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AUTORITÉS ADMINISTRATIVES.

En général, l'action administrative a été mise par la loi aux mains d'un agent unique, et il y a longtemps qu'on a renoncé au système des administrations collectives. « Agir est le fait d'un seul, » disait le rapporteur de la loi du 28 pluviôse an VIII, dont la plupart des dispositions sont encore en vigueur. Ce n'est que dans certains cas, très-rares, que l'on trouve encore des commissions chargées collectivement d'administrer'. Mais si l'unité est indispensable à une bonne administration, le législateur a placé, auprès des fonctionnaires chargés d'agir, des conseils pour éclairer leur marche. Aussi trouverons-nous, à tous les degrés de la hiérarchie administrative, la délibération confiée à des corps multiples, à côté de l'action mise aux mains d'agents uniques. « Délibérer est le fait de plusieurs, » disait encore le rapporteur de la loi du 28 pluviôse an VIII.— Au centre, l'Empereur et les ministres administrent, et le Conseil d'État, qu'ils peuvent toujours consulter, doit l'être, par eux, dans certains cas que la loi détermine. Au chef-lieu de département, le préfet, qui représente le chef de l'État, a auprès de lui: 1° le conseil de préfecture, sorte de Conseil d'État au petit pied qui, à l'instar du grand conseil, est obligé de répondre aux questions que le préfet veut lui soumettre, et dont l'avis doit quelquefois être demandé, sous peine d'excès

1 C'est ce qui a lieu pour les hospices qui sont administrés par des commissions administratives, et pour les fabriques dont la direction est confiée au bureau des marguilliers.

de pouvoir; 2° le conseil général, qui est plus particulièrement appelé à délibérer sur les intérêts du département considéré comme personne morale. Dans l'arrondissement, le sous-préfet a un conseil d'arrondissement, et dans la commune, le maire chargé de l'administration est limité par les pouvoirs d'un conseil municipal électif. Reprenons en détail les parties de cette hiérarchie dont nous venons de présenter l'ensemble et la pensée générale.

ADMINISTRATION CENTRALE.

Empereur. - L'Empereur est le chef du pouvoir exécutif et, par conséquent, celui de l'administration. Mais tandis qu'il s'est réservé le pouvoir exécutif pour tout ce qui a un caractère politique, les détails de l'administration ont été, presque entièrement, délégués aux agents subordonnés ; certaines matières seulement sont réservées au chef de l'État, et l'on peut dire que la délégation est la règle tandis que la réserve n'est que l'exception. C'est l'Empereur qui, par exemple, concède les mines; qui exerce la tutelle administrative des établissements religieux, et, en certains cas, celles des personnes morales autres que les établissements de cette nature; qui autorise l'établissement des octrois; c'est l'Empereur qui statue, en appel, sur le contentieux administratif, le Conseil d'État, délibérant au contentieux, préalablement entendu; car le Conseil d'État, en matière administrative, contentieuse et législative, est un corps purement consultatif. Quoique cette énumération soit fort incomplète, les exemples

cités suffisent pour démontrer que l'Empereur administre, et que plusieurs jurisconsultes ont eu bien tort d'affirmer que le chef de l'État était en dehors de l'administration. Il est vrai que la plus grande partie des attributions administratives sont déléguées aux ministres, et que les attributions réservées à l'Empereur sont peu nombreuses; mais les cas que nous venons de citer suffisent pour établir que la compétence du chef de l'État existe quoiqu'elle ne soit composée que d'exceptions.

Ministres. Le nombre et la division des ministères ne sont pas fixés par la loi, et toutes les modifications qu'exigent les besoins du service peuvent être faites par décret. Aujourd'hui, les départements ministériels sont au nombre de dix:

1o Le ministère d'État;

2o Le ministère de la justice et des cultes;
3o Le ministère des affaires étrangères;
4° Le ministère de l'intérieur;

5o Le ministère des finances;

6° Le ministère de la guerre;

7° Le ministère de la marine et des colonies; 8° Le ministère de l'instruction publique;

9° Le ministère des travaux publics, de l'agriculture et du commerce;

10° Le ministère de la maison de l'Empereur et des beaux-arts (décret du 23 juin 1863).

Nous avons énuméré les dix ministères en suivant le rang qui leur a été assigné; mais le rang des ministères est indépendant de la préséance personnelle des mi

nistres, qui sont placés dans l'ordre que détermine l'ancienneté de leurs services. Une exception à la règle veut cependant que le ministre d'État, quelle que soit la date de sa nomination, ait le pas sur les autres ministres'.

Quelques écrivains placent le pouvoir réglementaire de l'Empereur au nombre de ses attributions administratives; mais nous en avons parlé, dans le droit public, en traitant des droits de souveraineté.

Le mouvement général de chaque ministère dépend du ministre, qui manifeste sa volonté par des instructions, des ordres ou des décisions. Les instructions sont tantôt générales et tantôt individuelles, suivant qu'elles s'adressent à tous les fonctionnaires de la même catégorie ou à un fonctionnaire pour une affaire spéciale. Les ordres sont des injonctions envoyées à un fonctionnaire, pour lui prescrire un acte déterminé. Quoique l'ordre soit plus impératif que l'instruction, celle-ci est cependant obligatoire pour le subordonné qui la reçoit; d'un autre côté, elle le couvre suffisamment par la responsabilité ministérielle. L'ordre et l'instruction sont, l'un et l'autre, des actes de propre mouvement que le ministre fait, sans être provoqué par la demande des parties. Au contraire, les décisions ministérielles sont rendues sur la réclamation des parties ou le référé des agents inférieurs.

Parmi les décisions ministérielles, les unes sont d'administration pure et ne peuvent pas être attaquées devant le Conseil d'Etat, les autres, au contraire, sont

Note insérée au Moniteur du 21 décembre 1860.

rendues en matière contentieuse, et donnent lieu au recours devant le Conseil d'État. Nous verrons ulté rieurement en quoi consistent l'administration pure et les matières contentieuses.

Le droit de faire des règlements obligatoires, à l'égard des tiers, n'a pas été délégué aux ministres, mais ils peuvent faire des instructions réglementaires pour leurs subordonnés, qui seront obligés de s'y conformer, en leur qualité de fonctionnaires. S'ils les violaient comme administrés, ils ne seraient passibles d'aucune peine pour l'infraction aux dispositions de l'instruction. Comme interprétation des lois ou règlements, les instructions ministérielles n'ont qu'une autorité purement doctrinale'.

Si les ministres n'ont pas reçu le pouvoir de réglementer, ils ont le droit d'annuler ou d'approuver les arrêtés réglementaires des préfets; mais leur compétence est bornée à la faculté d'opposition, et ne va pas jusqu'à remplacer l'initiative du préfet par celle du ministre; celui-ci ne pourrait pas substituer un règlement départemental à un règlement qu'il aurait

annulé.

Conseil d'État. — L'organisation et les attributions du Conseil d'État sont déterminées par les art, 47 à 53 de la Constitution du 14 janvier 1852, le décret organique du 25 janvier 1852 et le règlement du 30 janvier suivant.

Il en est autrement des décrets en forme d'instruction qui furent rendus par l'Assemblée constituante de 1789; ils ont une véritable autorité législative en matière d'interprétation.

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