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FONCTIONS INDIVIDUELLES DES CONSEILLERS

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jusqu'à ce que la question préjudicielle ait été jugée par les tribunaux compétents, et fixe un bref délai dans lequel la partie qui aura élevé la question préjudicielle doit justifier de ses diligences. S'il y a appel, l'acte d'appel doit, sous peine de nullité, être notifié à la partie dans les dix jours du jugement, quelle que soit la distance des lieux. Les questions préjudicielles seront jugées sommairement par les tribunaux et conformément au paragraphe 4 de l'article 33 de la loi du 19 avril 1831 (Loi du 31 juillet 1875, relative à la vérification des pouvoirs des membres des conseils généraux, art. 1 §§ 1 et 2,) — Pour les élections qui ont eu lieu avant la présente loi, les réclamations pourront être faites par les électeurs du canton, les candidats, les membres du conseil général et le préfet dans les vingt jours à partir de la promulgation (art. 2). Les conseils généraux sont dessaisis des réclamations qui ont été portées devant eux dans les sessions précédentes. Les ayants droit pourront se pourvoir au conseil d'Etat dans les délais de l'article précédent (art. 3).

170. Des lois diverses ont conféré aux membres des conseils généraux, à ceux des conseils d'arrondissement et des conseils municipaux, des fonctions spéciales attachées à leur titre. Ainsi, pour ne parler que des conseillers généraux, leurs attributions individuelles sont très nombreuses. Aux termes de la loi du 15 juillet 1889, ils continuent à faire partie des conseils de révision cantonal et départemental; aux termes de l'article 11 de la loi du 24 novembre 1872 sur le jury en matière criminelle, tous les conseillers généraux de l'arrondissement composent, avec les juges de paix, sous la présidence et sur la convocation du président du tribunal civil, la commission chargée d'arrêter pour chaque arrondissement la liste annuelle du jury; quatre membres du conseil général font partie du conseil départemental de l'enseignement primaire (L. 30 octobre 1886, art. 44 et 45); deux membres des conseils généraux des départements du ressort de chaque académie font partie du conseil académique (L. 27 février 1880, art. 1 et 10); deux conseillers généraux élus par leurs collègues font partie du comité de surveillance de la protection des enfants du premier âge (L. 23 décembre 1874, art. 2); le conseiller général du canton fait partie de la commission cantonale chargée du jugement des réclamations en inscription ou en radiation sur la liste d'assistance médicale gratuite (L. 15 juillet 1893, art. 17). En matière électorale, les conseillers généraux sont appelés par la loi à remplir de nombreuses fonctions individuelles, dans la commis

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SANCTION; LOI DU 7 JUIN 1873

sion du recrutement général des votes pour les élections législatives (Décret du 2 février 1852, art. 34), pour l'élection des membres des tribunaux de commerce (L. 8 décembre 1883, art. 11), et dans les commissions d'établissement de la liste des électeurs pour les chambres de commerce (L. 21 décembre 1871, art. 1), des chambres consultatives des arts et manufactures (D. 22 janvier 1872, art. 3). Les conseillers généraux peuvent être chargés de remplacer les sous-préfets, et nous verrons qu'ils sont les suppléants éventuels des conseillers de préfecture, etc., etc. Nous n'avons pas besoin de rappeler que tout conseiller général, comme tout conseiller d'arrondissement, est, comme tout député, un électeur sénatorial.

171. Il est arrivé que des membres des conseils électifs, surtout des conseillers généraux, ont refusé, avec tout l'éclat de la publicité, de siéger dans quelques-unes des commissions dont ils font ainsi partie. Nous parlons surtout des commissions constituées par des lois antérieures à 1873, principalement de la loi sur le jury du 24 novembre 1872. Pour empêcher le retour de ces faits. regrettables, une loi fort sage du 7 juin 1873 a conféré en pareil cas, au conseil d'État, le droit de déclarer démissionnaire le conseiller général, d'arrondissement ou municipal, et le frappe d'inéligibilité pendant un an (voir, art. 34 [n° 204], un autre cas d'inéligibilité). Dans l'hypothèse dont il s'agit ici, le projet primitif, plus en harmonie avec les règles du contentieux administratif, proposait de saisir préalablement le conseil de préfecture; diverses considérations, et entre autres la pensée que la menace écrite dans la loi suffirait et la rendrait sans application, ont fait préférer la rédaction qui institue le conseil d'État unique degré de juridiction dans ces sortes d'affaires..

Tout membre d'un conseil général de département, d'un conseil d'arrondissement ou d'un conseil municipal qui, sans excuse valable, aura refusé de remplir une des fonctions qui lui sont dévolues par les lois, sera déclaré démissionnaire (Loi du 7 juin 1873, relative aux membres des conseils généraux, des conseils d'arrondissement et des conseils municipaux, qui se refusent à remplir certaines de leurs fonctions, art. 1). Le refus résultera soit d'une déclaration expresse à qui de droit ou rendue publique

SESSIONS ORDINAIRES ET EXTRAORDINAIRES

203 par son auteur, soit de l'abstention persistante après avertissement de l'autorité chargée de la convocation (art. 2). Le membre ainsi démissionnaire ne pourra être réélu avant le délai d'un an (art. 3). - Les dispositions qui précèdent seront appliquées par le conseil d'État, sur l'avis transmis au préfet par l'autorité qui aura donné l'avertissement suivi de refus. Le ministre de l'intérieur devra saisir le conseil d'État dans le délai de trois mois, à peine de déchéance. La contestation sera instruite et jugée sans frais dans le délai de trois mois (art. 4).

172. Les conseils généraux ne sont pas permanents. Leur constituer une quasi-permanence était une véritable mesure de décentralisation administrative, de la plus haute portée, et tel est le véritable caractère de la création de la commission départementale [nos 207 à 222]. C'était encore décentraliser utilement qu'augmenter le nombre de la durée des sessions ordinaires des conseils généraux, que de décider qu'elles auraient lieu de plein droit sans que les pouvoirs publics puissent les empêcher, et de rendre plus facile leur réunion en sessions extraordinaires. La loi du 10 août 1871 y a libéralement pourvu.

Depuis leur création, les conseils généraux n'avaient qu'une session ordinaire par an. Ils ont actuellement deux sessions ordinaires par année (L. 1871, art. 23). La seconde session, dans laquelle sont votés le budget et les comptes, «< commence de plein <<< droit le premier lundi qui suit le 15 août et ne pourra être << retardée que par une loi »; ce qui prouve qu'une loi même ne peut retarder l'ouverture de l'autre session. L'ouverture de cette autre session, la première de l'année a lieu de plein droit le second lundi qui suit le jour de pâques (L. 12 août 1876). La durée de la session d'août ne pourra excéder un mois; celle de la première session ordinaire ne pourra excéder quinze jours. L'article 4 et dernier de la loi du 31 juillet 1875 dispose que, par dérogation à l'article 23 de la loi de 1871, la session d'août «< commencera << de plein droit, dans le département de la Corse, le deuxième <«<lundi de septembre ».

Les sessions extraordinaires (art. 24) ont lieu quand les besoins du service l'exigent. La réunion s'opère, dans ce cas, ou en vertu d'un décret du pouvoir exécutif, ou sur la convocation que le préfet est tenu d'adresser d'urgence aux membres du conseil,

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SÉANCES PUBLIQUES DES CONSEILS

chaque fois que le président du conseil général lui donne l'avis que les deux tiers des membres du conseil lui en ont adressé la demande écrite. C'est en réalité permettre aux conseils généraux de se réunir toute les fois que la majorité des deux tiers le désire. Toutes ces dispositions consacrent un important développement des libertés locales. La durée des sessions extraordinaires ne peut excéder huit jours; mais il résulte de ce que nous venons de dire, qu'il dépend des deux tiers du conseil général de faire suivre une première session extraordinaire d'une ou plusieurs autres sessions de même nature.

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173. Les articles 25, 26, 31 § 1, et 32 § 3 de la loi du 10 août 1871, reproduisent les articles 1, 2 et 3 de la loi du 23 juillet 1870, conférant au conseil général, le droit d'élire son bureau et de faire son règlement intérieur; aux électeurs, celui de prendre copie des délibérations et procès-verbaux; aux journaux du département, le droit de prendre communication et de reproduire un compte rendu sommaire et officiel des séances, qui doit être tenu dans les quarante-huit heures à leur disposition,

La prescription de l'article 31 § 2 qui interdisait aux journaux d'apprécier une discussion d'un conseil général, sans reproduire en même temps la portion du compte rendu officiel afférente à cette discussion, est abrogée par la loi du 29 juillet 1881 sur la presse (art. 68 § 2, et art. 38 à 41).

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L'article 32 § 2 et surtout l'article 28 modifient les dispositions antérieures de la loi de 1833: le premier, en portant que les procès-verbaux doivent contenir les noms des membres qui ont pris part à la discussion; le second, en rendant publiques les séances des conseils généraux. Elles l'avaient été déjà en 1848; mais on était alors promptement revenu aux prescriptions de la loi de 1833 contraires à la publicité des séances des conseils généraux. La loi de 1871 ne se borne pas à ouvrir au public la porte des séances; elle en met tous les éléments à la disposition des électeurs, des contribuables, et de la presse.

L'article 29, qui confère au président du conseil général, seul, la police de l'assemblée, a donné licu, dans le département des

GÉNÉRAUX ET LEUR POLICE

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Bouches-du-Rhône, à un conflit entre le président et le préfet. Un avis du conseil d'Etat, en date du 3 décembre 1874, sur les questions posées par le ministre de l'intérieur, estime que « l'article 29 << de la loi du 10 août 1871, ni aucun autre texte, ne confère au << président du conseil général le droit de requérir directement la << force publique; que s'il juge nécessaire la présence des agents << de la force publique dans la salle des séances, il doit les de<«<mander au préfet, qui apprécie dans quelle mesure et de quelle <«< manière il déférera à cette demande; qu'il peut adresser aux << agents mis à sa disposition dans la salle des séances des ordres << directs, mais seulement dans la limite de la mission qui lui est << confiée par l'article 29, pour faire expulser et arrêter tout indi<< vidu qui, dans l'auditoire, troublerait l'ordre; qu'au surplus le << droit du président ne peut faire obstacle au droit qui appartient << partout et toujours au préfet, soit comme représentant du << pouvoir exécutif, soit comme officier de police judiciaire, de << prendre sous sa responsabilité les mesures qu'il jugerait néces<< saires pour maintenir l'ordre public et faire respecter la loi ».

A l'ouverture de la session d'août, le conseil général, réuni sous la présidence du doyen d'âge, le plus jeune membre faisant fonctions de secrétaire, nomme au scrutin secret et à la majorité absolue son président, un ou plusieurs vice-présidents et ses secrétaires. Leurs fonctions durent jusqu'à la session d'août de l'année suivante (L. 1871, art. 25). Le conseil général fait son règlement intérieur (art. 26). Le préfet a entrée au conseil général; il est entendu quand il le demande, et assiste aux délibérations, excepté lorsqu'il s'agit de l'apurement de ses comptes (art. 27). — Les séances des conseils généraux sont publiques. Néanmoins, sur la demande de cinq membres, du président ou du préfet, le conseil général, par assis et levé, sans débats, décide s'il se formera en comité secret (art. 28). — Le président a seul la police de l'assemblée. Il peut faire expulser de l'auditoire ou arrêter tout individu qui trouble l'ordre. En cas de crime ou de délit, il en dresse procès-verbal, et le procureur de la Ré publique en est immédiatement saisi (art. 29). Les conseils généraux devront établir jour par jour un compte rendu sommaire et officiel de leurs séances, qui sera tenu à la disposition de tous les journaux du département, dans les quarante-huit heures qui suivront la séance.............. (art. 31). – Les procès-verbaux des séances, rédigés par un des secrétaires, sont arrêtés au commencement de chaque séance, et signés par le président et le secrétaire. Ils contiennent les rapports, les noms des membres qui ont pris part à la discussion et l'analyse de leurs opinions. Tout électeur ou contribuable du département a le droit de demander la communication

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