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RÈGLES DE L'AUTORISATION

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341. Le § 3 et dernier de l'article 69 maintient en ces matières la règle traditionnelle du recours par la voie hiérarchique devant le ministre, ouverte au conseil municipal, en cas de refus d'autorisation du préfet. Ce texte [n° 340] lui confère le même droit lorsque le préfet « n'a pas fait connaître la décision dans un délai « d'un mois à partir de la date du récépissé ». La circulaire ministérielle du 15 mai 1884 recommande aux préfets de statuer avant l'expiration de ce délai. Lorsque le préfet a, dans ce délai, appelé un conseil municipal à compléter ou régulariser une de ses délibérations, il est évident qu'un nouveau délai de trente jours est imparti au préfet, par le texte même de l'article 69, à partir de la délivrance du récépissé du procès-verbal de la seconde délibération.

Le rapport soumis à la Chambre des députés en 18821 présen. tait cette règle comme une innovation. Un autre rapporteur l'a répété. Mais cette voie de recours hiérarchique, du préfet au ministre de l'intérieur, a toujours existé. Elle existerait même en l'absence de cette disposition. Parce qu'il est de principe que l'acte d'un inférieur [n° 120] puisse toujours être déféré à son supérieur hiérarchique. Le ministre ne statue pas comme juge, mais comme administrateur au même titre que le préfet lui-même. C'est le recours par la voie gracieuse toujours ouvert contre les actes d'administration en suivant les degrés hiérarchiques.

L'article 6 du décret-loi du 25 mars 1852 sur la décentralisation administrative et l'article 7 du décret du 13 avril 1861 [n° 149] n'ont fait eux-mêmes qu'appliquer ce principe général en matière d'administration. Il dérive de ce que la plénitude de l'autorité administrative se trouve dans le pouvoir exécutif dont l'administration est une des branches.

L'institution de l'autorisation administrative respecte entièrement le droit d'initiative des conseils municipaux. En ce qui concerne cette sorte de délibérations des conseils municipaux, il y a

Journal officiel; Documents parlementaires, Chambre des députés ; janvier 1883; p. 2661; rapport annexe au procès-verbal de la séance de la Chambre des députés du 19 décembre 1882, no 1547.

T. I.

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RÉGIME LÉGAL DE L'AUTORISATION

encore trois phases dans l'accomplissement de l'acte de la vie civile de la commune: la délibération toujours nécessaire du conseil municipal, l'autorisation, l'acte d'exécution par le maire. Cette initiative du conseil municipal, même dans ces hypothèses où ses délibérations sont soumises à la nécessité d'une autorisation, engendre une triple conséquence.

1° L'autorité compétente pour autoriser ne peut, sans excès de pouvoir, rien ajouter aux termes de la délibération dont elle autorise l'exécution. Elle ne peut la modifier; c'est ce qui a été jugé plusieurs fois par le conseil d'Etat (C. d'Ét. 18 avril 1861, Kaur la Grande; 3 janvier 1881, commune de Campagne le Hesdin, Soubry et Thuillier c. Moitier). Dans cette dernière affaire le conseil municipal avait voté la suppression et l'aliénation du sol d'une ruelle, et le préfet, en approuvant cette délibération, avait autorisé l'aliénation en faveur d'un seul riverain, c'est-àdire d'un particulier spécialement désigné.

2o La seconde conséquence du droit d'initiative du conseil municipal est que l'autorisation donnée à sa délibération ne fait pas obstacle à ce que le conseil municipal revienne sur sa détermination, refuse d'y donner suite, la déclare non avenue. Cela encore tient à la nature même de l'institution; elle n'est qu'une simple autorisation d'exécuter la délibération, qui laisse le conseil libre de la mettre à néant (C. d'Ét. 12 nov. 1881, SainteLizaigne). Dans le même ordre d'idées il a été jugé que le préfet commettrait un excès de pouvoir en ordonnant l'exécution de travaux que le conseil municipal, après avoir délibéré qu'il y avait lieu de les faire et y avoir été autorisé, aurait ensuite décidé de ne pas exécuter (C. d'Ét. 3 déc. 1864, Ornon).

3 Mais de son côté l'administration supérieure peut rapporter l'autorisation qu'elle a donnée, tant que la délibération régulièrement autorisée n'a pas reçu d'exécution. De nombreux arrêts du conseil d'État ont jugé ces deux points s'il n'y a pas eu d'exécution, faculté de retrait (24 juillet 1874, Roby Pavillon); perte de cette faculté du retrait de l'autorisation pour l'adminis. tration supérieure, lorsqu'il y a eu exécution (C. d'Ét. 2 mars 1877).

DÉLIBÉRATIONS ENTIÈREMENT SUBORDONNÉES

342. 3° Délibérations entièrement subordonnées.

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Cette sorte de délibérations formait la règle générale dans la loi du 28 pluviose an VIII. La loi du 18 juillet 1837 en a fait une exception restreinte. Cette loi avait en effet consacré l'indépendance des conseils municipaux «< pour ne pas faire », en ce sens qu'en principe, depuis et en vertu de cette loi, un acte de la vie civile de la commune ne pouvait être accompli sans une délibération conforme du conseil municipal.

Toutefois cette loi, par dérogation à ce principe, et dans des cas déterminés, donnait exceptionnellement, à l'administration supérieure, le droit de passer outre au refus ou a l'abstention du conseil municipal. Il en était ainsi, au cas de refus par le conseil municipal d'accepter un don ou un legs, et lorsqu'il refusait, soit de vendre un bien de la commune pour payer ses dettes, soit de voter le crédit nécessaire pour une dépense obligatoire.

Dans le premier cas, la volonté du conseil municipal était réellement subordonnée à celle de l'administration supérieure dans l'appréciation de l'intérêt de la commune. Aussi l'autorisation d'office d'accepter les dons et legs n'existe plus en ce qui concerne les communes.

Dans le second cas, ce n'est pas à la volonté de l'administration supérieure que celle du conseil municipal est subordonnée, mais aux prescriptions impératives d'un arrêt de justice ou d'une décision de la loi. Dans ces cas, les droits d'inscription et d'imposition d'office pour les dépenses obligatoires des communes ont été justement conservées par la loi du 5 avril 1884. Ces droits ne constituent ni une atteinte aux franchises communales, ni un acte de centralisation. Ils sont une sanction destinée à empêcher les conseils municipaux de méconnaître les prescriptions formelles de la loi [nos 189 à 192].

343. C'est avec ce caractère, que cette catégorie de délibérations des conseils municipaux est demeurée dans la loi du 5 avril 1884, et ne pouvait y faire défaut. En y joignant d'autres lois contenant des dispositions de même nature, on peut actuellement distinguer de nombreuses délibérations subor

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DÉCISION D'OFFICE; INSCRIPTION D'OFFICE;

données au droit de décision, d'inscription ou d'imposition d'office.

1o A défaut de fonds disponibles, lorsque le conseil municipal refuse, pour payer un créancier porteur de titre exécutoire, de vendre des meubles ou immeubles de la commune non affectés à un usage ou service public, un décret du président de la République peut l'y contraindre (L. 1884, art. 110).

2. A défaut de vote par le conseil municipal des fonds exigés pour une dépense obligatoire, c'est-à-dire « mise à la charge des <«< communes par une disposition de loi (art. 136) », l'inscription au budget de la commune peut en être opérée d'office, par décret pour les communes dont le revenu est de 3 millions et au-dessus, par arrêté du préfet en conseil de préfecture pour les autres, après que le conseil municipal a été préalablement appelé à en délibérer (art. 149 §§ 1 à 4).

3o En cas de ressources insuffisantes pour subvenir aux dépenses obligatoires, inscrites d'office, une imposition d'office peut être établie par décret ou par une loi suivant que cette contribution extraordinaire excède ou non le maximum annuellement fixé par la loi de finances (art. 149 § 5).

4o Dans les villes ayant plus de 40,000 habitants, si le conseil municipal n'allouait pas les fonds exigés pour la dépense du service de la police réglé par décret, « l'allocation nécessaire <«< serait inscrite au budget par décret du président de la Répu«blique, le conseil d'État entendu ». D'après le projet de loi du 27 octobre 1896 modifiant certaines dispositions de la loi du 5 avril 1884, et déjà cité, cette disposition de l'article 103 § 2 [n° 280] serait supprimée. Il ne serait plus nécessaire d'un décret rendu en conseil d'État pour l'inscription d'office de ces dépenses de police. La règle générale de l'article 149 n'exigeant, pour l'inscription d'office d'une dépense obligatoire au budget communal, qu'un arrêté préfectoral ou un décret non rendu en conseil d'État, serait seule applicable.

5° Au cas de biens et droits indivis entre plusieurs communes [no 357], « la part de dépense définitivement assignée à chaque «< commune sera portée d'office aux budgets respectifs confor<«<mément à l'article 149 de la présente loi (art. 163 § 4 [no 357]) ».

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6o Au cas de syndicat de communes, la première des recettes du budget du syndicat est la contribution des communes associées; « cette contribution est obligatoire pour lesdites com<<munes pendant la durée de l'association et dans la limite «<< des nécessités de service telles que les délibérations initiales « des conseils municipaux l'ont déterminée (art. 177 no 1 de la <«< loi du 5 avril 1884, titre VIII, des syndicats de communes; loi « du 22 mars 1890 [no 359]) ».

7° « L'établissement des écoles primaires élémentaires publiques créées par application des articles 11, 12 et 13 de la présente loi, est une dépense obligatoire pour les communes. Sont également des dépenses obligatoires, dans toute école régulièrement créée : le logement du personnel, l'entretien ou la location des bâtiments et de leurs dépendances, l'acquisition et l'entretien du mobilier scolaire. Le chauffage et l'éclairage des classes et la rémunération des gens de service s'il y a lieu (Loi du 30 octobre 1886 sur l'organisation de l'enseignement primaire, art. 14 et 15) ».

8 « Si le conseil municipal, mis en demeure, n'a pas voté, dans la session désignée à cet effet, les prestations et centimes nécessaires, ou si la commune n'en a pas fait emploi dans les délais prescrits, le préfet pourra d'office, soit imposer la commune dans la limite du maximum, soit faire exécuter les travaux. Chaque année le préfet communiquera au conseil général l'état des impositions établies d'office en vertu du présent article (L. 21 mai 1836 sur les chemins vicinaux, art. 5) »

La vente des biens mobiliers et immobiliers des communes, autres que ceux servant à un usage public, peut être autorisée sur la demande de tout créancier, porteur de titre exécutoire, par un décret du président de la République, qui détermine les formes de la vente (L. 5 avril 1884, art. 110). Si un conseil municipal n'allouait pas les fonds exigés par une dépense obligatoire, ou n'allouait qu'une somme insuffisante, l'allocation serait inscrite au budget par décret du président de la République pour les communes dont le revenu est de 3 millions et au-dessus, et par arrêté du préfet en conseil de préfecture pour celles dont le revenu est inférieur. Aucune inscription d'office ne peut être opérée sans que le conseil municipal ait été, au préalable, appelé à prendre une délibération spéciale à ce sujet. S'il s'agit d'une dépense annuelle et variable, le chiffre en est fixé sur sa quotité moyenne pendant les trois dernières années. S'il s'agit d'une dépense annuelle et fixe de sa nature ou d'une dépense extraordi

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