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Les filets médullaires, ou les fibres nerveuses, sont toujours humides, et remplis d'une espèce de gluten. Les plus exactes observations prouvent qu'elles ne sont jamais contractées par la condensation de leur longueur, ni par le rapprochement mutuel de leurs extrémités, mais par un gonflement. Il s'agit maintenant de savoir ce qui l'occasionne; ce n'est pas l'air : on a coupé en longueur des muscles d'animaux vivans; on les a plongés dans l'eau, purgée d'air; on a excité l'ébulition, et l'on n'a vu sortir que quelques bulles d'air. Ce n'est point l'eau : elle est si fluide, qu'elle ne peut les pénétrer que très-difficilement. Quoi done cause ce gonflement? est-ce le sang? encore moins: composé de parties grasses, glutineuses et fibreuses, il est très-peu fluide; il ne pourrait conséquemment s'introduire et sortir dans un clin-d'oeil de pores aussi étroits, aussi serrés que ceux des fibres nerveuses du muscle. Au reste le sang ne pourrait circuler pendant la contraction du muscle, puisque ses pores si petits, sont encore resserrés par la compression. Nous remarquons, au contraire, que la circulation du sang n'est jamais plus active que durant le mouvement des muscles: ce n'est donc pas le sang qui produit l'irritation dans le muscle.

L'estomac est le grand laboratoire de l'ani

mal c'est là que se forme le

:

sang; il se rend ensuite au cœur, et de là dans les poumons où restent ses parties les plus grossières; il pénètre enfin dans le cerveau, qui est l'alambic de la machine organique. Le sang en sort, mais sa partie la plus subtile y reste; il y est élaboré avec la moelle allongée et la moelle épinière. Ces trois substances, après l'épuration, se mêlent ensemble, et produisent une espèce de gluten très-subtil.

Nous remarquons encore que l'origine des nerfs est au centre oval, partie du cerveau, qui est tissue de petits vaisseaux très-déliés : ils communiquent tous les uns avec les autres par une infinité d'autres petits vaisseaux encore plus fins, issus de tous les points de leur surface extérieure. C'est dans les premiers de ces petits vaisseaux que le sang artériel se subtilise, et il coule ensuite dans les seconds. Les nerfs naissent dans ces tuyaux presque imperceptibles, et ils y sont humectés de ce gluten trèssubtil formé par les parties essentielles du sang et de la moelle.

A la plus légère commotion, à la moindre irritation des nerfs dans le cerveau, un frémissement se fait sentir dans toute leur longueur : il en résulte un écoulement de quelques gouttes

de ce gluten, et elles enflent les canaux des fibres nerveuses, qui se répandent dans toute la masse des muscles. Ce gonflement qui a lieu vers une partie déterminée, opère nécessairement la contraction du muscle en cet endroit. Lorsque ce gluten est d'une bonne qualité, la contraction est plus susceptible; les mouvemens se font avec plus de vivacité dans l'animal. Lorsqu'il est âcre, on remarque dans les fibres nerveuses des ondulations très-irritantes: Les muscles se contractent trop; on éprouve des crispations qu'on nomme communément maux de nerfs, et qui souvent conduisent à l'hypocondrie. Ce malaise arrive principalement lorsque le sang contenu dans les fibres charnues du muscle, a lui-même de l'âcreté,. et crispe le nerf, au lieu de lui procurer de l'adoucissement.

C'est cette contraction du muscle qu'on nomme irritabilité. Sans la présence du gluten animal les muscles ne seraient pas irritables; c'était le sentiment du célèbre M. Haller. M. Boerhave attribuait aussi ce mouvement des muscles à une cause incitante provenant du cerveau en effet, l'irritablité diminue avec l'âge; les mouvemens convulsifs, qui en sont le résultat, disparaissent également; le mouvement, les frictions, les toniques les calment.

Le cœur est le muscle le plus irritable, parce que les fibres nerveuses y sont plus nombreuses que dans tout autre muscle. Plus celui-ci contient de fibres dans sa structure. plus il est rempli de suc glutineux, et plus il est susceptible d'irritabilité.

Il ne faut pas confondre l'action élastique avec l'irritabilité : l'action tonique de l'irritabilité contracte seulement le muscle, et l'élasticité est la tendance d'un corps à se rétablir dans son premier état, lorsque la cause, qui l'en avait éloignée, cesse d'agir. L'irritabilité a lieu même quelque temps après la mort, parceque le gluten animal, ayant perdu son cours, cause des ondulations dans certaines parties.

Il faut distinguer aussi la crispation de l'irritabilité. La crispation est occasionnée par les caustiques et les substances âcres: elle constitue l'éréthisme; elle roidit les fibres et les muscles pendant la vie; ses excès sont dangereux.

Le muscle a conséquemment deux actions: l'une produite par les nerfs, et l'autre par les fibres charnues. Les fibres nerveuses sont mises en action par le fluide qu'elles contiennent : particulier au muscle, il tend continuellement à le raccourcir sans le pouvoir. Ceci n'exclut

pas

l'action tonique ni l'élasticité; l'irritabilité peut se combiner avec elles, et ces actions combinées produisent des effets uniformes. Dans la contraction volontaire, le gluten animal, en agaçant, picotant les racines des nerfs dans le cerveau, et en les ébranlant, s'y introduit; alors la contraction ou l'irritabilité a lieu.

Les convulsions, les crampes proviennent principalement de l'âcreté du sang, qui arrose les fibres charnues du muscle. Nous éprouvons des malaises semblables en irritant les nerfs de nos narines, et cette action nous fait éternuer. En jetant du sel sur les cuisses d'une grenouille, ou en les piquant avec une éguille, nous lui occasionnerons une crispation; mais cette contraction involontaire ne dure qu'autant que l'irritation continue. Ce fait est visible dans ceux qui périssent de convulsions après la mort, leurs muscles se détendent; la contraction cesse, et les articulations reprennent leur état naturel.

Le gluten animal agit dans toutes les parties du nerf; dans son principe, dans son milieu, à son extrémité. La section d'une partie du nerf n'empêche pas son action dans la partie qui reste; il agit au-dessus de la ligature. Principe subtil, ou plutôt essence du sang et

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