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DÉLIBÉRATIONS ENTIÈREMENT SUBORDONNÉES

breuses allocations. Les articles 10 et 11 de la loi du 18 juillet 1866 avaient étendu le droit du conseil général, en réduisant à trois sortes de dépenses les pouvoirs de modification et d'inscription d'office du décret qui continue à régler le budget du département comme d'après la loi de 1838. La loi du 10 août 1871 a suivi la disposition de la loi de 1866, en étendant ce droit d'inscription d'office à une quatrième sorte de dépenses; de sorte que les dépenses obligatoires se trouvaient ainsi réduites à cinq, avec les dettes exigibles, toutes autres étant facultatives pour le conseil général. Il résulterait donc de l'article 61 § 3 de la loi du 10 août 1871 que, sauf en ce qui concerne les dépenses énumérées par les nos 1, 2, 3 et 4 de l'article 60, et les dettes exigibles du département (art. 61 § 1), toutes les autres délibérations du conseil général pour le vote du budget sont des délibérations définitives. Toutefois ces délibérations définitives, au lieu d'être soumises au régime des articles 46 et 47, le sont au régime particulier résultant des articles 57 et 61 § 3 de la loi du 10 août 1871. Ce régime spécial a pour caractère distinctif que « le budget délibéré par le conseil général est définitivement réglé par décret (art. 57 § 2) », mais que ce décret, sauf les cinq espèces de dépenses ci-dessus, ne peut « ni changer, ni modifier, les autres allocations portées au budget par le conseil général (art. 61 § 3)».

On ne peut donc pas dire que, pour toutes ces dépenses devenues facultatives, l'intervention de ce décret constitue un acte d'autorisation, ou, en ce qui les concerne, soit un acte suspensif. Ce sont donc bien exactement des délibérations définitives soumises à un régime particulier.

189. En ce qui concerne les quatre sortes de dépenses énumé rées aux quatre premiers numéros de l'article 60 et les dettes exigibles du département (art. 61 § 1), il n'est pas possible non plus de se méprendre sur leur caractère légal. Ce sont des dépenses obligatoires pour les départements. Les conseils généraux n'ont jamais reçu de la loi le droit de se refuser à les payer, ou de négliger de le faire, ce qui produirait le même résultat. Ils

INSCRIPTION ET IMPOSITION D'OFFICE

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n'ont jamais été dotés à cet égard de l'indépendance pour ne pas faire, pour dire <<< non »; ils n'en ont pas le droit. La raison en est simple. En ce qui concerne les dettes exigibles, un départe ment ne doit pas avoir, plus qu'un particulier, le droit de se refuser à payer ses dettes. En ce qui concerne les quatre dépenses d'administration, d'instruction publique, justice, gendarmerie, listes électorales et du jury en matière criminelle, mises par la loi à la charge du département, donner aux conseils généraux le droit de refuser ou de s'abstenir de voter ces dépenses, serait, sous prétexte d'indépendance ou de liberté locale, permettre aux conseils généraux de paralyser, en violant la loi, tous ces services publics qui sont d'intérêt général en même temps que d'intérêt départemental. Pour les dettes exigibles, ce serait subordonner au bon vouloir du débiteur lui-même l'obligation qui lui incombe de payer ses dettes. Les délibérations du conseil général sur ces cinq points sont donc des délibérations entièrement subordonnées aux prescriptions de la loi, et non à la volonté de l'administration supérieure. Elle n'est armée que pour assurer l'exécution des lois.

Les moyens d'exécution sont, d'abord l'inscription d'office au budget départemental du crédit non voté ou insuffisamment doté pour tout ou partie de ces dépenses. Cette inscription d'office est faite par le décret qui règle le budget. En second lieu, il faut créer les ressources nécessaires à l'acquittement de ses dépenses.

IL y sera pourvu, dit l'article 61 § 1, au moyen d'une contribu<<tion spéciale portant sur les quatre contributions directes ». L'imposition d'office ou établie d'office est la conséquence de l'inscription d'office. Elle ne devrait pas en être toujours la suite nécessaire [no 193 in fine]. Cette contribution est établie par une loi, si elle doit excéder le maximum fixé annuellement par la loi de finances, et par un décret si elle ne dépasse pas les limites de ce maximum. Dans ce cas, le décret doit être délibéré en assemblée générale du conseil d'État (D. 3 avril 1886 n°9 no 98). Bien que cette disposition ne se trouve pas dans les règlements antérieurs du conseil d'État, la situation était identique, puisque le no 26 du même décret, reproduit des autres règlements, saisit l'assemblée générale du conseil d'Etat des affaires sur lesquelles

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NOUVELLES DÉPENSES OBLIGATOIRES DES

il doit être statué par décrets rendus dans la forme des règlements d'administration publique, et que l'article 61 § 2 de la loi du 10 août 1871 s'en explique expressément et exige en outre l'insertion du décret au Bulletin des lois.

Le projet de budget du département est préparé et présenté par le préfet, qui est tenu de le communiquer à la commission départementale, avec les pièces à l'appui, dix jours au moins avant l'ouverture de la session d'août. Le budget, délibéré par le conseil général, est définitivement réglé par décret. Il se divise en budget ordinaire et budget extraordinaire. (L. 1874, art. 57).— Le budget ordinaire comprend les dépenses suivantes : 1o loyer, mobilier et entretien des hôtels de préfecture et de sous-préfecture, du local nécessaire à la réunion du conseil départemental d'instruction publique et du bureau de l'inspecteur d'académie; 2o casernement ordinaire des brigades de gendarmerie; 3° loyer, entretien, mobilier et menues dépenses des cours d'assises, tribunaux civils et tribunaux de commerce, et menues dépenses des justices de paix; 4° frais d'impression et de publication des listes pour les élections consulaires, frais d'impression des cadres pour la formation des listes électorales et des listes du jury;... (art. 60 §§ 1, 2, 3 et 4). —- Si un conseil général omet d'inscrire au budget un crédit suffisant pour l'acquittement des dépenses énoncées aux numéros 1, 2, 3 et 4 de l'article précé dent ou pour l'acquittement des dettes exigibles, il y est pourvu au moyen d'une contribution spéciale portant sur les quatre contributions directes, et établie par un décret, si elle est dans les limites du maximum fixé annuellement par la loi de finances, ou par une loi, si elle doit excéder ce maximum. Le décret est rendu dans la forme des règlements d'administration publique et inséré au Bulletin des lois. Aucune autre dépense ne peut être inscrite d'office dans le budget ordinaire, et les allocations qui y sont portées par le conseil général ne peuvent être ni changées ni modifiées par le décret qui règle le budget (art. 61).

190. Depuis la loi du 10 août 1871, des lois diverses ont augmenté le nombre des dépenses départementales obligatoires. Ces lois sont relatives aux épizooties, aux écoles normales primaires, à l'inspection des écoles maternelles, à certaines autres dépenses de l'enseignement primaire, et à l'assistance médicale gratuite. Ce dernier point fera l'objet des deux numéros suivants [nos 191 et 192]. Nous indiquons ici les quatre autres, sans avoir égard à l'ordre chronologique des lois qui ont élargi le cercle d'application de l'article 61 de la loi du 10 août 1871. Nous pourrons ainsi rapprocher les unes des autres les trois dispositions législatives de cette sorte qui sont relatives à l'enseignement primaire. Les cinq lois postérieures à celle de 1871 que nous allons faire con

LOIS DE 1879, 1881, 1885, 1889

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naître dans ce numéro et les suivants, consacrent toutes l'existence de nouvelles délibérations des conseils généraux entièrement subordonnées aux droits d'inscription et d'imposition d'office.

1o La loi du 21 juillet 1881 sur la police sanitaire des animaux, dans son titre V, intitulé « dispositions générales », contient un article 38 ainsi conçu : « Un service des épizooties est établi dans <«< chacun des départements, en vue d'assurer l'exécution de la « présente loi. Les frais de ce service seront compris parmi les « dépenses obligatoires à la charge des budgets départementaux <«<et assimilés aux dépenses classées sous les §§ 1 à 4 de l'ar«ticle 60 de la loi du 10 août 1871 ».

2o La loi du 10 août 1879 relative à l'établissement des écoles normales primaires a étendu aux écoles normales d'institutrices l'obligation qui avait été écrite, à la charge des départements, dans la loi sur l'enseignement primaire du 28 juin 1833 (art. 11), en ce qui concerne les écoles normales d'instituteurs. Les articles 1 et 2 de cette loi du 9 août 1879, ci-dessous reproduits, consacrent le caractère obligatoire des dépenses d'installation première et d'entretien annuel des écoles normales primaires d'instituteurs et d'institutrices.

3o La loi de finances du 8 août 1885 (art. 25), innovant par rapport à la situation antérieure, a fait concourir les départements pour moitié aux traitements et frais de tournées des inspectrices départementales des écoles maternelles, en assignant à cette dépense le caractère obligatoire.

4o La loi du 19 juillet 1889 relative aux dépenses de l'enseignement primaire public (art. 26 § 2) déclare obligatoires les dépenses mises à la charge du département par les articles 3 et 23 de la même loi, ci-dessous reproduits. Aux termes du même article 26 § 2, la part des dépenses de l'enseignement primaire imposée aux communes est également obligatoire.

Tout département devra être pourvu d'une école normale d'instituteurs et d'une école normale d'institutrices suffisantes pour assurer le recrutement de ses instituteurs communaux et de ses institutrices communales. Ces établissements devront être installés dans le laps de quatre ans, à partir de la promulgation de la présente loi. Un décret du président de la République pourra, sur l'avis conforme du Conseil supérieur de l'instruc

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NOUVELLES DÉPENSES OBLIGATOIRES

tion publique, autoriser deux départements à s'unir pour fonder et entretenir en commun, soit l'une ou l'autre de leurs écoles normales, soit toutes les deux. Les départements procéderont, dans ce cas, conformément aux dispositions des articles 89 et 90 de la loi du 10 août 1871 sur les conseils généraux (L. 9 août 1879, relative à l'établissement des écoles normales primaires, art. 1er). L'installation première et l'entretien annuel des écoles normales primaires sont des dépenses obligatoires pour les départements (art. 2).

Sont au nombre des dépenses obligatoires, pour les départements, les traitements et frais de tournées des inspectrices départementales des écoles maternelles, jusqu'à concurrence de la moitié de la dépense, l'autre moitié étant à la charge de l'État. Deux ou trois départements pourront se réunir pour concourir à la dépense qui, dans ce cas, sera répartie entre eux par égales portions. Un arrêté ministériel réglera les conditions de nomination et d'exercice des inspections départementales (L. du 8 août 1883 portant fixation du budget général des dépenses et des recettes de l'exercice 1886, art. 25).

Sont à la charge des départements: 1° l'indemnité prévue à l'article 23; 2o l'entretien et, s'il y a lieu, la location des bâtiments des écoles normales; 3o l'entretien et le renouvellement du mobilier de ces écoles et du matériel d'enseignement; 4° le loyer et l'entretien du local et du mobilier destinés au service départemental de l'instruction publique; 5o les frais de bureau de l'inspecteur d'académie; 6o les imprimés à l'usage des délégations cantonales et de l'administration académique; 7o les alloca tions aux chefs d'atelier, contre maîtres et ouvriers chargés par les dépar tements de l'enseignement agricole, commercial et industriel dans les écoles primaires de tout ordre et dans les écoles régies par la loi du 11 décembre 1880 (L. 19 juillet 1889 sur les dépenses ordinaires de l'enseignement primaire public et les traitements du personnel de ce service, art. 3). Indépendamment du traitement qui leur est attribué par l'article précédent, les inspecteurs primaires ont droit à une indemnité dite départementale, qui ne pourra être inférieure à 200 francs (art. 23). — 11 est pourvu aux dépenses incombant à l'État en vertu de l'article 2, au moyen des crédits annuels inscrits au budget du ministère de l'instruction publique. Il est pourvu aux dépenses incombant aux départements et aux communes au moyen de crédits ouverts annuellement à leurs budgets, à titre de dépenses obligatoires, dans les conditions prévues par les paragraphes 1 et 2 de l'article 61 de la loi du 10 août 1871 et par l'article 149 de la loi du 5 avril 1884 (art. 26).

191. 5° Une importante loi du 15 juillet 1893 sur l'assistance médicale et gratuite est venue créer deux nouvelles sortes de délibérations entièrement subordonnées du conseil général, tout en le dotant d'attributions nouvelles. Le moment n'est pas venu d'exposer l'ensemble des dispositions de cette loi qui comprend 36 articles divisés en six titres. Ce sont les titres I et V qui ren

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