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NOTICE RAISON NE'E SUR DIFFERENTES COUTUMES.

voyer paître un plus grand nombre de bêtes qu'un autre; auquel cas felon la Coutume d'Acqs, il étoit tenu de donner compenfation aux autres. Les Coutumes de Poitou, Hedin, & plufieurs autres, ont déterminé le nombre felon la quantité de terre, & ce qu'il falloit de beftiaux pour l'exploitation. En ce qui regarde les Forêts du Roi, les quantités de bêtes pâturantes ont été fixées par des Arrêtés du Confeil dreffés après productions des Titres de chacun.

Lorfqu'il y a des Co-Seigneurs indivis, la Coutume d'Orleans veut qu'ils évitent de fe nuire réciproquement, mais quelque précaution que les Coutumes ayent pu prendre à cet égard, la méchanceté ou l'efprit d'intérêt dans les hommes a prefque toujours prévalu, & rien n'eft plus fujet à inconvénient & à procès que les Seigneuries ou poffeffions indivifes.

PRISES ET AMENDES.

Perfonne dans l'ordre des Loix & en Pays policé n'a droit de se faire justice à lui-même, mais il lui eft permis de se mettre en état de l'obtenir & de fe la faire rendre dans tous les cas de léfion. C'est ce que les Coutumes ont autorifé en prenant en même tems des précautions pour que ces moyens de fe procurer juftice ne puffent point dégénérer en tirannie : nous avons notté, dans le cours de notre Commentaire, comment une portion d'exercice de la justice avoit été dévolue à des Seigneurs Particuliers, & nous partirons delà dans ce que nous avons à dire fur ce point.

Selon toutes les Coutumes on eft en droit de faifir & arrêter toutes bêtes qui font dommage de quelqu'endroit qu'elles foient & à qui que ce foit qu'elles appartiennent. Le Seigneur Haut-Jufticier felon la Coutume de Troyes, eft compétent d'en connoître & l'amende lui en peut être adjugée par fes Juges. Il peut faifir par lui-même ou faire faifir par fes Sergens felon la Coutume de

Reims.

La Coutume de Poitou, ordonne qu'à ceux qui n'ont Juftice n'appartient que le dédommagement, & qu'ils ne peuvent rien prétendre à l'amende ce qui eft jufte, puifqu'elle ne peut réfulter que d'un Jugement dont ils ne font pas compétens.

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Selon la Coutume de Blois, de la Marche & de Bordeaux, les bêtes prifes doivent être mifes en Juftice après vingt-quatre heures, pendant lefquelles feulement le faififant peut les garder, foit pour fe faire rendre juftice à l'amiable, foit pour rendre les bêtes faifies en confignant l'amende de la part de celui qui les répete, ainsi que le prononce la Coutume de Bayonne.

La Coutume de Montargis ne permet pas l'emprisonnement des perfonnes, & en effet nul Particulier n'a par lui-même aucun droit perfonnel fur la liberté d'un autre Citoyen, voilà pourquoi il faut toujours faifir la juftice publique dans l'efprit comme nous venons de l'obferver de prevenir tout exercice de tirannie.

Nous n'entrerons pas ici dans le détail de ce que les Coutumes ont prononcé de différent fur le taux des dédommagemens. L'Ordonnance a fixé les peines en ce qui peut regarder le Roi, c'est tout ce qu'il eft effentiel que les Officiers d'Eaux & Forêts connoiffent pour en faire ufage dans l'occasion.

DES RAPPORTS DES SERGENS GARDES &c.

Quelque hazardeux qu'il foit de s'en rapporter à la fidélité des Gardes ou Sergens, quoiqu'avec ferment fur leurs rapports, ainfi que l'expérience nous l'apprend, l'Ordonnance de 1669. n'a cependant pas pu en ce point adopter le langage des différentes Coutumes à caufe des inconvéniens d'une autre espéce qui en auroient pu réfulter au détriment des Forêts du Roi; elle a feulement adopté celles des précautions les plus effentielles, que quelques Coutumes fuggeroient pour laiffer fur cela le moins qu'il fe pourroit au hazard. Le langage en ce point des Ordonnances antérieures à celle de 1669. fait affez connoître que le Légiflateur fentoit les inconvéniens de cette confiance, & qu'il y mettoit toutes les bornes que pouvoit comporter l'adminiftration de fes Eaux & Forêts. Il est aisé de confronter ce que nous allons dire des Coutumes, avec ce que ftatue l'Ordonnance de 1669. Titre des Huiffiers→ Gardes.

Dans la Coutume du Hainault, le Meffier ainsi que le Sergent Foreftier affermenté à Justice, n'étoit cru de fes rapports qu'au cas Q q q ij

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qu'ils fuffent faits à tiers jour. Selon celle du Boulenois, le Sergent étoit cru fur fon ferment, mais non felon celle du Maine, qui par conféquent exigeoit témoins ou information, on a vû dans notre Commentaire combien cette néceffité de témoins feroit impraticable dans l'ufage pour les Forêts du Roi.

La Coutume de Nivernois, ne permettoit pas que les Gardes fuffent crus à moins qu'ils ne fuffent gens du tout non fufpects, & que leurs rapports ne fuffent bien circonftanciés. Et elle admettoit à faire preuve du contraire. L'Ordonnance de 1669. a établi de même la nécessité de circonftancier, de laquelle naiffent deux avantages, l'un que le Garde a moins de facilité à frauder quand il eft affujetti à multiplier les circonftances, parce que plufieurs fauffetés ne font pas aifées à raccorder; l'autre, que dans les cas où l'infcription de faux peut être admife, la Partie plaignante a plus de moyens pour affeoir fes griefs & fes moyens. La faculté de fe pourvoir par infcription de faux répond à l'admission à faire preuve contraire établie par cette Coutume du Nivernois.

Selon les Coutumes d'Amiens & de Meaux, le Sergent dans fes rapports pour coupes de Bois étoit cru fur fon ferment, jufqu'à fept fols fix deniers parisis, & jufqu'à foixante avec témoin. Dans les Coutumes qui exigeoient deux témoins on trouvoit bon que le Garde lui-même paffât pour un. Elles ont beaucoup varié fur la quotité de la fomme jufqu'à laquelle le Garde pouvoit être cru fans témoin, ou avec témoin & fans information, mais en général ç'a toujours été pour des fommes très-modiques.

Les Coutumes d'Auxerre, Melun, Sens & Langres, permettoient aux Parties lorfqu'elles ne font pas contentes des rapports, de faire informer, c'eft ce que font tous les jours les Officiers d'Eaux & Forêts, lorsqu'ils fufpectent la fidélité des rapports des Gardes au préjudice des intérêts du Roi, en quoi le Roi ne peut avoir moins de priviléges que le fimple particulier.

La Coutume d'Auvergne, ordonne que le miniftre de juftice foit cru de fa prife. Cela a lieu, & trouve fon application pour les Officiers d'Eaux & Forêts, qui font crus fans aucune difficulté de leurs procès-verbaux, fur lefquels on ne demande pas leur affirmation comme fur ceux des Gardes, & fur lefquels on juge, à moins que

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l'Officier ne fût affez malheureux pour s'être mis dans le cas d'être pris à partie. ainfi

Selon toutes les Coutumes, la Partie intéreffée à un délit, que fes ferviteurs font crus fur leur ferment pour de légeres fommes, mais pour de plus grandes il leur faut des témoins non fufpects

ni reprochés.

Elles ordonnent des rapports d'Experts pour faire des eftimations & évaluer les dédommagemens. Mais par rapport au Roi, tout eft évalué par les Ordonnances, notamment par l'Ordonnance de 1669. excepté pour de légers objets fur lefquels le Roi a laiffé à l'arbitre des Juges d'Eaux & Forêts, la quotité des peines pouvant alors beaucoup dépendre d'une infinité de circonftances particulieres que l'Ordonnance n'a pas pu prévoir, & d'après lefquelles il peut être de juftice étroite que les Tribunaux condamnent modérément.

EPAVE S.

Epaves eft chofe trouvée, dont le Propriétaire eft inconnu, & qui n'eft point de nature à être primò occupanti. Quoique les Coutumes allouent pour la plûpart quelque portion du profit de l'Epave au Moyen & Bas Jufticier, fi l'Epave eft trouvée fur fon Domaine ou Fief, la régle générale eft cependant qu'elle appartient aux HautsJufticiers, & que ce font leurs Officiers qui ont droit d'en connoître. Ainfi toute Epave du Domaine du Roi lui appartient en cette qualité, quoique la Coutume de Chaulny dife, qu'elle lui appartient à caufe de fa fouveraineté. Les Coutumes d'Anjou, Maine, Reims, Laon, Bourbonnois, Châlons, Sens, Auxerre, Bretagne font uniformes en ce point. Ainfi toute Epave fur grand chemin, ou en Forêts du Roi & Rivieres navigables eft de droit au Roi. Ce font fes Officiers qui en doivent connoître, & notamment les Officiers Royaux d'Eaux & Forêts, pour celles des Forêts & des Rivieres navigables, fans qu'aucuns Officiers Seigneuriaux en puiffent être compétens; nous en avons rapporté des preuves dans le cours de notre Commentaire, entr'autres un Arrêt du Confeil du mois de Septembre 1736. fur lequel nous nous abftiendrons de nouvelles réflexions.

Ces Epaves appartenantes au Roi doivent felon la Coutume de

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Berry être vendues à fon profit, après les délais expirés & les proclamations néceffaires.

Toutes les Coutumes varient à l'infini fur le nombre de jours de délaïs néceffaires. Les uns le mettant à dix, d'autres à trente ou quarante jours felon nature des chofes, mais toutes s'accordent après ces délais fur la néceffité de trois proclamations, afin que le véritable Propriétaire ait le tems de fe faire connoître, & de revendiquer fon bien en payant les frais qui ont pu être faits, comme de nourriture fi l'Epave en eft fufceptible ou autres quelconques.

Nous n'avons pas befoin de faire observer que les Ifles croiffant dans les Rivieres font des efpéces d'Epaves, nous en avons déja parlé en la premiere Partie de cette notice pour ce qui regarde les Rivieres navigables, fur quoi nous ne repéterons rien ici.

GARENNES ET CHASSES.

En examinant ce que les Coutumes prononcent par rapport aux Garennes, nous trouvons une entiere uniformité de principe entr'elles, & ce que nous avons dit dans notre Commentaire fur cette matiere, ainfi nous pouvons dire qu'à cet égard les Ordonnances Foreftieres ont parfaitement adopté le langage des Coutumes.

Selon celles de Meaux & de Blois, on peut avoir Clapiers fur fon héritage avec confentement du Seigneur ou des voisins, fans qu'on puiffe de là arguer que l'on ait Garenne ni privilége de Garenne : car felon la Coutume de Nivernois, il faut outre les Clapiers que le lieu ait ancienne dénomination de Garenne. Or il eft de principe felon les Coutumes de Meaux & Blois, que pour avoir Garenne, il faut permiffion du Roi & titre exprès, ou poffeffion immémoriale fur tout pour les Garennes non forcées, encore toutes ces circonstances ne difpenfent-elles pas des conditions que nous avons rapportées en la Section de la Chaffe pour qu'il n'en advienne préjudice ni dommage à autrui; nul titre au monde foit de naissance ou d'autorité ne pouvant felon nos Loix donner droit de ruiner nos voifins, c'est par une fuite de ce principe que tout accroiffement de Garenne, au préjudice d'autrui eft défendu par les Coutumes d'Anjou & Maine; nous avons marqué dans notre Commentaire

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