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judicieuse qu'elle eft confolante & encourageante pour les bons chrétiens: on diroit que c'eft à nos fiers & confians incrédules que S. Paul l'a adreffée. Empreffons-nous à dire avec lui: Numquid incredulitas illorum fidem Dei evacuabit?

L'auteur m'a adreffé deux autres brochures, dont l'une (j'en ignore l'objet) eft restée fous les décombres du royaume d'où elle m'a été envoyée; l'autre eft intitulée : Théorie de l'ame des bêtes, & de celle qu'on attribue à la matiere organifée. Paris, chez Belin, 1790, de 42 pag. in-12. Elle a pour épigra phe: La bête voit, mais elle ne fait pas qu'elle voit. Sentence qui annonce affez les principes de l'auteur, & qui prouve qu'il tient aux véritables. Il eft vrai que donnant aux brutes une ame fpirituelle, il s'engage dans des difficultés pénibles; mais en l'admettant bornée aux fenfations, conféquemment d'une efpece très-différente de l'homme, il repouffe toutes les erreurs qu'on croiroit pouvoir en déduire. Ce qui l'engage dans cette opinion, eft la répugnance qu'il a de reconnoître une fubftance qui ne foit ni efprit ni matiere. Ef-il un milieu, dit-il p. 19, entre le Jpirituel & le corporel? Le célebre Boerhave & d'autres phyficiens qui prétendent que le feu n'eft ni efprit ni matiere (à plus forte raifon la lumiere, tout autrement merveilleuse dans fa nature & fes inexplicables effets), tiendroient l'auteur bien en deçà de l'objet de fa difcuffion; il ne douteroit plus qu'il n'y eût un milieu entre les deux extrêmes, l'efprit & le

corps, s'il voyoit entre les deux la lumiere & le feu. (a)

Lettres de Henri-Marie Boudon, grandarchidiacre d'Evreux. A Paris, chez Froullé; & fe trouve à Bruxelles, chez Le Charlier, 1785. Deux gros vol. in-12. Prix, 6 liv. rel., 4 liv. 10 f. broch.

C

ES Lettres n'auront fans doute pas le fuffrage de ceux qui y cherchent les graces du ftyle épiftolaire. C'eft le langage du zele & de la piété dans toute la fimplicité de l'efprit

(a) Je ne voudrois pas dire qu'il n'y a pas ici (comme dans cent autres fujets fortement agités, & cela depuis qu'il y a des hommes) une pure queftion de nom. Si on appelle efprit exclufivement la fubftance intelligente & raifonnante, rien n'eft efprit dans les brutes. Si on appelle esprit ce qui n'eft pas matiere; le feu, la lumiere, & les brutes peuvent prétendre à cette dénomination, & il ne fera pas néceffaire pour cela de recourir à des créations & des annihilations. Nous avons amplement traité cette matiere dans le Catéch. phil. n. 168. T. 1. p. 292. Remarquons encore ici les travers de l'efprit de fecte & de parti. Voltaire, qui ne trouvoit aucun inconvénient à fuppofer une Voyez moyenne claffe d'êtres en faveur du feu *, regardoit comme fouverainement ridicule ce même miprogrès de Vefprit dans lieu dès qu'on vouloit y placer l'ame des brutes. ies fciences Tant il eft vrai que ce n'eft point le raifonnement, M. Saverion, mais le fecret intérêt de fyftême, qui fixe le fuffrage de nos philofophes!

Hift. des

nat. Par

p. 165.

chrétien, langage qui dans fa négligence même & fon défordre plaira aux ames droites qui cherchent à s'inftruire & à fe nourrir par des penfées faintes. Voici le compte que l'éditeur rend de ces Lettres.

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Les ouvrages de M. Boudon lui ont affuré un rang diftingué parmi les anteurs afcétiques. Ce n'étoit ni le defir de fe faire un nom ni l'efprit de critique, ni la paffion de l'intérêt qui conduifoit fa plume. C'étoit l'unique vue de Dieu, & de Dieu feul, le defir ardent de multiplier fes adorateurs, la paffion de lui gagner des cours, qui le déterminoient à écrire. C'étoit ce même motif, à l'exclufion de tout autre, qui l'engageoit à entretenir tant de correspondances épiftolaires, pour crier de toutes parts au feu de l'amour divin, felon fon expreffion favorite. On lui écrivoit non-feulement de toutes les provinces de France, mais d'Italie, de Flandre, d'Allemagne, & même de l'Afie & de l'Amérique, foit pour lui demander des avis fpirituels, foit pour conférer avec lui fur les moyens les plus propres à établir le regne de Dieu; & il répondoit exactement à tous ceux qui s'adreffoient à lui.

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Depuis long-tems, & fur-tout depuis que M. Collet a donné sa Vie au public, on demandoit avec empreffement l'impreffion de fes Lettres. Quelque defir qu'on ait eu de répondre à ce pieux empreffement, quelques démarches que l'on ait faites pour cela, on n'a pu raffembler qu'environ trois cens Lettres, prefque toutes en original, & quelquesunes feulement, en très-petit nombre, fur des copies authentiques. Quoiqu'elles portent toutes l'empreinte de la piété & du zele dont M. Boudon étoit rempli, cependant, pour ne pas trop multiplier les volumes, on a cru ne devoir faire choix que de celles que l'on a jugées les plus édifiantes & les plus intéreffantes. Ce font ces Lettres que l'on

donne aujourd'hui au public, avec d'autant plus de confiance, qu'il a paru les defirer avec plus d'ardeur. En effet, les Lettres font prefque tou→ jours ce qu'il y a de plus intéreffant parmi les ouvrages de toutes fortes d'auteurs. Elles font à l'égard des autres ouvrages, ce que la converfation eft à l'égard des harangues & des actions publiques. Et comme il n'y a perfonne qui n'aimât mieux converser avec tout ce qu'il y a eu de grands hommes & de faints personnages, que de les entendre parler en public, il n'y a perfonne auffi qui ne foit plus touché de ce qui nous refte de leurs Lettres que de leurs autres ouvrages; parce qu'enfin on aime à voir les hommes tels qu'ils font, & que ce qui les montre fous leur forme naturelle, & avec le plus de naïveté, eft toujours ce qui plaît le plus. „

Lettres fur les dangers de changer la conf titution primitive d'un gouvernement public, écrites à un patriote Hollandois.

J

Noftrum eft, fi nec ingrati, nec imprudentes effe volumus, eam rempublicam conftantes tueri, quam ratio fuadet, probant experimenta, commendat antiquitas. Hugo Grotius, de Antiq. Reip. Bat.

A Leyde, chez J. Cyfveer. I vol. in-8vo. 2 fl. de Hollande.

E n'ai pas lu cet ouvrage que je ne connois que par le titre. Mais fi l'auteur a profité de tous les avantages de la these qu'il défend, il eft certain qu'il impofera filence à fes adverfaires. Outre les raisons les plus convaincantes, les autorités les plus graves & les plus refpectées, il a pour lui les faits, & c'eft bien là le grand argument qui parle aux igno

rans

rans comme aux favans; il a pour lui l'état déplorable de tous les états où l'esprit de nouveauté & de prétendue réforme a fu s'introduire, foit par l'imbécillité des fouverains, foit par les intrigues de la démocratie, ou par tous les deux ensemble: car cette union est une chofe très-ordinaire. Mais les grands princes favent s'en préferver. On connoît le mot de Charles Quint. Un gouvernement établi marche de lui-même ; ceux qui propofent des nouveautés, font les perturbateurs du repos public.

Vita venerabilis patris Emmanuelis Correa, e focietate Jefu, in Brafilia miffionarii unà cum adjunctis animadverfionibus hiftoricis. In fano fancti Martini. 1789. I vol. in-12. de 303 pag.

MMANUEL Correa eft un des ouvriers

Evangeliques qui s'eft le plus diftingué

dans les vaftes champs que l'Amérique offroit au zele apoftolique, avant que la politique du philofophifme foit venue ravager ces plages à peine défrichées par les travaux de la Religion. Sa Vie pleine de leçons & d'exemples, & qui préfente plus d'un fujet de ré flexions à un efprit jufte & folide (a), n'est cependant pas ce qu'il y a de plus remarqua

(a) Né à Scalapa, bourg du Portugal, d'une fa mille ancienne & noble, en 1712, Emmanuel Cot Tome 11.

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