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87. Sa composition en vertu des lois des 24 mai 1872, 25 février 1875, et

13 juillet 1879.

88. Conditions d'âge et incompatibilités.

89. Président, vice-président, et présidents de section.

90. Situation des auditeurs au conseil d'État.

91. Nomination des auditeurs de 1r classe; concours pour l'auditorat de la 2 classe.

92. Organisation du conseil d'État en sections, assemblée générale, et assemblée du contentieux.

93. Des sections; leur division et leurs attributions.

94. Parallèle entre la section du contentieux et les quatre sections administratives.

95. Loi du 26 octobre 1888 et décrets du 10 novembre 1888 relatifs à la création d'une section temporaire du contentieux.

96. Nécessité d'une modification d'ordre permanent, et non temporaire, dans l'organisation du conseil d'État.

97. Des quatre projets de loi de 1891, 1892 et 1894.

98. Assemblée générale; son organisation; ses attributions: article 7 du règlement du 2 août 1879 remplacé par le décret du 3 avril 1886.

99. Dispositions générales communes à l'ensemble du conseil d'État. 100. Statistiques du conseil d'Etat publiées depuis 1800.

101. Constatations générales du compte général des travaux du conseil d'Etat du 20 juin 1890.

84. Le conseil d'État présente l'application la plus élevée du principe, qui, à chaque degré de la hiérarchie, place la délibération confiée à des conseils administratifs, à côté de l'action administrative remise à des agents uniques. C'est surtout à ce titre qu'en matière d'administration pure le conseil d'État fonctionne près du chef de l'État et des ministres, et qu'indépendamment et au dessus des divers conseils ou comités consultatifs attachés à chaque ministère, il complète l'administration centrale.

Le conseil d'État, en outre de sa participation à la confection des lois qui appartient au droit constitutionnel et fait de lui 1° un conseil de gouvernement, est de plus 20 un grand conseil d'administration (ce n'est que sous ce point de vue qu'il doit être considéré dans ce chapitre), et 3° la plus haute des juridictions administratives en matière contentieuse.

Ce triple caractère du conseil d'État est consacré par les articles 8 et 9 de la loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du conseil d'État. La loi constitutionnelle du 16 juillet 1875 [n 387

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FONCTIONS DU CONSEIL D'ÉTAT

a développé implicitement, dans son article 6, l'article 8 de la loi de 1872, en permettant au gouvernement de prendre des commissaires pour la défense de tous les projets de loi, dans le conseil d'État comme ailleurs. En outre, l'article 4 de la loi constitutionnelle du 25 février 1875 [nos 38, 86 et 87] a consacré constitutionnellement l'existence du conseil d'État.

L'antithèse des articles 8 et 9 montre que le conseil d'État continue à n'avoir pas de pouvoir propre en matière administrative; il ne fait que donner son avis, et le pouvoir exécutif décide. Il reçoit au contraire de la grave disposition de l'article 9, qui fait ainsi disparaître la fiction légale de la justice retenue, le droit de statuer souverainement sur le contentieux administratif. D'autre part, il n'a plus le jugement des conflits d'attributions entre l'au torité administrative et l'autorité judiciaire. La loi du 13 juillet 1879, relative au conseil d'État, a laissé intactes ces dispositions fondamentales de la loi du 24 mai 1872.

Le conseil d'État donne son avis: 1° sur les projets de loi d'initiative parlementaire que l'assemblée nationale (actuellement chaque Chambre) juge à propos de lui envoyer; 2° sur les projets de loi préparés par le gouvernement, et qu'un décret spécial ordonne de soumettre au conseil d'Etat; 3° sur les projets de décret et, en général, sur toutes les questions qui lui sont soumises par le président de la République ou par les ministres. Il est appelé nécessairement à donner son avis sur les règlements d'administration publique et sur les décrets en forme de règlements d'administration publique. Il exerce, en outre, jusqu'à ce qu'il en soit auautrement ordonné, toutes les attributions qui étaient conférées à l'ancien conseil d'Etat par les lois ou règlements qui n'ont pas été abrogés. Des conseillers d'Etat peuvent être chargés par le gouvernement de soutenir devant l'assemblée les projets de loi qui ont été renvoyés à l'examen du conseil (Loi du 24 mai 1872, portant réorganisation du conseil d'État; titre II Fonctions du conseil d'Etat; art.8).- Le conseil d'Etat statue souverainement sur les recours en matière contentieuse administrative, et sur les demandes d'annulation pour excès de pouvoirs formées contre les actes des diverses autorités administratives (art. 9).

85. Le conseil d'Etat a une double origine. Par l'une, l'ancien conseil du roi, il est une de nos plus antiques institutions. Par l'autre, le conseil d'Etat de l'an VIII, qui a mis l'ancien corps en harmonie avec le nouveau droit public de la France, il est devenu non seulement, comme autrefois, l'une des plus grandes, mais

HISTOIRE DU CONSEIL D'ÉTAT

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aussi l'une des plus vitales institutions du pays, survivant à chaque commotion politique, sinon dans son personnel, du moins dans son organisme, et se conciliant parfaitement avec les règles du régime parlementaire, bien qu'occupant une place plus considérable en l'absence de ce régime.

En 1789, le conseil du roi,qui avait subi des vicissitudes et des changements divers, était divisé, bien qu'il fût un et indivisible, en cinq conseils royaux : le conseil des affaires étrangères (ou conseil d'en haut, dit aussi le conseil d'État), le conseil des dépêches, le conseil des finances, le conseil du commerce, le conseil privé ou conseil des parties. Par les quatre premiers, l'ancien consei! du roi correspond aux conseils d'État modernes, divisés en comités ou sections; mais par le dernier de ces conseils royaux, il correspond à la cour de cassation de nos jours. Dans un régime qui n'admettait ni la division des pouvoirs, ni la séparation des autorités, il était logique qu'il présentat la réunion du législatif et de l'exécutif, de l'administratif et du judiciaire. En toutes matières, du reste, le conseil, dépouillé de pouvoir propre, auxiliaire du roi, ne faisait que préparer les actes du roi, qui était toujours réputé présent en son conseil. En 1789, le conseil du roi se composait de 30 conseillers d'État, dont 3 d'église, 3 d'épée et 24 de robe, de 80 maîtres des requêtes, et des ministres secrétaires d'État présidents des divers conseils royaux, ainsi que de ministres d'Etat ayant entrée au conseil des affaires étrangères.

Bien que l'Assemblée constituante ait employé voir no 483] le mot de conseil d'État, elle eut le tort de supprimer l'institution elle-même avec l'ancien conseil du roi; et la solution de continuité s'est prolongée jusqu'en 1800.

Le conseil d'État apparaît alors dans la constitution consulaire du 22 frimaire de l'an VIII et le règlement du 6 nivôse de la même année, avec un degré de force considérable. Auxiliaire du pouvoir exécutif, préparant la plupart de ses actes d'administration, rendant la justice administrative, rédigeant sous l'autorité du premier Consul toutes les lois, les soutenant devant le pouvoir législatif, y ajoutant les règlements nécessaires à leur exécution, rendant même des avis interprétatifs obligatoires comme la

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HISTOIRE DU CONSEIL D'ÉTAT

loi elle-même, le conseil d'État de l'an VIII s'est illustré par l'œu vre immense de la codification des lois françaises et de la rédaction des grandes lois d'organisation administrative, religieuse et judiciaire de la France.

86. Ce grand corps, actuellement organisé par les lois des 24 mai 1872 et 13 juillet 1879, diffère du conseil d'État du Consulat et du premier Empire, en ce qu'il ne peut pas être exclusivement investi comme lui, indépendamment de ses attributions administratives et contentieuses, de la préparation, de la rédaction officielle, de l'amendement des projets de loi, ainsi que de leur défense au sein des assemblées. Il ne fait qu'y participer dans la mesure déterminée par l'article 8, ci-dessus rapporté [no 84). Il en diffère aussi, comme tous les autres conseils d'État, en ce qu'il n'a pas comme lui l'interprétation législative par voie d'autorité, rendue depuis 1814 au pouvoir législatif. Seul, il doit la posséder en vertu du principe de la séparation des pouvoirs.

Le conseil d'État actuel diffère des conseils d'État organisés, dans le silence des chartes, en 1814 et en 1830, surtout du premier dépouillé de presque toute attribution de l'ordre législatif et constitutionnel. « Sous la Restauration (dit un des docu«ments officiels cités n° 100), le conseil d'État, dont la Charte n'a<< vait pas consacré l'existence, même par une simple mention, <«<et qui n'avait pas recouvré sans contestation ses anciennes << attributions en matière administrative, n'eut plus aucun rôle << politique et ne fut que rarement appelé à donner son avis << sur les projets de loi. La Monarchie de Juillet mit à profit les <«<lumières du conseil d'État pour la préparation des projets de « loi d'intérêt local relatifs aux affaires des départements et des <«< communes et de plusieurs projets d'intérêt général; aussi << la loi du 19 juillet 1845 énumérait, parmi les attributions << du conseil, l'étude des projets de loi qui lui étaient renvoyés « par le gouvernement. >>

La constitution du 4 novembre 1848 rendit au conseil d'Etat, organisé par elle, une partie de ses attributions législatives, sans lui rendre aucune participation à la défense des projets de loi

COMPARAISON DES DIVERS CONSEILS D'ÉTAT

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devant les chambres, qui avait illustré le conseil d'État de 1800 à 1810. Le conseil d'État actuel, créé par la loi du 24 mai 1872, diffère du conseil d'État de 1848 en ce que l'article 8 in fine [reproduit no 84], et l'article 6 de la loi constitutionnelle du 16 juil. let 1875 n° 38], lui confèrent aujourd'hui cette double attribution, bien que limitée aux cas déterminés. Sous deux autres rapports, ce conseil d'État ressemble à celui de 1848 en ce qu'il possède comme lui, en matière contentieuse, un pouvoir propre dont le conseil d'État moderne, créé en 1800, aussi bien que l'ancien conseil du roi, n'a éte in vesti à aucune autre époque de son histoire; en outre, comme le conseil d'État de 1848, il est privé de la préparation du jugement des conflits, qui, sous tous les autres régimes, a appartenu au conseil d'État. Ces points de ressemblance entre le conseil d'État de 1848 et celui de 1872 sont naturels, puisque ces deux conseils d'État sont également appropriés à la forme républicaine du gouvernement de ces deux époques. Il existait entre eux une autre ressemblance, d'après la loi du 24 mai 1872 (art. 3) qui réservait au pouvoir législatif l'élection des conseillers d'État en service ordinaire; mais la loi constitutionnelle du 25 février 1875 (art. 4) a judicieusement rattaché le conseil d'État, par le droit de nomination de ses membres, au pouvoir exécutif dont il est l'auxiliaire.

Enfin, si l'on compare le conseil d'État actuel au conseil d'État organisé par la constitution de 1852, on voit qu'il en diffère sous les deux rapports qui le rapprochent de celui de 1848, que son personnel, bien qu'augmenté par la loi du 13 juillet 1879, est cependant moins nombreux, et que, dans son ensemble, il a moins d'attributions. Le document déjà cité, comparant les diverses périodes, constatait que « la constitution du 1 janvier 1852 et les décrets organiques de cette constitution conféraient au conseil d'État d'alors, des attributions plus considérables que celles qui lui avaient été données jusque-là, même sous le premier Empire ». Le conseil d'État de la loi de 1872 présente au contraire, sauf les deux points ci-dessus signalés, moins de dissemblances avec le conseil d'État de la constitution du 21 mai 1870, dans laquelle la situation du conseil se conciliait aussi avec le régime

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