la commune d'Epinal s'en occupa, dans sa séance du 13 floréal an II en ces termes : « Sur la réquisition de l'agent national, le « conseil arrête qu'il ne sera désormais délivré aucun passeport « à des filles ou des femmes, pour aller aux armées, que le conseil n'y ait agréé, ainsi qu'aux frontières » (1). Il semble qu'on ait prévu, dès le début de la Révolution, que l'élan patriotique était susceptible de gagner la plus belle moitié du genre humain. Un pamphlet, imprimé à Paris le 15 août 1790, suivi d'une pièce de vers, raillait par anticipation les femmes-soldats. Nous croyons intéressant de donner la teneur intégrale de cette pièce. Elle n'est certainement pas inédite, puisqu'imprimée mais il est fort probable qu'elle est peu connue (2). NOUVELLE ORDONNANCE CONCERNANT Une Milice de Filles dans toute l'étendue du Royaume, ainsi que des femmes qui portent la cocarde sur l'épaule gauche. PERSUADE de l'intrépidité des Filles de ce Royaume, voulant à cet effet les faire participer à la gloire, on a jugé à propos qu'il sera levé la quantité de deux cents Mille Filles, pour être employées au service Militaire. Il est ordonné que dans le courant de ce mois, il sera présenté, pardevant les Subdélégués des Archiduchesses de Bellone, tout le Sexe en état de servir, tant dans les Villes, Bourgs & Villages, noms & surnoms des Filles, depuis l'àge de seize ans jusqu'à quarante, pour tirer au sort de la Milice; tous les états y seront admis, comme Bourgeoises, Marchandes, Lingères, (1) Arch. com. d'Epinal, D. 1° 14. (2) Cette piece provient de la collection A. Philippe.. Fileuses, Tricoteuses, Ravaudeuses Couturières, & Dentelières, Passementieres, Poissonnières, Rempailleuses de chaises, Cuisinières & Filles-de-chambre, & généralement tous les arts & métiers du Sexe; les femmes veuves y seront reçues, n'excédant pas l'âge de quarante ans, avec une permission de placer leurs enfants où bon leur semblera, en cas qu'elles en aient; le tout de leur bonne volonté les femmes mariées par consentement de leurs maris, pourront s'en absenter pendant trois ans, il leur sera donné de bons engagemens, liberté entière, des congés de trois ans toute satisfaction due à leur bonne volonté, nous sommes assurés que le nombre passera la demande par l'agrément que le beau sexe trouvera dans cette nouvelle milice. Nous commencerons dans notre capitale dans le courant du mois prochain, pour bannir l'alarme qui est dans le cœur de tant d'aimables Filles, qui attendent avec impatience le plaisir & la joie de revoir leurs amans. La levée des Filles étant complette, il sera fait un état particulier de celles qui peuvent avoir du service, pour leur donner des grades proportionnés; comme lieutenans, enseignes, sergens, caporaux, appointés pour l'infanterie, & dans la cavalerie, maréchaux des logis, brigadiers, carabiniers. Les Filles qui s'enrôleront sans avoir subi le sort, seront distinguées par un petit galon d'or ou d'argent sur la manche, excepté cette préférence, toute la troupe sera uniforme dans les habits, tant infanterie, cavalerie, dragons, hussards, volontaires & chasseurs; les uns par les épaulettes, aiguillettes, casques, chapeaux à l'amazone, les compagnies, tant à pied qu'à cheval, seront de cent Filles, quatre sergens; dix compagnies formeront un bataillon & deux bataillons formeront un régiment; chaque régiment portera le nom de sa province; toute la troupe à cheval sera tirée de l'infanterie qui relevera les provinces d'où il sortira les quartiers d'assemblée se feront sur les bords de : nos plus grandes rivieres, comme le Rhône, la Garonne, la Loire & la Seine la dame de Bellone y commandera en chef quatre Filles choisies des plus guerrières qui recevront les ordres, avec agrément d'y nommer capitaines, lieutenans, officiers & autres supérieurs, tel qu'il leur plaira. Il sera fait des guérites en forme de châteaux sur les bord de nos rivieres, pour y loger une compagnie entière, afin en cas de besoin qu'elles puissent se joindre d'un seul coup de tambour, pour marcher à leur destination. Les deux cent mille Filles formeront plusieurs corps; vingt mille Amazones volontaires, choisies d'un embonpoint, portant un plastron au-dessus de l'estomac en forme de cuirasse, où il sera gravé ce mot INVINCIBLE, tenant en main une flèche flamboyante & ardente, pour assurer les conqètes de la Reine de Russie & de la Reine de Hongrie; six camps volants, chaque de deux mille héroïnes coëffées, chaussées à la mode, & pour bannière la pucelle d'Orléans; un corps de vingt mille soldats sans barbe, portant un toquet sur la tète, à la mode des Bressandes, orné d'une banderole bleue: deux régiments de hussards bien montés, portant chacun un casque de malines, des souliers plats, tirés dans les limites. des poissonnieres de mer & d'eau douce; six bataillons de grenadiers, qui ne formeront qu'un mème corps, pour être divisé en quatre parties en cas de besoin; trois regiments de dragons, six compagnies de cavalerie de même uniforme, équipées à la dragonne, excepté le sabre, mousqueton & bottines, de plus, un régiment de cuirassiers, tiré dans les femmes veuves de bonne volonté, portant pour armure une cuirasse à l'épreuve de la carabine; elles serviront d'arrièregarde lorsque la grande armée marchera. VERS à la gloire des Demoiselles les plus courageuses, qui se préparent à combattre. Vite donc, ma chere amie, A la guerre de Bellone, Attaquer le plus résolu dragon ; Si je vois qu'il se mutine, Par leurs lances & javelots. Ces côtes si renommées De les gagner par faveur. Nous deviendrons invincibles Les armes formidables Trembleront en nous voyant ; Nous nous rendrons redoutables Aux guerriers les plus vaillants ; Car ils mettront bas les armes, Evitant notre courroux; Tout cédera à nos charmes, Et tombera sous nos coups. Permis d'imprimer & distribuer à Paris, le 15 Août 1790. On peut se rendre compte une fois de plus que tout, en France, finit, et même commence par des chansons. Léon SCHWAB. C'est, en somme, le livre d'or des volontaires incorporés aux 4, 7 et 12 bataillons de la Meurthe et dans différente. unités, et qui faisaient partie du contingent Vezelisiens L'auteur a voulu rendre hommage à ces fameux soldats de l'an H, «si vantés, mais si peu connus ». Pour ceux << tombés au champ d'honneur », comme il le dit si excellemment dans l'avant-propos, « on devait buriner leurs noms sur l'airain, mais c'est à peine si leurs concitoyens ont songé à enregistrer leur glorieux décès ». La première partie de l'étude de M. de Sandt est consacrée au recrutement des années 1791, 1792 et 1793; nous ne nous y arrêterons que pour y louer la méthode et la clarté de l'exposé. La seconde partie renferme les états de service des volontaires, puisés aux Archives de la Guerre, aux Archives départementales et municipales. Nous y relevons les noms (1) Nancy, Crépin Leblond, 912, in 8' de 100 pages. |