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ni les agitations qu'on cherche à exciter, ni un départ qui peut blesser la convenance, mais qui n'enfreint pas les loix, qui peuvent vous occuper. Vous ne porterez votre attention que sur la constitution décrétée par vous et acceptée par le roi, pour la confection de la loi que vous allez porier. Le travail que nous vous soumettons aujourd'hui, n'est cependant qu'une portion de celui qu'embrasse cette matiere.

Pour fixer complettement l'état et les obligations des membres de la famille du roi, il faut non-seulement dire si ceux entr'eux qui sont fonctionnaires publics, ou prochainement appellés à le devenir, sont assujettis à la résidence, mais encore déterminer les regles qui seront suivies pour la régence et l'éducation de l'héritier présomptif du roi mineur. Sous peu de jours, nous vous apporterons un projet de loi sur les émigrans; cette derniere loi est aussi nécessaire que l'autre, et la liberté ne s'en allarmera pas. Il faut distinguer le droit qui appartient à l'homme en société d'aller, de venir, de partir, de rester, de fixer son domicile où bon lui semble, et le délit qu'il commet, quand pour éviter ou pour fuir lâchement les troubles de sa patrie, il en aban、 donne le sol. L'ordre ordinaire est alors dérangé; les loix qui lui conviennent ne lui sont pas applicables; et comme dans un moment d'emeute la force publique prend la place de la loi civile, ainsi dans les cas de l'émigration criminelle la nation doit prendre des mesures séveres contre ces dégerteurs coupables; ils ne peuvent plus prétendre ni à ses bienfaits pour leurs personnes, ni à sa protection pour leurs propriétés. On s'occupe du projet de cette loi; nous n'en ferons pas attendre le rapport; ce sera une loi constitutionnelle, mais qui, comme la loi martiale, ne sera applicable qu'aux momens d'effervescence et d'incivisme qui en sollicitent l'application. Aujourd'hui c'est un décret sur la résidence des fonctionnaires publics

Ceux qui sont, à des titres différens, chargés du gouvernement de l'empire, sont certainement obligés de résider, mais ce n'est aussi qu'à ceux-là que la loi de la résidence peut être imposée; les autres citoyens ne peuvent être gênés dans leurs voyages ou dans la fixation de leur domicile. Outre que le roi est le premier fonctionnaire de l'état, il est des membres de sa famille qui, sans être encore fonctionnaires publics en activité, sont si prochainement appelés a la succession au trône par la constitution de l'état, qu'ils doivent être assujettis à la résidence. L'héritier présomptif 9, quand il est en minorité, celui de ses parens majeurs

le plus près de la succession au trône, doivent résider dans le royaume, de même que la mere de l'héritier présomptif mineur. C'est-là que doit s'arrêter la loi, parce que, quoique tous les mêles de la maison du roi soient, par la constitution, appelés à la succession au trône par droit de pri mogéniture, la loi qui arête la libre disposition des personnes ne peut être étendue au-delà de ce qui peut strictement être exigé par l'utilité publique. C'est déjà une fiction que celle qui place dans la classe des fonctionnaires publics, en activité continue, les membres de la famille du roi, qui, venant immédiatement après lui, sont les suppléans au trône: un double danger résulteroit d'une loi qui, prolongeant ces fonctious jusqu'au dernier individu de cette famille, les astreindroit tous à la résidence. Leur liberté seroit attaquée sans qu'ils eussent accepté aucunes fonctions publiques qui les assujettissent à aucun devoir. La famille du roi seroit, sans avantage, frappée d'un esclavage politique dans lequel chacun des membres qui la composerait, n'étant ni fonctionnaire ni citoyen, désaprendroit les obligations de ceux-ci, sans avoir ni intérêt ni occasion de s'instruire des obligatious de ceux-là; ensuite ce seroit une famille privilégiée jusqu'à son dernier rejetton, et qui, liée à toutes les puissances voisines par ses ramifications diverses, menaceroit l'égalité politique, sauve-garde de la liberté et base de la constitution.

Que les premiers membres de la famille du roi soient considérés comme fonctionnaires publics, parce qu'ils peuvent le devenir à chaque moment; mais que les autres soient libres comme tous les autres citoyens, qu'ils en exercent les droits, et qu'ils jouissent de tous les bénéfices des loix de leur pays, en conservant toujours les titres à la suppléance héréditaire qu'ils tiennent de la constitution. Voilà, selon nous, les conséquences les plus pures de la constitution françoise. Voici en conséquence, messieurs, le projet de décret que vous propose votre comité.

Art. I. Les fonctionnaires publics dont l'activité est continue, ne pourront quitter les lieux où ils exercent celles des fonctions qui leur sont destinées, s'ils n'y sont auto

risés.

II. Ceux des fonctionnaires publics dont l'activité n'est pas continue seront tenus de se rendre aux lieux de leur résidence politique, pour le tems où ils doivent reprendre Fexercice de leurs fonctions, s'ils n'en sont dispensés.

III. L'autorisation ou la dispense ne pourront être accor

dées aux fonctionnaires publics que par les corps dont ils sont membres, ou par leurs supérieurs.

IV. Le roi, premier fonctionnaire public, doit avoir sa résidence à portée de l'assemblée nationale, lorsqu'elle est réunie; et lorsqu'elle est séparée, le roi peut résider dans toute autre partie du royaume.

V. L'héritier présomptif de la couronne étant en cette qualité premier suppléant du roi, est tenu de résider auprès de sa personne. La permission du roi lui suffira pour voyager dans l'intérieur de la France; mais il ne pourra sortir du royaume, sans y être autorisé par un décret de l'assemblée nationale, sanctionné par le roi.

VI. Si l'héritier présomptif est mineur, le suppléant majeur capable de succéder à la couronne, d'après la loi constitutionnelle de l'état, sera assujetti à la résidence, conformément au second article, sans que, par la présente disposition, l'assemblée nationale entende rien préjuger sur la loi de la régence.

VII. Tant que l'héritier présomptif sera mineur, sa mere sera tenue à la même résidence. L'assemblée nationale n'entend rien préjuger sur ce qui concerne l'éducation de l'héritier présomptif ou d'un roi mineur.

:

VIII. Les autres membres de la famille du roi ne sont pas compris dans les dispositions du présent décret ils ne sont soumis qu'aux loix communes aux autres citoyens.

IX. Le fonctionnaire public qui contreviendra aux conditions prescrites par le présent décret, sera censé avoir renoncé sans retour à ses fonctions; et les membres de la famille du roi seront censés de même avoir renoncé personnellement à la succession au trône (Vifs applaudissemens ). L'assemblée ordonne l'impression du rapport.

M. Tronchet propose de corriger une erreur de date qui s'est glissée dans un précédent décret sur les droits féodaux, et de rétablir le mot de pariage, auquel l'imprimeur a substitué celui de pacage. L'on admet ces deux corrections.

M. Tronchet: Quoique les articles que je vais avoir l'honneur de vous proposer, ne soient que des articles additionnels à seux qui ont été proposés par M. Merlin, pour n'en faire qu'un seul et même décret, votre comité féodal a cru cependant devoir en faire l'objet d'un rapport particulier.

Persuadé, messieurs, que vous avez lu ce rapport et que

vous en avez médité les principes, je passe au projet de décret.

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L'assemblée nationale, voulant faire cesser plusieurs difficultés qui se sont élevées en exécution de son décret du 3 mai, en interprétant, en tant que de besoin, ce décret et notamment les articles 2 3, 4, 5, 44 et 45 dudit décret, et l'article 10 de celui du 19 septembre suivant, a décrété et décrete ce qui suit :

Art. I. Tout propriétaire d'un ci-devant fief, lequel ne consistera qu'en domaines corporels tels que maisons terres, prés, bois, et autres de même nature, pourra racheter divisément les droits casuels dont il est grevé, pour telle portion qu'il jugera à propos, pourvu qu'il rachete en même-tems la totalité des redevances fixes et annuelles dont son fief pourroit être grevé, sans préjudice de l'exception portée au décret du 14 novembre, relativement aux fiefs mouvans des biens nationaux. Décrété.

II. Il en sera usé de même à l'égard des ci-devant fiefs qui ont sous eux des fonds tenus en fief ou en censive, lorsque lesdites mouvances auront été inféodées par le propriétaire du fief supérieur, ou lorsque lesdits fiefs seront régis par des usages fondés sur une jurisprudence constante ou par les coutumes dans lesquelles le seigneur supérieur ne conserve aucun droit utile immédiat sur les objets qui ont été sous-inféodés ou accensés par le propriétaire du fief inférieur, encore que le jeu de fief n'ait point été approuvé ou reconnu par le seigneur supérieur. Décrété.

III. Lorsqu'il dépendra du fief des mouvances qui n'auront point été inféodées par le ci-devant seigneur supérieur, et lorsque ce fief sera situé dans un pays où le jeu de fief ne peut porter préjudice à ce ci-devant seigneur supérieur, le propriétaire du fief inférieur ne pourra racheter partiellement les droits casuels sur les domaines qui sont restés dans sa main, , que jusques à concurrence de la portion dont la loi qui régit le fief lui avoit permis de se jouer, en comprenant dans ce calcul les portions déja par lui accensées ou inféodées; en telle sorte qu'il reste toujours dans sa main la portion entiere que la loi l'auroit obligé de réserver; si mieux il n'aime racheter préalablement les droits casuels à raison de la totalité des mouvances non-inféodées dépendantes de son fief, auquel cas, et après avoir effectué ledit rachat, il pourra racheter librement et partiellement le surplus de son fief, et pour telle portion qu'il jugera à propos.

Décrété.

IV. Dans le même cas où les mouvances ne seront poin

inféodees, et où ces jeux de fief ne peuvent point porter préjudice au seigneur supérieur, si d'ailleurs le fief est régi par l'une des coutumes qui ne permettent point le jeu de fief à prix d'argent, mais seulement par bail à cens ou à rente, le propriétaire de ce fief pourra néanmoins vendre à prix d'argent telle portion des fonds qui sont restés en sa main, et en acheter partiellement les droits casuels, pourvu que les portions qu'il rachetera ou vendra n'excedent point les deux tiers du fief, en comprenant dans ces deux tiers les fonds déja sous-inféodés ou accensés; si mieux il n'aime racheter préalablement les droits casuels à raison de la totalité des mouvances non-inféodées, auquel cas, et après avoir effectué ledit rachat, il pourra racheter librement et partiellement le surplus de son fief pour telle portion qu'il jugera à propos. Décrété.

V. Il en sera usé de même que dans l'article précédent à l'égard des ci-devant fiefs dont dépendront des mouvances non inféodées, et dont les aliénations ne peuvent point porter préjudice au ci-devant seigneur supérieur, lorsque lesdits fiefs seront régis par l'une des coutumes qui n'avoient aucune disposition sur la liberté du jeu de fief, ou qui sont situés dans les pays de droit écrit, et cela nonobstant tout usage ou jurisprudence particuliere qui se seroient introduits dans lesdits pays. Décrété.

VI. Le rachat partiel, dans les cas autorisés par les articles 3, 4 et 5 ci-dessus, ne pourra avoir lieu que sous la condition de racheter en même tems la totalité des redevances fixes et annuelles dont le fief pourroit se trouver chargé, sans préjudice de l'exception portée au décret du 14 novembre, relativement aux fonds mouvans des biens nationaux. Décrété.

VII. A l'égard des fonds ci-devant tenus en censive ou roturiérement, tout propriétaire d'iceux en pourra racheter pareillement les droits casuels à raison de telle portion desdits fonds qu'il jugera à propos, sous la seule condition de racheter en même tems la totalité des redevances fixes et annuelles dont le fonds se trouvera chargé, sans préjudice de l'exception portée au décret du 14 novembre relativement aux fonds mouvans des biens nationaux. Décrété.

VIII. Lorsqu'il s'agira de liquider un rachat des droits casuels dus à raison des mouvances et dépendances d'un cidevant fief, et dont le rachat n'aura point été fait par le propriétaire ou les propriétaires des fonds tenus sous ces mouvances; et dans le cas où lesdites mouvances auront été inféodées, il y sera procédé ainsi qu'il suit:

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