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A LA NOMINATION DES MAIRES

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importantes. Au point de vue de la statistique, il convient de dire qu'il y avait en France 362 villes chefs-lieux de département et d'arrondissement; mais en dehors d'elles, il n'y avait que les deux seules villes de Roubaix et de Tourcoing qui eussent en 1871 une population supérieure à 20,000 habitants.

8° Nomination des maires par le pouvoir exécutif dans les communes chefs-lieux de département, d'arrondissement et de canton; élection par le conseil municipal dans les autres; avec obligation, dans les deux cas, de choisir le maire parmi les conseillers municipaux. C'est, avec l'extension du droit de nomination du gouvernement aux communes chefs-lieux de canton, la même idée de distinction des communes en deux catégories, qui a inspiré les deux systèmes précédents; c'était la règle consacrée par la loi du 12 août 1876.

9° Élection du maire par le conseil municipal, avec adjonction des plus fort imposés dans toutes les communes où cette adjonction était exigée par la loi, pour le vote des emprunts et de certains impôts; nomination par le gouvernement dans toutes les autres communes; toujours parmi les membres du conseil, dans les deux cas. C'est le système qui avait été admis par la commission de décentralisation, en mai 1873, pour être soumis à l'assemblée dans les projets de modification aux lois municipales. Il avait pour objet, à côté de la prédominance du principe électif en cette matière, d'assurer à la propriété, qui peut être exclue du conseil municipal par le suffrage universel, une certaine influence sur l'élection du maire.

10° Élection par le conseil municipal avec institution par le pouvoir exécutif. Ce système à été proposé, mais n'a jamais été admis par la loi, ainsi que les suivants.

11° Élection par le conseil municipal d'un président, autre que le maire qui serait nommé par le pouvoir exécutif.

12o Division des attributions actuelles du maire entre un représentant des intérêts locaux élu par les électeurs ou le conseil municipal, et un représentant de l'autorité centrale nommé par le pouvoir exécutif.

Cette idée fort grave, de la division des fonctions municipales,

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ÉLECTION DU MAIRE ET DES ADJOINTS PAR

telles qu'elles existent depuis 1789, semble, dans des termes moins absolus, avoir inspiré le rapport de la commission de l'Assemblée nationale en 1871, où il est dit: « Cette distinction (des <«< communes) n'a été admise qu'à titre provisoire, et avec l'espoir qu'une loi nouvelle, en remaniant les attributions, per« mettra d'appliquer sans distinction l'élection du maire à tou<<< tes les communes ». L'article 18 de la loi du 14 avril 1871, et d'importants amendements signalés dans les rapports présentés au Sénat et à la Chambre des députés sur la loi du 12 août 1876, se sont aussi placés dans cet ordre d'idées du dédoublement des fonctions des maires.

Ce tableau des divers systèmes produits sur la question de la nomination des maires est le commentaire historique, général et nécessaire, tant de la loi qui la résout en ce moment, que de toutes les solutions qui lui ont été données.

tre ces douze sys

en imaginer un récédent parlemen

267. La loi du 5 avril 1884, avait le choix tèmes, à moins qu'il ne plût au législate nouveau. Il était facile de prévoir, après taire du 8 avril 1871, et surtout le vote de la loi du 28 mars 1882, qu'elle consacrerait le cinquième des systèmes ci-dessus exposés. En effet les articles 73 § 1 et 76 disposent que le maire et les adjoints sont élus par le conseil municipal dans toutes les communes de France. Nous n'hésitons pas à voir dans ces dispositions la mesure de décentralisation administrative la plus considérable qui existe, non seulement dans la législation française, mais aussi dans aucune autre législation communale. Deux points d'une importance capitale sont en effet à constater; c'est, d'une part, que la loi française concentre dans la main unique du maire toute l'autorité municipale active, que nous verrons répartie entre des mains diverses et parfois très nombreuses dans les législations étrangères; et, d'autre part, que le maire en France est à la fois le chef de l'association communale et le représentant du gouvernement dans la commune. Dans les 36,170 communes de France le représentant du gouvernement, concentrant dans sa main toute l'autorité municipale, même dans ses parties

ET DANS LE CONSEIL MUNICIPAL

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afférentes aux intérêts généraux du pays, émane entièrement désormais du principe électif.Nous ne pensons pas qu'il soit possible de pousser plus loin la décentralisation administrative.

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Il y a dans chaque commune un máire et un ou plusieurs adjoints élus parmi les membres du conseil municipal (L. 5 avril 1884 sur l'organisation municipale (art. 73 § 1). Le conseil municipal élit le maire et les adjoints parmi ses membres, au scrutin secret à la majorité absolue. Si, après deux tours de scrutin, aucun candidat n'a obtenu la majorité absolue, il est procédé à un troisième tour de scrutin et l'élection a lieu à la majorité relative. En cas d'égalité de suffrages, le plus âgé est déclaré élu (art. 76). - La séance dans laquelle il est procédé à l'élection du maire est présidée par le plus âgé des membres du conseil municipal. Pour toute élection du maire ou des adjoints, les membres du conseil municipal sont convoqués dans les formes et délais prévus par l'article 48; la convocation contiendra la mention spéciale de l'élection à laquelle il devra être procédé. Avant cette convocation, il sera procédé aux élections qui pourraient être nécessaires pour compléter le conseil municipal. Si, après les élections complémentaires, de nouvelles vacances se produisent, le conseil municipal procédera néanmoins à l'élection du maire et des adjoints, à moins qu'il ne soit réduit aux trois quarts de ses membres. En ce cas, il y aura lieu de recourir à de nouvelles élections complémentaires. Il y sera procédé dans le délai d'un mois, à dater de la dernière vacance (art. 77). — Les nominations sont rendues publiques dans les vingt-quatre heures de leur date, par voie d'affiche à la porte de la mairie. Elles sont, dans le même délai, notifiées au sous-préfet (art. 78). - L'élection du maire et des adjoints peut être arguée de nullité dans les conditions, formes et délais prescrits pour les élections du conseil municipal. Le délai de cinq jours court à partir de vingt-quatre heures après l'élection. Lorsque l'élection est annulée ou que, pour toute autre cause, le maire ou les adjoints ont cessé leurs fonctions, le conseil, s'il est au complet, est convoqué pour procéder au remplacement dans le délai de la quinzaine (art. 79).

268. La durée maxima des fonctions de maire et d'adjoint est de quatre ans, comme celle du conseil municipal qui les élit. Les fonctions des uns et des autres sont gratuites; l'article 74 de la loi de 1884 s'en explique expressément, comme les lois antérieures du 5 mai 1855 (art. 1 § 2) et du 14 avril 1871 (art. 19). Cette dernière loi avait certainement pour but d'atteindre certaines violations de la loi précédente, qui n'ont pas cessé, dans la première commune de France, de se produire avec éclat.

Les maires et adjoints sont nommés pour la même durée que le conseil municipal. Ils continuent l'exercice de leurs fonctions, sauf les dispositions des articles 80, 86, 87 de la présente loi, jusqu'à l'installation de

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SUSPENSION ET RÉVOCATION DES MAIRES

leurs successeurs. Toutefois, en cas de renouvellement intégral, les fonctions de maire et d'adjoint sont, à partir de l'installation du nouveau conseil jusqu'à l'élection du maire, exercées par les conseillers municipaux dans l'ordre du tableau (L. 5 avril 1884, art. 81). Les fonctions de maire, adjoints, conseillers municipaux, sont gratuites. Elles donnent seulement droit au remboursement des frais que nécessite l'exécution des mandats spéciaux. Les conseils municipaux peuvent voter, sur les ressources ordinaires de la commune, des indemnités aux maires pour frais de représentation (art. 74).

269. Comme dans la législation antérieure à 1882, les maires et adjoints peuvent être révoqués par décret, et suspendus par arrêté préfectoral qui cesse d'avoir son effet, s'il n'est, dans le délai d'un mois, porté à trois mois par le ministre de l'intérieur. Les maires et adjoints ne sont pas rééligibles pendant une année à partir du décret qui a prononcé leur révocation. La loi du 5 mai 1884 (art. 86) a emprunté ces dispositions à la loi du 5 mai 1855 (art. 2) et à celle du 14 avril 1871 (art. 9). Cetie disposition de l'article 86 de la loi municipale du 5 avril 1884 est certainement plus en harmonie avec les lois de 1855 et de 1871, qu'avec l'élection du maire par les conseils municipaux. Il est en effet plus rationnel que le même pouvoir soit investi du droit de nommer et de révoquer. Mais en raison des graves considérations relevées plus haut, le maire élu peut être révoqué par décret, et devient alors de plein droit inéligible pendant un an.

Les maires et adjoints peuvent être suspendus par arrêté du préfet pour un temps qui n'excédera pas un mois et qui peut être porté à trois mois par le ministre de l'intérieur. Ils ne peuvent être révoqués que par décret du président de la République, La révocation emporte de plein droit l'inéligibilité aux fonctions de maire et à celles d'adjoint pendant une année à dater du décret de révocation, à moins qu'il ne soit procédé auparavant au renouvellement général des conseils municipaux. Dans les colonies régies par la présente loi, la suspension peut être prononcée par arrêté du gouverneur pour une durée de trois mois. Cette durée ne peut être prolongée par le ministre. Le gouverneur rend compte immédiatement de sa décision au ministre des colonies (L. 5 avril 1884, art. 86).

270. Les conditions d'éligibilité aux fonctions de maire et d'adjoints sont de deux sortes: 1° être conseiller municipal et par suite remplir les conditions d'éligibilité exigées des conseillers

DUALITÉ DES ATTRIBUTIONS DES MAIRES

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municipaux; et 2° n'être pas dans un des cas d'incapacité prévus par l'article 80, ainsi conçu:

Ne peuvent être maires ou adjoints ni en exercer même temporairement les fonctions: les agents et employés des administrations financières, les trésoriers-payeurs généraux, les receveurs particuliers et les percepteurs; les agents des forêts, ceux des postes et télégraphes, ainsi que les gardes des établissements publics et des particuliers. Les agents salariés du maire ne peuvent être adjoints.

271. Les attributions du maire sont très diverses. Il est officier de l'état civil, officier de police judiciaire; il a été officier du ministère public près le tribunal de simple police dans certaines communes; à ces divers titres, la loi l'a placé sous la surveillance du ministère public et il appartient à l'ordre judiciaire. Nous ne devons le considérer ici que comme administrateur de la commune; nous dirons, dans le chapitre consacré aux tribunaux administratifs, qu'il fonctionne aussi, dans certains cas très rares, comme juge investi d'attributions contentieuses [nos 730 et 731].

272. Les attributions purement administratives du maire, jusqu'en 1884, en vertu de la loi du 18 juillet 1837 sur l'organisation municipale, se divisaient en deux catégories qui subsistent toujours. Il exerce les unes en qualité d'agent et de représentant de l'administration centrale, et les autres comme chef de l'association communale. La réunion de ces deux qualités dans la personne du maire forme le trait caractéristique de la commune moderne, et la différencie complètement de la commune du moyen âge; elle concilie la protection des intérêts locaux avec le besoin social de l'unité administrative. Les municipalités créées par l'Assemblée constituante étaient investies de ce double caractère par l'article 49 de la loi du 14 décembre 1789 ainsi conçu: «Les corps munici<«<paux auront deux espèces de fonctions à remplir: les unes, pro<< pres au pouvoir municipal; les autres, propres à l'administra<«<tion générale de l'État et déléguées par elle aux municipalités ».

La loi du 28 pluviôse de l'an VIII, en donnant au maire seul l'action administrative, collectivement exercée dans la législation de 1790 par le bureau municipal, a conservé au maire cette

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