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CONSEILS D'ARRONDISSEMENT

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demeurée intentionnellement étrangère aux conseils d'arrondissement; elle a même évité de prononcer leur nom pour mieux réserver la question de leur suppression ou de leur maintien, au risque de rendre la rédaction de quelques-unes de ses dispositions très inférieure par leur clarté et leur précision à celle des articles correspondants de la loi de 1838.

Cette question n'est pas nouvelle. On connaît l'adoption, dans la séance du 8 avril 1829, par la gauche de la Chambre des députés (formant, contre les centres, la majorité de l'assemblée, par suite de l'abstention volontaire de la droite), d'un amendement ainsi conçu : « Les conseils d'arrondissement sont supprimés ». Elle amena, dans cette séance même, l'ordonnance du roi Charles X portant retrait de deux projets de loi soumis à la chambre sur l'organisation communale et départementale, et bientôt après la chute du ministère de MM. de Martignac, de Vatisménil, Portalis, Hyde de Neuville, Roy et Feutrier. On sait son remplacement par le ministère de Polignac, qui contresigna les ordonnances du 25 juillet 1830. Le vote de la Chambre des députés du 3 décembre 1886, contre les sous-préfets, ne fit que renverser un ministère. Sous-préfets et conseils d'arrondissement n'en ont pas moins continué d'exister. Ces conseils furent formellement maintenus par les lois de 1833 et de 1838; et, malgré la question posée de nouveau par le législateur de 1871, cet organe administratif secondaire, créé par la loi du 28 pluviôse de l'an VIII, n'a cessé d'attester sa vitalité, certainement plus grande que son importance. Cette vitalité a sa raison d'être dans l'utilité d'un organe pour faire connaître les besoins et les vœux des arrondissements.

La loi du 2 avril 1880, qui a supprimé les sous-préfectures de Sceaux et Saint-Denis n° 223], a maintenu leurs conseils d'arrondissement, en se bornant à dire qu'ils « se réuniront lors de leurs << sessions à la préfecture de la Seine ».

Nous avons déjà vu [no 224] que l'arrondissement n'est qu'une circonscription administrative; qu'il n'est ni une unité administrative, ni une personne civile, ce qui explique et justifie le peu de pouvoir imparti aux organes administratifs qui lui corres

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ORGANISATION ET ATTRIBUTIONS

pondent. Nous savons qu'il en était de même du district de 1790 et de l'élection d'avant 1789.

231. Ainsi que nous l'avons vu [no 225], la question de la suppression pure et simple des conseils d'arrondissement n'a pas seule été posée; le plus souvent on a agité celle de leur remplacement par des conseils cantonaux qui pourraient avoir le tort de ramener aux administrations cantonales de l'an III (propositions de loi d'initiative parlementaire du 20 décembre 1879 et du 8 mars 1887), ou de leur maintien avec ces conseils cantonaux qu'avait proposé le projet de 1829, qu'avait admis, sans que la loi organique en ait été votée, l'article 77 de la Constiution de 1848, qu'avait repris un projet de loi délibéré en conseil d'État dans les derniers mois de 1869, et qui a l'inconvénient d'ajouter aux conseils d'arrondissement, déjà peu occupés, de nou. veaux conseils administratifs qui auraient encore moins à faire.

232. Les conseils d'arrondissement sont régis par les lois du 22 juin 1833 et du 10 mai 1838, qui n'ont été abrogées par la loi du 10 août 1871 que dans la partie relative aux conseils généraux. Cette loi, comme celle du 18 juillet 1866, ne contient aucune disposition relative aux conseils d'arrondissement. Comme les conseils généraux, les conseils d'arrondissement sont des assemblées électives, issues du suffrage universel. Pour être éligible au conseil d'arrondissement, il faut, en outre de la jouissance des droits civils et politiques, être âgé de 25 ans au moins, être domicilié dans l'arrondissement, ou y payer une contribution directe (L. 3 juillet 1848, art. 14), et ne pas remplir une des fonctions déclarées incompatibles par la loi du 22 juin 1833 (art. 5 et 23). L'article 34 de la loi du 15 juillet 1893 sur l'assistance médicale gratuite dispose que « les médecins de l'assistance médicale gratuite ne pourront être considérés comme inéligibles au conseil général et au conseil d'arrondissement à raison de leur rétribution sur le budget départemental ». Le contentieux des élections aux conseils d'arrondissement appartient aux conseils de préfecture [no 700'.

DES CONSEILS D'ARRONDISSEMENT

283 Les sessions des conseils d'arrondissement se divisent en sessions ordinaires et sessions extraordinaires; ils n'ont qu'une session annuelle ou ordinaire, partagée en deux parties, dont la première précède et la seconde suit la session d'août du conseil général, et dont les époques sont fixées par décret (L. 10 mai 1838, art. 39).

Chaque conseil d'arrondissement est composé d'autant de membres que l'arrondissement a de cantons, sans que le nombre des conseillers puisse être au-dessous de neuf. Un décret du 24 juin 1892, rendu en exécution des articles 20 et 21 de la loi du 22 juin 1833, et visant « les nouveaux états de population déclarés authentiques par le décret du 31 décembre 1891 », a fixé le nombre des conseillers d'arrondissement à élire par chaque canton dans les arrondissements de sous-préfecture où il y a moins de neuf cantons.

Les conseillers d'arrondissement sont élus pour six ans et renouvelés par moitié tous les trois ans (L. 22 juin 1833, art. 25). En cas de vacance par option, décès, démission, annulation d'élection, perte des droits civils ou politiques, les électeurs doivent être convoqués dans le délai de deux mois (L. 1833, art. 11 et 26)Les président, vice-présidents et secrétaires sont nommés par le conseil, aux termes de la loi du 23 juillet 1870, art. 6.

Le sous-préfet a entrée dans le conseil; il est entendu quand il le demande, et assiste aux délibérations (L. 22 juin 1833, art. 27).

233. Par suite du défaut d'application de la loi du 10 août 1871 aux conseils d'arrondissement, il existait entre leur législation électorale et celle des conseils généraux une anomalie regrettable. L'élection aux conseils d'arrondissement continuait à avoir lieu sur les listes électorales politiques (L. 7 juillet 1852, art. 3) et le scrutin restait ouvert deux jours dans certaines communes, tan. dis que la loi de 1871 imposait à l'élection des conseils généraux des règles contraires. L'autorité chargée de convoquer les électeurs et le délai qui doit séparer le décret de convocation de la date de l'élection variaient également (L. 22 juin 1833, art. 34). Une loi du 30 juillet 1874, également émanée de l'assemblée

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DÉLIBÉRATIONS, AVIS ET VOEUX

qui craignait de nommer les conseils d'arrondissement dans la loi de 1871, a effacé ces distinctions par une disposition ainsi conçue et qui forme son article 3: « Sont applicables aux élec<<<tions du conseil d'arrondissement les articles 5 et 12 [rapportés «< ci-dessus n° 165] de la loi du 10 août 1871 ».

234. Les attributions des conseils d'arrondissement diffèrent de celles des conseils généraux autant que les attributions des sous-préfets diffèrent de celles des préfets, les mêmes motifs produisant ici les mêmes effets. Ces conseils n'ont de pouvoir propre qu'en tant que chargés de la répartition des contributions directes au troisième degré, entre les communes de l'arrondissement; ils forment devant le conseil général les demandes en réduction du contingent de l'arrondissement, et ils délibèrent sur les demandes en réduction de contributions formées par les communes, la solution définitive de ces demandes appartenant au conseil général. Cette matière, la seule sur laquelle le conseil procède par voie de délibération proprement dito, est de beaucoup la plus importante de ses attributions. La séparation accomplie entre les deux impôts fonciers, dont l'un est devenu un impôt de quotité, a déjà diminué cette importance. Elle le sera plus encore par la suppression des impôts personnel et mobilier, et des portes et fenêtres.

Dans la première partie de sa session, le conseil d'arrondissement délibère sur les réclamations auxquelles donnerait lieu la fixation du contingent de l'arrondissement dans les contributions directes. Il délibère éga lement sur les demandes en réduction de contributions formées par les communes (Loi du 10 mai 1838, sur les attributions des conseils généraux et des conseils d'arrondissement, art. 40). Dans la seconde partie de sa session, le conseil d'arrondissement répartit entre les communes les contributions directes (art. 45). - Le conseil d'arrondissement est tenu de se conformer, dans la répartition de l'impôt, aux décisions rendues par le conseil général sur les réclamations des communes. Faute par le conseil d'arrondissement de s'y être conformé, le préfet, en conseil de préfecture, établit la répartition d'après lesdites décisions. En ce cas, la somme dont la contribution de la commune déchargée se trouve réduite est répartie, au centime le franc, sur toutes les autres communes de l'arrondissement (art. 46).

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235. En dehors de l'attribution qui vient d'être signalée, le conseil d'arrondissement n'exerce aucune autorité; il n'a que des attributions consultatives. Elles se produisent sous forme d'avis (art. 41 et 42). Ces avis sont de trois sortes: ceux qui doivent être demandés au conseil par l'administration; ceux qu'elle peut lui demander; ceux que le conseil d'arrondissement peut donner spontanément. Il peut en outre exprimer des vœux sur des objets d'intérêt exclusivement local (art. 44). Aux termes de l'article 28 de la loi du 22 juin 1833, les articles 13, 14, 15, 16, 17, 18 et 19 de cette loi relatifs aux envahissements possibles des conseils généraux et qui, pour ces conseils, ont en partie passé dans la loi du 10 août 1871, sont restés applicables dans leur texte primitif aux conseils d'arrondissement. Aussi toute immixtion de leur part, sous quelque forme que ce soit, dans les questions politiques ou même d'administration générale, constitue une violation de la loi frappée de nullité (D. 28 décembre 1872, portant annulation d'une adresse signée par les membres d'un conseil d'arrondissement. Bull. off. min. int. 1873, p. 55; deux décrets du 11 août 1879, annulant des voeux des conseils d'arrondissement d'Avignon et des Sables-d'Olonne). Il peut, selon les cas, y avoir lieu à l'application de l'article 258 du Code pénal.

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Le conseil d'arrondissement donne son avis 1 sur les changements proposés à la circonscription du territoire de l'arrondissement, des cantons et des communes, et à la désignation de leurs chefs-lieux; 2° sur le classement et la direction des chemins vicinaux de grande communication; 30 sur l'établissement et la suppression ou le changement des foires et marchés 1; 4° sur les réclamations élevées au sujet de la part contributive des communes respectives dans les travaux intéressant à la fois plusieurs communes et le département; 5° et généralement sur tous les objets sur lesquels il est appelé à donner son avis en vertu des lois et règlements, ou sur lesquels il serait consulté par l'administration (Loi du 10 mai 1838, art. 41). Le conseil d'arrondissement peut donner son avis: 1o sur les travaux de routes, de navigation et autres objets qui intéressent l'arron

Abrogé, en ce qui concerne les marchés d'approvisionnements ou de menues denrées, depuis l'article 11 de la loi du 24 juillet 1867 sur les conseils municipaux, mais non relativement aux foires et marchés aux bestiaux (D. 13 août 1864; L. 10 août 1871, art. 46 § 24 [n° 183]; avis du conseil d'État et circulaire du ministre de l'agriculture et du commerce du 1er février 1873, Bull. off. min. int. 1873, p. 60 [voir aussi no 183 la loi du 16 septembre 1879]).

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