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LOIS DE 1894; CONSEILS DE PAROISSE ET DE DISTRICT 441

de deux cédules ou annexes. La première partie de cette loi traite des «< assemblées paroissiales et conseils de paroisse (art. 1 à 19) »; la seconde, des tuteurs des pauvres et conseils de district (art. 20 à 35) »; la troisième, des « circonscriptions et délimitations (art. 36 à 42) »; la quatrième contient des << dispositions supplémentaires relatives aux assemblées paroissiales et aux élections (art. 43 à 77) »; la cinquième comprend les « dispositions transitoires (art. 78 à 89) ». Des deux annexes, la première édicte des « règles pour les assemblées paroissiales, les conseils de paroisse et les comités »; et la seconde donne l'énumération de 26 acts précédents, de 1814 à 1892, abrogés par l'act présent, soit totalement, soit dans un certain nombre d'articles spécialement désignés.

Cette très importante loi ne concerne pas seulement l'administration locale; elle a un caractère politique et social très accentué. L'article 43 de cette loi consacre le droit des femmes, malgré les liens du mariage, «< a être portées sur toute liste d'élec«<teurs du gouvernement local et à user de ce droit pour élire <«< une autorité locale quelconque ». L'article 9 est relatif au droit pour le conseil de paroisse d'acquérir des terres par contrainte, avec l'assentiment du conseil du comté ou du local government board, mais sans l'intervention du parlement exigée par un acte de 1887. L'article 10 consacre même, au profit du conseil de paroisse, le pouvoir de louer des terres par contrainte, pour une période qui ne sera pas moindre de quatorze ans, dans le but de les affermer à des tiers. Ce pouvoir exorbitant n'existait pas antérieurement. Le chancelier de l'Échiquier, dans la discussion de cet article si peu respectueux du droit de propriété, et que la Chambre des Lords rejetait vainement, n'a pas craint de déclarer que ses amis et lui s'efforçaient ainsi « de faire passer les terres <«< aux mains du peuple des campagnes », et que c'était le principal objet du bill. Logiquement aussi les dispositions du bill relatives aux élections locales ont pour but de faire dominer l'élément populaire dans les nouveaux conseils.

En traitant des institutions provinciales anglaises [no 253], nous avons signalé la loi du 13 août 1888 sur les conseils de

442 ÉVOLUTION COMMUNE DES LOIS DE 1888-89 ET 1894

comté, en 126 articles et 3 cédules ou annexes, qui a eu pour but de modifier dans un sens démocratique l'administration aristocratique des comtés anglais. Cette loi n'était applicable qu'à l'Angleterre proprement dite et au pays de Galles. Une loi du 26 août 1889, pour modifier les lois relatives au gouvernement local en Écosse, a étendu à l'Écosse l'institution des conseils de comté électifs bien accueillie en Angleterre.

La loi sur les conseils de paroisse du 5 mars 1894 forme, avec celle de 1882 [n° 366] et les lois de 1888 et 1889, un ensemble qui révolutionne, dans une certaine mesure, les institutions locales de la Grande-Bretagne. Les idées d'unification et de simplification y dominent d'une manière manifeste, dans le sens d'un moindre éloignement, par rapport aux institutions locales du continent européen. Seulement, ainsi que nous venons de le montrer, la loi du 5 mars 1894 mêle aux réformes administratives un élément de transformation sociale qui n'apparaissait pas au même titre dans les lois précédentes. Avec ces tendances différentes, elle ne s'en rattache pas moins à la loi du 13 août 1888, en créant après les conseils de comtés. non seulement les conseils de paroisse, mais, entre eux, et élus, comme ces derniers conseils, par l'assemblée paroissiale, des conseils de district, pouvant leur servir d'intermédiaires. Ils correspondent au territoire des unions de paroisses. Ils héritent des attributions de leurs administrateurs, les bureaux des tuteurs des pauvres, réunissant entre leurs mains l'assistance et la salubrité. Cette création des conseils de district, bien que non indiquée par le titre de la loi, est une réforme non moins grave que celle des conseils de paroisse prise pour caractéristique de l'acte du 5 mars 1894.

Il ne change pas la constitution des paroisses urbaines; mais dans chaque paroisse rurale, il est créé une assemblée paroissiale (parochial meeting) composée de tous les individus, hommes ou femmes, portés sur la liste électorale. Cette assemblée procède à l'élection d'un conseil de paroisse (parish concil) dans toutes

1 Annuaire de législation étrangère de 1888, publié par la Société de législation comparée, pages 42 à 164.

* Id., 1889, pp. 50 à 131.

3o GROUPE; ASSEMBLÉES GÉNÉRALES D'HABITANTS

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les paroisses de 300 habitants au moins. Ce conseil est pour les paroisses rurales ce qu'est le conseil municipal dans les villes, avec les pouvoirs exorbitants ci-dessus signalés dans les articles 9 et 10. Dans les paroisses de moins de 300 habitants, il suffit du concours de volonté de l'assemblée paroissiale et du conseil de comté pour qu'il soit également élu un conseil de paroisse. Dans le cas contraire, la loi du 5 mars 1894 n'est pas applicable à ces paroisses, réduites alors à l'antique institution du vestry et au système d'administration locale antérieur à 1894.

Une loi du 25 août 1894 sur le gouvernement local en Écosse a étendu à ce pays la réforme relative au régime des paroisses réalisée pour l'Angleterre et le pays de Galles, par la loi du 5 mars 1894. Malgré des différences dans le texte de la loi, qui s'expliquent par la situation antérieure de l'Écosse (spécialement elle n'avait qu'un « bureau d'inspection », au lieu d'un « bureau du gouvernement local » qui lui est donné), cette loi applique à l'Écosse les mêmes principes. Elle étend aux paroisses la réforme démocratique de la loi de 1888 pour les comtés, par l'élection de tous les conseillers appelés à l'administration de la paroisse et en écartant l'élément ecclésiastique. Les mêmes tendances sociales signalées dans la loi du 5 mars se retrouvent dans celle du 25 août 1894.

L'Irlande, toujours moins favorisée, est actuellement la seule des trois îles Britanniques qui n'ait pas sa réforme du gouvernement local et reste soumise au régime des paroisses.

3e groupe.

369. États de l'Europe continentale ayant des communes avec assemblée générale d'habitants.

Nous rappelons que ce groupe contient, non seulement les États dont toutes les communes sont administrées par l'assemblée générale des habitants, sans application du régime représentatif dans aucune d'elles, mais aussi les États nombreux dont les communes se divisent en communes avec conseils municipaux, et communes à assemblées générales d'habitants. Les États que nous

1 Annuaire de législation étrangère de 1894 (Société de législation comparée, pp. 169 à 182).

444

RUSSIE; COMMUNES RURALES; LE MIR

réunissons dans ce groupe sont la Russie et la Finlande, la Suède, l'Allemagne, la Suisse, la Serbie et le Monténégro.

370. En Russie, il faut distinguer les communes rurales et les communes urbaines. Les premières, de beaucoup les plus nombreuses, n'ont pas de conseil municipal; les secondes en ont un.

Il est en effet impossible dans cet immense empire, dans des milieux aussi différents au point de vue économique et social, d'appliquer une règle uniforme. La variété existe, même dans chacune des deux grandes sortes de communes que nous venons d'indiquer.

La commune rurale russe est administrée par une assemblée générale des habitants, le mir, composée de tous les chefs de familles et de tous les fonctionnaires de la commune. Pour toutes ses délibérations et la gestion des biens, dont elle est devenue propriétaire à la suite de l'émancipation des 23 millions de serfs par l'ukase du 3 mars 1861, cette assemblée est soumise à la surveillance immédiate de la commission de district. Cette commission est en partie composée d'agents du pouvoir central, et de la commission provinciale, présidée par le gouverneur de la province nommé par le tzar. Ce sont des lois du 19 février 1861, du 27 juin 1874 et du 30 mars 1878, qui règlent ces divers points.

Mais il est un caractère qui distingue la commune rurale de Russie, en dehors de l'institution du mir, des autres communes européennes. C'est que la propriété des paysans affranchis est collective. La commune est seule en réalité propriétaire des terres. Le mir est chargé de les gérer et il en fait l'allotissement avec des pouvoirs absolus. La commune est responsable vis-à-vis l'État, le district ou la province, des impôts qui leur sont dus par tous ses membres. La commune russe, et par suite l'assemblée des habitants, le mir, puise dans cette responsabilité des droits exorbitants,constituant un véritable despotisme, allant jusqu'à louer les

1 Annuaire de législation étrangère de 1873 (Société de législation comparée, pp. 422, 159 à 464).

COMMUNES URBAINES; LOIS DE 1892

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services du contribuable en retard, à le priver de son lot, à vendre ses biens. De sorte que le paysan russe n'a cessé d'être le serf du seigneur par l'émancipation, que pour devenir celui de la commune, grâce à la toute-puissance du mir.

Le pouvoir exécutif communal est partagé entre l'assemblée elle-même, le mir, et le chef ou ancien (starosta), élu par l'assemblée pour trois ans. Il la préside, assure l'exécution de ses décisions, veille à l'entretien des chemins et établissements communaux, à la rentrée des impôts et à l'ordre public.

Dans les communes urbaines, on ne retrouve plus la propriété collective du mir. Une loi spéciale des 16-28 juin 1870 réglait leur administration.

D'après cette loi, un conseil municipal, nommé gorodskaia douma, délibère sur toutes les affaires intéressant la ville, et ses délibérations sont soumises à l'autorisation, soit du législateur, soit du ministre, soit du gouverneur, soit de la commission provinciale présidée par le gouverneur et composée des principaux fonctionnaires et chefs d'administration de la province. En outre du conseil municipal élu, il y a, dans les communes urbaines, une commission de ville (ouprava) élue par lui pour 4 ans, dont le maire fait partie, et qui est la commission municipale exécutive. Dans les bourgs et petites villes le conseil peut décider que le maire remplira seul les fonctions de l'ouprava.

Une loi du 11 juin 1892 sur l'organisation urbaine, en 154 articles et deux appendices, a modifié certains points de la loi de 1870. D'une part, elle a renforcé l'intervention du gouvernement dans le fonctionnement des institutions communales urbaines, comme nous avons vu [n° 246] que l'a fait la loi du 12 juin 1892 pour celles de province et de cercle. C'est ainsi que le gouverneur de la province, qui avait déjà le devoir de maintenir les conseils municipaux dans la légalité, devra en outre, en tant qu'organe du gouvernement central, s'assurer que leurs décisions sont conformes aux intérêts de l'État et à ceux de la

Annuaire de législation étrangère de 1892 (Société de législation comparée, pp. 716 à 792).

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