ΔΕ 25 ESS ENCYCLOPÉDIE MÉTHODIQUE, OU PAR ORDRE DE MATIÈRES; PAR UNE SOCIÉTÉ DE GENS DE LETTRES, DE SAVANS ET D'ARTISTES; Précédée d'un Vocabulaire univerfel, fervant de Table pour tout l'Ouvrage, ornée des Portraits de MM. DIDEROT & D'ALEMBERT, premiers Éditeurs de l'Encyclopédie. Chez PANCKOUCKE, Libraire, hôtel de Thou, rue des Poitevins. A LIÈGE, Chez PLOMTEUx, Imprimeur des États. M. DCC. LXXXI X. AVEC APPROBATION, & PRIVILEGE DU ROI. DISCOURS PRELIMINAIRE. AVANT de développer les caufes qui ont amené les changemens que nous appercevons aujourd'hui dans la police de l'Europe, nous allons établir quelques principes généraux fur l'origine & l'objet de cette partie du gouvernement civil, & faire connoître les moyens de civilisation qu'elle a fait naître ou introduits dans la fociété. Nous en prendrons occafion de parler de la morale publique des anciens & des modernes, & de faire voir l'avantage que nous avons fur les premiers à cet égard. Ces connoiffances paroiffent d'autant mieux placées ici, qu'elles jetteront du jour fur ce que nous aurons à dire des progrès de la civilisation parmi nous. Elles rendront fenfibles des vérités utiles, & ferviront de principes pour juger de l'état des mœurs & de la fociété actuelle. On a tant répandu d'erreurs dans cette matière, on s'eft tellement efforcé de déprimer les peuples modernes en faveur des anciens, on a tant prodigué le blâme à ceuxlà & la louange à ceux-ci, qu'on doit, avant tout, chercher à donner des idées faines aux lecteurs fur ces objets, quand on a à leur parler de moeurs, de police & de législation. Les grands noms de Sparte & de Rome féduifent encore les efprits, & nuifent aux progrès de la raison. On fe croit fort avec eux, & l'on repouffe toute morale, toute maxime publique qui n'a point été autorisée de leur exemple. Il est donc important de réduire à fa jufte mefure l'idée qu'on doit s'en former, fi l'on veut éviter les erreurs où font tombés ceux qui nous ont propofé, comme des modèles de police & de législation, les formes des républiques anciennes. Dire que la civilisation fut l'objet que fe proposèrent les hommes en fe réuniffant, feroit peut-être une erreur: il paroît que ce fut la guerre, foit de défense, foit de conquête du moins l'hiftoire, que l'on Police & Municipalité. doit prendre pour guide en pareil cas, ne nous offre rien qui ne confirme cette idée. Mais quels qu'aient été les motifs de cette union, la néceffité de l'ordre & de la fubordination dut d'abord fe faire fentir parmi les nouveaux affociés. Ils fe trouvèrent indifpenfablement obligés d'introduire une police au milieu d'eux, & de fuivre un plan de difcipline publique. Cette police fut fans doute très-groffière, & telle que des hommes qui fe propofoient la guerre ou le brigandage pouvoient la comporter, Quelques règlemens, ou plutôt quelques conventions tacites & commandées par le befoin de l'ordre, en composèrent d'abord toute l'étendue. La guerre en formoit le principal objet ; & tout ce qui pouvoit fervir à en entretenir le goût & les inclinations parmi les citoyens, mérita fûrement une attention particulière. Toute autre forme de gouvernement eût été trop compliquée pour des hommes très-ignorans & à peine fortis de l'état fauvage. Le petit nombre d'idées générales qu'ils avoient, ne leur eût jamais permis de fe donner un fyftême de légiflation plus régulier, Ils de voient très-difficilement concevoir les droits de la propriété & ceux qui en dérivent. Le befoin du moment les entraînoit; & quoiqu'il ne les fubjuguât pas auffi impérieusement que dans l'état abfolument fauvage, il étoit le mobile de leur conduite journalière, & leur faifoit souvent négliger le foin de l'avenir, Ce que quelques Auteurs ont dit de l'établissement des premières fociétés & des loix qui les réunirent fous un gouvernement régulier, ne s'accorde pas à la vérité avec cette police que nous leur donnons pour conftitution primitive. Mais il eft bien difficile que des peuples groffiers en aient pu d'abord, & même pendant long-temps, connoître d'autre. Comment des hommes ifolés & répandus fur un grand a |