1761. ticulierement pour conferver la poffeffion. Ainfi qu'on vienne enJanvier. lever la poffeffion d'un meuble, qu'on vienne entreprendre fur un héritage dont on a toujours joui, fi le poffeffeur veut s'opposer à l'entreprise qu'on fait à fon préjudice, & que l'ufurpateur n'y défere pas, telle eft la circonftance où le Haro devient indispensable pour faire ceffer le trouble qui est fait; qu'un prétendu créancier vienne fans obligation de fon débiteur pour le contraindre à payer, & qu'il vienne fans titre exécutoire, fans condamnation & fans Jugement pour l'y forcer, foit par la voie de faifie fur fes meubles ou par l'emprisonnement de fa perfonne, fuivant la qualité de la dette, tel eft encore le cas pour lequel le Haro peut être interjetté, parce que malgré la défaveur qui naît contre un débi-. teur, dès que le créancier n'a point obfervé les formalités que les Ordonnances lui prefcrivent, le débiteur peut s'affranchir des pour. fuites irrégulieres qu'on fait contre lui; mais lorsqu'il s'agit de fe faire réintégrer dans la poffeffion d'un meuble ou d'un immeuble qu'on a perdu, lorsqu'il eft queftion d'obtenir contre fon débiteur la condamnation d'une fomme qui eft dûe, foit fans obligation ou avec obligation, comme rien ne périclite, & que l'Ordonnance prefcrit les voies qui doivent être prises, ce n'eft point la voie du Haro qui convient, le Haro n'eft fait que pour conferver & non pour recouvrer; c'eft la voie de l'action qu'il faut prendre, parce qu'on doit éviter avec foin le trouble & l'éclat qui accompagnent toujours le Haro: s'il en étoit autrement, on ne connoîtroit en Normandie d'autre voie introductive, pour quelque matiere que ce fût, que celle du Haro : ce qu'il eft bien important de ne pas permettre, pour ne pas abufer d'une voie qui ne doit être prise que dans les cas de néceffité pour lefquels a été introduit la liberté de reclamer l'affiftance du Prince; l'origine du Haro étant certaine, les cas dans lefquels on peut ufer de cette voie étant difcutés, il s'agit de fçavoir fi elle a pu être prife par le fieur Briffon dans la circonftance où il s'eft trouvé vis-à-vis du fieur le Fort. Le motif qui a déterminé le fieur Briffon à interjetter le Haro dont il s'agit se trouve constant par le Procès-verbal de Bazire, Sergent, qui a été requis de l'interjetter; fon but a été de contraindre le fieur le Fort à lui payer fix cents trente-fix livres pour la valeur d'un billet dont il étoit porteur; ce billet étoit du 14 Février 1758, payable dans le courant d'Avril de la même année il y avoit donc deux années qu'il étoit échu, lorsqu'en 1760 le fieur Briffon a cherché à s'en procurer le paiement: où : étoit donc la néceffité de recourir à la voie du Haro? Quel péril y avoit-il dans le retardement ? S'il y avoit de la néceffité de requérir un Haro, cette voie ne pouvoit être reclamée que par le fieur le Fort, & non par le fieur Briffon qui vouloit contraindre le fieur le Fort par l'arrêt de fa perfonne à payer le billet dont il étoit porteur: une pareille exécution étant irréguliere parce qu'elle ne fe trouvoit appuyée d'aucun titre exécutoire & d'aucun Jugement, c'étoit-là le moment de reclamer l'affistance du Prince pour arrêter l'effet d'une oppreffion autant injufte qu'irréguliere; en prenant par le fieur Briffon du fieur le Fort fon obligation, il s'eft confié tellement en fa folvabilité, qu'il n'a exigé de lui aucune autre fûreté pour le paiement de fix cents trente-fix livres : il a donc prévu qu'au défaut de paiement à l'échéance, il n'avoit d'autre moyen que d'en obtenir contre lui la condamnation par la voie ordinaire. Si on difpenfoit en Normandie d'agir par cette voie, & qu'on admît indistinctement le Haro pour toutes matieres, l'Ordonnance deviendroit illufoire, & ce feroit donner ouverture à la furprife & à l'injuftice. Pourquoi l'Ordonnance a-t-elle voulu qu'un Exploit fût libellé, qu'il contint fommairement les moyens & les conclufions? pourquoi a-t-elle accordé au défendeur affigné des délais. que perfonne ne peut abréger à fon préjudice? C'eft afin de le mettre en état de se défendre & de lui donner le temps de trouver les moyens de fe juftifier; l'Ordonnance eft faite pour avoir fon exécution en Normandie comme dans toute l'étendue de la France; la voie du Haro n'a point la force de l'anéantir, de même que l'Ordonnance n'a point anéanti le Haro, ce font deux voies qui ne font ni contraires ni oppofées; celle indiquée par l'Ordonnance eft la voie ordinaire & commune qui doit être prife, celle du Haro est introduite pour certaines circonftances, & exigent de l'accélération; que l'on prenne la voie du Haro dans les cas de néceffité pour laquelle elle est faite, mais qu'on ne l'admette pas indiftinctemenr pour anéantir la véritable voie que tout créancier doit prendre contre fon débiteur : il eft donc certain par l'origine même du Haro qu'il ne doit point être étendu au-delà de fes bornes, & l'efpece du fieur Briffon ne pouvant être comprise dans le nombre de celles pour lesquelles cette voie eft introduite, il est incontestable qu'elle n'a pu être prife contre le fieur le Fort, il s'agit feulement d'approfondir fi en la prenant le fieur Briffon n'a fait aucune furprise au fieur le Fort, & s'il n'a obtenu contre lui que 1761. Janvier. 1761. Janvier. ce qui lui auroit été accordé par la voie ordinaire : il est indubi- 1761. celle de l'action ordinaire ; fi la dette eft civile, elle ne changera la demande en Haro: toute la différence qu'elle opere, Janvice. point par c'eft qu'elle procure à celui qui la prend fans forme de procès, fans inftruction & en un inftant, la décifion de fa demande qu'il n'auroit obtenue qu'après avoir obfervé tous les délais & exercé une longue procédure, s'il avoit pris la voie ordinaire ; il est vrai que par la voie du Haro les Parties font tenues de donner caution, & qu'à ce défaut elles peuvent être contraintes & par corps; mais il ne faut pas confondre les circonftances dans lefquelles elles peuvent être affujetties à donner caution ou à entrer en prifon l'article LVI de notre Coutume l'explique clairement c'eft afin que le Haro ne refte pas indécis, & qu'il puiffe être poursuivi & défendu. Tel est le cas où la caution devient néceffaire, parce que le Haro ne pouvant être décidé, les Parties font obligées de le pléger; mais s'il peut être jugé, il n'est plús néceffaire de cautionner ni de pléger le Haro, le Juge examinant la nature de la conteftation qui lui eft portée, c'est à lui de juger fur le Haro, comme il auroit fait, & fur l'action jordinaire fi elle avoit été prife; fi la dette eft une dette de commerce, & qui doit être exécutée fur la perfonne du débiteur, il doit en difant à bonne caufe le Haro, ordonner que le débiteur paiera dans l'inftant, finon qu'il fera conftitué prifonnier jufqu'à ce qu'il ait fatisfait; fi cette même dette n'étoit pas échue, mais qu'elle eût été contractée fous la condition expreffe de donner caution avant l'échéance, le Juge a le droit également d'affujettir, & par corps, le débiteur à donner caution; mais fi la dette n'est point une dette de commerce, fi elle est purement civile, foit qu'elle ait été contractée ou non fous l'obligation de donner caution elle ne peut être exécutée fur la perfonne du débiteur, foit pour le paiement de la fomme principale, foit pour la néceffité de donner caution, parce qu'on ne peut pas impofer une peine plus forte pour obliger un débiteur d'exécuter la condition fous laquelle il à contracté que celle qu'on lui impoferoit pour le paiement du principal. Telle eft la pureté des principes qu'il s'agit de conferver, afin d'éviter le trouble & les inconvénients qui en naîtroient, s'ils étoient violés : ce feroit, en effet, le plus dangereux des inconvénients que d'affujettir, par la voie du Haro, à la contrainte & par corps ceux qui n'y feroient point fujets par la nature de leur obligation. La Loi vivante & générale de la France eft l'Ordonnance de 1667; elle défend, pour une dette civile, & au - delà 1761. ; des cas qu'elle indique, de l'exécuter fur la perfonne du débiteur Javier. pour une dette de commerce, pour un ftellionat, pour un dépôt public & autres cas, la contrainte par corps peut être ordonnée; mais pour ceux qui ne font pas indiqués par l'Ordonnance, la prohibition eft formelle; il eft interdit même au citoyen de pouvoir obliger fa perfonne, aux Cours & aux Juges de les ordonner, aux Greffiers & Notaires de les recevoir, aux Huiffiers & Sergents de les exécuter, encore que ces actes foient paffés hors du Royaume, à peine de nullité, & de tous dommages & intérêts; c'est cette Loi qui affure l'état des Sujets de tout le Royaume, & qui nous commande auffi impérativement que Briffon a enfreinte, & qu'il veut faire violer: Eft - il poffible de balancer un inftant à la confirmer, quand la liberté du citoyen & son repos en dépendent? La Jurifprudence ancienne, dont il reclame l'autorité, pourroit être de quelque poids dans cette Caufe, fi les Loix reftées dans leur même état n'étoient point parvenues à leur degré de perfection. Un mauvais débiteur, foupçonné de prendre la fuite pour ne pas payer fa dette, étoit arrêté, non-seulement en Normandie, par , par la voie du Haro, mais encore dans toutes les Provinces par toutes autres voies, lorfque par les faits, dont on avoit la preuve, il en naiffoit des préfomptions de fuite : quel préjudice faifoit-on à un pareil débiteur dans ces temps reculés? On ne faifoit que précipiter la détention qu'il ne pouvoit éviter. Par l'article XLVIII de l'Ordonnance de Moulins, tout débiteur pouvoit être contraint & par corps, même pour une dette civile après les quatre mois le débiteur, pour éviter cette contrainte méditoit une fuite pour faire perdre fon créancier ; quand il étoit fufpecté d'un pareil projet, les Juges fubvenoient aux créanciers, en détenant les débiteurs & en les faifant emprisonner: mais pourquoi ? parce qu'ils étoient affujettis à la contrainte & par corps; au-lieu que dans le fiecle où nous vivons les dettes civiles ne peuvent jamais, par quelque moyen que ce foit, être exécutées fur la perfonne du débiteur. Qu'il y ait donc ou non un foupçon de fuite de la part du fieur le Fort, qu'importe à Briffon, puisque cette circonftance n'ajoute rien à fon droit, & ne peut jamais obliger la perfonne du fieur le Fort: eft-on enfui pour errer de Province en Province ? Le Souverain a-t-il impofé quelque peine à ceux qui veulent aller de Ville en Ville? On fçait qu'il n'en a prononcé que contre ceux qui, fans permiffion, quittent la France; mais peut-on foupçonner le fieur le Fort à prendre la fuite? De Vinfobre |