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DÉLIBÉRATIONS DÉFINITIVES

bération du conseil général qu'aucun texte ne déclare définitive, ou soumise à la nécessité d'une autorisation, ou entièrement subordonnée.

183. Les délibérations définitives des conseils généraux interviennent sur les matières considérables et nombreuses énumérées dans les vingt-six paragraphes de l'article 46 de la loi de 1871. Cet article emprunte à la loi de 1866, presque entièrement. les seize paragraphes de l'article 1er de cette loi, la dénomination même de délibérations définitives, et la suppression de l'acte d'autorisation. Sous ce rapport la loi de 1871 étend et complète l'idée qui avait déjà reçu du législateur de 1866 une somme importante d'application. Les délibérations de cette première sorte ne peuvent être atteintes que par un décret, rendu en la forme des règlements d'administration publique, prononçant leur annulation, dans le délai de deux mois et vingt jours après la clôture de la session, et seulement pour excès de pouvoir ou pour violation d'une disposition de la loi ou d'un règlement d'administration publique. Telle est la prescription de l'article 47. Elle s'applique non seulement aux délibérations prises par les conseils généraux sur les matières énumérées dans l'article 46, mais encore à toutes les délibérations définitives prises par ces conseils en vertu d'autres dispositions de la loi.

Une loi du 16 septembre 1879 a modifié l'article 46 § 24.

Le conseil général statue définitivement sur les objets ci-après désignés, savoir: 1 acquisition, aliénation et échange des propriétés départementales mobilières ou immobilières, quand ces propriétés ne sont pas affectées à l'un des services énumérés au no 4; 2° mode de gestion des propriétés départementales; 3° baux de biens donnés ou pris à ferme ou à loyer, quelle qu'en soit la durée ; 4o changement de destination des propriétés et des édifices départementaux autres que les hôtels de préfecture et de souspréfecture, et des locaux affectés aux cours d'assises, aux tribunaux, aux écoles normales, au casernement de la gendarmerie et aux prisons; 5° acceptation ou refus de dons et legs faits au département, quand ils ne donnent pas lieu à réclamation; 6° classement et direction des routes départementales; projets, plans et devis des travaux à exécuter pour la construction, la rectification ou l'entretien desdites routes; désignation des services qui seront chargés de leur construction et de leur entretien; 7° classement et direction des chemins vicinaux de grande communication

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et d'intérêt commun; désignation des communes qui doivent concourir à la construction et à l'entretien desdits chemins, et fixation du contingent annuel de chaque commune; le tout sur l'avis des conseils compétents; répartition des subventions accordées, sur les fonds de l'État ou du département, aux chemins vicinaux de toute catégorie; désignation des services auxquels sera confiée l'exécution des travaux sur les chemins vicinaux de grande communication et d'intérêt commun, et mode d'exécution des travaux à la charge du département; taux de la conversion en argent des journées de prestation; 8° déclassement des routes départementales, des chemins vicinaux de grande communication et d'intérêt commun; 9° projets, plans et devis de tous autres travaux à exécuter sur les fonds départementaux, et désignation des services auxquels ces travaux seront confiés; 10° offres faites par les communes, les associations ou les particuliers pour concourir à des dépenses quelconques d'intérêt départemental; 11° concessions à des associations, à des compagnies ou à des particuliers, de travaux d'intérêt départemental; 12° direction des chemins de fer d'intérêt local, mode et conditions de leurs constructions, traités et dispositions nécessaires pour en assurer l'exploitation; 13° établissement et entretien des bacs et passages d'eau sur les routes, et chemins à la charge du département; fixation des tarifs de péage; 14° assurances des bâtiments départementaux; 15° actions à intenter ou à soutenir au nom du département, sauf les cas d'urgence, dans lesquels la commission départementale pourra statuer; 16° transactions concernant les droits des départements; 17° recettes de toute nature et dépenses des établissements d'aliénés appartenant au département; approbation des traités passés avec des établissements privés ou publics pour le traitement des aliénés du département; 18° service des enfants assistés; 19° part de la dépense des aliénés et des enfants assistés, qui sera mise à la charge des communes, et bases de la répartition à faire entre elles; 20o créations d'institutions départementales d'assistance publique, et service de l'assistance publique dans les établissements départementaux; 21° établissement et organisation des caisses de retraite ou de tout autre mode de rémuné ration en faveur des employés des préfectures et des sous-préfectures et des agents salariés sur les fonds départementaux; 22° part contributive du département aux dépenses des travaux qui intéressent à la fois le département et les communes; 23 difficultés élevées relativement à la répartition de la dépense des travaux qui intéressent plusieurs communes du département; 24° délibérations des conseils municipaux ayant pour but l'établissement, la suppression ou les changements de foires et marchés; 25° délibérations des conseils municipaux ayant pour but la prorogation des taxes additionnelles d'octroi actuellement existantes, ou l'augmentatiou des taxes principales au delà d'un décime, le tout dans les limites du maximum des droits et de la nomenclature des objets fixés par le tarif général établi conformément à la loi du 24 juillet 1867; 26° changements à la circonscription des communes d'un même canton et à la désignation de leurs chefs-lieux, lorsqu'il y a accord entre les conseils municipaux (L. 10 août 1871, relative aux conseils généraux, art. 46). — Les délibérations par lesquelles les conseils généraux statuent définitivement sont exé

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DÉLIBÉRATIONS SOUMISES AU DROIT

cutoires si, dans le délai de vingt jours à partir de la clôture de la session, le préfet n'en a pas demandé l'annulation pour excès de pouvoir ou pour violation d'une disposition de la loi ou d'un règlement d'administration publique. Le recours formé par le préfet doit être notifié au président de la commission départementale. Si, dans le délai de deux mois à partir de la notification, l'annulation n'a pas été prononcée, la délibération est exécutoire. Cette annulation ne peut être prononcée que par un décret rendu dans la forme des règlements d'administration publique (art. 47).

Les conseils généraux, appelés à délibérer dans le cas prévu à l'article 46 § 24 de la loi du 10 août 1871, statuent souverainement et nonobstant toute opposition sur l'établissement, la suppression ou les changements des foires et marchés dans les communes de leurs départements respectifs. Néanmoins, lorsqu'il s'agira de foires et marchés établis ou à établir dans les communes situées à moins de deux myriamètres d'un département voisin, le conseil général de ce département devra être préalablement consulté, conformément au décret du 13 août 1864 (Loi du 16 septembre 1879, art. 1er). - Sont abrogées toutes les dispositions de lois et de règlements contraires à la présente loi (art. 2).

184. Les délibérations soumises au droit de suspension, prises par les conseils généraux en vertu de l'article 48 de la loi de 1871, ressemblent aux précédentes, en ce qu'elles sont également dispensées de toute autorisation gouvernementale ou législative; mais elles en diffèrent en ce sens que ce n'est pas seulement pour excès de pouvoir, violation de loi ou de règlement qu'elles peuvent être atteintes; alors même qu'elles ne sont entachées d'aucun de ces vices, l'exécution de ces délibérations peut être suspendue par un décret motivé. Il faut que ce décret, pour lequel l'intervention du conseil d'Etat n'est pas exigée, intervienne dans le délai de trois mois à partir de la clôture de la session, aux termes de l'article 49. De nombreux décrets ont fait depuis 1871 l'application de cette disposition; tel est un décret qui a suspendu, sur le recours du préfet, l'exécution d'une délibération du conseil général de l'Hérault prise en vertu de l'article 48 de la loi (Bulletin officiel du ministère de l'interieur, année 1872, p. 351).

Tandis qu'il n'y a, dans la catégorie des délibérations définitives des conseils généraux, que les matières qui y sont nominativement placées, cette seconde catégorie embrasse d'une manière générale toutes les délibérations que le conseil est appelé

DE SUSPENSION DU GOUVERNEMENT

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à prendre sur tous objets d'intérêt départemental, non classés dans l'une des trois autres catégories. En un mot, tandis que l'énumération de l'article 48 n'est qu'énonciative, ainsi que cela résulte de son §5, celle de l'article 46 ci-dessus et les dispositions de l'article 41 et de l'article 61 sont limitatives.

Le conseil général délibère: 1° sur l'acquisition, l'aliénation et l'échange des propriétés départementales affectées aux hôtels de préfecture et de sous-préfecture, aux écoles normales, aux cours d'assises et tribunaux, au casernement de la gendarmerie et aux prisons; 2° sur le changement de destination des propriétés départementales affectées à l'un des services cidessus énumérés ; 3° sur la part contributive à imposer au département dans les travaux exécutés par l'Etat qui intéressent le département; 4 sur les demandes des conseils municipaux : 1 pour l'établissement ou le renouvellement d'une taxe d'octroi sur les matières non comprises dans le tarif général indiqué à l'article 46; 2 pour l'établissement ou le renouvellement d'une taxe excédant le maximum fixé par ledit tarif; 3 pour l'assujettissement à la taxe d'objets non encore imposés dans le tarif local; 4 pour les modifications aux règlements ou aux périmètres existants; 5° sur tous les autres objets sur lesquels il est appelé à délibérer par les lois et règlements, et généralement sur tous les objets d'intérêt départemental dont il est saisi, soit par une proposition du préfet, soit sur l'initiative d'un de ses membres (L. 10 août 1881, art. 48). Les délibérations prises par le conseil général sur les matières énumérées à l'article précédent sont exécutoires si, dans le délai de trois mois à partir de la clôture de la session, un décret motivé n'en a pas suspendu l'exécution (art. 49).

185. La loi du 10 août 1871 n'a soumis que dans trois cas seulement les délibérations du conseil général à la nécessité d'une autorisation. Dans l'un de ces cas, au mot autorisation, l'article 53 de la loi de 1871 a substitué le mot décision du gouvernement. Mais le décret réglementaire sur le conseil d'État de 1872 (art. 5 § 5) avait rétabli le vrai mot, et le décret suivant de 1879 (art. 7 §5) l'avait conservé, ainsi que le fait encore aujourd'hui le décret du 3 avril 1886 (no 98]. Il s'agit de l'acceptation des dons et legs faits au département, lorsqu'il y a opposition de la famille. Le mot décision de l'article 53 n'est pas seulement impropre; il est d'une inexactitude absolue, car pour qu'il fût exact il faudrait que le gouvernement eût le droit de contraindre, comme sous l'empire de la loi 1838, le conseil général à accepter une libéralité, et la loi du 10 août 1871 lui dénie ce pouvoir;

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DÉLIBÉRATIONS SOUMISES A LA NÉCESSITÉ

donc il ne décide pas. Il accorde ou non l'autorisation d'accepter demandée par le conseil général, sans pouvoir le contraindre à accepter s'il refuse.

Dans les deux autres cas, l'autorisation est donnée par le 'pouvoir législatif. Ces deux cas sont ceux : 1° du vote de centimes extraordinaires au delà du maximum fixé annuellement par la loi de finances; et 2° du vote d'un emprunt départemental remboursable dans un délai excédant quinze années (l'article 2 de la loi du 18 juillet 1866 disait douze années); en deçà de ces limites la délibération du conseil général est dispensée d'autorisation (articles 40 et 41 de la loi du 10 août 1871).

La loi de finances, fixant le maximum de centimes extraordinaires que le conseil général peut librement voter aux termes de l'article 40, place ainsi une sorte d'autorisation législative générale et par conséquent moins directe, avant la délibération du conseil général; tandis que la véritable autorisation exigée par l'article 41, après la délibération du conseil général, permet seule au pouvoir législatif d'apprécier les circonstances spéciales à chaque département et à chaque acte.

Nous avons signalé ci-dessus [n° 126] un projet de réforme de ces articles 40 et 41 de la loi du 10 août 1871. Le projet de loi annoncé a été déposé par le ministre de l'intérieur sur le bureau de la Chambre des députés dans la séance du 27 octobre 1896 1. L'exposé des motifs de ce projet de loi constate que « les assem« blées départementales sont enfermées dans des limites financiè«res trop étroites » en raison de l'extension des services publics départementaux depuis 1871. En conséquence, il annonce au

1 Projet de loi tendant à modifier les articles 40 et 41 de la loi du 10 août 1871, présenté par M. Barthou, ministre de l'intérieur; Chambre des députés; session extraordinaire de 1896; no 2059.

« Les lois d'intérêt départemental intervenues depuis cette époque ont considérablement élargi le cadre d'évolution du régime financier des départements. La construction des écoles normales primaires, le développe. ment du réseau vicinal, l'organisation de nouveaux services d'assistance, l'application de la loi du 15 juillet 1893 sur l'assistance médicale gratuite, l'établissement de chemins de fer d'intérêt local et de tramways départementaux, pour ne citer que les faits les plus saillants, tout en donnant satisfaction aux préoccupations légitimes des pouvoirs publics, aux intérêts

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