elle yous coûtera. Il eft jufte, M. C. P., & ne le reffentons-nous pas? Hélas! cette difficulté à trouver les Sacremens de l'Eglife, n'eft-elle point une punition de nous en être éloignés par négligence ou approchés fans difpofition? Cette privation de la parole fainte qui ne coule maintenant que de fources impures, ne feroit-elle point un châtiment mérité du coupable dégoût avec lequel nous l'avons tant de fois entendue? Oui, la main du Seigneur eft vifiblement fur nous. Efforçons-nous par nos

humiliations de fléchir fa colere & pleurons les infidélités qui nous l'ont attirée... Dans les courfes pénibles que le defir de vous nourrir du pain facré va fuggérer à votre zele, fongez à l'état plus trifte encore de nos freres difperfés dans les miffions de la Chine & du Nouveau-Monde. Hélas! ils voient fouvent bien des années s'écouler avant de rencontrer un miniftre évangélique. Ils entreprennent de longs voyages pour jouir deux ou trois fois en leur vie de la préfence des SS. Myfteres. Cependant ces chrétientés sont très-floriffantes; la foi y est vive, la charité abondante, l'innocence ordinaire, & ces nouveaux enfans venus à la derniere heure du jour confolent la douleur de l'Eglife qui voit les ténebres de l'erreur couvrir des contrées autrefois brillantes de tout l'éclat du foleil de juftice, & un déluge de corruptions inonder l'ancien héritage d'un peuple de Saints.

دو

,, J'ai dit que vous devicz rechercher en fecret. Car en vain réclameriez-vous les droits dits imprefcrip- › tibles de la tolérance religieufe. Cette tolérance tant vantée est bien pour le fectaire, pour le juif, pour l'impie, pour l'athée; mais elle n'eft pas pour vous. Le mafque eft levé, le catholicifme eft profcrit, le glaive eft tiré contre l'Eglife. L'édit de fang jadis affiché dans Nicomédie s'exécute aujourd'hui dans toutes les parties de l'empire. O Eglife de France, dans quelle mer d'affliction vous êtes plongée!... Pour trouver dans les annales de la Religion l'image de la terrible tempête qui vous agite, nous devons remonter à ces fiecles de douleur où une héréfie meurtriere, funefte fruit de l'ambition trompée d'un prêtre d'Alexandrie, pourfuivoit les Athanafe jufques dans les fables du défert & faifoit ruiffeler le fang orthodoxe; ou bien encore à ces époques cruelles où les Céfars devenus eux-mêmes héréfiarques & perfécuteurs, immoloient leurs fujets fideles par le glaive barbare de leurs foldats iconoclaftes.

,, J'ai dit encore en fecret: puifque nous en fommes revenus à ces tems de frayeur où la Religion tremblante, fugitive, pourfuivie, n'osoit raffembler fes enfans que dans les folitudes & les cavernes profondes. Là dans le filence de la nuit, fur un autel dreffé à la hâte & conforme à la trifteffe d'un tel temple, elle offroit au Pere le Corps & le Sang adorable du Fils; elle fortifioit les fideles de cette nourriture falutaire & du pain de la parole fainte; elle les engageoit par le faint baifer de la paix à demeurer toujours unis, & elle finiffoit par des prieres que fouvent la ferveur prolongeoit jusqu'à l'aurore.

[ocr errors]
[ocr errors]

Portons nos regards fur ces jours de foi, M. C. P., afin de foutenir & d'animer la nôtre dans ces tems d'apoftafie & de défection. Souvenons-nous que c'eft par elle que les Saints ont triom phé des puiffances & conquis les promeffes. Ils furent comme nous traités de fanatiqués, de féditieux & d'enthoufiaftes; comme eux, répondons à ces ous trages par des bénédictions. Ils furent le jouet & le rebut du monde : mais l'Eglife, honorée par leur patience & leur courage, les regarda comme fa gloire & fon ornement, le Ciel les couronna comme fes conquérans & fes héros, & les fideles jufqu'à la fin des fiecles les invoqueront comme leurs protecteurs & leurs modeles.,,

[ocr errors]

Que cette vérité fainte, M. C. P., foit fans ceffe préfente à vos efprits. Qu'il m'eft confolant de ne l'avoir pas retenue captive! Je favois bien à quoi je m'expofois en vous l'annonçant : mais je vous la devois au péril de ma vie; & vous l'avez entendue. Forcé de m'éloigner de vous, j'ai fonné l'alarme à la vue de l'ennemi, & j'ai pu dire en vous quittant, avec le grand Apôtre : Je Suis innocent de la perte de ceux qui fe luifferoient féduire, puifque rien ne m'a empêché de vous annoncer le péril. Je vous ai de plus laiffé mon exemple en me réduifant à la captivité, à la mifere, à l'exil, pour

« PreviousContinue »