pas de même si la citation avait été donnée devant un juge incompétent, lors même que l'incompétence aurait été matérielle, parce que l'article 2246 du code civil veut que la citation en justice, donnée même devant un juge incompétent, interrompe la prescription. La Cour de cassation a pourtant, le 11 mars 1819, S. t. 19, 1, p. 317, rejeté le pourvoi formé contre un jugement qui, relativement à un délit de chasse, avait déclaré que la citation donnée à la requête d'un procureur du roi incompétent, devant le tribunal incompétent auprès duquel il exerçait ses fonctions, ne pouvait être considérée comme un acte de poursuite légale propre à interrompre la prescription. La Cour régulatrice n'a pas employé, dans ses motifs, ce considérant du jugement qui lui était dénoncé, « qu'en point de droit, les lois pénales étant de rigueur et ne pouvant s'étendre d'un cas à l'autre, on ne doit point, en matière de délits de chasse, consulter le code civil dans son article 2246. Mais la Cour ne l'a point improuvé, et on pourrait penser qu'elle l'a approuvé virtuellement en sanctionnant la décision qui n'en était que la conséquence. Si la proposition est juste pour les délits de chasse, elle l'est aussi pour tous crimes et délits. Découle-t-elle d'un principe textuellement posé dans la législation criminelle, ou résulte-t-elle nécessairement de l'esprit manifesté dans son ensemble ? Est-il vrai que les lois criminelles se suffisent à elles-mêmes, et n'aient rien à emprunter du code civil? Nous ne pensons pas qu'elles aient cette vertu, et nous renvoyons aux développemens que nous avons présentés dans le chap. VI, n. 268. L'art. 2246 du code civil nous paraît convenir grandement à la prescription des crimes et délits. Mais ce n'est là qu'un sentiment ; la difficulté reste; et le code d'instruction criminelle devait la prévenir. D. t. 22, p. 473; S. t. 19,1, p. 317. Pendant que ces observations étaient sous presse, pour la première fois , on a publié un arrêt de la Cour de cassation, rendu le 18 janvier 1822, qui démontre une règle tout opposée à celle de l'arrêt de 1819, et conforme aux principes des V. dans ce sens J. du 19e s. 1828, 36, p. 39; et 1830, Ire, p. 337; Legraverend, t. Jer, p. 73, édit. Tarlier. art. 2246 et 2247 du code civil. Mais, en déclarant valables, pour l'interruption de la prescription, les poursuites et les instructions des magistrats ou des officiers publics qui appartiennent à des tribunaux incompétens, ce nouvel arrêt confirme la doctrine qui présente les jugemens de ces tribunaux comme incapables d'interrompre la prescription. La confirmation nous semble découler de ces termes « que la compétence de ces tribunaux ne devrait, en effet, être prise en considéra tion que relativement aux actes qui leur seraient propres. C'est précisément la règle des articles 2246, 2247, qui fait produire l'interruption à la citation donnée devant un tribunal incompétent, sans la faire résulter du jugement de ces tribunaux. V. D. t. 22, p. 474; S. t. 22, 1, p. 300. 784. Les délits forestiers, les délits ruraux, les délits de chasse et de pêche, devant être poursuivis en justice, dans le cours de trois mois, ou d'un mois, doiventils , être jugés dans un délai semblable ? Les lois de 1790 et 1791 n'établissent pas de péremption; et le code forestier de 1827 n'en ayant point établi, il faut s'en référer aux art. 638 et 640 du code d'instruction criminelle. Il y aura prescription, par discontinuation de poursuites pendant trois ans, ou un an, selon que la connaissance des délits appartiendra aux tribunaux de police correctionnelle ou de simple police. Deux arrêts de cassation sont venus fortifier cette doctrine, le 20 septembre 1828, et le 8 mai 1830. Ils portent qu'aux termes de l'art. 12 de la loi du 30 avril 1790, l'action pour la poursuite des délits de chasse, se prescrit par le délai d'un mois; que dans le silence de la loi sur le temps requis pour la prescription des poursuites auxquelles donnent lieu des délits soumis à des prescriptions particulières, il faut se reporter nécessairement aux dispositions générales du code d'instruction criminelle; qu'aux termes des art. 637 et 638, la prescription des poursuites en matière correctionnelle, ne peut être acquise que lorsque ces poursuites ont été interrompues pendant trois années. » C'est un peu long pour un simple délit de chasse. J. du 19 s. 1829, 1, p. 76. 785. L'art. 7 de la loi du 9 juin 1819 défend aux éditeurs de journaux de rendre compte des séances secrètes des chambres législatives sans leur autorisation. L'art. 18 leur ordonne d'insérer dans leurs feuilles les publications officielles, qui leur sont adressées par le gouvernement, le lendemain du jour de l'envoi des pièces, sous la seule condition du paiement des frais d'insertion. L'art. 11 leur impose l'obligation, lorsqu'ils ont été condamnés pour crimes ou délits de publication, d'insérer dans leurs feuilles, et dans le mois de la condamnation, un extrait contenant les motifs et le dispositif du jugement ou de l'arrêt qui porte cette condamnation. L'article 12 déclare que la contravention à ces dispositions sera punie correctionnellement d'une amende de 100 à 1000 francs. Enfin, l'article 13 dispose que les poursuites auxquelles pourront donner lieu les contraventions aux articles 7, 8 et 11 de la présente loi, se prescriront par le laps de trois mois, à compter de la contravention, ou de l'interruption des pour suites, s'il y en a de commencées en temps utile. Ici les poursuites ne changent pas la prescription, comme pour les délits forestiers, les délits ruraux et les délits de chasse; elles n'ont pas l'effet de substituer à la prescription spéciale la prescription générale du code d'instruction criminelle. Les poursuites ne font qu'interrompre la prescription spéciale, qui reprend son cours, lorsqu'elles sont abandonnées. Pourquoi n'en est-il pas de même en toute matière, la prescription propre à chaque délit ne devrait toujours être qu'interrompue par les poursuites. $IV. - Vices rédhibitoires. 786. La loi refuse à l'acquéreur la rescision pour cause de lésion dans le prix de la vente; mais elle soumet le vendeur à la garantie des défauts cachés de la chose vendue. Sous ce nom de chose, la loi comprend les immeubles comme les meubles; mais l'action résultant de ces vices rédhibitoires est très peu usitée en vente d'immeubles. Elle est soumise, pour ces deux objets également, à une prescription que la loi n'a pas déterminée. L'article 648 dit seulement que l'action doit être intentée dans un bref délai, suivant la nature des vices rédhibitoires et l'usage des lieux où la vente a été faite. Dans le droit romain, d'après les lois 9 et 45, ff. de act. empt., le délai est de six mois, à compter du jour où ce vice se découvre. En France, les usages n'ont marqué de délai à l'action que pour les vices des animaux; et ces délais sont assez variés. La Coutume de Bourbonnais ne donnait que huit jours. Coquille a dit que c'était la règle d'une ancienne ordonnance de la police de Paris. Cependant, Brodeau assurait qu'à Paris le délai emportait neuf jours; et Lacombe ajoute que tel est l'usage. Selon Pothier, il est de quarante jours à Orléans, pour les vaches et les chevaux. La Coutume de Bar a aussi fixé quarante jours. En Normandie, d'après Basnage, ce délai s'applique aux ventes de chevaux, et il n'est que de dix jours relativement aux vaches et aux moutons, et encore y a-t-il des usages différens dans diverses parties de la province. Avec des règles aussi peu fixes, le juge a quelque latitude, selon les circonstances. V. Dunod, p. 170, et R. Lacombe, Vices rédhib. 1. Quant aux immeubles, comme l'action est rare, l'usage n'a rien indiqué. Dans les pays de droit écrit on avait la règle des lois romaines, et elle pouvait être suivie partout. Il serait bon qu'elle fût généralement admise. Un arrêt de la Cour de Lyon, du 5 août 1824, nous offre, en cette matière, une assez bonne instruction. Un de ses considérans porte « que, dans l'espèce, s'agissant d'une maison dont les défauts ont besoin d'être mûrement examinés et appréciés dans leurs causes et dans leurs effets, avant de hasarder l'action rédhibitoire, il est évident qu'il faut un délai d'une certaine étendue pour un tel examen, et que l'usage n'indiquant rien sur la mesure de cette étendue, il en résulte qu'elle est abandonnée à la sagesse et à la prudence des magistrats; que, dans l'espèce encore, s'agissant d'une vente récente, dont l'acte authentique ne remonte pas à six mois avant l'exercice de D'après l'usage suivi en Belgique, le délai accordé à l'acheteur d'un cheval, pour exercer contre son vendeur l'action rédhibitoire, n'était que de six semaines (Br., 23 fév. 1828; J. de Br., 1828, Ire, p. 227; Voët, L. 21, tit. Ller, no 6, Deghewiet, t. 2, p. 124, art. 3). l'action, il est évident que cette action a été exercée en temps utile; que lors même qu'il serait vrai qu'une vente sous seing privé aurait précédé de quelques mois la vente publique, il n'y aurait pas lieu, pour cela, de repousser l'action, parce que, rigoureusement, le délai pour son exercice ne peut être fixé qu'à dater du moment où les vices de la maison vendue ont commencé à être signalés et connus, et que, dans l'espèce, il paraît constant que la dame Laurent n'aurait été avertie que par les locataires, et que six mois ne se sont pas écoulés depuis cet avertissement jusqu'à la demande. » S. t. 24, 2, p. 365. Remarquons en passant que les vices de la chose qui ne tiennent qu'à sa vétusté, ne sont pas propres à justifier l'action redhibitoire. On vend la chose dans l'état où elle se trouve; et l'acheteur doit l'examiner. C'est la raison qui rend si rare l'action rédhibitoire pour les immeubles. Mais dans l'affaire de Lyon, c'était une maison nouvellement construite, dont les planchers avaient fléchi bientôt par le vice des solives ou des poutrelles, qui étaient masquées par les plafonds. 787. Nos différens codes, civil et de commerce, de procédure civile et de procédure criminelle, et des lois spéciales, établissent des formalités qui s'attachent aux actionset aux exceptions, pour l'exercice ou la conservation de beaucoup de droits ou de facultés. Des délais sont marqués, dans lesquels ces formalités doivent être remplies, sous peine de déchéance ou de fin de non-recevoir. Ces déchéances ont du rapport avec les prescriptions; mais ce ne sont que des parties secondaires, très multipliées et très minutieuses, toutes de droit positif, et dont l'explication ne peut être bien placée que dans des commentaires de procédure. On a eu l'attention d'annoncer qu'elle n'entrait pas dans le plan de cet ouvrage. Toutefois, on a donné, dans le chapitre VII, des indications générales sur la manière de compter les délais pour les déchéances comme pour les prescriptions, parce que là, il s'agit de principes plutôt que de règles de détail purement arbitraires. 788. Nous terminerons ce chapitre en rappelant, 1o que la prescription, dans les cas prévus par les art. 2271, 2272 et 2273 du code civil, et dans tous autres cas semblables, reçoit son application quoiqu'il y ait-eu continuation de fournitures, livraisons, services et travaux ; et qu'elle cesse de courir dans les mêmes cas, et généralement dans toutes les circonstances, lorsqu'il y a compte arrêté cédule ou obligation ou citation en justice. Code civil, art. 2274; code de commerce, art. 434. 2o Que, pour toutes demandes en paiement de travaux, services, soins et fournitures, et en paiement des lettres de change et billets à ordre, le serment peut être déféré à ceux qui opposent la prescription. Code civil, art. 2275; - Code de commerce, art. 189. 3o Que le droit d'exiger le serment ne doit pas être étendu contre la prescription de l'article 2277, non plus qu'à aucune autre prescription du même ordre ou d'un ordre supérieur. Ce droit doit être borné aux prescriptions à l'égard desquelles la loi l'a établi, et à celles de la même nature, quoique la loi ne l'ait pas formellement déclaré. On peut voir sur ce point, Dunod, p. 170, et Dumoulin et Rebuffe, qu'il cite à la marge. 4° Que, d'après l'art. 2278 et les observations que l'on a présentées dans le chapitre IV, sur les art. 2251 et 2252, la prescription de cinq ans et au-dessous en matière civile, et toutes prescriptions re latives au commerce et à la poursuite des crimes et délits, courent contre toutes personnes, femmes en puissance de mari mineurs et interdits. ; CHAPITRE XVII. Questions transitoires sur la prescription. SOMMAIRE. 789. Transition de la loi ancienne à la loi 801. Relativement à la poursuite des délits, nouvelle. Difficultés. L'art. 2280 entre la prescription ancienne et la nouvelle, on prend la plus abré 790. Il n'y a pas d'effet rétroactif odieux dans la réduction à trente ans des 802. Les peines ne se prescrivent que se gée. prescriptions qui auraient pu durer lon les lois existantes au temps où plus long-temps. elles ont été prononcées. et d'intérêts, échus avant la loi du 792. Prescription d'arrérages de ferme, suivant que le bail a fini avant ou après le code. un ans a abrégé la prescription ancienne, en matière de rescision pour les mineurs. 791. Prescriptions des arrérages de rentes 803. Si la loi qui a fixé la majorité à vingt 804. Incertitude sur le temps de la presscription ancienne, contre la nullité des actes entre le tuteuret le pupille, sans compte prealable. 793. Depuis le code, les arrérages de redevances et d'intérêts échus auparavant se prescrivent partiellement, 805. Lorsque la tutelle a fini sous la loi à compter de chaque échéance. 794. La durée du temps de la prescription pour les arrérages reste fixée par la loi ancienne. 795. Intérêts échus après le code reçoivent la prescription nouvelle, quoique le titre soit antérieur. ancienne, avant la majorité qui n'est venue qu'après le code, quelle prescription contre le compte ? 796. La première règle de l'art. 2281 s'applique à toutes prescriptions. 806. Paiemens reçus en assignats, sans déclaration de la loi qui autorisait le refus, ne sont que des à-compte. Pas besoin de rescision dans les dix ans. 797. On est allé jusqu'à mettre sous la *sauvegarde de l'art. 2281, une ancienne jurisprudence contraire à l'art. 2250. 807. L'inscription dans six mois, pour exercer le droit à la séparation des patrimoines, n'est nécessaire que dans le cas de décès, après le code. 798. Comment la citation en conciliation 808. Pour les successions ouvertes avant interrompait la prescription sous la loi du 24 août 1790. la loi du 14 juillet 1819, les étrangers sont restés incapables de pres 799 Après le code de procédure, a-t-il crire les droits d'hérédité. fallu, pour des citations antérieu- 809. Possession commencée avant le code res, l'ajournement dans le mois de ne peut, en se continuant, faire prescrire les servitudes devenues im 800. Billets à ordre, souscrits avant le code de commerce, ne se prescrivent que 810. Elle ne peut non plus servir au pospar trente ans. sessoire. prescriptibles. tude discontinue accordée par un 825. La réclamation d'un chemin vicinal, 811. Conditions rigoureuses de la posses- 824. 812. Possession immémoriale d'une servi Mais le brûlement des papiers du seigneur a pu faire admettre la preuve testimoniale d'une possession de quarante ans, à titre légitime, etc. statut que le code a abrogé, n'a pu par une commune, n'a pas pu pres faire acquérir cette servitude. crire par cinq ans. prescriptibles, on a pu étendre, par la possession, les droits d'usage accordés par le titre. 814. Action des communes pour revendi 827. quer les biens que leur avaient enle- 828. 813. Sien pays où toutes servitudes étaient 826. L'acquéreur d'une terre seigneuriale 815. Méme prescription contre l'action en rescision de cantonnemens. dans laquelle se trouvent des communaux usurpes, n'a pas de titre légitime contre la commune. On a jugé autrement pour l'acquéreur sur décret forcé. Avant le code forestier, l'obligation de replanter les bois défrichés sans autorisation, a été jugée imprescriptible. On ne jugerait plus de méme. 816. Point de prescription spéciale contre l'action des communes pour se faire 829. Dans les pays qui n'admettaient pas réintégrer dans les biens qu'elles avaient anciennement possédés. 817. Prescription de cinq ans contre la la prescription de dix ou vingt ans, la vente antérieure au code ne fait pas titre pour cette prescription. restitution des terres vaines et va- 830. La transcription après le code ne rengues possédées par les seigneurs. 818. Cette législation exceptionnelle, contraire au droit commun, a fait naítre des difficultés. 819. Distinction entre les biens à réclamer dans le délai de cinq ans, et ceux pour lesquels il n'y a pas de prescription déterminée. drait pas la vente antérieure utile à la prescription des hypothèques, par dix ou vingt ans. 831. Dans les pays qui admettaient la prescription de dix ou vingt ans, pour l'appliquer aux hypothèques, la transcription du titre a été nẻcessaire depuis la loi du 11 brumaire an 7. 820. Droits d'usage se trouvent dans la disposition de cinq ans, et non dans 832. Dans ces pays la prescription ne celle qui ne fixe pas de délai. 821. Aucune prescription n'a pu courir contre les communes qui ont repris la possession des biens. 822. La loi du 10 juin 1793 n'a pas touché à la prescription de cinq ans. courait pas contre les privilégiés. Les communes étaient au nombre des privilégiés. 833. Prescription de dix ans relativement aux sous-acquéreurs des biens de l'état, avant et après le code civil. 823. La loi du 9 ventose an 12 n'a pas 834. Explications sur la loi qui suspendit rétabli l'exception de la possession la prescription des droits corporels et incorporels, du 2 novembre 1789 au 21 novembre 1794. 789. DANS un changement de législation, la loi ancienne, quoique abrogée, ne disparaît pas aussitôt ; elle conserve encore son empire sur bien des droits que la loi nouvelle ne peut atteindre, parce qu'elle ne doit point avoir d'effet rétrocatif. Mais il n'est pas toujours facile de trouver le point précis où l'une de ces lois rentre tout-à-fait dans le néant, et où l'autre exerce seule tout son empire. Relativement à la prescription, les rédacteurs du code civil ont cru prévenir les difficultés par les dispositions de l'art. 2281; et il s'en est pourtant élevé un grand nombre. Cet article, dans sa première partie, repousse jusqu'à l'apparence même de la rétroactivité, puisqu'il veut que les prescriptions commencées avant les lois nou |