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monastique, qui doit être le premier pas vers l'affranchissement de l'Espagne. Que le gouvernement de Madrid s'éclaire donc sur les peuples qu'il gouverne avec des moyens aussi extraordinaires. Les lumières répandues dans plusieurs classes de citoyens y ont déjà étouffé l'ignorance et une foule de préjugés. L'Aragon se souvient de son antique liberté ; le peuple, comprimé dans les lisières de la superstition et du royalisme, a conservé son caractère primitif; il a toujours ce même penchant démesuré pour tout ce qui tient au courage et à l'élévation de l'ame. Que la liberté lui apparaisse, et il s'élancera vers elle avec cette énergie qui lui est si naturelle. Il faut à la nation espagnole de grandes entreprises et une immense perspective de gloire; elle la verra dans la conquête de son indépendance et de ses droits, comme ses rois l'ont vue dans la conquête des trésors du Mexique. L'habitude qu'elle a de ne plus relever que du trône depuis l'abaissement des grands sera bientôt remplacée par la conquête de la liberté. Qu'il tremble ce gouvernement astucieux et versatile, qui a trompé les alliés de l'Espagne par de fausses espérances de neutralité, et qu'il apprenne des Français libres que c'est du sein de l'Andalousie que viennent de sortir récemment les expressions énergiques du mécontentement espagnol, précurseur des révolutions: Quand ce seraient les Maures qui nous gouverneraient une autre fois, nous ne pourrions pas être plus malheureux qu'avec cette maison de Bourbon. ›

» Citoyens, que la guerre soit donc déclarée à l'Espagne. Si l'agent de la république française n'a pas été outrageusement chassé de son territoire, comme un autre l'a été de l'île anglaise, n'oublions pas qu'on a refusé hautement de l'entendre et de répondre aux notes officielles. Le ministère de la raison rendu inutile nécessite celui des armes; elles seront victorieuses le long de l'Ebre et du Mançanarès, comme elles le sont sur les bords de la Meuse et du Rhin.

› Si nous avions eu l'armée que vous avez décrétée contre l'Espagne, si ceux qui étaient chargés de l'organiser et de l'approvisionner n'avaient fait tout ce qu'il fallait pour l'anéantir dès

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son origine, si nous n'avions pas donné au gouvernement espagnol une confiance trop longue dont il n'était pas digne, nous aurions eu le long des Pyrénées une force disponible qui aurait assuré la neutralité de la cour de Madrid, arrêté l'Angleterre dans ses projets hostiles, et défendu à l'Espagne de se constituer en puissance navale, car l'Angleterre n'a eu l'audace de l'agression qu'en s'appuyant sur les galions de l'Espagne et les florins de la Hollande. Il est donc indispensable que vous ordonniez sur-le-champ que le conseil exécutif fasse passer dans les Pyrénées le matériel nécessaire à une armée qui nous donne tous les moyens d'agression; il faut que les Bourbons disparaissent d'un trône qu'ils ont usurpé avec les bras et les trésors de nos pères, et que le plus beau climat, le peuple le plus magnanime de l'Europe reçoive la liberté, qui semble faite pour lui.

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Et vous, citoyens libres de la France méridionale, que vos alarmes cessent, que votre courage se relève : l'armée des Pyrénées s'organise sur un pied formidable. Unissez-vous à nos légions patriotiques; yous apprendrez au gouvernement espagnol que la république française n'est pas un ennemi à dédaigner, et qu'elle ira porter dans son sein tous les germes de la liberté, de l'égalité et de la tolérance, qu'ils n'ont jamais connues. Le despotisme vous insulte et yous menace; mais le despotisme est vieux en Europe, et il fut làche dans toutes les contrées. Le souverain de l'Espagne sommeille, allez le réveiller, et aussitôt le fanatisme qui soutient les prêtres et les rois sera détruit; le colosse du gouvernement espagnol sera abattu, et de nouvelles sources d'industrie et de commerce vous dédommageront des sacrifices que vous aurez faits à la liberté.

Le Nord est défendu par des armées victorieuses contre les tyrans de Vienne et de Berlin. Que vos braves légions nous défendent des fanatiques et des esclaves d'Aranjuez. Descendez de ces rochers qui, produisant du fer et des soldats, furent toujours les boulevarts de la liberté du genre humain. La gloire vous attend au-delà des monis; allez faire trembler à Madrid le despote coalisé avec les ennemis de la République ; les Pyrénées

ne peuvent être une barrière que contre des esclaves ou des moines.

› En allant venger vos frères, rappelez-vous que, lorsqu'un des despotes de la France eut placé un de ses petits-fils sur le trône espagnol, il s'écria dans son orgueil : Il n'y a plus de Pyrénées. Portons la liberté et l'égalité en Espagne par nos victoires, et nous dirons alors avec plus de vérité, il n'y a plus de Pyrénées, et nous le dirons pour le bonheur du monde.

Le comité propose de déclarer la guerre à l'Espagne, et la Convention la décrète à l'unanimité.

Réal fait rendre un décret sur les pensions et traitemens de la ci-devant liste civile. Décret qui déclare incompatibles les fonctions de notaire avec celles d'avoué, greffier et receveur.

- Un autre décret abolit la faculté de tester, et porte que tous descendans auront une portion égale dans les biens des ascendans. A la séance du soir, Gensonné fut élu président; Isnard, Guyton-Morveau et Grangeneuve furent élus secrétaires.

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FIN DU VINGT-QUATRIÈME VOLUME.

ERRATA du XXIIIa volume.— Pages 419-420, supprimez depuis sÉANCE DU 29 JANVIER jusqu'à séance du 30 JANVIER.

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