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V.

Instruction pour procéder à la confection du catalogue de chacune des bibliothèques sur lesquelles les directoires ont dû ou doivent incessamment apposer les scellés.

15 mai 1791.

Les catalogues qu'il est nécessaire de dresser, n'ont d'autre objet que de procurer une connoissance exacte de tous les livres, tant imprimés que manuscrits, qui existent dans celles des bibliothèques de chaque département qui font partie des biens nationaux.

Quoique la méthode indiquée ci-dessous pour faire ces catalogues, soit la plus simple et la plus facile, il est cependant essentiel que ceux qui seront chargés de ce travail, ayent quelque teinture des lettres, et qu'ils sachent au moins la langue latine.

Avant tout, il faudra qu'ils se procurent une quantité de cartes à jouer suffisante pour y écrire tous les titres des livres, et pour faire des fichets : ces fichets, dont l'usage sera expliqué plus bas, se font en coupant une carte dans sa longueur, en deux ou trois parties.

Il ne faut point que les personnes qui seront introduites dans une bibliothèque pour en dresser le catalogue, s'embarrassent de l'ordre ou de la confusion qui peuvent y régner: elles sont sûres de bien opérer, si elles suivent exactement la méthode suivante.

Elles commenceront le travail par la première tablette ou armoire à gauche, et elles finiront par la dernière, qui est à droite: elles prendront un de ces morceaux ou bandes de cartes que nous avons appelés fichets, et écriront au haut le numéro premier, puis elles l'inséreront dans le premier volume de la première planche de la première armoire ou rayon, de manière que ce numéro sorte tout entier et soit bien visible. Il faut avoir soin de replier sur la tranche du livre cette partie saillante du fichet, pour empêcher qu'il ne se glisse dans l'intérieur du livre et ne s'y perde. Si ce volume appartient à un ouvrage qui soit en plusieurs tomes, on ne mettra un fichet qu'au premier seulement.

L'ouvrage suivant recevra un second fichet portant numéro 2; le troisième, un troisième fichet portant numéro 3, et ainsi de suite jusqu'au dernier livre de la bibliothèque, dont le numéro pourra être 15,000, 20,000, ou 25,000, etc., si cette bibliothèque contient ce nombre d'articles.

Quand tous les ouvrages auront été ainsi garnis de fichets numẻrotės, on passera à la seconde opération, qui consiste à prendre sur les cartes les titres de ces livres : 'on répétera sur la première ligne de la carte le numéro du fichet de chaque livre; ainsi la première carte portera le chiffre premier, qui sera le numéro du fichet du premier livre ; la seconde le chiffre 2, numéro du second livre; la troisième le chiffre 3, numéro du troisième livre.

A la suite de ce no, écrit en caractères un peu gros, on transcrira exactement le titre du livre; ou, s'il est trop long, on en fera l'extrait avec le plus de précision et de clarté qu'il sera possible, observant d'y faire entrer et les mots qui caractérisent la matière et les noms de l'auteur, avec le nom du lieu où l'ouvrage aura été imprimé, celui de l'imprimeur ou libraire, la date de l'année et le format du livre; c'est-à-dire, qu'on marquera, si c'est un in-folio, in-f'; si c'est un in-quarto, in-4°; si c'est un in-8o; un in-12; un in-16, etc. On observera scrupuleusement de tirer une ligne sous le nom de l'auteur, ainsi qu'il sera expliqué plus bas.

Exemple.

Euvres de Bochart, qui sont supposées être le 49 ouvrage de la bibliothèque, et porter par conséquent le fichet 49. Le titre de ce livre doit être fait ainsi : « No 49, Samuelis Bocharti opera. Lugduni Batavorum, » Boutesteyn, 1712, in-fo, 3 vol. » Ce titre apprend que ce sont les Euvres de Samuel Bochart, de l'édition de Leyde, 1712, en trois volumes in-fol. (Voyez le modèle figuré à la fin, numéro 1or).

Comme il est essentiel d'avoir, autant qu'on peut, le nom de l'auteur, il faut examiner si ce nom, lorsqu'il ne se rencontre pas au frontispice du livre, ne se trouve point à l'épître dédicatoire, dans l'approbation, ou même dans le privilége.

Quand on n'aura aucun moyen de découvrir le nom de l'auteur, on copiera le titre ainsi qu'il a été indiqué plus haut, et on soulignera le mot qui spécifie plus particulièrement l'ouvrage. Si c'est un livre d'architecture, on tracera une ligne sous ce mot; si c'est un livre sur le patriotisme, le mot patriotisme sera souligné; si c'est une bible, on soulignera le mot bible.

Exemple.

<< Biblia sacra. Lutetiæ Parisiorum, typographiæ regiæ, 1642, 8 vol. in-fo. » On reconnoît, par ce titre, la bible latine imprimée en 1642 à l'imprimerie royale de Paris, en 8 volumes in-folio. (Voyez à la fin, modèle imprimé no II.)

le

Si dans l'ouvrage dont on tire le titre, il se trouve des estampes ou des cartes gravées, il faut ajouter ces trois lettres, fig. Si les marges sont très larges, ou plus larges qu'à l'ordinaire, on doit écrire gr. pap., pour indiquer que le livre est en grand papier. Enfin si on remarque sur les pages des lignes rouges ou noires, transversales et longitudinales, et y formant comme un cadre, il est à propos d'ajouter ces mots abrégés, pap. reg., c'est-à-dire, papier réglẻ.

Exemple des deux derniers cas.

<< Monumens de la monarchie française, par Bernard de Montfaucon, » Paris, 1720 et années suivantes, in-f. fig. gr. pap. rég. Ces quatre

derniers mots abrégés signifient que les gravures qui doivent accompagner cet ouvrage du savant bénédictin, ne manquent pas à l'exemplaire de cette bibliothèque; que les marges en sont plus larges que celles des exemplaires communs ; qu'il est, comme on dit, en grand papier : enfin les lettres rég. avertissent que cet exemplaire est en papier réglé; ce qui ajoute encore à son prix. (Voyez à la fin, le modèle imprimé, no III.) Les livres qui sont imprimés sur vélin ou parchemin, au lieu de papier, seront indiqués par ces lettres, vél. ou par.

Dans le cas où le livre seroit imprimé en caractères gothiques, dont on a usé dans les quinzième et seizième siècles, on aura soin d'en faire la mention en ces mots car. got.

Si le livre avoit été relié avec une sorte de recherche et de magnificence, il conviendroit aussi de le marquer. Si, par exemple, la reliure étoit en maroquin rouge, on écriroit mar. r. ; si elle étoit en maroquin vert ou citron, on mettroit mar. v., mar. c., etc. On abandonne ces derniers détails sur la condition extérieure des livres, à l'intelligence de ceux qui seront employés à ce travail.

Enfin si le livre est incomplet, c'est-à-dire, s'il y a des feuillets arrachés au commencement, au milieu ou à la fin, il faut mettre ces trois lettres, inc.; ou s'il manque quelques volumes, au lieu de mettre le nombre de volumes en un seul chiffre, on doit mentionner seulement les volumes qui se trouveront. Ainsi, dans l'exemple figuré à la fin pour la carte de la Bible, en 8 vol. in-fo, de l'imprimerie royale, si dans le septième volume il manque quelques feuillets, il faut écrire huit volumes in-fo, le septième inc., c'est-à-dire, incomplet: si, au contraire, le cinquième et le septième manquent absolument, et sont égarés, il faut mettre en chiffres détachés, 1, 2, 3, 4, 6, 8 vol. in-f°; ce qui indique suffisamment que le cinquième et septième volumes n'y sont pas. Si ce sont les derniers volumes qui manquent, on peut s'énoncer ainsi six vol. in-fo, le reste

manque.

Lorsque les titres de tous les livres auront été copiés sur des cartes, il faudra reprendre ces mêmes cartes pour procéder à une troisième opération, c'est-à-dire, pour les ranger par ordre alphabétique d'après les noms d'auteurs, ou d'après les noms caractéristiques de la matière, lesquels se trouveront soulignés.

On commencera par ranger sur une grande table toutes ces cartes en autant de tas qu'il y a de lettres dans l'alphabet. Par exemple, si le mot capital de la carte qui se présente est Biblia, on place cette carte au tas B; si c'est le mot Bochart, on met encore cette carte au tas B; si le mot caractéristique ou souligné de la carte est Plutarque, on la dépose au tas P, et ainsi de suite jusqu'à la dernière lettre de l'alphabet.

Cette première division ne suffit pas ; il faut reprendre tous ces tas en particulier, pour y ranger dans un ordre plus régulier chacun des mots qui

commencent par la même lettre, et former ce qu'on appelle l'ordre alphabétique, intérieur de chacune des lettres. Ainsi sous la lettre A, Aaron doit être placé d'abord, Abano après, puis Abdias, Abulfeda, etc. On suit la même marche pour les autres mots de cette première lettre, jusqu'à ce qu'on soit arrivé au dernier mot, par exemple, Aymon. Cet ordre, comme on voit, est précisément le même qui s'observe pour disposer les mots d'un lexique ou dictionnaire.

Il ne sera peut-être pas inutile d'avertir ici, que c'est le surnom ou le nom de famille de l'auteur qui doit entrer dans le système alphabétique, et nullement ses noms de baptême. Il est essentiel, à la vérité, de marquer les noms de baptême, pour distinguer les uns des autres des écrivains qui ont été de la même famille, ou qui ont porté le même nom dans la société, sans être parens: mais ces noms seront placés entre deux parenthèses après le nom de famille, à qui seul il appartient d'avoir rang dans l'ordre alphabétique. Si vous aviez égard au nom de baptême, l'article de Bochart ne seroit pas placé au B, mais à la lettre S, puisque le nom de baptême de ce savant est Samuël: il faut donc écrire dans le dictionnaire, Bochart (Samuël), et non Samuël Bochart. D'ailleurs, on peut prendre pour guide Moréri, le dictionnaire de l'Advocat, et voir comment ils ont opéré.

Lorsque le paquet des cartes appartenantes à la lettre A sera arrangé définitivement et de la manière ci-dessus exposée, il faudra percer avec une grosse aiguille enfilée d'un bout de fil ciré, la première carte par le bas à gauche du côté qui est écrit.

Pour que l'écriture ne reçoive aucune atteinte de la piqûre de l'aiguille, on aura soin de laisser en blanc la place où doit se faire cette piqûre, en prenant la précaution de la marquer avec la plume par une ligne demicirculaire tracée à l'angle de la carte, comme on peut le voir plus bas sur le modèle figuré.

Le même modèle indique encore qu'il est nécessaire que celui qui copie les titres, laisse, tant au haut qu'au bas de chaque carte, un espace vuide, dont il fixera les limites par une ligne transversale, afin qu'il ne soit pas exposé à prolonger au-delà l'écriture du titre qu'il transcrit. Si la place comprise entre les deux lignes d'en-haut et d'en bas ne suffisoit pas pour contenir tout le titre du livre, il faudroit l'achever de l'autre côté: dans ce cas, qu'il est aisé de prévoir, le copiste choisira une carte qui soit peu chargée de peinture, telle qu'un as, un deux, etc.

Il prendra ensuite la seconde carte, et l'enfilera comme la première, et ainsi des autres, jusqu'à la dernière. Il faut laisser le fil un peu lâche, pour qu'il y ait du jeu entre les cartes, et qu'on puisse les écarter les unes des autres, lorsqu'on voudra les consulter. On observera d'arrêter ce fil derrière la dernière carte du paquet, avec assez de soin pour que les cartes ne puissent s'échapper.

Le premier paquet amsi disposé, on passe au second, puis aux autres successivement, depuis C, D, E, F, jusqu'à Z; tous ces paquets une fois enfilés, le catalogue est achevé; et pour l'envoyer à Paris, il suffit de faire copier les cartes sur du papier ordinaire, écrivant au haut de chaque page la lettre A tant qu'elle dure, puis le B, puis le C, jusqu'à la fin. Le catalogue copié sur papier et collationné exactement sur les cartes, restera au district, et les cartes seront envoyées à Paris dans des boëtes bien garnies de toile cirée en-dedans et en-dehors.

Il ne faut pas oublier, avant d'envoyer les cartes, d'ajouter en petits caractères au bas de chacune, sur le blanc qui y aura été réservé, le numéro du département, les trois lettres initiales du nom de la maison et celles de l'ordre religieux, ou du titre de cette maison: ainsi, pour les religieux Minimes, on écrira R. M.; pour les Carmes, R. Car.; pour les Capucins, R. Cap.; pour les Feuillans, R. F.; pour les Chapitres, Chap.; pour les Evêchés, Ev., etc.

Premier exemple.

La carte d'un livre de la bibliothèque du chapitre de Lyon, département de Rhône et Loire, qui est le soixante-huitième département, sera ainsi figurée, si le livre est sur vélin.

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