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facile à apercevoir! Déistes, direz-vous encore que Dieu ne s'occupe pas des hommes? Que diriez-vous d'un roi qui ne penserait jamais à à ses sujets? Qu'il n'est ni bon ni juste. Cependant vous n'ignorez point que l'Être suprême est infiniment bon et juste: cessez donc de blasphemer, en disant qu'il ne s'occupe pas de nous. Ajouterez-vous qu'il y a dans l'Ancien Testament, afin d'autoriser votre opiniâtreté, quelques manières de parler, peu conformes à l'idée que nous devons avoir des perfections divines. Faites attention au caractère du peuple à qui l'on parlait. C'était des hommes opiniâtres, indociles et séditieux. Confrontez ces expressions avec d'autres qui les expliquent. L'Ancien Testament, les Écritures sacrées nous annoncent la bonté infinie de Dieu, ses miséricordes, sa tendresse paternelle pour ses créatures. Mais tout serait scandale pour quiconque voudrait se scandaliser. Lisez les confessions de saint Augustin, et taisez-vous.

Direz-vous que Dieu, en choisissant un peuple, a proscrit le reste du genre humain; qu'assurer cela, ainsi que le rapporte l'Ancien Testament, c'est attaquer la justice et la bonté divine; que c'est blasphemer, et que conséquemment les livres de Moïse ne contiennent pas la révélation divine? Mais les autres nations,

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pendant tout le temps qu'a duré la religion des Juifs, ont pu se sauver en observant la loi naturelle, témoin Job, qui ne connaissait point la loi de Moïse n'est-il pas qualifié de saint dans le livre de Tobie? L'Église chrétienne ne le révère-t-elle pas? Saint Paul ne l'a-t-il pas qualifié de juste et de saint? Au reste lorsque l'Ancien Testament traite les Israélites de peuple de Dieu, il entend seulement que c'est par celui-là que Dieu a voulu se faire entendre au genre humain. Abraham et Isaac, ainsi que ses descendans, ont été plus dociles à sa voix que les autres, et ils les a choisis pour manifester sa volonté aux hommes: c'est une preuve de sa justice. A-t-il ôté aux autres les moyens de suivre la loi d'Abraham, d'Isaac et de Jacob? Au contraire : il a mis les Israélites en relation

avec tous les autres peuples, avec les Égyptiens, les Babylonniens, les Syriens, les Grecs et les Romains. Tous connaissaient que les Israélites n'adoraient qu'un seul Dieu, créateur de tout. Les Grecs lui envoyaient des offrandes. Alexandre-le-Grand, s'est prosterné dans le Temple du Très-Haut, et Cyrus, le Conquérant, l'a fait rebâtir. Dieu se faisait connaître suffisamment aux nations: celles-ci s'opiniâtraient à garder leurs fausses divinités, et il en est de même aujourd'hui. La religion chrétienne

ils

est connue de toutes les nations, et cependant les Chrétiens seuls sont les élus de Dieu, sont le peuple de Dieu. Dira-t-on que cela n'est pas juste? Mais pourquoi certaines nations refusentelles de lire et de suivre l'Évangile? Mais n'y a-t-il pas des athées, des déïstes au milieu des chrétiens? n'y a-t-il pas des Juifs? n'ontpas tous les moyens de s'éclairer sur la chose la plus importante? Quel est donc l'insensé qui osera accuser Dieu de son opiniâtreté ? n'ont-ils pas osé dire, à cause de la ressemblance du style des livres d'Esdras avec celui de Moïse, qu'ils étaient tous d'Esdras, et qu'ils avaient été faussement attribués à Moïse? Ils ignoraient sans doute les précautions des Juifs relativement à l'authenticité de ces monumens. Au reste, de ce que Esdras, après un long espace de temps, a écrit dans le même style que Moïse, s'ensuit-il que tout est de lui? Ce serait faire un très-faux raisonnement que de décider ainsi. Esdras, qui était l'homme de Dieu comme Moïse, ne devait-il pas écrire dans le même style que lui? Lorsqu'une langue est à sa perfection, elle n'éprouve plus de changement. Est-ce 'que, si un écrivain s'exprimait aujourd'hui comme Virgile, on pourrait induire de-là que les ouvrages de Virgile sont faussement attribués à Virgile? Non sans doute. Cependant

le temps, qui s'est écoulé depuis Virgile jusqu'à nous, est plus long que celui qui s'est passé depuis Moïse jusqu'à Esdras. L'écrivain que nous supposons, a imité Virgile dans le style, comme Esdras a imité Moïse. Virgile a porté la langue latine à sa perfection, on doit donc chercher à suivre ses traces. C'est ce qu'a fait Esdras à l'égard de Moïse: ainsi on ne peut alléguer aucune raison plausible contre l'authenticité de l'Ancien Testament.

Ce serait une très-faible objection d'alléguer qu'on a été obligé de préférer au texte Hébreu, la version des Septante pour concilier avec l'écriture l'antiquité de la Chine: si elle a eu cette préférence, c'est parce qu'on a cru qu'elle rendait mieux le texte de Moïse. M. Bergier a si victorieusement réfuté les idées de Freret sur les Annales Chinoises, que M. de Voltaire, dans les conseils raisonnables, n'a rien trouvé à lui répliquer. Les Chinois n'ont été instruits que par les Mahométans et les Jésuites ils étaient encore, en 1772, trèsignorans dans les Mathématiques. Quel fondement peut donc avoir un homme sensé sur leur calcul des éclipses? Aussi cette preuve a-t-elle été abandonnée par l'auteur des recherches philosophiques sur les Chinois. Mais un de leurs empereurs n'a-t-il par brûlé leurs annales?

alors quel fond établir sur l'ouvrage qu'on lui a substitué? Leur histoire ne mérite aucune croyance, que depuis l'an 206 avant JésusChrist; c'est un chaos de fables et de contradictions dont on ne peut extraire rien de raisonnable.

La réalité du déluge est prouvée par l'autorité de l'histoire sacrée et de la profane; et toutes les hypothèses qu'on lui substituerait ne seraient que le fruit d'une imagination déréglée : on ne détruit pas les faits par des systèmes ou

par des songes.

En vain dirait-on contre l'Ancien Testament qu'il rapporte la haine des Juifs contre leurs ennemis, leur cruauté envers les nations subjuguées, plusieurs actions condamnées par le droit des gens et les lois de l'humanité; car il serait ridicule de croire que Dieu ne condamnait pas la manière de l'éxécution, et quoiqu'on dise que le Tout-Puissant l'a voulu, c'est une manière de parler des peuples qui admettent une providence. On commettra toujours des erreurs de cette nature, lorsqu'on ne saura pas interpréter le sens d'une langue, et il serait absurde de décider de son génie par celle en usage aujourd'hui. Ce qui est indécent en français, ne l'est pas en latin, et ce qui ne conviendrait point dans cette dernière langue,

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